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VUE, subst. fém.
A. − [Gén. avec un art. déf. ou poss.]
1. Sens par lequel on perçoit la lumière, la forme, la couleur, la position des objets; p. méton., fonction remplie par ce sens, perception qui lui est propre. Organes, sens de la vue; perdre, recouvrer la vue. On ne parvient pas tout d'un coup à juger par la vue de la résistance que le toucher doit éprouver; cet art demande quelques expériences (Laclos, Éduc. femmes, 1803, p. 463).D'après l'importance des lobes du cerveau correspondants, le premier des sens qui explorent à distance, c'est l'odorat pour le singe, et, pour l'homme, la vue (Alain, Propos, 1921, p. 270).
Loc. Voir de sa propre vue. Synon. plus cour. voir de ses propres yeux (v. œil II A).Voici ce que j'ai entendu de mes propres oreilles et vu de ma propre vue (A. France, Pt Pierre, 1918, p. 146).
2. [Dans des empl. faisant réf. aux performances de ce sens, à la qualité des perceptions]
a) [En rapp. avec les capacités moy. ou individuelles de l'œil hum.] Mesure de la vue; baisse, déficience, excellence de la vue; la vue baisse, se raccourcit progressivement; étendre la vue; augmenter la portée de la vue (avec un télescope). Anna (...) lui servait parfois de secrétaire; il avait recours à elle (...) pour ménager sa vue, qui commençait à faiblir (Gide, Si le grain, 1924, p. 398).Selon une statistique évoquée par Adler, 70 pour 100 des peintres souffriraient d'un défaut de la vue (Mounier, Traité caract., 1946, p. 93).
[Avec un adj. ou compl. de nom] Avoir une bonne/mauvaise vue; avoir la vue faible, d'une finesse extrême; vue affaiblie, courte, perçante. Laplace est fameux par sa jolie moitié, et surtout par sa vue de lynx (Marat, Pamphlets, Charlatans mod., 1791, p. 290).J'ignorais, dit-il, que les côtelettes ne figuraient pas sur la carte. Je ne l'ai pas regardée, parce que j'ai la vue fort basse, et que je n'avais pas mon pince-nez sur moi (Michaux, Plume, 1930, p. 140).
Vue longue. V. long I A 2 a.
Lunette de longue(-)vue. Synon. vx de longue-vue.Lunettes de longue vue, qui rapprochent par un bout et éloignent par l'autre (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p. 348).
P. méton., au plur. Ensemble des personnes caractérisées par leur acuité visuelle. Les myopes seuls connaissent le contraste prodigieux qu'il y a entre la vision confuse et la vision nette. Les vues excellentes se doutent à peine du bonheur que donnent aux premiers une lunette (Amiel, Journal, 1866, p. 213).
b) [En rapp. avec un état physique ou psychol. passager] Erreur, hallucination, illusion de la vue; brouiller, éclaircir la vue; vue troublée. Il fallut que la peur troublât sa vue jusqu'à me prêter des moustaches (A. France, Vie fleur, 1922, p. 292).
c) [En rapp. avec des circonstances extérieures] Fatiguer, (s')user, ménager la/sa vue; vue fatiguée, brûlée (par la lumière). Il portait des conserves à verres bleus (...) sous prétexte de préserver sa vue de l'éclatante réverbération de la lumière (Balzac, Illus. perdues, 1843, p. 566).La mer (...) prenait des éclats d'argent ou de fer, douloureux pour la vue (Camus, Peste, 1947, p. 1239).
[Dans l'expr. de sentiments éveillés par des perceptions visuelles] Flatter, réjouir, heurter la vue; être un enchantement pour la vue. Elle avait des bas couleur chair, tellement chatouillants à la vue, qu'anges et saints n'y eussent tenu (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p. 211).Je ne vais pas placer mon monde dans des endroits où l'odorat et la vue courent le risque d'être offensés (Boylesve, Leçon d'amour, 1902, p. 3).
