ABSINTHE, subst. fém.
Étymol. Corresp. rom. : n. prov.
absint, absinte; ital.
absintio; cat.
absinti.
1546 «
Artemisia Absinthium L., plante aromatique amère » (
Rabelais,
Tiers-Livre, éd. A. Lefranc, p. 350 ds
Quem. : Les aultres [plantes] ont leur n. par antiphrase et contrariété : comme
absynthe, au contraire de pynthe, car il est fascheux a boyre).
1. Forme
absince, début
xiiies. « boisson à base d'absinthe » (
Sermons de St Bernard, éd. Forster,
Rom. Forsch. II, 47, 28 ds T.-L. : Enyvreiz est d'
absince);
2. forme
assenz, xives. (plante) (Moamin fol. 52 ds
Tilander,
Glan. Lexic., 25 : Et s'il ne gerist por ce, prenez dimie drame d'
assenz et metez la en trois morseaux de char, et donez li à mangier);
3. forme
assince, fin
xves. (plante) (
C. Tardif,
L'art de fauconnerie et des chiens de chasse, cité par H. Werth ds
Z. rom. Philol. XIII, p. 21 : contre vers ou ventre du chien, le remède est : donne luy semence de
assince, pouldre de vers, tout meslé avec beurre ou miel).
Empr. au lat.
absinthium « plante aromatique amère », attesté dep.
Varron,
Res rusticae, 1, 57, 2 ds
TLL s.v. apsinthium, 321, 40, fréq. ds
Pline,
Hist. nat., ibid., passim (forme
apsinthium dep.
Plaute,
Trinummus, ibid., 69, calque du gr. α
̓
ψ
ι
́
ν
θ
ι
ο
ν; graph. lat.
ab- anal. de
absum, Ern.-Meillet),
Roland,
Flore pop., VII, 66. 1 forme demi-sav. Lat. vulg.
ausentium vies., Dioscorides latinus (
TLL ibid., 46-47). « Boisson faite d'absinthe » dep.
Pline,
Hist. nat., 22, 146,
ibid. 322, 20, sens fréq. en lat médiév. (
Mittellat. W. s.v., 49, 13
sq.).
Cf. a. prov.
absens (
Rayn.). 2 et 3, formes pop.,
cf. a. prov.
aissens, ausen, ausens (
Levy,
s.v. aisens); formes rom.
REW3. Synon. b. lat.
aloxinum « plante aromatique amère » (
cf. Corp. Gloss. Götz, III, 616, 36 ds
TLL s.v. : absentius [
absinthius] est
aloxinus, dep.
vies. Anthimus,
ibid., d'où mot pop. a. fr.
aluisne évincé par
absinthe; (aire gallo-rom., voir
REW3s.v. alŏxĭnum).
HIST. − L'ordre d'importance des 3 sens aux
xixeet
xxes. ne correspond pas à leur ordre d'apparition. Pas de disparition de sens ou d'emploi av. 1789 :
A.− Sém. I (« plante aromatique amère »). − Ce sens qui a survécu jusqu'à nos jours appartient d'une part au domaine de la bot., d'autre part à celui de la pharmacopée (potion ou autre remède extrait de la plante) (
cf. étymol. 1, 2 et 3).
− xvies. : De plant enraciné et de semence s'edifie l'aluine ou
absinthe appelé fort.
O. de Serres, 565 (Littré).
Absinthe romaine ou pontique, marin et vulgaire, est dict aussi aluine pour sa grande amertume, comme celle de l'aloes; aussi fort, c.-à-d. fort amer; sa graine tue les vers.
Id., 615 (Littré).
− Rem. Absinthe pris dans ce sens ne vit guère que dans les lang. spéc. de la bot. et de la pharmacopée, concurremment avec le n. sc.
Artemisia absinthium. D'où la rareté des attest. dans la docum.
B.− Sém. IB (« amertume »). − Métaph. à partir du sens I
(absinthe, plante médicinale).
− xvies. : La longueur d'une absence est bien pleine d'
absinthe. Bertaut,
Complainte sur une absence (Hug.).
− xviies. : Quand tu la vois si dignement adoucir toutes nos
absinthes. Malh., III 3 (Littré). Cet emploi n'est plus vivant à partir du
xviiies. (l'absinthe boisson remplace l'absinthe médicament.
Cf. inf. C) à l'exception du style archaïsant, en partic. dans l'expr. stéréotypée :
le fiel et l'absinthe. C.− Sém. II (« boisson alcoolique »). − 1
reattest.
Ac. 1835. C'est pendant la seconde moitié du
xixes. et au début du
xxequ'en raison de la vogue des boissons alcooliques à base d'absinthe ce sens est le plus vivant (
cf. nombreuses attest. dans sém. et nombreux dér. fam. ou arg.). La loi du 16 mars 1915 qui interdit la fabrication, la détention et la vente de ces boissons est le principal motif sociol. de la quasi disparition du terme dans ce sens.
Cf. styl.