PARTICULIER, -IÈRE, adj. et subst.
Étymol. et Hist.I. A. Qui se limite à un élément, une partie, un détail
ca 1265
sciences particuleres (
Brunet Latin,
Trésor, éd. F. J. Carmody, II, 2, p.176); 1269-78 (
Jean de Meun,
Rose, éd. F. Lecoy, 17481: Et useront de leur poissances [li cors celestre] Par necessaires influances Seur les
particulieres choses Qui sunt es elemenz ancloses);
id. li san particulier «les cinq sens» p.oppos. à
li san conmun [plur.] «le sens commun» [
sensorium commune] qui fait la synthèse des données des divers organes sensoriels, v. aussi note de l'éditeur, t.3, p.173 (
Id.,
ibid., 13280); 1314 (
Chirurgie de Mondeville, éd. A. Bos, 1824: la cure
particulier et propre; 1950: les purgacïons universerseilz et
particuliers); 1580 (
Montaigne,
Essais, II, 1, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p.334: autant d'actions, autant faut il de jugemens
particuliers); spéc.
a) ca 1360
en particulier loc. adv. «par clause expresse» (
Miracles de N.-D., éd. G. Paris et U. Robert, XIX, 129);
b) av. 1473 subst. «ce qui n'est pas général, détail» (
Jean Jouvenel des Ursins,
Hist. de Charles VI, éd. Denys Godefroy, 1653, p.248); 1633 (
Corneille,
Examen de ,,La Veuve`` ds
OEuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t.1, p.395: Elle [la Veuve] a ce même défaut dans le
particulier de la durée de chaque acte); 1652, juin «détail» (
Pascal,
Lettre à la reine de Suède ds
OEuvres, éd. J. Chevalier, p.502: Je n'importunerai pas... votre Majesté du
particulier de ce qui compose cette machine [arithmétique]).
B. Qui ne concerne qu'un individu, fin
xiiie-déb.
xives. (
Gloss. Bibl. Bruxelles 9543 ds T.-L.); [relig.
jugement particulier (
Commynes, VI, conclus. ds
Littré, v. éd. J. Calmette, VI, XII, t.2, p.341, note: il s'agit d'une interpolation ultérieure] 1570, 10 sept.
interests particuliers (
Montaigne,
Lettre à M. de Foix ds
OEuvres, éd. A. Thibaudet et M. Rat, p.1367); 1580
profit particulier (
Id.,
Essais, I, XXXIX, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p.237); 1671 «qui est exclusivement réservé à un groupe, une personne» (
Pomey: Les Juifs ont dans les villes où ils habitent un lieu
particulier); 1683 «
id. à une activité» (
Bossuet,
Oraison funèbre de Marie-Thérèse d'Autriche ds
OEuvres, éd. B. Velat et Y. Champailler, p.121); spéc.
a) 1538
en particulier loc. adv. «séparément des autres, dans le privé» (
Est.,
s.v. privatim); 1671
parler en particulier (
Pomey);
b) 1580 subst. (
Montaigne,
Essais, I, XXXIX, p.237: nous ne sommes pas nez pour nostre
particulier, ains pour le publicq); 1655
dans le particulier «dans l'intimité» (
Molière,
L'Étourdi, III, 2); 1656-57
en vostre particulier «chez vous» (
Pascal,
Provinciales, lettre 6
eds
OEuvres, éd. J. Chevalier, p.717).
C. Qui se distingue des autres individus ou autres éléments de même nature
1. ca 1265 (
Brunet Latin,
op. cit., II, XXXI, p.201); 1671 (
Pomey: Je n'ai rien de
particulier en ma manière de vivre);
2. 1549 p.ext. «singulier, bizarre» (
Est.);
3. 1666 «hors du commun, exceptionnel» d'une personne (
Molière,
Médecin malgré lui, I, 5); 1671 (
Pomey: Il a une
particulière passion pour cela).
D. Qui est la propriété, l'apanage d'un individu 1314 (
Chirurgie de Mondeville, éd. A. Bos, 1952: la maniere
particuliere et la ruille d'ouvrer des cyrurgiens); 1537 (
Boutillier,
Somme rur., fol. 19d ds
Gdf. Compl.: en leur nom
particulier ou au nom d'autruy);
ca 1590 (
Montaigne,
Essais, I, XIII, p.48: chasque cité a sa civilité
particulière); subst.
a) 1563
pour mon particulier «en ce qui me concerne, quant à moi» (
Estienne,
Conformité, ch. 2, p.94 ds
Hug.);
b) 1636
an son particulier «en propriété personnelle» (
Monet).
E. À l'écart des autres, tourné vers soi-même
1. fin
xives. «égoïste» (
Eustache Deschamps,
OEuvres, I, 230, 11 ds T.-L.);
2. ca 1590 «replié sur soi-même, se tenant à part» (
Montaigne,
Essais, I, XXVI, p.176).
II. Subst.
A. masc. fin
xves. [ms.] «personne privée, citoyen» (
Journal de Jean de Roye, éd. B. de Mandrot, t.1, p.38); 1559 (
Amyot, trad.
Plutarque,
Hommes illustres, Solon, § 34 ds
OEuvres, éd. G. Walter, t.1, p.194); 1690 «un certain homme, quidam» (
Fur.).
B. 1607
particulière dame «maîtresse» (
H. d'Urfé,
L'Astrée, 1
repart., XII, éd. H. Vaganay, t.1, p.460); 1649
particulière «prostituée» (
Le Tableau du tyran Mazarin d'apr.
Larchey,
Dict. hist. arg., 1878). Empr. au lat.
particularis (rare av. la basse époque) propr. «se rapportant à une part; partiel, particulier»;
-er s'est très tôt confondu avec
-ier*,
Nyrop t.3, § 212.