Loc. fig. Donner dans la vue (vieilli); en mettre plein la vue. Éblouir. Les discours du lieutenant-colonel (...) avaient donné dans la vue de ce dernier (Nerval, Filles feu, Angélique, 1854, p. 554).Fouillard (...) haussait les épaules, tout de suite hostile, regardant déjà de travers ce soldat trop propre qui parlait poliment.Un gars aux sous qui veut nous en mettre plein la vue, dit-il à Sulphart (Dorgelès, Croix de bois, 1919, p. 10).En avoir, en recevoir plein la vue. Être ébloui. Le soldat gratuit ça c'était du nouveau... Tellement nouveau que Gœthe, tout Gœthe qu'il était, arrivant à Valmy en reçut plein la vue (Céline, Voyage, 1932, p. 88).
3. [Dans des empl. faisant réf. à l'exercice de ce sens] Synon. regard, yeux.
a) [Relativement au sujet voyant]
α) [Dans des énoncés évoquant le mouvement des yeux] Arrêter la vue sur; détourner la vue de qqc./qqn. Sa vue parcourt la superficie du rectangle, de manière à ne laisser échapper aucune perspective (Lautréam., Chants Maldoror, 1869, p. 341).Le Survenant, sans même lever la vue, vit Alphonsine ajouter à la dérobée deux ou trois œufs à la pâte à crêpe (Guèvremont, Survenant, 1945, p. 50).
β) [Dans des énoncés évoquant la possibilité de solliciter ou non la vue]
[L'objet est visible ou non] S'offrir, se présenter, échapper à la vue (de qqn). La voiture fermée a caché son trépas à leur vue alarmée (Legouvé, Mort Henri IV, 1806, v, 7, p. 431).Une de ces haies continues, qui dans ce pays bordent les prés, dérobait presque constamment cette route à la vue (Gide, Si le grain, 1924, p. 394).
Apparaître à la vue. Ce qu'il y eut de marchandages effectifs derrière ces hésitations n'apparut pas à la vue du gros public (J.-R. Bloch, Dest. du S., 1931, p. 66).
Perdre vue. Ne plus voir. Les édredons (...) crevés aux fenêtres, masquèrent de duvet les soldats vaincus par l'essaim candide où leur défense perdait vue (Hamp, Champagne, 1909, p. 169).
À la vue de qqn. En étant vu, visible. À la vue de tous les passants, du public. Tous les modes de scrutin que l'on a vus jusqu'ici sont en fait publics; ils se déroulent à la vue de tous (Vedel, Dr. constit., 1949, p. 421).
Jusqu'à la vue de. L'armée du roi (...) avança presque jusqu'à la vue de la garnison; mais, trouvant les Anglais en bonne position, elle se retira (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 429).
En vue (de qqn). Girardin est dans la loge de la princesse Mathilde, en vue de tous, la tête haute, le pince-nez hautain, la mine insolente (Goncourt, Journal, 1865, p. 181).Pour pêcher à la ligne, on était alors trop en vue des poissons (Gide, Si le grain, 1924, p. 394).Loc. adv. Visiblement. Des maisons où il y a trente domestiques qui, tous, friponnent sur le prix des choses et ne toucheront jamais à un diamant placé en vue (Gobineau, Corresp.[avec Tocqueville], 1856, p. 253).Antoine aperçut son frère, accroupi en belle vue dans le réduit que l'administration nommait les vatères, et dont la porte était maintenue grande ouverte (Martin du G., Thib., Cah. gris, 1922, p. 701).
Loc. adj. Visible. Sur le quai, pas un taxi en vue. Le groupe hésite. « Allons à pied, » commande Lecouvreur (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p. 89).P. méton. Remarquable, éminent. Homme en vue. Les fêtes officielles de la troisième République, auxquelles la situation en vue de son père la forçait d'assister (G. Leroux, Parfum, 1908, p. 5).
