ABSURDITÉ, subst. fém.
Étymol. − Corresp. rom. : prov.
absurditat; ital.
assurdità; esp.
absurdidad; cat.
absurditat; port.
absurdidade.
1371-75 « acte ou affirmation contraire au sens commun » (dans trad. cont. relig.) (
Raoul de Presles,
Cité de Dieu, VIII, 20 [1531] ds
Quem. : ceste erreur ou
absurdité et indignité si grant); «
id. » (
ibid., XIV, 22 : contredire que masle et femelle n'ont pas esté ainsi creez en corps de divers sexes à ce qu'ilz creussent et fussent multipliez... c'est grant
absurdité); 1541 «
id. » (
Calvin,
Institution Chrétienne, éd. Pannier, chap. I, p. 65 : ces blasphemateurs... ne se soucyent pas de quelles
absurditez ils s'envelopent).
Empr. au lat. chrét.
absurditas dep. St Augustin (au sens propre de « dissonance », terme de musicologie et de poétique,
De Musica, 4, 16, 33) au sens fig. :
cf. De civ. Dei, VIII, 21, éd. Dombart et Kalb, Coll.
Corpus christ. Lat., XLVII : Sed nimirum tantae hujus absurditatis et indignitatis est magna necessitas; et
ibid., XIV, 21 : apparet... masculum et feminam ita creatos ut prolem generando crescerent et multiplicarentur, magnae absurditatis est reluctari.
HIST. − Comme pour l'adj.
absurde (
cf. absurde, hist.) c'est le sens fig. du lat. « ce qui est contraire au sens commun » qui devient sens premier en fr. (
cf. étymol.). Le sens propre « dissonance (physique) » n'y est passé que dans 2 loc. du vocab. de la mus. (
cf. styl.). Au fig.,
absurdité se présente sous 2 aspects : subst. concrétisé et subst. abstr.; contrairement à la logique de la lang., qui en soi conçoit d'abord la qualité abstr. puis la concrétise, c'est le subst. concrétisé qui est historiquement le premier attesté en discours.
I.− Le subst. concrétisé. − A.− Au
xvies. il est concurrencé par l'adj. substantivé avec l'article indéfini,
un absurde (
cf. absurde, hist. II A) : De toutes les
absurdités, la plus absurde aux épicuriens est de désavouer la force et l'effet des sens.
Montaigne, II, 12 (Littré).
B.− Après le
xvies. (
cf. absurde, hist. II A)
absurdité s'impose seul, et d'abord au plur. semble-t-il, et se maintient jusqu'au
xxes. (
cf. sém.) :
1. xviies. : Il s'ensuivrait de grandes
absurdités d'une telle supposition.
Fur. 1690. Les impies sont tombés dans toutes les
absurdités. Bossuet,
Hist. II, 13 (Littré).
2. xviiies. : Que ceux qui nous exhortent à faire ce qu'ils disent, et non ce qu'ils font, disent une grande
absurdité. Rousseau,
Julie, [1761], t. II, p. 84 (Rob.).
II.− Le subst. abstrait. − A.− En emploi absolu, il apparaît au tout début du
xviiies. : Ce qui est le comble de l'
absurdité. Fénelon,
Existence de Dieu, [1712], I, 3
(DG). B.− Suivi d'un complément, il est un peu postérieur :
1. Se rapportant à un inanimé désignant une activité hum. : L'
absurdité d'un discours.
Ac. 1762.
2. P. ext., se rapportant à l'animé hum. : On dit par extension, en parlant des personnes, Cet homme est d'une
absurdité rare.
Ac. 1798.
− Rem. cf. dès 1757 :
L'absurdité de ces gens-là.
Voltaire,
Lett. 7/8/1757
(DG).