GARDER, verbe trans.
Étymol. et Hist. 1. Fin du
xes. « regarder » (
Passion, éd. D'A. S. Avalle, 259);
2. a) 2
emoitié du
xes. « se tenir sur ses gardes (vis-à-vis de Dieu) en se conduisant bien » (
S. Léger, 70 ds
Henry Chrestomathie t. 1, p. 10, v.
DEAF s.v. garder, col. 185, 24);
b) ca 1050 « prendre soin de (une personne) » (
Alexis, éd. Chr. Storey, 152);
ca 1145 «
id. (des animaux) » (
Wace,
Conception N.D., éd. W. R. Ashford, 299);
c) ca 1130 « rester dans un lieu pour en interdire l'accès, pour le protéger » (
Paraphrase du Cantique des cantiques, éd. E. Koschwitz, 43);
d) ca 1165
soi garder de « prendre garde à, se méfier de » (
Benoit de Ste-
Maure,
Troie, éd. L. Constans, 3640);
e) 1269-78
garder la chambre, le lit, etc. (
Jean de Meun,
Rose, éd. F. Lecoy, 12513);
f) 1334 « conserver (une chose périssable) en bon état, (l') empêcher de se corrompre » (
Reg. de la loy, 1332-35, f
o78 v
o, A. Tournai ds
Gdf.
Compl.);
3. ca 1100 « surveiller (un prisonnier, un otage), pour l'empêcher de s'enfuir » (
Roland, éd. J. Bédier, 3849);
4. a) ca 1135 « mettre de côté, en réserve » (
Couronnement Louis, éd. Y. G. Lepage, réd.
AB, 432) :
b) ca 1145 « garder dans son intégrité (son vœu, sa foi, etc.) » (
Wace,
Conception N.D., 692);
c) ca 1265 absol. « conserver pour soi, ne pas se dessaisir de » (
Brunet Latin,
Trésor, éd. F. J. Carmody, p. 192, 22);
d) 1675 « garder (une personne) à son service » (
La Rochefoucauld,
Réflexions ou sentences et maximes morales, 396 ds
Œuvres, éd. D. L. Gilbert, t. 1, p. 180); 1738 « retenir (une personne) avec soi » (
Marivaux,
Fausses confidences, III, 12 ds
Littré);
5. ca 1145 « observer, respecter, suivre (une règle, un ordre, etc.) » (
Wace,
Conception N.D., 1528). Du germ. occid. *
wardôn « regarder vers »,
cf. l'a. h. all.
warten « regarder; se garder de », m. h. all.
warten « regarder; prendre soin de », m. néerl.
waerden « veiller sur; monter la garde; se garder de ». Dans les langues romanes, le mot a pris les mêmes sens principaux « regarder » et « surveiller, protéger »; en fr., celui de « regarder » s'est perdu au profit des dér.
esgarder (v.
égard) et
regarder*. Pour la date de l'empr. du mot germ. par les langues romanes, v.
DEAF, s.v. garder, col. 167-168.