JUSQUE(S),(JUSQUE, JUSQUES) prép.
Étymol. et Hist. A. Prép.
1. indique la limite extrême
a) 2
emoitié
xes.
jusche + compl. de lieu (
Passion, éd. D'Arco S. Avalle, 328);
b) id. jusque + compl. de temps (
ibid., 309);
jusque peut être en relation avec des prép. indiquant le point de départ ou l'origine, comme
des dans l'ex. précédent;
jusque ne s'emploie plus que suivi d'une autre prép.
ca 1050
jusque an (
Alexis, éd. Chr. Storey, 113), surtout de la prép.
à : ca 1100
jusqu'a ici au sens particulier de « d'ici à » (
Roland, éd. J. Bédier, 972);
2. jusque + adv.
a) ca 1165
jusque ci (
Benoît de Ste-
Maure,
Troie, éd. L. Constans, 11865);
b) 1176-81
jusqu'a demain (
Chrétien de Troyes,
Chevalier charrette, éd. M. Roques, 358); 1561
jusques à quand (J.
Grevin,
César, éd. L. Pinvert, p. 21); 1676 fig.
en avoir jusque-là de qqn « en avoir assez de lui » (M
mede Sév.,
Lettres, éd. M. Monmerqué, t. 4, p. 453);
3. indique le degré extrême
a) 1
erquart
xiiies.
jusc'a + subst. abstr. (
Lancelot del Lac, éd. O. Sommer, t. 1, p. 234); 1640 fig.
aller jusques au bout (
Corneille,
Cinna, 1559);
b) ca 1460
jusques à + inf. (
Coquillart, Trad. de la
Guerre des Juifs, éd. Ch. d'Héricault, t. 2, p. 310);
4. 1547
jusque + subst. peut indiquer l'inclusion dans un tout (en liaison ou non, avec des termes tels que
y compris, tout) (J.
Bouchet,
Epistres morales du Traverseur, II, III, 4 ds
Hug.).
B. Adv. 1561 « même » devant un terme qu'il met en valeur, ici en relation avec un relatif (
Calv.,
Instit., 207 ds
Littré).
C. Conj.
a) ca 1050
jusqu' + ind. « jusqu'au moment où » (
Alexis, 603); ne subsiste que comme loc. conj. av. 1405
jusques a ce que + subj. (
Livre du chevalier de la Tour Landry, éd. A. de Montaiglon, p. 8); est parfois suivi de l'ind. 2
emoitié du
xves.
jusques a ce que (
Myst. du V. Testament, éd.J. de Rothschild, 34684);
b) 1176-81
jusque tant que + ind.
« id. » (
Chrétien de Troyes,
Chevalier lion, éd. M. Roques, 720); 1247
jusk'a tant que + subj. (doc. ds
Runk. p. 173);
c) début
xiiies.
jusques là que « id. » (
Raoul de Houdenc,
Vengeance Raguidel, 3050 ds T.-L.). Prob., bien qu'il soit attesté plus anciennement, p. aphérèse de
enjusque prép. (1176-81
Chrétien de Troyes,
Chevalier lion, éd. M. Roques, 5353; également attesté comme conj.
cf. T.-L.,
s.v., cf. aussi l'a. prov.
en jusca que 1143 ds
Brunel t. 1, p. 49), du lat.
inde ŭsque (composé de
inde « d'ici » et
usque « jusqu'à »), fréquent en lat. tardif, mais déjà attesté en lat. class.; le
en- initial, ayant été pris pour un préf., fut ressenti comme superflu (P.
Falk,
Jusque et autres termes en a. fr. et en a. prov., p. 104 qui réfute l'hypothèse d'un rattachement à
de usque qui n'aurait pu se constituer qu'à une époque postérieure au traitement dy- > dz̆-). Le
-s- intérieur qui s'est normalement amuï (
cf. les formes
juque, juc encore attestées au
xvies. ds
Gdf.) est rétabli dans la prononc. surtout à partir du
xvies., prob. sous l'infl. anal. d'autres conj. comme
puisque*, et peut-être par rapprochement étymol. avec le lat.
usque (
FEW t. 14, p. 75a, note 4). Quant à
u pour
o (
josque), il vient d'un doublet déjà latin avec
ū
(
FEW t. 14, p. 74a).