AVOIR1, verbe.
ÉTYMOL. ET HIST.
A.− 1. 881-882 « posséder en soi ou sur soi, être doté de » (
Séqu. de Sainte Eulalie, 2 ds
A. Henry,
Chrestomathie de la littér. en a.fr., p. 3 : Buona pulcella fut Eulalia : Bel
auret corps, bellezour anima);
2. a) 881-882 « éprouver, concevoir (dans la conscience) » (
Ibid., 27,
ibid. : Tuit oram que por nos degnet preier Qued
auuisset de nos Christus
mercit Post la mort et a lui nos laist uenir);
b) 950-1000 « éprouver, souffrir de qqc. (dans son corps ou dans son esprit) » (
Passion de Clermont-Ferrand, 462, éd. D'Arco Silvio Avalle, p. 122 : Si alcuns d'els beven veren, non
aura mal, zo sab per ver).
B.− 1. a) 950-1000 « obtenir, devenir possesseur de » (
Ibid., 270, p. 111 : Il no l'auseren deramar, mais chi l'
aura, sort an gitad);
b) ca 1150 « jouir de, posséder sexuellement » (
Pèlerinage de Charlemagne, éd. E. Koschwitz-G. Thurau, 694 ds T.-L. : Ci estat Oliviers, qui dist si grant folie. Qu'en une sole nuit
avreit cent feiz ma fille);
c) 1690 « mettre (qqn) en son pouvoir, attraper » (
Fur. : Je l'
auray, on sous-entend, en mon pouvoir);
2. a) ca 1040 « posséder, être possesseur de » (
Vie de Saint Alexis, 402, éd. G. Paris, p. 14 : O filz, cui ierent mes granz ereditez, Mes larges terres dont jo
aveie assez, Mi grant palais en Rome la citet?); d'où
b) ca 1040 indique une relation, le rapport de possession étant très atténué (
Ibid., 150,
ibid., p. 6 : Quant n'
ai ton fil, ensemble o tei vueil estre).
C.− 1. 950-1000 auxil. servant à former les temps composés de nombreux verbes pour exprimer l'action accomplie (
Passion de Clermont-Ferrand, 137 ds
K. Bartsch,
Chrestomathie de l'a. fr., p. 8 : Et cum asez l'
ont escarnid, dunc li vestent son vestiment, et el medeps si pres sa cruz, avan toz vai a pasïun);
2. ca 1040 auxil. d'aspect avec l'inf. et la prép.
à, sert à exprimer l'action qui doit être accomplie (
Vie de Saint Alexis, 33
e, éd. G. Paris et L. Pannier, 1872, p. 147 : Por amistet ne d'ami ne d'amie, Ne por honors qui lui fussent tramises, N'en volt torner tant com
il ad a vivre).
D.− Impers.
il y a. Ca 1040 sans l'adv. de lieu
y (
Alexis, éd. G. Paris et L. Pannier, 14c ds T.-L. : En icest siecle nen
at parfite amor);
ca 1100 (
Roland, éd. Bédier, 734 : Dient Franceis que grant bataille
i ad).
Du lat.
habere (
FEW, t. 4, pp. 361-365) « tenir, occuper » (
Caton,
Orig., 7 ds
TLL s.v., 2401, 48;
Ennius,
Scaen., 259,
ibid., 35) et « habiter » −
cf. habitare « habiter » − (
Naevius,
Com., 83,
ibid., 14) également « se tenir » −
cf. fr.
habit, habitude − (
Cicéron,
Fam., 9, 9, 1 ds
Ern.-Meillet, p. 287) attesté dep. le
iiies. av. J.-C. au sens A 1 (
Naevius,
Trag., 54 ds
TLL s.v., 2397, 8;
Plaute,
Poen., 87,
ibid., 2410, 4), au sens A 2 a dep. le
iiies. av. J.-C. (
Livius Andronicus,
Carm., frg. 13,
ibid., 2403, 69), au sens A 2 b dep. Caton (
Agr., 157, 9,
ibid., 28); attesté au sens gén. de « posséder », B 2 a dep. Plaute (
Asin., 189,
ibid., 2398, 34), au sens B 2 b dep. Cicéron (
De Orat., 1, 82,
ibid., 2421, 16) et au sens de « avoir en son pouvoir » (
Ovide,
Met., 1, 187,
ibid., 2430, 81) à rapprocher de B 1 c; attesté dès Caton comme auxil. de temps avec le part. passé d'un verbe et un compl. d'obj. (
Caton,
Agr., 3, 1,
ibid., 2452, 73 : aedificare oportet, si agrum consitum habeas),
cf. passé composé équivalent au parfait (
Cicéron,
Font., 29,
ibid., 75 : quae comperta habemus, quae ipsi vidimus); attesté dep. Varron suivi d'un infinitif avec un sens d'obligation (
Varron,
R.R., 1, 1, 2 ds
Ern.-Meillet, p. 287), il prend le sens de « avoir à » C 2 (
Sénèque,
Contr., 1, 1, 19 ds
TLL s.v., 2454, 59 : quid habui facere); attesté en lat. chrét. à la 3
epers. du sing. comme impers. « il y a » D (
Saint-Jérôme,
Commentarius in Ezech., 11, 2 − p. 97b,
ibid., 2461, 80 : in Hebraeo ... non habet hunc numerum.. sed tricenarium).