ABORD, subst. masc.
Étymol. − 1. a) 1440-1475 « fait d'avoir accès à une personne » (
Chastellain,
Chron., IV, 379, éd. Kervyn ds
R. Hist. litt. Fr. I, 180 : Tandis doncques que ces anglois estoient devers le duc besognant pour leur premier
abord); 1611 « accueil fait par la personne abordée » (
Cotgr. s.v. abord : De doux
abord. Gentle, courteous, affable : of open accesse, easie to be spoken with, or come into);
b) 1636 « attaque » (
Corneille,
Cid. 1087 ds
Dub.-Lag. 1960 : De ces vieux ennemis va soutenir l'
abord), d'où 1575
de premier abord « dès le commencement » (
Marg. de France,
Mém. ds
D G : De premier abord, l'effroy l'ayant pris); 1607
d'abord «
id. » (
Hulsius,
Dict. fr.-all.);
2. 1616-1620 « action d'arriver en un lieu » (
D'Aubigné,
Hist., II, 183 ds
Littré : Il vint à la cour en poste, et deux heures après son
abord, Pellicar, ...);
3. a) ca 1530 « lieu (où l'on est arrivé) » (
C. Bucher,
Poésies, éd. Denais, 87 ds
R. Hist. litt. Fr., I, 180 : Que cerches-tu ores en ces
abords?); 1556 « lieu où l'on aborde, port » terme mar. (
Saliat,
Trad. d'Hérodote, éd. chez E. Groulleau, III, 5 ds
Hug. : Plusieurs ports et
abords de mer ou se fait grand trafic);
b) xvies.
abords « rive le long d'un cours d'eau » terme mar. (
Cout. de L'Angle, Nouv. Cout. gén. I, 312 ds
Lacurne, t. 1, 1875 : Est ordonné... a un chascun ayans
abords contre la grande rivière... qu'ils ayent à les entretenir).
Dév. de
aborder*
: 1 a de
aborder 3; 1 b de
aborder 1; 2 et 3 a de
aborder 2; 3 b dér. de
bord* 2 b.
HISTORIQUE
I.− Hist. des sens. − A.− « fait d'avoir accès auprès d'une pers. », 1
reattest. 1440-75 (
cf. étymol.) et attesté surtout dans les accept. suiv. :
1. « possibilité d'avoir accès auprès d'une pers. », apparaît ds
Ac. 1718 et se trouve durant toute notre période;
2. « accueil, aspect de la pers. abordée », 1
reattest. 1611 (
cf. étymol.) et constamment attesté.
B.− « lieu où l'on est arrivé », attesté en 1530 (
cf. étymol.), sans attest. post., sinon dans les accept. suiv. :
1. « lieu où l'on aborde, port », attesté en 1556 (
cf. étymol.) et encore en 1610 : Le Roy... le comble [l'hermitage d'Honneur] de toutes les singularitez dont il se peut aviser, l'ayant fait un
abord de toutes sortes de gens d'honneur.
Beroalde de Verville,
Voyage des Princes fortunez, 322 (Hug.). Pas d'attest. jusqu'en 1908, où cette accept. reparaît dans un emploi plus restreint (
cf. ex. 6);
2. « rive le long d'un cours d'eau », attesté au
xvies. Qq. rares attest. jusqu'au début du
xixes. (peut-être ds
ex. 2).
C.− « arrivée en un lieu », 1
reattest. 1616-1620 (
cf. étymol.). En ce sens gén.,
abord aurait pu prendre la place d'un autre mot,
arrivée, de même orig. mar., mais il est condamné comme vieilli au
xviiies.
(cf. Brunot t. 6, pp. 1335-1336;
cf. également
Besch. 1845,
s.v.), est relayé par certaines accept. partic. :
1. fig. « action d'aborder une entreprise », noté ds
Ac. Compl. 1842 (le commencement d'une action), et qui possède qq. attest. au
xxes., mais qui se trouve déjà dans les loc. apparues dès la fin du
xvies. :
de premier abord, 1575;
d'abord, 1607 (
cf. étymol.);
2. à noter, de même que pour les pers., la nuance entre le fait et la possibilité : « possibilité d'accéder à un lieu, spéc. par mer », 1
reattest. ds
Fur. 1690 et attesté durant toute la période;
3. p. ext. « arrivée massive, affluence », 1
reattest. 1687 : Les autres n'étaient que des hôteliers que le grand
abord des étrangers enrichissait.
Fontenelle,
Orac., I, 14 (Littré). Attesté dans les dict. jusqu'à la 1
remoitié du
xixes. Noté vieilli ds
Ac. 1835 et
Besch. 1845;
4. « présence », de 1701 (
Fur.) à 1832 (
cf. ex. 15);
5. « lieu par où l'on accède », ds
Fur. 1701; attest. constantes et avec plus d'ext. dep.
Besch. 1845 « environs »;
6. « action d'aborder à une côte », apparaît ds
Ac. 1798 et constamment attesté.
D.− « attaque par terre ou par mer ». Apparaît en 1636 (
cf. étymol.). Bien attesté jusqu'à la fin du
xviiies. (
cf. ex. 23), encore attesté en 1837. Pas d'attest. post.
II.− Vitalité des sens. − A.− Sens et accept. disparus :
1. av. 1789 : néant;
2. apr. 1789 : le sens B dans sa totalité; le sens C dans ses accept. 3 et 4; le sens D (sous réserve de certains emplois de loc.).
B.− La vitalité des sens et accept. restants n'est rien en compar. de celle des loc. (notamment
d'abord) où se manifeste surtout l'accept. C 1 (
cf. sém.).