AUTRE, adj. et pron. indéf. subst.
ÉTYMOL. ET HIST.
I.− Pronom. 1. a) 2
emoitié
xes.
altre « le reste d'un ensemble dont les premiers éléments ont été déjà été considérés » (
Saint Léger, 205 ds
A. Henry,
Chrestomathie de la litt. en a. fr., I, 12 : Cil Laudeberz, qual hora. 1 vid, Torne s'als
altres, si llor dist : Ciest omne tiel mult aima Deux);
b) ca 1100
bien des altres « beaucoup d'autres » (série ouverte opposée au premier élément considéré) (
Roland, éd. Bédier, 108 : La u cist furent,
des altres i out
bien); fin
xves.
d'aultres (
Ph. de Commines ds
E. Gamillscheg,
Historische Französische Syntax, Tübingen, 1957, p. 84 : Je fus d'opinion et
d'aultres aussi);
2. fin
xes. « le deuxième, le ou les suivants (p. oppos. à l'un ou les uns) » (
Passion, 289, éd. Bartsch,
Chrestomathie, pièce 5, 173 : Ensobre toz uns dels ladruns El escarnïe rei Jhesum. Respondet l'
altre 'mal i diz');
3. fin
xves.
les autres « le prochain, autrui » (
Ph. de Commynes,
Mémoires, VI, 11 ds
Dict. hist. Ac. fr. : Il n'est nul homme, de quelque dignité qu'il soit, qui ne souffre, ou en secret ou en public, et par especial ceulx qui font souffrir les
aultres).
II.− Adj. 1. ca 1040 « qui n'est pas le même » (
Alexis, 60, 296, éd. Christopher Storey : En l'
altra voiz lur dist
altra summunse);
2. ca 1040 « différent (avec une valeur qualificative) » en attribut (
Alexis, 32a, éd. G. Paris et L. Pannier ds T.-L. : Ne pot estre
altre);
3. 1160-74 avec une notion de temps, indique un moment passé ou futur (
Wace,
Rou, éd. H. Andresen, I, 637 ds T.-L. : el demain, a l'
altre nuit);
4. ca 1100
d'altre part « d'un autre côté » (
Roland, éd. Bédier, 916 :
D'altre part est Turgis de Turteluse);
5. a) 1220 loc.
autre chose « qqc. de différent, qui est à l'opposé » (
Ogier le Danois, 181, éd. J. Barrois ds T.-L. : Que font a Rome..., Come se tienent li baron chevalier...? Cil dïent : sire,
autre chose que bien);
b) 1539
autre répété pour renforcer une opposition (
Est., p. 50 : C'est
autre chose de mesdire d'aucung, &
autre chose de l'accuser);
6. xiiies. renforce un pron. pers., distingue le groupe représenté par le pron. (souvent en l'opposant au reste) (
Joinville, § 57 ds
Nyrop t. 5, p. 214, § 178, rem. : Messires de Neelle et li bons cuens de Soissons et nous
autre qui estiens entour li);
7. 1370 « distinct mais semblable, deuxième du même type » (
N. Oresme,
Ethiques d'Aristote, 282 ds
Littré : Et nous disons que ami est aussi comme
autre soy meisme);
8. 1690 « différent par une certaine supériorité » (
Fur.).
Du lat.
alter; I emploi pronom., désigne le deuxième élément d'un ensemble de deux éléments (
Plaute,
Poen., 1095 ds
OLD, 108), à rapprocher de I 2
unus ... alter (
Id.,
Poen. 919 ds
TLL s.v., 1742, 48), également attesté pour désigner le reste d'un ensemble dont un élément a déjà été considéré (
Accius,
Trag., 345 ds
TLL s.v., 1737, 64) et au sens de « autrui » (
cf. I 3) (
Q. Ennius,
Sat., 59, V ds
TLL s.v., 1737, 54); II emploi adj., sert à désigner le deuxième élément d'un ensemble de deux éléments (
Naevius,
Com., 18 ds
OLD, 107), sert à désigner un élément distinct d'un ensemble non limité à deux éléments (
Plaute,
Most., 778 ds
TLL s.v., 1733, 33), attesté comme synon. de
alius (
Ovide,
Fast., 3, 625 ds
TLL s.v., 1736, 6), attesté avec une notion de temps (II 3) (
César,
Gall., 3, 30, 6 ds
TLL s.v., 1736, 52), attesté pour désigner un autre élément du même type (II 6) (
Cicéron,
Att., 3, 15, 4 ds
TLL s.v., 1735, 71) et dans l'expr.
altera pars (
cf. autre part, II 4) pour désigner la partie adverse (
Cicéron,
Inv., 1, 83 ds
TLL s.v., 1737, 8) puis plus gén. l'autre côté (
César,
Gall., 7, 48, 1,
ibid., 16).