PAYS1, subst. masc.
Étymol. et Hist.1. 2
emoitié
xes. «région géographique habitée, plus ou moins nettement délimitée» (
St Léger, éd. J. Linskill, 211: Tuit li omne de ciel
païs, trestuit apresdrent a venir; Et sancz Lethgiers lis predïat);
ca 1050 (
St Alexis, éd. Chr. Storey, 182: Est vus l'esample par trestut le
païs, Que cele imagine parlat pur Alexis);
ca 1100 (
Roland, éd. J. Bédier, 1859: Si lungement tuz tens m'avez servit, A oes Carlon si granz
païs cunquis; 2333: Cunquis l'en [Charlemagne, par Durendal] ai païs e teres tantes...); début
xiies. (
Benedeit, St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 1821: Ja nuvele vait par
païs [
per partes terrarum] Que venuz est de paräis);
2. «division territoriale considérée des points de vue géographique et humain»
a) ca 1100 désigne l'Espagne (
Roland, 17, 134, 266);
id. la Barbarie (
ibid., 1236);
id. la France (
ibid., 1861);
ca 1200 (
Jean Bodel, Saisnes, éd. F. Menzel et E. Stengel, 352: Alemaingne ont destruite le grant
païs plenier); fin
xives.
li païs d'Engleterre (
Jean Froissart, Chron., II, § 5, éd. S. Luce, t.9, p.6); av. 1514
pais de Savoie (J.
Lemaire de Belges, Exploration de pitié ds
OEuvres, éd. J. Stecher, t.4, p.173);
b) 1315
selonc la coustume du pay (
Cart. du Mont-S.-Mart., B.N. lat. 5478, fol. 132 r
ods
Gdf. Compl.); 1532
pays d'Anjou (
Bourdigné, Faifeu, 22 ds
Hug.);
3. contrée, territoire auquel on appartient, dont on est originaire ou dont on a la charge; patrie «
ca 1100 (
Roland, 3207: Jo [l'émir Baligant] vos durrai un pan de mun
païs); début
xiies. (
Benedeit, op. cit., 777: Puis revendras en tun
païs [
ad patriam tuam redibis], Ileoc muras ù tu nasquis);
ca 1170 (
Marie de France, Lais, éd. J. Rychner,
Guigemar, 70: ...S'en vait li ber en sun
païs Veeir sun pere e sun seignur);
ca 1200 (
Chastelain de Couci [?]
Chanson, éd. A. Lerond, XXV, 5: Cascuns pleure sa tere et son
païs Quant se depart de ses carnels amis); 1269-78 p.ext. (
Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 5004: Mout est chetis e fols naîs Qui croit que ci soit ses
païs: N'est pas vostre
païs en terre, Ce peut l'en bien des clers enquerre Qui Boëce
De Confort lisent); loc.
a) 1611 péj.
estre bien de son païs «avoir la simplicité, la rusticité de son terroir» (
Cotgr.);
b) du pays, de pays «du terroir dont on parle» 1671
langage du païs; raisins du païs (
Pomey); 1798
vin de pays (
Ac.);
c) 1718
avoir la maladie du pays «en avoir la nostalgie» (
Ac.);
4. p.ext.
a) ca 1130 désigne l'enfer (
Li Ver del Juise, 68 ds T.-L.: en enfer... lo doleros
païs;
b) «domaine attribué à différentes réalités ou abstractions» 1643 (
Corneille, Menteur, I, 1: Le
pays du beau monde et des galanteries [les Tuileries]); 1668 (
La Fontaine, Fables, III, 1: La feinte est un
pays plein de terres désertes);
5. «contrée, région géographique considérée des points de vue physique, climatique»
a) 1160-74
plain païs «terrain ouvert, rase campagne» (
Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 1056); 1376
plat païs (
Modus et Ratio, 246, 33 ds T.-L.);
b) 1256
caus paiis; froit paiis (
Régime du corps de A. de Sienne, 50, 9: 50, 12 ds T.-L.); 1377
fort païs, bon païs «pays boisé» (
Gace de La Buigne, Deduis, 9091; 10119);
6. ca 1274 «ensemble de gens habitant une contrée» (
Adenet le Roi, Berte, éd. A. Henry, 3272: Tous li
païs i ert venus conmunaument; 3312: ...tres-tous li
païs contre li acoroit);
7. «partie d'une nation considérée par rapport à certaines particularités administratives, économiques...» 1355
pays coustumier (
Traité entre Charles de Navarre et Jean roi de France ds
Isambert, Rec. gén. anc. lois fr., t.4, p.738: bounes genz... de la Languedoïl et du
pays coustumier); 1510
pays de droit écrit (
Coutume d'Auvergne ds
Nouv. coutumier gén. éd. Bourdot de Richebourg, t.4, p.1174a); 1690
pays d'Estats; pays d'Election (
Fur.). Du b. lat.
pagensis propr. «habitant du
pagus, du canton» (2
emoitié
vies.,
Grégoire de Tours ds
Blaise Lat. chrét.); «compatriote» (fin
viiie-déb.
ixes.,
Capit. Car. Magni ds
Blaise Latin. Med. Aev.); «paysan, campagnard» (
ixes.,
Agobard, ibid.) cf. paysan*. Pagensis a, dans ces sens, évincé
paganus (autre dér. de
pagus, v. de mot) lorsque ce dernier désigna les païens (v. ce mot). La désignation du «pays» par
pagensis s'explique prob. par sa qualification, dans un 1
ertemps, d'un subst. désignant un territoire:
ager, territorium... (
Few t.7, p.471b).