BUFFET, subst. masc.
ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1150
bufet « escabeau » [
cf. m. angl.
buffet « tabouret » dans
NED] (
Thèbes, éd. G. Raynaud de Lage, 930 : Un faudestueill ont iluec mis, Polinicés i ont assis; De l'autre part sist Thideüs Desus un
bufet d'ybenus) − 1517,
Invent. dans
Gdf. Compl.;
2. a) 1268 « table, dressoir, comptoir » (
E. Boileau,
Métiers, 1
ep., I, 55, Lespinasse et Bonnardot dans
Gdf. : Li talemelier [...] pueent porter [...] leur estal ou
buffez ou tables), attest. isolée; repris en 1606 au sens de « présentoir à vaisselle (au moment du dîner) » (
Nicot); d'où 1532 « assortiment de vaisselle » (
Inv. de Florimond Robertet, p. 31 dans
Gay : Un
buffet de cérémonie, d'argent vermeil doré extrêmement bien ciselé, composé de 3 grands bassins);
Fur. 1690 note : ,,
Buffet, maintenant se dit seulement d'une table longue, où on met la vaisselle d'argent, les verres & les bouteilles pour le service de la table``; d'où 1832 « (dans une réunion) table où sont présentés mets et boissons » (
Raymond); 1863
danser devant le buffet (
Littré); 1863
buffet [de gare]
(Ibid.); b) p. anal. 1704
buffet d'eau (Trév.); 3. 1547 « meuble de rangement » (
Inv. du chât. de Gaillon, p. 132 à 134 dans
Gay); d'où
4. p. anal.
a) 1680 mus. (
Rich.); 1694
buffet d'orgues (Ac.); b) 1803 pop. « ventre, estomac » (d'apr.
Esn.); 1907 pop.
avoir le buffet garni, le buffet vide (
France).
Orig. obsc. (
EWFS2;
Dauzat 1973). L'hyp. d'une dérivation de la racine onomatopéique
buff- exprimant le bruit d'un souffle, d'un déplacement d'air (
cf. l'a. fr.
buffet « soufflet de foyer »,
xiiies.,
Tonlieu de Cambrai dans
Gdf.;
FEW suppose à côté de *
bǔff- [d'où le type
bouffer] la var. *
būff-) est la plus plausible, mais les textes ne fournissent pas de description assez claire de ce meuble pour affirmer (L. Spitzer, v. bbg.) que le buffet était à l'origine un meuble constitué par une planche qui, lorsqu'on l'abattait, faisait un bruit, un déplacement d'air, d'où une désignation onomatopéique qui le rattacherait à
buffet « coup » (
ca 1170
Rois, p. 337 dans
Gdf.), dér. de
buffe*, suff.
-et*. Moins satisfaisante est l'hyp. d'une formation à partir de
buff- interprété comme exprimant une idée de gonflement (
Diez5), parce que ce meuble serait ventru ou objet d'apparat, avec rapprochement de l'a. fr.
bufoi « orgueil, présomption » (
xiies.,
Raimbert,
Ogier dans
Gdf.). Il est peu probable qu'il y ait un rapport entre
buffet « meuble » et l'a. fr.
bufet « piquette » (
xes., Gerschom de Metz dans
R. des Études juives, 1901, p. 247;
xies., Gloses fr. de Raschi dans
École des hautes études, t. 253-254, p. 18, n
o151) d'où l'expr.
vin de buffet « piquette » (dep. le
xives. dans T.-L. et en partic. dans
Villon,
Testament, éd. J. Rychner et A. Henry, 1131) interprétée à contresens par
Gdf. Compl. et
Littré.