ATTACHER, verbe.
ÉTYMOL. ET HIST.
A.− Ca 1100 « lier à qqc. » (
Chanson de Roland, éd. Bédier, 3737 : A un'estache l'unt
atachet cil serf).
B.− 1. xiies. « lier, unir à qqn (par un sentiment) » (
Mém. de la Société des Antiquaires de Normandie, 3
esér., t. 7, p. 425 : Mis cuers deust bien
estre o lui
atachiez et si fermez Qu'altres n'en fust ja escoltez);
2. 1280 « appliquer, consacrer (son cœur, son esprit) » (
Roman de la Rose, 5358, éd. Langlois, t. 2, p. 254 : E pour ce veuil que tu le saches Que ton cueur pour riens n'i
ataches); 1574
s'attacher (à qqc.) (
Amyot, trad. de Plutarque,
Œuvres morales, Comment on pourra discerner le flatteur d'avec l'amy ds
Dict. hist. Ac. fr., p. 237a); spéc. 1580-92
attacher ses yeux, sa vue sur qqn, sur qqc. « regarder qqn, qqc. avec attention, avec intérêt » (
Montaigne,
Essais, III, 10,
ibid., p. 225a);
3. 1655 « mettre (une faculté, une qualité) au service de qqn » (
Molière,
L'Etourdi, II, 7 ds
Œuvres, éd. Du Seuil, 1962, p. 57 : je souhaitais fort Qu'un garçon comme toi plein d'esprit et fidèle, A mon service un jour pût
attacher son zèle), plus fréq.
s'attacher (à qqn) (
Ac. 1694); d'où
4. 1822 admin. part. passé subst. « celui qui est attaché à une ambassade » (
Martens,
Manuel diplomatique ds
Dict. hist. Ac. fr., p. 243a : Indépendamment des secrétaires d'ambassade ou de légation, il arrive encore que les gouvernements nomment, pour être attachés aux missions, notamment à celles de première classe... des gentilshommes portant le titre d'
attachés et d'élèves);
5. 1662 « adjoindre par l'esprit, associer, accoler » (
Nicole,
Traité de la foiblesse de l'homme, c. 1,
ibid., p. 227a : Si l'on demande pourquoi le Grand Seigneur a fait, depuis peu, périr cent mille hommes devant Candie, on peut répondre sûrement que ce n'est que pour
attacher encore,
à cette image intérieure qu'il a de lui-même, le titre de conquérant).
Issu, avec chang. de préf. (
a-1*), du verbe a. fr.
estachier « attacher » (début
xiiies.,
Aliscans ds T.-L.), dér. du subst.
estache « pieu » (
ca 1100,
Roland, ibid.), lui-même empr. à l'a. b. frq. *
stakka « pieu »; une forme avec
-kk- est en effet nécessaire pour expliquer les formes fr. La difficulté réside dans le fait que les formes germ. corresp. ne comportent qu'un seul
-k- : a. nord.
-staki (élément), ags.
staca, a. fris.
staka « palis », m. b. all., m. néerl.
stake « perche », formes à rattacher aux verbes : a. nord.
staka « pousser, heurter », m. b. all., m. néerl.
staken « mettre des palissades » (i.-e. *
steg- « pieu, perche »,
IEW t. 1, p. 1014); il faut peut-être admettre que le mot s'est répandu avec une certaine force expressive auquel correspondrait le
-kk- (
FEW t. 17, p. 205b). Parallèlement, l'a. prov.
estacha (
xiies. ds
Rayn.), l'ital.
stacca (
xives. ds
DEI), l'esp.
estaca (1140 ds
Cor.) sont empr. au got. *
stakka.