BRAS(-)LE(-)CORPS (À),(BRAS LE CORPS , BRAS-LE-CORPS ) loc. adv.
ÉTYMOL. ET HIST. − A. −
Ca 1465
a brache de corps (
Mathieu d'Escouchy,
Chronique, II, 304 dans
Gdf.); entre 1456 et 1467
à bras de corps (
Les Cent nouvelles nouvelles, éd. F. P. Sweetser, Genève, 1966, XLIV, 215-216) − 1583 Cl. Gauchet dans
Hug.,
s.v. bras. B. − 1755
à brasse-corps (
J.-J. Vadé,
La Pipe cassée, p. 22) − 1883,
A. Daudet,
L'Évangéliste, p. 283 dans
Thomas; encore d'usage régional : Anjou, Champagne, Normandie, Lorraine, Provence, Suisse, Québec.
C. − Fin
xviiies.
à bras le corps (Beaumarchais dans
Lar. 19e, s.v. bras).
La forme la plus anc. de cette loc. adv. semble avoir été *
a brace de corps (a brache de corps), composée de la prép.
à* (= « avec » en a. fr.,
cf. Sneyd., p. 306),
brace « les deux bras »
(brasse*
), de* (= « quant à, en ce qui concerne » en a. fr.,
Gam. Synt., p. 265),
corps* désignant le corps du partenaire ou des deux vis-à-vis (
cf. a. fr. [s']
encontrer de cors et de pis dans T.-L.,
s.v. cors, pp. 903-904). − Une var. de cette loc. est
à bras de corps qui est peut-être issu du croisement de deux loc. :
(prendre) à bras, « (prendre) avec ses bras » (
Roland, éd. J. Bédier, 2552)
de corps « par le corps » (
cf. a. fr.
de corps et de pis « au corps à corps » et la loc. angevine
se prendre de corps « avoir une querelle » dans
FEW t. 2, 2, p. 1212b,
s.v. corpus).
La disparition dans l'usage courant de
brace au sens de « les deux bras »
(brasse*
) ainsi que celle de la prép.
de au sens de « quant à » a abouti à la transformation de la loc. primitive :
brasse a été interprété comme forme verbale (issue de
brasser au sens anc. et encore dial. « entourer de ses bras »,
FEW t. 1, p. 487a,
s.v. brachium) et
corps comme obj. dir., d'où
à brasse-corps, sur le modèle d'expr. du type
à tire-larigot, à tue-tête, à brûle-pourpoint. Brasser perdant (sauf dans certains dial.,
cf. FEW t. 1, p. 488b) le sens de « entourer de ses bras »,
brasse a été interprété comme
bras +
se, ce dernier, devenu incompréhensible, étant ,,correctement`` remplacé par l'article
le appelé par le subst.
corps; l'expr. tout en conservant ainsi son rythme quadrisyllabique, a valeur de syntagme elliptique s'interprétant analytiquement par « prendre qqn [ou qqc.] avec ses bras à soi en lui saisissant le corps », ce qui est conforme pour l'essentiel au sens le plus anc. de l'expression.