BOUTER, verbe trans.
ÉTYMOL. ET HIST. − [1
reattest.
xies.,
Raschi]
1. ca 1100 « pousser » (
Roland, éd. J. Bédier, 2590) − 1611,
Cotgr.; 1155 « frapper » (
Wace,
Brut, 14300 dans
Keller, p. 348), seulement en a. fr.; « pousser, frapper » sont demeurés dans certains dial. : wallon (
Haust), pic. (
Corblet, Hécart), du Centre (
Jaub.), ang. (
Verr.-On.), norm. (
Moisy); divers emplois et acceptions techn.
a) xies. judéo-fr.
boter « (du vin) tourner au gras » (
Gloses de Raschi, d'apr.
Levy Trésor); 1268-71
vin bouté (
E. Boileau,
Métiers, 29 dans T.-L.); à nouv. dep.
Ac. 1798;
b) ca 1230 vén. « pousser (les chiens) » (
G. Le Clerc,
Fergus, 4, 8 dans T.-L.);
c) 1387 archit.
arc boutent (Arch. Aube, G 345, reg. 3 dans
Gdf.);
d) apr. 1207 mar. « (en parlant du vent) pousser (un bateau) » (
Villeh-Ardouin, éd. E. Faral, 242);
e) 1530 « germer » (
Palsgr., p. 672);
f) 1723
bouter (les cuirs) (
Savary des Bruslons,
Dict. universel de comm.);
2. 1144 « placer, mettre (de manière violente), ficher » (
Charroi de Nîmes, 1260 dans T.-L.); 1309 « mettre »
bouter le feu (
Joinville,
Histoire de Saint-Louis, éd. N. de Wailly, § 164, p. 69), terme vieilli d'apr.
Fur. 1690.
De l'a. b. frq. *
bōtan « pousser, frapper » (
FEW t. 15, 1, p. 210;
Bl.-W.5;
Gam. Rom.2t. 1, p. 364, 377) que l'on peut déduire du m. b. all.
bōten (
Lasch-Borchl.), vieil angl.
beatan (
NED, s.v. beat) a. h. all.
bozzan (
Graff t. 3, col. 232), a. nord.
bauta (
De Vries Anord.). − L'esp. (
ca 1250,
Cor.), le port.
botar (
xives.,
Mach.) sont empr. au fr.; l'aire esp. située en bordure de l'Océan (Asturies, Galice, Pays basque,
Cor.) indique que le mot n'est pas autochtone et exclut l'étymon got. *
bautan (
Gam.,
loc. cit., pp. 334-335) qui postulerait d'ailleurs un port. *
boutar; le cat.
botar (1374,
Alc.-Moll) est prob. empr. à l'a. prov.
botar (Hubschmid dans
Z. rom. Philol., t. 78, p. 111). − L'hyp. de
EWFS2qui sépare
bouter « mettre » et
bouter « bourgeonner », ce dernier étant une réfection de
bouton « bourgeon » (< frq. *
butto «
id. ») ne se justifie pas étant donné le lien sém. évident entre « pousser, exercer une pression » et « bourgeonner » (
cf. pousser). − L'étymon celto-roman *
bottare « frapper » (H.-E. Keller et H. Wagner v. bbg.) fondé sur la relation entre l'a. irl.
fo-botha « effrayé » (sens issu de celui de « battre, frapper pour écarter [du bétail, des oiseaux] ») et l'a. sax.
undar-badon « effrayer », d'où peut se déduire un verbe gaul. *
botā- « frapper », fait difficulté par manque d'argument permettant de relier ces formes, et d'exemples pour justifier un verbe gaul. *
botā-; de plus la très anc. et solide implantation en pays germ. de la famille germ. *
baut-(> a. b. frq., *
botan), v. Hubschmid,
loc. cit., p. 114, empêche de voir dans ses représentants, tous explicables par le germ., des empr. au romain; enfin cette hyp. supposerait le caractère autochtone des lang. hisp., ce qui a déjà été écarté.