Avoir qqn/qqc. en vue. Pouvoir voir. Le chasseur battait à peu près le même terrain que nous (...). Pendant le reste de la journée, nous l'eûmes en vue (Fromentin, Dominique, 1863, p. 5).
Dans la vue, devant la vue (de qqn)
[Dans le champ visuel] Des perspectives immenses et les lointains (...) du beau céleste, dont ils voudraient mettre partout quelque image ou quelque rayon, parce qu'ils l'ont toujours devant la vue, même alors qu'ils n'ont rien devant les yeux (Joubert, Pensées, t. 1, 1824, p. 175).Viens plus près, si tu as des raisons d'être dans ma vue (R. Bazin, Blé, 1907, p. 381).
SPORTS. Mettre* (...) dans la vue à. Avoir (...) dans la vue une roue, x minutes. Être dépassé à l'arrivée d'une longueur de roue, avoir x minutes de retard (d'apr. Petiot 1982).
De vue. L'acrobate symbolise à merveille la position de l'homme vis-à-vis de l'univers à ordonner (...). On comprendra l'art et l'histoire d'un seul coup si on ne quitte pas l'acrobate de vue (Faure, Espr. formes, 1927, p. 105).Perdre* de vue.
[Le champ visuel est plus ou moins limité] Une colline (...) d'où la vue porte sur la Lombardie (Krüdener, Valérie, 1803, p. 268).À l'est, au nord et à l'ouest, la vue s'étend très loin sur de mornes et immenses vagues de terrain (Gide, Voy. Congo, 1927, p. 777).P. méton., en loc. adj. Il trouvait près de Kleny un terrain à vues étendues, permettant l'emploi avantageux des trois armes (Foch, Princ. guerre, 1911, p. 157).
Verbe + vue.Boucher, borner, empêcher, limiter la vue; élargir la vue (sur qqc.). On s'écarte pour lui laisser la vue libre à la fenêtre (Sardou, Rabagas, 1872, iii, 11, p. 143).La cour de derrière (...) dont un haut préau barrait la vue sur la campagne (Alain-Fournier, Meaulnes, 1913, p. 247).P. anal. [À propos d'un lieu] [Les tours] avaient été plus tard rasées à la hauteur du parapet des boulevards (...). Cette opération avait été accomplie (...) lors de la construction d'un château moderne (...) et cela pour déblayer la vue dudit château (G. Leroux, Parfum, 1908, p. 40).
[Le suj. désigne une pers.] Avoir (la) vue sur qqc. Pouvoir voir un certain lieu, un certain espace. Les gonds grincèrent. De son lit, il avait la vue sur l'entrée. Machinalement, il regarda (Châteaubriant, Lourdines, 1911, p. 245).
[Le suj. désigne un lieu, une ouverture d'où l'on voit] Prendre vue sur qqc. Au-dessus des magasins étaient trois chambres étroites adossées au mur mitoyen, ayant vue sur la cour (Balzac, C. Birotteau, 1837, p. 176).Un judas donnait vue sur une cour intérieure (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 519).
Loc. nom. Rayon de vue. Tout l'espace que l'on peut voir. À gauche, le rayon de vue gagnait bien quelques milles au nord (Verne, Île myst., 1874, p. 86).Échappée de vue. Ouverture élargissant le champ visuel. J'avançais, par l'étroite tranchée (...) distrait seulement de temps à autre par une échappée de vue, à ma gauche, sur les lagunes (Gracq, Syrtes, 1951, p. 74).
[Circonstants à valeur adj.] Le retour à la rue étroite, sans vues (...) produirait un malaise inverse (Gds ensembles habit., 1963, p. 29).Un sixième étage parisien avec vue sur les toits (Sartre, Mots, 1964, p. 47).
Loc. prép., adv., adj.
À perte* de vue.
