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PIOT, subst. masc.
Étymol. et Hist. 1532 (Rabelais, Pantagruel, I, éd. V. L. Saulnier, p.10: La vigne, dont nous vient celle nectareicque, précieuse, celeste et déificque liqueur qu'on nomme le piot); 1534 humer le piot (Id., Gargantua, VI, éd. R. Calder et M. A. Screech, p.53); 1548 aymer le piot (N. Du Fail, Baliverneries d'Eutrapel, éd. G. Milin, I, p.24, 318); xvies. gourd piot «vin exquis» (Eglogue sur le retour de Bacchus ds A. de Montaiglon, Rec. de poés. fr. des XVeet XVIes., t.1, p.241), considéré comme appartenant au jargon par Henri Estienne (1565, Conformité, Advertiss., p.1 ds Hug.). Déverbal du m. fr. pioter «boire beaucoup» (Eglogue sur le retour de Bacchus ds A. de Montaiglon, loc. cit.), lui-même dér. (suff. -oter*) du verbe a. fr. pier «boire» (2emoit. xiiies., Escommeniement aus jalous ds H. Omont, Fac-similé du ms. fr. 837 de la Bibl. nat., Paris, 1932, p.389a [fol. 195a]: Qui tient le hanap se il pie), d'orig. discutée. S'appuyant sur un ensemble de témoignages ling. réunis par L. Sainéan (ds Z. rom. Philol. t.30, 1906, pp.562-563; ds R. XVIes. t.3, 1915, pp.26-27; Sources Arg. t.2, pp.418-419; Arg., pp.106-109), FEW t.8, pp.423b-424a considère pier comme dér. (dés. -er) du subst. pie1*, cet oiseau étant partic. avide; cf. les syntagmes et expr. tels que croquer ceste pie «boire» (ca 1480, Mistere du viel Testament, éd. J. de Rothschild, 48017; av. 1520 crocquer la pie, Recueil Trepperel, éd. E. Droz, Sotties, I, 9 et 117); la pye est juchie «le vin est bu» (ca 1460, Villon, Ballades en jargon, éd. E. Lanly, IX, 21; cf. Id., Testament, éd. J. Rychner et A. Henry, 1257); le desduit de la pie «le plaisir de boire» (av. 1465, Charles d'Orléans, Rondeau CCXLVII, 6 ds OEuvres, éd. P. Champion, p.490); l'enseigne La pie qui boit (1585, N. Du Fail, Contes d'Eutrapel, XXXIII, éd. J. M. Guichard, p.369); cf. aussi le dicton l'agace a emporté le dousil «le tonneau est vide» (Jaub.; Roll. Faune t.2, p.132). −Estimant, à raison, semble-t-il, que les témoignages ling. cités ne sont que le résultat du rapprochement plais. fait entre pie «vin» (ca 1480 gourde pie «vin excellent», Mistere viel Testament, 6616; fin xves. pier de la plus gourde pie, Guillaume Coquillart, Monologue des perruques, 111 ds OEuvres, éd. M. J. Freeman, p.323; ca 1545 donner bonne pie, Sottie du roy des sotz, 224 ds Rec. gén. des sotties, éd. E. Picot, t.3, p.223), déverbal de pier «boire», et pie (< lat. pica), P. Guiraud (ds Cah. lexicol. fasc. 12, 1968, pp.85-87 et Lex. fr. étymol. obsc.; cf. Guir. Étymol., p.95) écarte l'étymon pica; à ces motifs d'ordre sém., il ajoute une raison d'ordre morphol.: seuls les noms d'animaux pourvus d'un suff. et d'un ,,pseudo-suff.`` pourraient être générateurs de verbes (Guir. Étymol., p.94). Rapprochant pier, pioter «boire» de leurs synon. piailler, piarder, pioler, pionner (v. FEW t.8, pp.422b, 423a, s.v. pica [mais piarder et pioler n'y sont pas relevés]), P. Guiraud considère ces verbes comme des dér. sém. de pier, pioter, piailler*... «crier, piauler», eux-mêmes dér. de la racine onomat. pi- (v. piailler, piauler; FEW t.8, pp.415a-417a, s.v. pi- [mais pier et pionner n'y sont pas relevés]). Le prototype de ce sémantisme serait piper* «pépier», «souffler dans un chalumeau, jouer de la flûte» [FEW t.8, p.560a] et «aspirer un liquide avec un chalumeau; aimer boire» (qui n'est att. que dans des dial. mod.) [ibid., p.560b]; à rapprocher également de siffler* au sens de «boire». Dans l'une ou l'autre hyp., les rapports de pier «boire» avec l'arg. du domaine ibéro-roman (arg. esp. piar «boire», 1609; pio «vin» id.; port. piar «boire», Cor., s.v. picaza) sont obscurs, comme l'est l'orig. même de cet argot.