NEIGE, subst. fém.
Étymol. et Hist. 1329
naige (
Watriquet de Couvin, Dits, éd. A. Scheler, 53, 322 [
Dit du Connestable]);
cf. 1461 (
Villon, Testament, éd. J. Rychner et A. Henry, 336: Mais ou sont les
neiges d'anten?); 1550
nége eternelle (
Ronsard, Le Bocage, XIV, 12
A son retour de Gascongne, ds
OEuvres, éd. P.Laumonier, t.2, p.199).
A. 1. Allus. à la blancheur de la neige
a) 1360-70 (
Baudouin de Sebourc, XVIII, 52 ds T.-L.: as le barbe plus blanche c'onkes
nege ne fu); 1555 p.méton. (
Ronsard, Meslanges, Ode, Quand je veux en amours, 10,
ibid., t.6, p.198: ...ta barbe en tous endrois de
nege parsemée);
b) xives. (
Chevalier au papegau, 30, 21 ds T.-L.: sydone blanc come
nege);
2. allus. à la fragilité de la neige 1455-75 fig.
estre de neige «ne produire aucun effet» (
Georges Chastellain, Chron., éd. Kervyn de Lettenhove, t.5, p.281); 1585
de neige «de rien, sans valeur» (
N. du Fail, Contes et discours d'Eutrapel, éd. J.Assézat, t.1, p.210);
3. allus. à la propriété de la neige de s'agglomérer 1587 (
Lanoue, Discours pol. et milit., Bâle, F. Forest, p.833: Laissans rouler...ceste petite pelote de
neige [l'armée des Princes] ...elle se fit grosse comme une maison); 1671, 25 déc. fig.
il se fait une pelote de neige «l'affaire grossit et empire» (
Sévigné ds
Lettres, éd. E. Gérard-Gailly, t.1, p.440);
4. la neige symbole de l'innocence 1676, 22 juil. (
Id., ibid., t.2, p.249: Penautier sortira [de l'affaire des poisons] un peu plus blanc que de la
neige).
B. P.anal. avec la couleur, la consistance de la neige
1. 1501 chim.
neige de corne «phosphate de chaux obtenu par calcination de la corne de cerf» (
B. dict. gén. lang. wall. t.15, p.49 d'apr.
FEW t.7, p.154b);
2. 1552
neige de creme «crême fouettée» (
Rabelais, Quart livre, LIX, éd. R. Marichal, p.241); 1680
neige «sorte de sorbet» (
Rich.); 1798
oeufs à la neige (
Ac.);
3. 1921 arg. des malfaiteurs «cocaïne» (d'apr.
Esn.). Déverbal de
neiger*. A évincé l'a. fr.
noif (
ca 1100
neif, Roland, éd. J. Bédier, 3319) qu'il a repoussé vers les aires latérales du domaine gallo-rom.;
FEW t.7, p.157a.
Noif est issu du lat.
nix,
nivis «neige», de même que l'a. prov.
neu (1171-90,
Arnaut de Mareuil, Dona genser..., 94 ds
Les Saluts d'amour, éd. P.Bec, p.80), le cat.
neu, l'esp.
nieve, le port.
neve, l'ital.
neve, le roum.
nea. Le déclin de
noif est dû à la fois à son éloignement de
neigier qu'on ne sentait plus en rapport avec lui, et à la collision homonymique avec
noiz (< lat.
nuce).
Neige a également évincé le type a. fr.
nive (
ca 1350,
Gilles Li Muisis ds T.-L.) relevé dans les domaines du nord et du nord-est, se rattachant au lat.
nivere, FEW t.7, p.153a, v.
neiger.