PATATE, subst. fém.
Étymol. et Hist.1. a) 1582 «plante des régions chaudes cultivée pour ses gros tubercules comestibles à chair douceâtre»
pattates est cité comme un mot indigène qui a été cependant francisé dans sa finale et qui porte la marque du plur. (
Reprinse de la Floride d'apr.
Gaffarel,
Floride, p.489 ds
Arv., p.399);
b) 1601-03
patate «
id.» (S.
Champlain,
Brief discours, p.31 ds
OEuvres, Québec, 1870, t.1);
2. a) canad. 1765 «pomme de terre» (
Arch. du Pt Séminaire de Québec, C-11, 11 déc., p.80 ds
Trav. de ling. québécoise, t.2, 1978, p.208; peut-être déjà en 1750, v.
ibid.,
loc. cit.);
b) fr. 1769 «
id.» (
Valmont Suppl. d'apr.
FEW t.20, p.57b);
3. arg. ou pop.
a) α) 1866 «nez» (
Sicart,
loc. cit.);
β) 1919 «tête, visage» (
Carco,
loc. cit.);
b) «niais» 1893 (d'apr.
Chautard, p.235); 1915 (R.
Benjamin,
Gaspard, p.222 ds
Esn. Poilu, p.390);
c) en avoir gros sur la patate 1912 (d'apr.
Chautard, p.650; aussi en 1907
en avoir gros sur la pomme de terre,
ibid.); 1917 (
Mercure de France, 16 avr., p.692);
4. 1970 math. (
Rob. Suppl.). Empr., par l'intermédiaire de l'esp.
patata, plante convolvulacée (1528 ds
Fried, p.82), à une var. de l'arawak de Haïti
batata «
id.» (v.
König, p.163 et
Arv.), également empr. par le fr.
battate (
ca 1525, A.
Pigafetta,
Rel. du Prem. voy. autour du Monde par Magellan, p.43 ds
König, p.162), par l'intermédiaire de l'esp.
batata (1519 ds
Cor.-
Pasc.), et déjà att. (sous la forme
batata) en 1516, en lat., par l'aut. ital. Martyr d'Anghiera (v.
Fried, p.82). Le mot, sous sa forme mod., semble avoir été vulgarisé par l'intermédiaire du baragouin comm. parlé par les indigènes et les marins dans la mer des Caraïbes (v.
Arv.). Le sens 2 s'explique par l'introd., favorisée par la conquête angl., de la culture de la pomme de terre au Canada (v.
M. Juneau,
Probl. de la lexicol. québécoise, p.206). Le mot a ensuite été diffusé en fr. à partir de la côte ouest de la France et s'est répandu progressivement dans les dial. de l'Ouest, l'Île-de-France, du Centre, de la Champagne et de la Brie (v.
FEW t.20, p.57b-58a) et en fr. pop. (voir M.
Juneau,
loc. cit. et
Trav. de ling. québécoise, t.2, 1978, p.58-59). V.
König, pp.162-163;
Fried,
s.v. batata;
Arv., pp.398-402 et
FEW t.20, pp.57b-58b et t.13, 2, pp.387a-389a.