PELER, verbe
Étymol. et Hist.1. Arracher les poils
a) d'une personne
ca 1100 (
Roland, éd. J. Bédier, 1823: Icil li
peilent la barbe e les gernuns [à Ganelon)];
ca 1150 (
Thèbes, éd. G. Raynaud de Lage, 7568: Chaus devient l'en en poil
pelant); 1176-81
front pelé (
Chrétien de Troyes,
Chevalier au lion, éd. M. Roques, 295); 1197
poiler le cuir (
Hélinant,
Vers de la mort, éd. F. Wulff et E. Walberg, XIII, 6);
ca 1260 intrans. «devenir chauve» (
Récits Ménestrel de Reims, 71 ds T.-L.); 1532 part. passé subst., fam.
là n'estoient que troys teigneux et ung pelé de legistes (
Rabelais,
Pantagruel, V, éd. V. L. Saulnier, p.29, 65); 1690
trois tondus et un pelé (
Fur.); 1790
quatre pelés et un tondu (
Jean Bart, n
o103, 4 ds
Quem. DDL t.19);
b) d'un animal, de son pelage, de sa fourrure
α) 1260 (
Étienne Boileau,
Métiers, 325 ds T.-L.: piaus de mouton... pour
peler et pour draper); 1174-87
pane pelee (
Chrétien de Troyes,
Perceval, éd. F. Lecoy, 1798); 1176-81
veir pelé (
Id.,
Chevalier à la charrette, éd. M. Roques, 508);
β) 1377 (
Gace de La Buigne,
Deduis, 9615 ds T.-L.:... meschëans chiens
pelés, Qui sont de roigne guerpelés);
c) 1262 p.anal.
parisis, tournois pelez «dont le relief est érodé par l'usage» (doc. ds
Du Cange,
s.v. pelatus);
d) ca 1230
id. «dépouiller [une terre] de sa végétation» (
Péan Gatineau,
St Martin, 2216 ds T.-L.);
2. a) «enlever la peau, l'écorce [d'un végétal], l'enveloppe [de quelque chose]»
ca 1100
verge pelee (
Roland, 3323);
ca 1180
valoir deux aus pelés exprime une valeur minime (
Fierabras, 108 ds T.-L.;
cf. Fr.
Möhren,
Le renforcement affectif de la négation par l'exp. d'une valeur minimale en a. fr., Tübingen, 1980, pp.41-42);
ca 1215
ne... vaillant un oef pelé id. (
Aimeri de Narbonne, 2227,
ibid.); fin
xiiies. [ms.]
peler une chastaigne fig. «raconter des histoires, chercher à tromper» (
Jean de Meun,
Rose, éd. E. Langlois, 16456, var. ms. Be); 1611
peler son fromage (
Cotgr.);
b) 1690 «dépouiller un animal de sa peau» (
Fur.);
3. fig.
a) 1197 «voler, dépouiller» (
Hélinant,
op.cit., XLIII, 3); 1
erquart
xiiies. (
Renclus de Molliens,
Miserere, 143, 1 ds T.-L.: Gastebien
poile clers et lais); spéc. domaine du jeu 1
remoitié
xiiies. réfl. «perdre tout son bien» (
De St Pierre et du jougleor, 8 ds A.
de Montaiglon et
G. Raynaud,
Rec. gén. fabliaux, t.5, p.65: sovent as dez
se pela);
b) 1918
froid qui pèle (R.
Florigny et G.
d'Abzac,
L'Amant de l'ingénue, p.112 ds
Cellard-
Rey); 1970
peler «avoir très froid» (J.
Hougron,
La Gueule pleine de dents, p.254,
ibid.). Du b. lat.
pĭlare (de
pĭlus, v.
poil) au sens de «arracher les poils, épiler», avec, par étymol. seconde, rapprochement de l'a. fr.
pel (
peau*), d'où est issu le sens de «ôter la peau».