À portée de, hors de la portée de (la) vue (de qqn). La ville (...) représentait la terre, avec ses chagrins et ses tombeaux, situés loin derrière, mais non totalement oubliés, ni hors de la portée de ma vue (Baudel., Paradis artif., 1860, p. 416).Chaque cabine de conduite comporte, à portée de vue du conducteur, un voltmètre indiquant la tension de la ligne (Bailleul, Matér. roulant ch. de fer, 1951, p. 81).
À distance de vue. J'admirai comment il renvoyait les hommes et l'homme du jour à distance de vue (Alain, Propos, 1921, p. 268).
À l'abri de, contre les vues (de qqn). Cet espace à tenir à l'abri des coups et des vues de l'ennemi est ce qu'on appelle la zone de manœuvre (Foch, Princ. guerre, 1911, p. 133).Le plus mauvais passage reste à franchir: quinze à dix-huit cents mètres sur un plateau qui, de jour, est çà et là vaguement protégé contre les vues par des boqueteaux (Bordeaux, Fort de Vaux, 1916, p. 52).
Loin de la vue de qqn, hors de (la) vue (de qqn). Le long de la rive, vers l'est, l'eau reste hors de vue et d'atteinte, derrière l'épais écran de papyrus et de roseaux (Gide, Voy. Congo, 1927, p. 835).Tout en haut du bahut (...) en sûreté loin de la vue des enfants, les sucreries, les oranges et les pommes languissaient derrière une pile de draps (Guèvremont, Survenant, 1945, p. 102).
γ) [Dans des énoncés évoquant les positions du sujet par rapport à l'objet] Ma vue plongeant au loin sur les plus riches provinces de France, l'ambition a enflammé mon cœur (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p. 507).
Vue + adj.Vue plongeante. De là, la ville ne semblait qu'un champ de tuiles rouges. Les vues dominantes ne sont pas les meilleures; elles effacent les pentes, les accidents (Michelet, Journal, 1835, p. 209).Aux enseignements qu'apportaient la vue verticale utilisée par Blumenbach et la vue latérale suivant laquelle observait Camper, Prichard ajouta ceux que donnait l'examen du crâne vu de face (Hist. sc., 1957, p. 1372).
Loc. nom. Angle de vue. Manière de se placer pour voir quelque chose. Le cinéma lui révéla des angles de vues nouveaux (...) qui brisaient les anciennes conventions perspectives (Arts et litt., 1935, p. 30-20).
Point de vue. V. ce mot.À vue d'oiseau*.
δ) [Dans les loc. évoquant l'usage de ce sens pour évaluer, faire qqc.]
À la vue. Par le sens de la vue; autant qu'on puisse en juger par ce sens; en usant de ce seul sens. Se diriger à la vue. Les hommes (...) afin d'accourir plus vite sur les lieux, se coiffèrent du premier casque à la vue. Ainsi des têtes grotesques, ou perdues dans des coiffures trop larges, ou débordant de coiffures étroites, se montraient un peu partout (Guèvremont, Survenant, 1945, p. 135).Les Goitres. Aisément appréciable à la vue et à la palpation (Bariéty, Coury, Hist. méd., 1963, p. 742).
À la simple, à la seule vue. Par le regard; en partic., sans instrument. Mon rival étant fort brun, elle l'avait cru Italien à la simple vue (Restif de La Bret., M. Nicolas, 1796, p. 92).Une lunette de seize pieds (...) la lui fit paraître [la planète Vénus] trois fois plus grande que la lune à la simple vue (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p. 350).
À première vue, à la première vue (vieilli). Au premier coup d'œil. Werner croit (...) que les êtres créés l'un pour l'autre doivent se reconnoître à la première vue (Staël, Allemagne, t. 3, 1810, p. 139).Gérard lui avait été sympathique à première vue (Peisson, Parti Liverpool, 1932, p. 120).[À propos d'un texte, d'une partition] Michel traduisait l'hébreu à la première vue (Nodier, Fée Miettes, 1831, p. 113).Un comte hongrois présenta à Beethoven une composition de Bach, manuscrite et difficile, et (...) Beethoven l'exécuta, à première vue, « comme Bach la jouait (...) » (Rolland, Beethoven, t. 1, 1937, p. 279).
