| ABLATIF, subst. masc. Étymol. − Corresp. rom. : a. prov., n. prov., cat. ablatiu; esp., port., ital. ablativo; roum. ablativ.
I.− Subst. 2emoitié xives. « cas de la déclinaison indiquant qu'un subst. sert de point de départ ou d'instrument à l'action » terme gramm. (Jean Lefèvre, La Vieille, Cocheris, 109 ds Rev hist. litt., I, 179 : Pourquoi il aime l'ablatif Puisqu'il n'a cure du datif).
II.− Adj. Fin xives. [sans indication de sens] (Aalma, 29 ds Roques, Rec. lex., II, p. 6 : ablatiuus, tiua, tiuum : ablatif). Mil. xves., terme gramm. empl. par jeu de mot (Ch. d'Orléans, Rondeaux, éd. P. Champion, XIX, 9 : Quant rencontré a un accusatif Qui sa robe lui a fait ablative ... [le galant a perdu sa robe en sautant par la fenêtre]).
Sens I empr. au lat. ablativus subst., terme de gramm. dep. Quintilien, Inst. orat. 1, 4, 26 ds TLL s.v., 104, 23; cf. ives. Ps. Sergius, Gram. Keil IV, 535, 1 ibid., 14 : ablativus dictus, quod per eum auferre nos ab aliquo aliquid significemus ut « ab hoc magistro »; fréq. en lat. médiév. (Mittellat. W. s.v.); sens II au lat. ablativus adj., terme de gramm. « qui régit l'ablatif » : Ves. Pompei comment. artis Donati, Keil V, 274, 33 ds TLL s.v., 104, 79.
HIST. − La réflexion des théoriciens de la gramm. fr. aux xvie, xviies., xviiies. sur la nature de l'ablatif a très souvent pris les formes d'une mise en cause de la dénomination de ce cas gramm. : a) Ils récusent l'appellation d'ablatif parce qu'elle est sém., qu'elle ne correspond qu'à une partie des emplois de l'ablatif. J.-C. Chevalier (cf. bbg. op. cit. pp. 346-349) écrit : ,,Sanctius rappelle que Scaliger a protesté contre les dénominations accordées aux cas et proposé qu'ils fussent purement et simplement numérotés; on se rappelle que Scaliger comme Ramus voyaient dans cette procédure un moyen (...) de se débarrasser d'une gênante captatio : la référence à « l'appel » du cas vocatif, au « don » du cas datif, ou surtout à « l'accusation » du cas accusatif a entraîné toutes sortes de fortes discussions ...`` D'où la dénomination fréquente de sixième cas pour l'ablatif ds les dict. des xviieet xviiies. L'article ablatif de C.-C. du Marsais ds Encyclop. repris ds le Dictionnaire de grammaire et de littérature (1789) se situe dans cette tradition : ,,Ablatif (...) C'est le sixième cas des noms latins. Ce cas est ainsi appelé du latin ablatus, ôté, parce qu'on donne la terminaison de ce cas aux noms latins qui sont le complément des prépositions a, absque, de, ex, sine, qui marquent extraction ou transport d'une chose à une autre (...) : ce qui ne veut pas dire qu'on ne doive mettre un nom à l'ablatif que lorsqu'il y a extraction ou transport; car on met aussi à l'ablatif un nom qui détermine d'autres prépositions, comme clam, pro, prae, etc. Mais il faut observer que ces sortes de dénominations se tirent de l'usage le plus fréquent, ou même de quelqu'un des usages. C'est ainsi que Priscien, frappé de l'un des usages de ces cas, l'appelle cas comparatif; (...) Varron l'appelle cas latin, parce qu'il est propre à la langue latine.`` N. Beauzée, dans une note ajoutée à cet art., écrit : ,,Quant à l'origine du nom Ablatif, telle que l'assigne ici M. du Marsais avec les autres grammairiens, il est clair qu'on auroit pu, avec autant de fondement, donner à ce cas un tout autre nom (...). En effet, s'il se joint à absque, sine, il se joint aussi à cum, qui a un sens contraire; s'il détermine de, ex, il détermine aussi pro. Est-il croyable qu'on ait donné à ce cas un nom qui ne caractérise que l'un de ses usages, et qu'on n'ait pas eu l'intention ou l'adresse de le désigner d'une manière qui lui convînt partout?`` N. Beauzée, Gramm. (1789). b) Certains grammairiens proposent d'appeler l'ablatif cas de la préposition. ,,Sanctius l'appelle cas de la préposition; l'appeler ablatif est une dénomination d'un cas très particulier, car l'ablatio n'est qu'une des possibilités de l'ablatif.`` (J.-C. Chevalier, op. cit., p. 349) : ,,... car, comme les cinq premiers cas n'ont pas pu suffire pour marquer tous les rapports que les choses ont les unes aux autres, on a eu recours, dans toutes les langues, à une autre invention, qui a été d'inventer de petits mots pour être mis avant les noms, ce qui les a fait appeler prépositions (...). Et en latin, quoiqu'il y en ait qu'on joigne à l'accusatif, amor erga Deum, amour envers Dieu, on a néanmoins inventé un cas particulier, qui est l'ablatif, pour y en joindre plusieurs autres, dont il est inséparable dans le sens, au lieu que l'accusatif en est souvent séparé, comme quand il est après un verbe actif ou devant un infinitif.`` (O.-C. Arnauld, II, VI, p. 27 ds J.-C. Chevalier, op. cit., pp. 522-523). ,,Sanctius, Vossius, la méthode de Port-Royal, et les grammairiens les plus habiles, soutiennent que l'ablatif est le cas de quelqu'une des propositions qui se construisent avec l'ablatif; en sorte qu'il n'y a jamais d'ablatif qui ne suppose quelqu'une de ces prépositions exprimées ou sous-entendues.`` (C.-C. Du Marsais, Gramm. 1789).
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