BORD, subst. masc.
ÉTYMOL. ET HIST. − A.− 1. Ca 1121 mar. « côté d'un navire »
bord de la nef (
Saint Brendan, éd. Suchier dans
Rom. Studies, t. 1, p. 578, 1011); av. 1307
id. bort a bort (
G. Guiart,
Royaux Lignages, II, 9753 dans T.-L.);
2. p. ext. 1644 (
Corneille,
Mort de Pompée, II, 2 dans
Littré : Achillas à son
bord joint son esquif funeste);
3. xviies. fig. « parti » (M
mede Sévigné, 569,
ibid.).
B.− 1. 1160 « contour d'une surface » (
B. de Ste Maure,
Troie, 23454 dans T.-L.);
2. 1174-77 « ce qui borde un puits, une fosse » (
Renart, éd. M. Roques, branche 2, 3683); d'où fig. 1670 (
Racine,
Bérénice, IV, 4 dans
Littré : Vois-je l'État penchant au
bord du précipice?);
3. av. 1307 « bande de terrain le long d'un cours d'eau » (
G. Guiart,
op. cit., II, 4602 dans T.-L.);
4. spéc. 1596 « étoffe, ruban dont on garnit le tour d'un vêtement » (
Hulsius,
Dict. françois-alemand); d'où 1680
bord d'un chapeau (
Rich.).
De l'a. b. frq. *
bord « bord d'un vaisseau » (
Gam. Rom.2t. 1, p. 346;
FEW t. 15, 1, p. 180;
Bl.-W.5;
Dauzat 1968;
EWFS2), que l'on peut déduire de l'a. nord.
bord « bord, arête; bord de navire » auquel
De Vries Anord. s.v. rattache l'a. sax. et le vieil angl.
bord, le néerl. mod.
boord, l'a. h. all.
bort, de même sens. L'empr. à l'a. b. frq. s'est fait tout à fait indépendamment de celui de l'a. fr.
bort « planche » à l'a. b. frq. *
bord « planche » (v.
borde). Le rapport entre les 2 mots germ. est obsc.,
cf. les opinions divergentes de
Kluge20,
s.v. Bord, de Sperber dans
Wörter und Sachen, t. 6, pp. 44-46 et de
Falk-Torp, p. 94 (
cf. IEW t. 1, p. 138 qui semble enclin à rattacher les 2 prototypes à l'i.-e. *
bhrdho- « planche » [*
bheredh- « couper »]).
L'hyp. d'un double empr. : A terme de mar. emprunté au frq.; B emprunté au germ. (
FEW t. 1, p. 438,
s.v. germ.
bord) fait difficulté, étant donné qu'aux sens A et B les corresp. rom. sont récents et empruntés au fr. : esp.
borde dep. Nebrija 1493-5 (> cat.,
Cor.); ital.
bordo mar.
xives. terme gén. 1590
(DEI), port.
bordo xives. (
Mach. t. 1); pour la même raison, l'empr. du fr.
bord au germ. (aux sens A et B) (
Brüch, p. 54;
REW3, n
o1215) est à écarter. La forme de lat. médiév.
borda (
borda clavia [clavata] dans
CGL t. 5, p. 596, 9, interprétée « bordure » par Kluge dans
Archivum romanicum t. 6, p. 302) doit être considérée comme un hapax demeuré improductif.