ACCOSTER, verbe trans.
Étymol. ET HIST.
I.− Pronom. 1. 1155
s'acoster à « se placer à côté de (qqn) » 1155
s'acoster a (
Wace,
Brut, éd. Arnold, 4951 ds
Keller,
Et. vocab. Wace, 358a :
Al rei Wider
s'est acostez, E juste lui fu lez a lez), 1250
s'acoster de (
Atre perilleux, éd. Schirmer, 2336 ds T.-L. : Lors
s'est d'Escanor
acosté). − 1680 (
Rich. t. 1 :
s'acoster v. r. je
m'acoste, je
me suis acosté, je
m'acosterai : s'aprocher de quelqu'un [on n'eût osé parler ensemble, ni
s'être acosté de personne.
Vaugelas,
Quinte-Curce lib. X]);
2. apr. 1160 (rare à l'époque mod.) « se lier à (qqn) » (
Wace,
Rou, éd. Andresen, 3593 ds
Keller,
op. cit., 122a : Tiebalt requist le rei e od lui s'
acosta) emploi qualifié de fam. par les lexicogr. dep.
Ac. 1762; 1556
s'accoster à « aborder » (
Le Caron,
Dialogues, I, 2, 44 r
ods
Hug. : J'avois grand desir ce matin de
m'accoster à vous, pour estre participant de vos devis);
3. 1174
s'acoster à (à l'époque mod. qq. ex. accidentels) « s'appuyer à » (
G. de Pont Ste Maxence,
St Thomas le Martyr, éd. Hippeau, 5437 ds T.-L. : E
a un piler
s'est tenuz et
acostez). − 1934 (
G. Duhamel,
La Chronique des Pasquier. Le Jardin des Bêtes sauvages, p. 42 : Il
s'était accosté distraitement
au chambranle de la porte...).
II.− Trans. A.− 1. 1155 [arch.] « (d'un navire) longer la côte (d'un pays) » mar. (
Wace,
Brut, éd. Arnold, 5116 ds
Keller,
op. cit., 226a : Le lunc de la mer ad siglé E le païs
ad acosté). Qualifié d'arch. ds
Jal2s.v.; 1835 « (d'un navire) se placer le long, à côté de qqc. » mar. (
Ac. s.v. : ...se dit d'un bâtiment, d'une embarcation qui vient se placer le long et à côté d'un objet :
accoster un vaisseau);
2. 1582 « être à côté de qqn, l'accompagner » (
F. Bretin, trad. de Lucien,
Du Cercheur de repue franche, 59 ds
Hug. : Il n'y aura aucun qui temerairement attaque ce riche en debat : quand il appercevra cestuy cy qui l'
accoste), attest. isolée; forme passive : 1556 (vieillie)
être accosté de « (d'une pers.) avoir (qqn) près de soi » (
Saliat,
trad. d'Hérodote, IX, 28,
ibid. : Aprés estoient ordonnez mil Trezeniens,
acostez de deux cens Lepreates, que quatre cens Myceneens et Tirynthiens adossoient), emploi qualifié de vieilli ds
DG; 3. 1606 « aborder qqn pour lui parler » (
Nicot s.v. : ... ainsi l'on en use pour approcher et joindre aucun et Quelquefois pour prendre sa hantise et conversation : comme si tost Que je l'
eus accosté), qualifié de fam., de
Fur. 1701 à
Besch. 1845.
B.− 1. Apr. 1160 (arch.)
acoster (+ obj.)
à « placer (un vaisseau) côte à côte avec (un autre) » mar. (
Wace,
Rou, III, 6506 ds
Keller,
op. cit., 358a : Lor navie tot assenblerent, L'une nef
a l'autre
acosterent), attest. isolée; 1687
accoster une voile « la border à toucher la vergue ou le bord » mar. (
Desroches ds
Jal2:
accoster les huniers ou les perroquets, c'est faire toucher les coins ou points des unes et des autres, à la poulie qui est mise exprès pour cela au haut des vergues), qualifié d'arch. ds
Jal2;
2. 1177 « appuyer (qqc.) » (
Chrét. de Troyes,
Chevalier à la Charrette, éd. M. Roques, 3510 : A ses danz l'espee li oste Et sor un fust gisant l'
acoste Et derriers a un tronc l'apuie);
3. 1575 (rare)
accoster (+ obj. de pers. ou inanimé)
de « placer (qqn ou qqc.) à côté de (qqn ou qqc.) » (
Am. Jamyn,
Poesies, L.V, 257 r
ods
Hug. : Pour me guider en ces lieux inconnus Il m'
accosta d'un homme de Lycie qui me servoit de seure compagnie) encore au
xixes. dans la litt. (Ch.
Nodier voir
sup. A, rem. 2), en mauvaise part, dep.
Ac. 1762.
III.− Intrans. 1155
acoster a terre « atterrir, aborder », terme de mar. (
Wace,
Brut, 4301 ds
Keller,
op. cit., 222a : Les nefs fit
a terre acoster); apr. 1160 «
id. » (
Id.,
Rou, III, 6495,
ibid. : Les nés sunt a un port tornees, Totes sunt ensenble arivees, Totes
sunt ensemble
acostees).
Dér. de a. fr.
coste*; à partir du
xiiies., où
s intérieur devant consonne n'est plus que graph., contaminations fréq. avec
acoter* (
Herzog ds
Z. rom. Philol., XL, 713;
Vidos,
Parole, 179
sq.), de sens apparenté, avec lequel il devient homophone; réintroduction du
s dans prononc. (difficile à dater puisque
st conservé dans graph. jusqu'à
Ac. 1740) s'est prob. faite d'apr. processus suiv. :
a) xvies.
s réintroduit dans prononc. au sens « s'approcher, aborder (qqn) » sous l'influence de l'a. prov.
acostar, réfl. (sens attesté dep. mil.
xiies.,
Rayn., II, 501b) par auteurs tels que Monluc, Montaigne, Aubigné, Brantôme;
b) de là, 2
emoitié
xviiies., prononc.
st étendue au terme mar. : (
cf. Fur. 1690 :
accoster en terme de mar. l'
s ne se prononce point;
Trév. 1740 :
accoter, terme de mar. ... du lat.
costa).
− Hyp. fr. mod.
accoster xvies. « aborder (qqn) » (puis
xviies. terme de mar.) empr. à l'ital.
accostare, de même orig. « approcher de, aborder (qqn) » dep.
xiiies., terme de mar. dep.
xives. ds
Tomm.-Bell 1929. et
Batt. t. 1 1961 (
Vidos,
Parole, 179
sq.;
Wind 1928, p. 150;
Sar. 1920, p. 55;
Nypop, I, 62;
Sain. Lang. Rab., 137;
Kohlm 1901, p. 27;
REW3;
DG; DEI; Dauzat 1968), est improbable, ces 2 sens étant plus anciennement attestés en a. fr., la transformation étant purement phonét. et plus prob. due à auteurs étroitement en contact avec lang. d'oc.