Au fig. Sans examiner les choses de près, sans réfléchir. Un peu de travail de bureau, alternant avec de longues sorties (...) hein? à première vue, qu'est-ce que vous en diriez? (Romains, Hommes bonne vol., 1932, p. 241).
À la seconde vue (rare). Franz et Albert (...) reportèrent les yeux sur les meubles, sur les tableaux et sur les armes. Tout cela, à la seconde vue, leur parut encore plus magnifique qu'à la première (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 489).
À vue d'œil. Sans mesurer, de manière approximative. Enfin le temple est trouvé et il promet. À vue d'œil, il occupe quatre mille mètres carrés (Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 290).À vue d'œil. De façon visible, très nette. Changer, embellir, engraisser, pousser à vue d'œil; travail qui avance à vue d'œil. La jambe seule était fortement contusionnée et s'enflait à vue d'œil (Theuriet, Mariage Gérard, 1875, p. 188).
À vue (v. supra à la vue, à la simple vue)
De façon visible. La Thénardier remplaça bien vite sa mine bourrue par sa grimace aimable, changement à vue propre aux aubergistes (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 480).Une atmosphère de rêve les enveloppe; les contrées qu'ils habitent se transforment à vue (Arts et litt., 1936, p. 64-1).THÉÂTRE. Changement* à vue.
Par le seul exercice de la vue. Atterrir, naviguer à vue; dessin à vue. Les 1 028 étoiles inscrites par Ptolémée dans son catalogue y sont classées en 6 grandeurs, d'après leur éclat (...). Cette notation toute subjective ne répond à aucune définition précise, le classement par grandeurs ayant été fait à vue (Danjon, Cosmogr., 1948, p. 264).
Sans quitter du regard. Villeneuve repart le 21, cherchant à gagner le détroit de Gibraltar (...). Nelson le suit, à vue, avec ses frégates (Billotte, Consid. strat., 1957, p. 40-05).DR. Garde à vue. V. garde1. Garder à vue. V. garder I B 1. CHASSE. ,,On chasse à vue quand on voit le gibier`` (Baudr. Chasse 1834). P. méton. ,,Fanfare que l'on sonne lorsqu'on voit l'animal par corps`` (Baudr. Chasse 1834).
À vue (v. supra à première vue). Lire, déchiffrer (une partition) à vue; lecture à vue. Exécution d'un morceau au choix, accompagnement à vue d'une mélodie facile en grégorien ou en musique courante (Enseign. mus., 1, 1950, p. 14).
FIN. Sur simple présentation (d'un document), sans délais. Bon, mandat payable à vue; payer, rembourser... à vue. On pourrait réserver cette dernière expression [compte courant] aux comptes remboursables à vue, les autres constituant les dépôts (Baudhuin, Crédit et banque, 1945, p. 165).Loc. adj. Je t'envoie sous ce pli une traite de 600 fr. à vue sur Paris (Hugo, Corresp., 1864, p. 461).Parmi ces dépôts, certains sont des dépôts à vue: le déposant peut à tout moment en réclamer le retrait. D'autres sont des dépôts à terme (Lesourd, Gérard, Hist. écon., 1968, p. 63).
