MOELLE, subst. fém.
Étymol. et Hist. A. 1. a) 1121-34
mëule «substance molle et grasse renfermée à l'intérieur des os» (
Philippe de Thaon, Bestiaire, 2169 ds T.-L.: ... l'oisel at un os Eng la quisse, gros: Se om la
mëule a ...; 2211: la
mëule de l'os de l'oisel);
xiiies. [ms.]
moelle (
Marie de France, Fables, éd. K. Warnke, 57, 14, var. N); spéc.
b) 1155 synon. de
moëlle épinière (
Wace, Brut, éd. I.Arnold, 11800: Bos le feri parmi la gule Dessi al col en la
mëoule [
mouele, leçon rejetée du ms. de base P,
xiiies.]);
ca 1200
id. (
Doon de la Roche, 4362 ds T.-L.: cop ... Que dou maistre os del col li froissa la
mëolle); 1534
mouelle spinale (
Rabelais, Gargantua, XLII, éd. R. Calder et M. A. Screech, p.247, 20); 1660
mouelle espiniere (
Habicot, La semaine ou pratique anatomique ds
FEW t.12, p.180a); 1667
moelle epiniere (
J. des Sav., cr. du 28 nov. d'apr. P.
Gason ds
Fr. mod. t.23, 1955, p.222);
2. emplois fig.
a) α) 1
remoitié
xiies. «la partie la plus profonde, la meilleure, la fine fleur de quelque chose» (
Psautier d'Oxford, éd. F. Michel, p.244: E les bucs ot la
moule de froment [
Deut. 32, 14:
medullam tritici];
cf. Psautier Cambridge, même éd., 274); 1387-91 «mie du pain»
la meole dou pain (
Gaston Phebus, Chasse, éd. G. Tilander, 15, 77 et 78, p.111);
β) ca 1223 appliqué à une personne (
Gautier de Coinci, Miracles N.-D., éd. Fr. Koenig, 2 Dout 34, 2525: La mere Dieu ... Est li moieus et la
mooulle Qui toute paist l'ame et saoule;
cf. 2 Sal 35, 440: Tu ieés de toz les biens la
mouele et la mie);
b) fin
xiies. «ce qu'il y a de plus profond, de plus intime» (
Homélies St Grégoire sur Ezéchiel, 89, 12 ds T.-L.: l'amons de la
molle de nostre cuer [
medullitus amamus]); 1
erquart
xiiies. (
Renclus de Molliens, Miserere, éd. A. G. van Hamel, 9, 8: Hom, entent a che ke tu os! Dusk'a la
moële des os T'en toukera ancui la glose)
c) 1269-78 «ce qu'il y a d'essentiel dans une oeuvre de l'esprit» (
Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 11830: Or vos ai dit du sen l'escorce... Or en veill la
moële espondre);
cf. 1534 (
Rabelais, Gargantua, prol., éd. citée, p.14, 79: ...vous convient estre saiges, pour fleurer... ces beaux livres...Puis...rompre l'os et sugcer la substantificque
mouelle).
B. [
ca 1240 le dér.
La möulette del junc (
Guillaume Le Clerc, Joies N.-D., 639 ds T.-L.)] début
xives.
moeule de ronce (
Recettes médicales, Bibl. nat. lat. 8654 B, éd. P. Meyer ds
Romania t.37, 1908, p.362);
ca 1314
moele de seu [v.
sureau] (
Henri de Mondeville, Chirurgie, éd. A. Bos, § 1959). Du lat.
medulla «moelle de l'os; d'un végétal» (d'où
mëole, et
moële par métathèse), qui présente tous les sens att. en fr.