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ABDIQUER, verbe trans.
ÉTYMOL. − Corresp. rom. : prov. abdica; ital. abdicare; esp., port, cat. abdicar. 1. Ca 1375, « renoncer au pouvoir », réfl., terme jur. dans une trad. (Symon de Hesdin, Trad. de Val. Max. fol. 99b [impr. abdita] ds Gdf. Compl. : Et lors se abdica, c'est à dire se desmit de sa dictature); 2. 1402, 20 avril trans. « renoncer (à qqc. que l'on possède) » terme jur. (Ordon., VIII, 496, ibid. : Nous ne devons aucune chose detraire, abdiquer ou aliener, qui soit du domaine de nostre couronne); 3. 1539 « renier, déshériter (un fils) » (Thérence en françoys, fol. 222c, ibid. : ... Pour me abdiquer et priver Si soubdain de ton heritage?). Empr. au lat. abdicare (comme dīcere, abdicere, dīcare, terme techn. à son orig.) attesté comme terme jur. au sens de « se refuser à reconnaître, renier (un fils) » dep. Pacuvius (Tragoed. frag., 343, TLL s.v., 53, 83 : te ... natum abdico; cf. 1119-90 Epistol. a Wibaldo coll., 312, Mittellat. W. s.v., 16, 72 : a. filios), d'où 3. Emploi fréq. en lat. class. : se abdicare + ablatif « renoncer à (une charge) »; emploi réfl. : se abdicare « renoncer au pouvoir, à une charge » (Papinianus, Digest, 1, 18, 20, TLL s.v., 55, 3 : abdicando se, non amittit imperium), d'où 1. 2 est empr. au lat. jur. médiév. (cf. xiie-xiiies., Chart. scrinior. Coloniens., I, p. 19, 17, Mittellat. W. s.v., 17, 40 : heredes suam partem manu et calamo abdicarunt). HISTORIQUE I.− Sens disparu av. 1789. − « Renier, deshériter » (un fils), cf. étymol. 3 : Quel pechié ou quel vitupere Peut il contre moy approuver Pour me abdiquer et priver Si soubdain de son heritage? Thérence en francoys, f. 222c (Gdf.). On dit en Droit, abdiquer un fils, pour dire l'abandonner, le chasser de sa maison, ne le reconnaître plus pour fils. C'est l'exhéréder, et le priver de tous les avantages attachés à sa qualité de fils. Est quasi negare filium. Trév., 1771. − Rem. 1. La technicité du sens est prouvée à la fois par son absence ds les dict. de l'Ac. (qui donnent la lang. de ,,l'honnête homme`` en excluant celle du ,,pédant``) et sa présence ds Fur., ds Trév. (tous dict. à vocation encyclop.). 2. P. ext., abdiquer de soy « rejeter, détacher de soi » : Tout ainsi que le vassal ne se peut dispenser de la foy envers son Seigneur féodal, aussi ne peut le Seigneur féodal abdiquer de soy son vassal sans le consentement de luy. E. Pasquier, Plaidoyé pour le duc de Lorraine, I, 1080, s. d. (Hug.). II.− Hist. des sens attestés apr. 1789. − A.− Sém. sens I, « renoncer volontairement ou de force à de hautes fonctions et particulièrement à l'autorité souveraine ». 1. « À l'autorité souveraine » : Et lors se abdique, c'est-à-dire se desmit de sa dictature. Sym. de Hesdin (étymol. 1). Ce sens subsiste jusqu'à nos jours. xviies. : Il y a eu bien des empereurs et des Rois qui ont abdiqué l'Empire, le Royaume. Fur. 1690. xviiies. : Abdiquer la Royauté. Abdiquer la Couronne. Abdiquer le Consulat. 2. « À d'autres fonctions importantes » : par ext. successives de l'accept. précédente. Si les dict. des xviieet xviiies. en font mention, c'est d'abord à propos de l'hist. romaine : cf. Ac. 1718 : ,,Il se dit aussi en parlant des magistratures des Romains`` puis Ac. 1740 : ,,Par ext. il se dit des principaux emplois et des places éminentes. Ce Général d'Ordre a abdiqué``. Cf. aussi : L'Empereur se plaignit et le duc crut devoir abdiquer l'ambassade. Moniteur, II, 1789, 395 (IGLF).Cf. sém. I. − Rem. Historiquement grande variété de constr. : a) Pronom. absolue : s'abdiquer (cf. sup. II A 1, Sym. de Hesdin); b) Pronom. + de : s'abdiquer de qqc. : Fortune ... ne l'abandonna pas, apres ce qu'il se fut abdique de son magistrat tyrannique. G. Budé, Institution du Prince, 1574, éd. J. Foucher, p. 160 (Hug.); c) Trans. directe : abdiquer qqc. (cf. sup. II A 1, Fur.); d) Absolue, abdiquer : Ce prince a abdiqué. Seules les constr. c et d subsistent. − B.− Sém. sens II « renoncer à (une chose) ». Ext. du sens I, 1reattest. 1402 (cf. étymol. 2) dans un cont. jur. : Nous ne devons aucune chose detraire, abdiquer ou aliener, qui soit du domaine de notre couronne. Ordonn., VIII, 496 (Gdf.). La coloration jur. peut se perdre et le mot s'emploie : a) Pour parler de biens moraux : 1694 : Pour peu qu'on ait de goût au rang où je me vois On abdique aisément ce qu'on a de bourgeois. Boursault, Mots à la mode, sc. 6 (Quem.). 1762 : Faut-il abdiquer mon autorité. Rousseau, Émile, 2 (DG). Fin du xviiies. : Si j'étais offensé, écoutant l'indulgence J'abdiquerais pour vous le droit de la vengeance. M.-J. Chénier, Tibère, IV, 3, (Littré). b) Pour parler de biens matériels : Souvent dépouillé de ses États et tantôt les abdiquant puis les reprenant. Saint-Simon, Mém., 1, 492 (DG). Les emplois a et b subsistent (cf. sém.). − Rem. « Renoncer à agir », « se déclarer vaincu » (cf. sém. II b). Cet emploi abondamment attesté à l'époque mod. ne figure pas dans la docum. ant. à 1789.