NOUS, pron. pers.
Étymol. et Hist. I. Pron. pers. 1
repers. du plur. tonique et atone
A. cas régime direct
1. atone
ca 881 précède le verbe (
Ste Eulalie, 28 ds
Henry Chrestomathie, p.3: ... et a lui [Christus]
nos laist venir); 2
emoitié
xes. (
St Léger, éd. J. Linskill, 239: Il [Lethgiers]
nos aiud ob ciel Senior);
ca 1050 régime d'un inf., lui-même régime d'un autre verbe,
nus se place non devant l'inf. mais devant cet autre verbe (
St Alexis, éd. Chr. Storey, 11: Puis icel tens que Deus
nus vint salver);
ca 1100 (
Roland, éd. J. Bédier, 1149: Li emperere
nos devreit ben venger; 1744);
2. tonique
a) ca 1100 (
ibid., 1747-48: Nostre Franceis ... Truverunt
nos e morz e detrenchez, Leverunt
nos en bieres sur sumers);
b) id. après un verbe à l'impér. en début de prop. (
ibid., 1906-07: Paien escrient: ,,Aïe
nos, Mahum! Li nostre deu, vengez
nos de Carlun!...``).
B. Cas régime indirect
1. tonique
a)ca 881 après une prép. (
Ste Eulalie, 26-27, p.3: Tuit oram que por
nos degnet preier [Eulalia] Qued auuisset de
nos Christus mercit); fin
xes. (
Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 502: contra
nos eps [
nos ipsos; a. prov.] pugnar devem); 1365
chiés nous (
Froissart, Meliador, éd. A.Longnon, 633);
b) après un impér. en début de phrase, fin
xes. (
Passion, 188: ,,Di
nos, prophete, chi t'o fisdret?``);
ca 1100 le pron. pers. régime direct précède
nus régime indirect (
Roland, 2560: ,,Sire, rendez le
nus! ...``);
2. atone fin
xes. précède le verbe (
Passion, 11: La sua morz vida
nos rend; 307);
ca 1100 le pron. pers. régime direct précède
nus régime indirect (
Roland, 1008: Respont Rollant: ,,E! Deus la
nus otreit!...``; 3013).
C. Cas suj.
1. atone 2
emoitié
xes. plur. de narration représentant l'auteur et ses lecteurs (
St Léger, 6: Et or es temps et si est biens Quae
nos cantumps de sant Lethgier); fin
xes. (
Passion, 305: O Deus...
Nos te laudam e noit e di);
ca 1100 le compl. étant placé en tête de la phrase, le verbe se place entre ce compl. et le suj. (
Roland, 77: Dient paien: ,,De ço avun
nus asez!``);
xiiies. en prop. interr., le verbe précède le pron. (
Aucassin et Nicolette, éd. M. Roques, 27, 10, p.29: En quel tere en irons
nous?);
2. tonique fin
xes. (
Passion, 291: El mor a tort, ren non forsfist; Mais
nos a dreit per colpas granz Esmes oidi en cest ahanz; 501); fin
xiies.
nos meïsmes (
Béroul, Tristan, éd. A. Ewert, 599).
II. Nous peut désigner le locuteur seul, non associé à d'autres personnes
A. Ca 1200 (
Auberée, 165 ds T.-L.: Se riens vous faut, dites le
nous [= moi]); 2
emoitié
xiiies. (
Blancandin, 561,
ibid.).
B. Ca 1213
nous dit ,,de modestie`` désignant l'auteur parlant à la 1
repersonne (
Fet des Romains, éd. K. Sneyders de Vogel, IV, 2, 17, t.1, p.726).
C. 1241,
nous dit ,,de majesté`` par lequel se désigne lui-même un grand personnage dans un acte officiel (Charte de Thibaud, roi de Navarre et comte de Champagne ds
Layettes du Trésor des chartes, éd. A. Teulet, t.2, p.447a:
Nos Tiebauz...Sachent tuit...que...
nostre ami...).
III. Emploi subst. 1674 «ensemble formé par deux ou plusieurs personnes» ici, les Muses (
La Fontaine, Poèmes, Clymène ds
OEuvres, éd. P. Clarac, 1968, t.2, p.35); 1751 (
D'Alembert, Discours préliminaire de l'Encyclop. ds
OEuvres, éd. Paris, A. Belin, t.1, 1821, p.22). Du lat.
nos, pron. pers. de la 1
repers. du plur. tonique et atone, quelquefois employé au sens de
ego, notamment pour accentuer une opposition (
Virgile, Bucoliques, I, 3, 4). Depuis le haut Moy. Âge (Léon le Grand),
nos s'emploie comme plur. dit ,,de majesté`` (
cf. ixes. Raban Maur [pour une autorité relig.];
id. Dipl. Arnulfi [autorité civile] ds
Nov. gloss.) et comme plur. ,,de narration`` pour représenter l'auteur qui s'exprime (2
emoitié
viiies.,
Liutger) ou l'auteur et ses lecteurs (
xes.,
ibid.).