De vue. Connaître qqn de vue. Avoir déjà vu quelqu'un sans lui avoir parlé. Beaucoup de jeunes gens que je connais de vue, mais dont j'ignore les noms (Delécluze, Journal, 1826, p. 341).Votre pauvre grand-père a bien connu, au moins de réputation et de vue, le vieux père Chenut (Proust, J. filles en fleurs, 1918, p. 512).
b) [Relativement à l'objet vu] Fait de voir, de regarder quelque chose/quelqu'un. Un appareil extérieur, qui lui dérobe la vue de la rue, ne laisse pénétrer dans le fond de sa retraite qu'un peu de la lumière du ciel (Toepffer, Nouv. genev., 1839, p. 69).Le carnaval se révèle seulement, par la vue d'enfants ayant sur leurs jeunes et frais visages de gros nez pustuleux d'ivrognes (Goncourt, Journal, 1888, p. 753).
[Dans l'expr. des sentiments éveillés par la perception] Aimer, ne pas pouvoir supporter la vue de qqn/qqc.; la vue de qqn/qqc. attendrit, émeut, fait plaisir, inquiète, irrite, offusque; étonnement, écœurement, ivresse causée par la vue de qqn/qqc. L'homme qui lui tapait le plus sur les nerfs était certainement M. Turbat, le supérieur du petit séminaire. Sa seule vue lui donnait (...) la chair de poule (Billy, Introïbo, 1939, p. 56).Il ne pouvait souffrir la vue d'une montre et, en fait, il n'y en avait pas une seule dans toute la maison (Camus, Peste, 1947, p. 1313).
À la vue de qqn/qqc. [Avec prop. indiquant la conséquence]
En voyant. S'enfuir, se lever à la vue de. J'ai vu des hommes du peuple plongés dans une vraie extase à la vue des évolutions des cygnes d'un bassin (Renan, Avenir sc., 1890, p. 493).Elle s'évanouissait à la vue d'une petite souris (Triolet, Prem. accroc, 1945, p. 22).
Synon. de en vue de ( infra).Le marin lutte contre les orages, à la vue lointaine de la terre où il doit aborder (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p. 339).
À la première vue de. Il est difficile de peindre leur effroi [des poulains] à la première vue de l'homme (Crèvecœur, Voyage, t. 2, 1801, p. 270).
À vue de
Rare. Étant donné (v. vu). La mission de la science est de chercher sans cesse, à vue des résultats obtenus et des phénomènes en cours d'accomplissement, quelles sont les innovations immédiatement réalisables (Proudhon, Syst. contrad. écon., t. 1, 1846, p. 45).
Vieilli. À vue de pays. V. pays1.
En vue de qqc. D'un endroit d'où l'on peut voir et d'où l'on peut être vu. Arriver en vue du port; navigation en vue des côtes. Nous étions en vue d'une porte en bois par laquelle on entrait dans le parc de Frapesle (Balzac, Lys, 1836, p. 102).À peine si celui-ci nota, le samedi, le passage en vue de l'hôtel d'une étrange cordée, conduite par un guide blanc, qui descendit de l'arête de l'Est (Peyré, Matterhorn, 1939, p. 252).Rare. [Le compl. désigne une pers.] Elle (...) se met à la portière pour agiter son mouchoir quand elle passera « en vue » de son fils, qui habite aux environs de Fontainebleau (Renard, Journal, 1901, p. 675).
B. − P. méton.
1. Ce qui est vu.
a) Espace, paysage que l'on découvre du lieu où l'on se trouve. Regarder la vue; peindre, photographier une vue. Une fenêtre percée de l'autre côté de la maison (...) donne sur une autre vue (Proust, Fugitive, 1922, p. 682).À gauche, un verger, une allée de tilleuls qui longe la vue (Mauriac, Journal 2, 1937, p. 107).
[Dans des énoncés faisant réf. à des limites naturelles] Vue bornée, limitée, panoramique, générale. La vue se découvrait au sortir du bois (Nerval, Filles feu, Sylvie, 1854, p. 616).La vue devient de plus en plus étendue, les vallées plus larges et profondes (Gide, Voy. Congo, 1927, p. 783).
