IL1(S), pron. pers., 3epers., masc.,ELLE1(S), fém., formes atones
Étymol. et Hist. Il, el(l)e, els pron. pers. de la 3
epers.
I. Cas suj.
A. Masc.
1. sing. :
il 842 intention d'insistance, d'opposition (
Serments Strasbourg, ds
Henry Chrestomathie, n
o1, 6 : si saluarai eo cist meon fradre Karlo... in o quid
il mi altresi fazet); 2
emoitié
xes.
el medeps (
Passion, éd. D'A. S. Avalle, 255); 2
emoitié
xes. sert d'appel pour annoncer un subst. à venir (
St Léger, éd. J. Linskill, 152);
id. rappelle un subst. précédemment énoncé (
ibid., 115);
ca 1190 fait fonction d'appos. au suj. (
Aspremont, éd. L. Brandin, 1113 : Vait s'en Turpins,
il et sa compaignie) [
cf. ca 1200
Escoufle, 451 ds T.-L.,
s.v. il, 1315, 5 : Ains i sejorne volentiers
Lui et sa gent];
2. plur.
a) il 937-52 (
Jonas, ds
Bartsch Chrestomathie, col. 7, 2);
b) eus ca 1130 (
Gormont et Isembart éd. A. Bayot, 497).
B. Fém.
1. sing.
ele ca 881 (
Eulalie, ds
Henry Chrestomathie, n
o2, 5);
2. plur.
eles (
Passion, 413).
C. Neutre
il mil.
xies. (
Alexis, éd. Chr. Storey, 503),
cf. la forme rég.
el relevée notamment ds les dial. de l'ouest :
ca 1165 (B.
de Ste-Maure,
Troie, 20263 ds T.-L.
s.v., 1313, 12); empl. en position de suj. devant un verbe unipersonnel : mil.
xies. (
Alexis, 51 : Quant li jurz passet et
il fut anuitet); annonçant un verbe en emploi unipersonnel
a) ca 1100 suivi d'un subst. (
Roland, éd. J. Bédier, 192 :
Il nus i cuvent guarde);
id. (
ibid., 2418 :
Il n'en i ad chevaler ne barun Que...); 1121-34 (
Ph. de Thaon,
Bestiaire, 1037 ds T.-L.
s.v., 1304, 43 :
Il n'en est creature... Ki...);
b) ca 1100 suivi d'une complétive (
Roland, 1443).
II. Cas régime
A. tonique
1. masc. plur.
els 937-52 (
Jonas, loc. cit., col. 8,6 :
sic liberat de cel peril quet il
habebat decretum que
super els mettreit);
2. fém. sing.
ele 1284 [ms.] (
Brunet Latin,
Trésor, éd. P. Chabaille, I, CLXXXIII, p. 231, ms. F;
li, éd. J. Carmody, ms. T début
xives.); fém. plur.
eles ca 1160 (
Eneas, 119 ds T.-L.,
s.v. il, 1312, 1).
B. Atone; masc. plur.
els mil.
xies. (
Alexis, 580 : Ço peiset
els);
ca 1100 obj. d'un verbe pronom. (
Roland, 111 : pur
els esbaneier).
Il, pron. pers. masc. suj. du verbe à la 3
epers. du sing., est issu du b. lat.
illī
(époque mérov.,
Vään., § 276), lui-même issu du dém. lat.
ille (désignant l'objet éloigné; marquant avec insistance ce qui a rapport à la 3
epers.) sous l'infl. du pron. rel.
quī. La forme
el (
St Léger, 29 et
passim; Passion, 17 et
passim; v. aussi T.-L.,
s.v. il, 1302, 9
sqq.) dénote une infl. mérid. Devant consonne et par suite d'un relâchement de l'articulation de la liquide en position implosive,
il peut se réduire à
i (1178
Renart, éd. M. Roques, 3687).
Il cas suj. masc. plur. (<
illī
) a pris, vers le mil. ou la 2
emoitié du
xiiies., un
-s : ils par anal. de la flexion nominale.
Ele, eles sont respectivement issus du lat.
ílla, íllas. L'éviction progressive de
lei, li, cas régime fém. tonique (< *
illáei) par
ele, commence dans la 2
emoitié du
xiiies.
El pron. neutre suj. (< lat. vulg.
ǐllum, TLL, s.v. ille, 340, 59-71; class.
illud) a de bonne heure été évincé par la forme masc.
il. Tandis qu'en lat. class. la dés. du verbe suffisait à en marquer la pers., le pron. n'étant utilisé que pour mettre en valeur le suj. du verbe, la lang. parlée a eu, dans un souci d'expressivité, tendance à généraliser l'emploi du pron. pers. suj. au point de l'utiliser fréquemment sans nuance styl. partic. (
Vään., § 281). En très a. fr., l'emploi du pron. pers. suj. traduit un besoin de renforcement, d'insistance, d'expressivité; ce pron. devient par la suite de plus en plus fréquent, étant dans la prose du début du
xiiies. la marque normale de la pers. suj.; d'emploi peu à peu obligatoire, il deviendra pron. conjoint, simple indice de la pers. suj. (
Moignet,
Gramm. de l'a. fr., p. 128;
Ménard,
Synt. de l'a. fr., pp. 72-74; v. aussi
Von Wartburg,
Probl. et Méthodes2, pp. 68-79 qui, faisant le point sur cette évolution à partir d'études partic., insiste sur la relation entre l'emploi du pron. suj. et les règles rythmiques de la phrase en a. fr. où le verbe occupe régulièrement la 2
eplace). Cette évolution a pour conséquence de faire peu à peu perdre aux pron. suj. leur intensité et leur valeur, et à les faire progressivement remplacer par les pron. du cas régime toniques (
lui, eux pour la 3
epers.), v.
Moignet,
op. cit., p. 152,
Von Wartburg,
op. cit., p. 77.