BÂILLER, verbe intrans.
ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1120 intrans.
bäaillier « bâiller » (ici sous l'effet de la faim) (
Ph. de Thaon,
Bestiaire, éd. Walberg, 1944 ds T.-L. : Cetus at tel nature Que quant il volt mangier Cumence a
bäaillier); d'où 1666 « s'ennuyer » (
Boileau Satire 3, 179 : Et je ne sais pourquoi je
bâille en la lisant [La
Pucelle]; forme
bâiller dans la lexicographie à partir de
Fur. 1690; av. 1848 trans.
bâiller sa vie « traîner dans l'ennui » (Chateaubriand ds
Lar. 19e);
2. 1678-79 p. anal. « être ouvert, mal fermé » (
La Font., VIII, 9 ds
Rob. : Parmi tant d'huîtres toutes closes. Une s'était ouverte, et,
bâillant au soleil, ... D'aussi loin que le rat voit cette huître qui
bâille : Qu'aperçois-je? dit-il; c'est quelque victuaille); 1835 (
Ac. :
Bâiller [...] Cette étoffe, cette dentelle
bâille. Elle n'est pas assez tendue).
Empr. au lat. vulg.
batac(ŭ)lare « bâiller » conservé par les gloses du
xes. (
Excerpta ex Codice Vaticano 1468 ds
Goetz,
CGL t. 5, p. 492, 46), issu de
batare attesté aux
viiie-
ixes. au sens de « bâiller » (
Goetz,
op. cit., t. 5, p. 347, 50,
Collectio amploniana à Erfurt
Glossarium ampl. primum); dér. de
bat- onomat. imitant le bruit du bâillement. Le fait que
bâiller est dès l'a. fr. fréquemment attesté au sens de « soupirer après qqc. » (
Énéas, éd. Salverda de Grave, 1231 ds T.-L.) a prob. contribué à sa confusion et à son interchangibilité avec
bayer* (a. fr.
baer, baier) 1668 (
La Font. II, 13 ds
Rob. : Outre la vanité de son art mensonger, c'est l'image de ceux qui
bâillent aux chimères) puis à la disparition quasi totale de celui-ci.