ACADÉMIE, subst. fém.
Étymol. ET HIST. − Corresp. rom. : esp.
academia; port.
académia; cat.
acadèmia; ital.
accademia; roum.
academie.
I.− a) 1508-1517 « lieu où se tenait l'école de Platon » (
Fossetier,
Chron. Marg., ms. Brux. VIII, II, f
o25a ds
Gdf. Compl. : l'autel de Venus situé en
achademie), 1532 p. anal. (mais non encore spécialisé au sens II) (
Rabelais,
Pantagruel, ch.
vi, éd. Verdun L. Saulnier, p. 32 : « Mon amy, dont viens-tu à ceste heure? » L'escholier luy respondit : « De l'alme, inclyte et célèbre
académie que l'on vocite Lutèce. − Qu'est-ce à dire? dist Pantagruel à ung de ses gens. − C'est [respondit-il] de Paris ... »), attest. isolée;
b) 1694 « les disciples de Platon » (
Ac. s.v. : Il se prend aussi pour la secte même de ces Philosophes. L'
Académie était d'opinion...).
II.− 1. [Idée d'« enseignement »;
sup. sém. III et IV]
ca 1535 synon. de
Collège de France, fondé en 1530 (
Marot,
Epitre au Roy, du temps de son exil à Ferrare [publ. en 1544] ds
Œuvres, éd. P. Jannet I, p. 214 : Autant comme eulx, sans cause qui soit bonne, Me veult de mal l'ignorante Sorbonne : Bien ignorante elle est d'estre ennemye De la trilingue et noble
academie Qu'as erigée); 1566 « établissement où l'on enseignait certaines disciplines » (
Discours fantastique de Iustin Tonnellier composez en italien par J.-B. Gelli Academic. florentin et nouvellement traduits en françois par C[
laude]
D[
e]
K[
erquifinen], Lyon, éd. 1575, 119 : on m'a conté ces iours ici de quelques ieunes hommes qui ont encommencé de dresser une escole en langue vulgaire qu'ils appellent
Académie); p. ext. :
a) 1630
académie des jeux « livre où l'on donne les règles de certains jeux (billard, cartes, etc.) » (
Chapelain,
Les gueux ou la vie de Guzman d'Alfarache, III, 247 ds
Brunot t. 6, p. 588); 1666 « maison de jeux, tripot » (
Ordonnance ds
Trév.) 1752
s.v. Académie : Voulons que les Ordonnances de Police pour chasser ceux chez lesquels se prend et consomme le tabac, qui tiennent
Académie, brélans, jeux de hasard et autres lieux défendus, soient exécutées;
b) 1671 « lieu où la noblesse apprenait l'équitation » (
Sév., 12 août ds
Dub.-Lag. 1960 : [M. de Locmaria] a soixante mille livres de rente, et sort de l'
académie) vieilli dans lexicogr.
xixes.; 1694 « écoliers qui fréquentent une académie d'équitation » (
Ac. s.v. : ... Ce jour-là un tel Escuyer fit monter toute son
Académie à cheval);
c) p. méton., à partir de « école de dessin », 1653 « exercice d'école dessiné d'apr. un modèle » terme de B.-A. (
Hilaire Pader,
La Peinture parlante, p. 17 : Prens garde toutes-fois... que par l'anatomie Tels corps ne soient trop secs en ton
académie. Note : Un
académie. C'est une figure desseignée conformément au modèle qui est un homme que les peintres payent pour les servir en le despouillant tout nud et qu'ils mettent en acte c'est-à-dire en posture, d'où ledit Modelle ne doit bouger sans en advertir les escoliers qui desseignent dans l'Académie d'où leurs figures tirent leur nom) d'où p. ext. 1865 « le modèle lui-même » (E. et
J. de Goncourt,
Journal, 22 mai 1865); 1849 « corps » « anatomie » terme fam. (
G. Flaubert);
d) 1808 terme dr. admin. « chaque circonscription des universités de France » (Décret du 17 mars 1808 ds
DG);
2. [« Société savante »;
sup. sém. II] 1570 « société constituée, formée de gens de lettres, de savants, d'artistes » date de fondation, à Paris, de l'
Académie de poésie et de musique par Antoine Baïf et Thibaud de Courville (
cf. Dict. des Lettres françaises du XVIes., Paris, 1951,
s.v.), 1573 «
id. » (
A. de Baïf,
Euvres en rime, éd. Marty-Laveaux, II, 229, Poème dédié à Charles IX : Je di premier comment En vostre
académie on euvre incessamment Pour, des Grecs & Latins imitant l'excellence, De vers & chants reglez decorer vostre France Avecque vostre nom); 1635
Académie française, fondée par Richelieu; 1835
Académie, emploi abs. :
Ac. s.v. : (...) Il se dit quelquefois absolument de l'Académie française, Un discours de réception à l'
Académie.
I empr. au lat.
Acadēmīa (< gr. Α
κ
α
δ
η
́
μ
ε
ι
α) « jardin consacré au héros Α
κ
α
́
δ
η
μ
ο
ς aux alentours d'Athènes, où enseignait Platon » (dep.
Cicéron,
De oratore, 11 ds
TLL, 246, 1) [datation « 1508,
Baïf » (
Dauzat 1964) procède d'une confusion entre 1508, date des
Chron. Marg., et la date de fondation de la première Académie par Antoine
De Baïf 1570, voir
sup.; 1508 ne peut être la date d'œuvres litt. de Lazare
Baïf (1496-1547) ni d'Antoine
de Baïf (1532-1589)]. II empr. à l'ital.
a(c)cademia (lui-même empr. au lat.
acadēmīa, voir
sup.); au sens de « lieu où enseignait Platon », dep. 1262-1347, Bartolomeo da S. Concordio ds
Batt. t. 1 1961; au sens II 1 seulement à partir du
xviies. (Raim. Montecuccoli ds
Batt. ibid.) mais localisation de l'attest. de 1540 (Ferrare) et modèle ital. (Giamb. Gelli) de celle de 1566 dénotent empr. à l'ital. Emploi comme terme de B.-A., malgré l'afflux de termes de peint. ital. au
xviies. (
cf. Brunot t. 6, pp. 696-698) prob. non redevable à l'ital. où cet emploi n'est pas ant. à
A.-M. Salvini [entre 1662 et 1729],
L'idea della perfezione della pittura di Rolando Freart tradotta ds
Tomm.-Bell. 1929 [trad. de
R. Fréart de Chantelou,
L'Idée de la perfection de la peinture, 1662]; au sens II 2 dep. 1455 (Donato
Acciaioli ds
Migl.-Duro, 1965, 295),
cf. xvies.,
Matteo Bandello,
Opere I, 155 ds
Batt. ibid. : Ma se, come si spera, l'instituzione de l'academia succede, averà la lingua latina, la greca e la volgare il suo candore, e l'arti liberali si ridurrano a la loro antica maiestà. Noter floraison et influence des Académies ital. aux
xve-
xvies. : 1427 Accad. Valdarnina; 1540 Accad. Fiorentina; 1459 Accad. Platonica;
ca 1464 Accad. Romana o Pomponiana; 1582 Accad. della Crusca.