Vue d'ensemble. Partout des sentiers creux, fossés et levées de terre garnies de buissons et d'arbres. Ce morcellement de détail laisse rarement place à des vues d'ensemble; et, quand un point dominant s'offre par hasard, c'est un pays fourré qu'on découvre (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum., 1921, p. 187).
[Dans des énoncés évoquant l'aspect esthétique] Vue admirable, mélancolique; chambre qui a une belle vue. Ils veulent (...) construire « un mas sur ce cap à pic sur la mer, hein, quelle vue! » (Colette, Naiss. jour, 1928, p. 10).
[Avec compl. spécifiant ce qui est vu] Vue admirable du soleil couchant; représenter une vue de Florence. Assis une demi-heure au bord de l'Adour, du côté du Saint-Esprit. Vue animée du pont, de la citadelle, de la pointe des deux rivières (Michelet, Journal, 1835, p. 187).Mmed'Orgel, de méchante humeur, tournait le dos à la Marne, à l'île d'Amour (...). Elle n'avait d'autre vue que la route (Radiguet, Bal, 1923, p. 124).
b) P. méton. Représentation de ce paysage. Vue photographique, cinématographique; prendre des vues d'un monument, d'un site, d'un accident; projection de vues fixes; vue d'avion; vue panoramique; vue gravée; vue sur carte postale. Les portraits des clients de passagemariages, baptêmes et l'inévitable panorama de Naples (...) il y avait aussi une vue de nuit avec des explosions d'obus sur les flancs du volcan (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 110).Le kinétoscope d'Edison, premier appareil de vues animées sur film (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 1, 1961, p. 403).Porte-plume à vue. Ce furent d'abord les porte-plumes « à vue » qu'il tira pour écrire sa dictée. Dans un œillet du manche, en fermant un œil, on voyait apparaître, trouble et grossie, la basilique de Lourdes ou quelque monument inconnu (Alain-Fournier, Meaulnes, 1913, p. 142).
En partic. Carte postale. Il ne pouvait s'empêcher de juger ridicule, à part soi, qu'on m'interdît d'acheter pour mes camarades des crayons de couleur et des vues de Cracovie (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 320).
DESSIN, PEINT. Vue (à la) cavalière. V. cavalier2.Vue perspective*. Prise* de vues. Vue d'optique*.
2. Ce qui permet de voir.
a) Ouverture.
α) Ouverture dans un mur, une clôture. Ouvrir, boucher une vue. Les voilà dans le labyrinthe, dont Ninon connaît les méandres. Elle s'arrête devant une de ces vues nommées « ah! ah! » ménagées dans l'épaisseur des fourrés (Boylesve, Leçon d'amour, 1902, p. 253).
DR. Vue droite/oblique ou de côté. Ouverture dans un mur parallèle/perpendiculaire à la ligne de séparation de deux propriétés (d'apr. Juridique 1987).
β) HIST. Fente dans la visière d'un casque; cette partie de la visière (d'apr. Leloir 1961).
b) Région. (Normandie), vieilli. Lampe. Ma mère, il fait noir. On n'y voit goutte. Je vas allumer la vue. Elle prononçait la veue, nommant ainsi la petite lampe de forme antique pendue au foyer normand (A. France, Vie fleur, 1922, p. 335).
C. − Au fig.
1. Faculté de se représenter mentalement quelque chose, de percevoir par l'esprit. Vue de l'esprit, de l'âme; vue intellectuelle. À mesure que la belle femme blanche perdait ses principaux traits dans ma vue intérieure, je devenais excessivement triste (Jouve, Scène capit., 1935, p. 177):
... je repassai les ineffables bienfaits [de Dieu] pour ma mère et pour moi depuis le jour de mon baptême jusqu'à ce triste jour de la mort de ma mère. D'une seule vue, je voyais: − ma naissance à Noël; mon baptême le même jour (...) − Paris qui devait nous perdre; − Saint-Sulpice qui nous sauva... Dupanloup, Journal, 1851-76, p. 73.
Perdre* de vue.
