MOUILLER, verbe
Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1050 trans. «imbiber, humecter» (
Alexis, éd. C. Storey, 267: si
moilent sun liçon);
ca 1165 pronom. «s'imprégner d'un liquide» (
Troie, éd. L. Constans, 10630: en sanc
se moilleront);
ca 1165 part. passé adj. (
ibid., 23864: darz [...]
moilliez);
ca 1165 trans. «rendre humide, imbiber (le sujet désigne un liquide)» (
ibid., 13284: Or
moilleront lermes ma face);
ca 1160 intrans. «devenir mouillé» (
Enéas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 1252);
b) 1801 part. passé subst. «ce qui est mouillé» (
Destutt de Tr.,
Idéol. 1, p.131: une sensation de chaud [...] ou de
mouillé); 1874 «endroit mouillé» (
Lar. 19e);
2. ca 1155 trans. «rendre humide (de larmes)» (
Wace, Brut, éd. I. Arnold, 14071: Lu chief lu rei en fud
muidliez);
ca 1225 part. passé adj.
yeux mouillés (
Gautier de Coinci, Théophile, 1461 ds
Miracles, éd. V. F. Koenig, t.1, p.138: oelz
moilliez);
3. a) xiiies. part. passé adj. «pluvieux, humide» (
Chansons Ms 389 Bibl. Berne, 379, 1: en tens
moillié et enpleu); 1563
année mouillée (
Palissy, Recepte véritable, éd. A. France, p.45); 1668 subst. «temps humide» (
La Fontaine, Fables, VI, 4, 13, éd. A. Régnier: du sec et du
mouillé);
b) 1636 intrans. «pleuvoir» (
Monet: il
a Moüillé ce matin); 1680 (
Rich.: pluie qui
mouille);
4. a) fin
xives. intrans. «être mouillé de sueur à cause de la peur» (
E. Deschamps,
Œuvres, éd. G. Raynaud, t.8, p.84: D'angoisse tous li frons me
mueille);
b) 1936 arg. «avoir peur» (
Céline, loc. cit.);
5. 1530
mouiller ses lèvres «tremper ses lèvres sans boire, ou en buvant peu» (
Palsgr., p.640);
6. 1573 expr.
tirer au doigt mouillé (
J. A. de Baif, Eclogue XI, f
o33 v
ods
Gdf. Compl.);
7. a) 1598 mar.
mouiller l'ancre (
J. de Villamont, Voyages, l. 3, chap.2, 478 ds
Quem. DDL t.10); 1667 intrans. «être au mouillage» (
L'Afrique de Marmol, trad. N. Perrot d'Ablancourt, t.2, p.239); 1797 part. passé adj. «au mouillage» (
Voy. La Pérouse, t.3, p.185);
b) 1866
mouiller une sonde (
Hugo, loc. cit.);
c) 1903
mouiller une bouée (
Nouv. Lar. ill.);
d) 1915
mouiller une mine (
Lar. mens. t.3, p.352c);
e) 1963 pêche
mouiller une ligne (
Lar. encyclop.);
8. 1648
poule mouillée (
Scarron, Virgile travesti, l. II, éd. 1786, t.4, p.104);
9. 1680 part. passé adj. phonét. (
Rich., s.v. g); 1690 trans. et pronom. (
Fur., s.v. mouiller et
s.v. l);
10. 1690
papier mouillé «étoffe de mauvaise qualité» (
Fur.);
11. 1691 cuis. «additionner d'un liquide nécessaire à la cuisson» (
B. Guégan, La fleur de la cuis. fr., p.163 ds
FEW t.6, 3, p.44a);
12. [1752 sculpt.? (
Trév. Suppl.: draperie de linge
mouillé)]; 1836 sculpt.
draperie mouillée (
Gautier, Mllede Maupin, IX, p.196 ds
Rob., s.v. couvrir);
13. a) [1765 text.
mouiller du drap (
Encyclop. d'apr.
Lar. Lang. fr.)]; 1812 (
Mozin-
Biber);
b) 1874 tiss.
mouiller de la soie (
Lar. 19e);
14. 1767
mouillée part. passé subst., papet. (
Encyclop., t.26, Papeterie, planche II);
15. 1820-40 arg.
mouillé «connu à la police» (Ms Jacquinot ds
Larch. Suppl. 1883, p.XI); 1886 pronom. «prendre des risques» (arg. des voleurs ds
Esn.); 1935 pronom. «se compromettre» (
Simonin, J. Bazin, Voilà taxi! p.218); 1948 trans. «compromettre» (
A. Paraz, Le gala des vaches, p.268 ds
Cellard-
Rey);
16. 1867 phys. «(en parlant de la surface d'un liquide) se relever au contact d'un solide» (
Lar. 19e, s.v. capillarité, p.309b: le liquide
mouille les parois du vase); 1903
corps mouillés et non mouillés (
Nouv. Lar. ill.); 1953
mouillant subst. (
Lar. 20eSuppl.); 1956
mouillant adj. (
Uv.-
Chapman);
17. 1874 «étendre d'eau (le vin)» (
Lar. 19e);
18. 1885 «uriner (dans ses vêtements)» (
Maupass., Contes et nouv., t.2, Bapt., p.575: il
avait mouillé ses linges); 1903 (
Janet, Obsess. et psychasth., p.48:
mouiller son pantalon);
19. 1887 arg. «être excitée sexuellement (en parlant d'une femme)» (
Renard, loc. cit.); 1893
en mouiller pour qqn (
Richepin, Miseloque, p.174) [
cf. ca 1470
Devinettes fr. du Moy. Âge, éd. B. Roy, n
o461: le con [...] poeult
moullier une teste, deux barbes];
20. 1925 géogr.
section mouillée, périmètre mouillé (
De Martonne, Traité de géogr. phys., t.I, 3
epart., V, III, p.459 ds
Rob., s.v. débit). Du lat. vulg.
*molliare «attendrir le pain en le trempant», puis «mouiller», dér. du lat.
mollia (
panis), «mie de pain», substantivation de l'adj.
mollis «mou, tendre» (
mou*) (v.
Ern.-
Meillet, s.v. mollis).