LOURD, LOURDE, adj.
Étymol. et Hist. A. «Maladroit»
1. ca 1165
lorz «abasourdi, pataud, endormi» (
Benoît de Ste-Maure,
Troie, éd. L. Constans, 29375); 1680 (
Rich.:
Lourd, Pesant, qui marche pesamment);
2. ca 1170
lort «sot, stupide, qui manque de subtilité» (
Béroul, Tristan, éd. A. Ewert, 2366);
ca 1330
lourt «grossier, rustre, rude (d'une personne)» (
Guillaume de Digulleville, Pèlerinage vie hum., éd. J. J. Sturzinger, 5228); 1400-03
lourd «grossier, stupide (d'une chose)» (
Christine de Pisan, Livre de mutacion de fortune, éd. S. Solente, 4386: fraudes
lourdes); 1559
lourde faulte (Amyot, Péricl. 50 ds
Littré). B. «pesant»
1. 1275-80 «pesant, dont le poids est élevé ou supérieur à la moyenne; massif, qui donne une impression de pesanteur sur les sens» (
Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 13299); 1863
artillerie lourde (
Lar. 19e, s.v. artillerie); d'où 1916 subst. fém.
lourde (
Mang, Fantasio, 1-5 ds
Esn. Poilu 1919);
2. a) 1388-89
lourt «difficile à supporter en raison de son importance» (
Eustache Deschamps, Balade MCIV, éd. Queux de Saint-Hilaire, t. 6, p. 9, 18); 1735-36 fig.
avoir la main lourde «frapper durement» (
Marivaux, Paysan parvenu, éd. Fr. Deloffre, p. 211);
b) 1690
lourd «pénible, difficile, long à exécuter»
(
Fur.);
c) 1810 «qui accable, oppresse» (
Staël, Allemagne, t. 2, p. 53);
3. 1538
lourde cheutte «action de tomber de tout son poids» (
Est., s.v. attolere); 1554
lourd «qui a du poids, difficile à déplacer en raison de son poids» (
A. Thevet, Cosmographie de Levant, p. 76); 1573
lourd (sommeil) «que rien ne peut déranger» (
Lariv., Facet. nuits de Strap., XIII, VI ds
Gdf.); 1690
(terre) lourde «grasse, forte» (
De La Quintinye, Instruction pour les jardins fruictiers, t. 1, p. 129); 1873 turf
piste lourde (
Lar. 19e);
4. 1901
ne pas en ficher lourd «ne pas travailler beaucoup» (
Bruant, p. 217). Prob. d'un lat. pop.
*lurdus [attesté dans les gloses de Rhaban et trad. par
fûl «pourri, gâté» d'apr.
Diez3, p. 197] altération du lat. class.
lūridus «jaune pâle, blême» et «qui rend livide»;
cf. l'ital.
lordo (mais aussi
lurido) «sale», l'a. prov.
lur «
id.» (1478, Doc. Forcalquier ds
Romania t. 27, p. 427). Cependant la forme et le sens font difficulté, le sens physique ne s'étant imposé que tardivement. Du sens de «blême» on peut passer à celui de «sale» de l'ital. (
cf. le dér. b. lat.
luridatus «souillé»
ives. ds
Blaise Lat. chrét.), mais aussi de «lourdaud, simple» d'où «pesant» (
Diez3, p. 197 et
FEW t. 5, p. 469b qui rejette en raison de la chronol. des attest. l'évolution proposée par
REW35176: «livide», «qui a le vertige», «troublé, stupide» et enfin «pesant»).