Vue de qqc. Fait d'envisager, de connaître quelque chose. Vue immédiate de la vérité. Dévoilez à lui-même les causes de ses maux! Redressez-le par la vue de ses erreurs! (Volney, Ruines, 1791, p. 38).Le pessimisme de ceux chez qui la vue du passé contrarie la vue de l'avenir (J.-R. Bloch, Dest. du S., 1931, p. 225).
Avoir qqc. en vue. Avoir dans l'esprit comme modèle, comme référence. On voit tous les jours discuter des hommes qui en se servant des mêmes mots ont en vue des idées certainement différentes (Cl. Bernard, Princ. méd. exp., 1878, p. 196).Les bancs de craie noduleuse que j'ai en vue ici répondent à deux types (Cayeux, Causes anc. et act. géol., 1941, p. 46).
En partic. Faculté de connaître ce qui n'est pas accessible aux sens, aux facultés naturelles. Synon. voyance.Aussi l'art est-il, comme par une vue anticipée, le résumé mythique de tout le développement futur de la volonté en quête de son parfait achèvement: dans l'œuvre sensible, dans le phénomène, il insère fictivement le réel, le vivant, l'humain, le divin (Blondel, Action, 1893, p. 229).La vue intérieure étant sans limites, on peut tout voir de près comme de loin et au travers de tout corps (Amadou, Parapsychol., 1954, p. 99).
Double vue, seconde vue
PARAPSYCHOL. Sa lucidité s'affaiblit peu à peu, elle répondit avec plus de difficulté et d'une façon moins nette (...). La somnambule était fatiguée, et sa double vue s'était obscurcie (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 391).
Intuition, perspicacité. Anselme Popinot (...) courait rue des Deux-Écus, pour s'emparer d'un jeune homme que sa seconde vue commerciale lui désignait comme le principal instrument de sa fortune (Balzac, C. Birotteau, 1837, p. 152).Qu'un penchant plus vif eût remplacé la protection affectueuse du grand cousin, elle l'espérait, elle croyait le deviner, avec l'infaillible seconde vue qui révèle aux jeunes filles la chose du monde qu'elles ont le plus d'intérêt à savoir (Vogüé, Morts, 1899, p. 272).
P. ext. Attention. Si je pouvais montrer aux hommes le vrai qui me frappe les yeux, leur faire détourner la vue des fausses grandeurs qu'ils poursuivent, et regarder la liberté, tous l'aimeraient (Courier, Pamphlets pol., Lettres partic., 2, 1820, p. 67).
2.
a) Faculté de concevoir plus ou moins bien quelque chose, de se faire une opinion sur quelque chose; exercice de cette faculté. Synon. jugement, idée.Son erreur dans l'affaire Dreyfus avait faussé sa vue pour les événements qui en étaient la suite (Jaurès, Ét. soc., 1901, p. 59).
[Avec adj. exprimant une qualité de la pers., un état d'esprit] Vue perçante, pénétrante. Ce tact fin que le solitaire exerce par ses perpétuelles méditations et par la vue exquise avec laquelle il saisit les choses qui tombent dans sa sphère (Balzac, E. Grandet, 1834, p. 255).Ils sont ignorants, peu emballés, à vue bornée, pleins d'un gros bon sens (Barbusse, Feu, 1916, p. 53).
Vue courte; à courte vue; court de vue. V. court I A 3.
Subst. (exprimant une qualité) + de vue(s).Hauteur, justesse, netteté, rigidité de vue(s). C'est dans l'étude des faits physiques, qu'Aristote avait acquis cette fermeté de vue qui le caractérise (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 1, 1808, p. 27).Cette largeur de vues et (...) cette tendre sollicitude que j'ai eu l'occasion d'admirer déjà bien souvent chez des hommes de science (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 231).
Loc. nom. Angle de vue. Manière de considérer quelque chose. Une traduction même approchée agit sur l'inconscient du chercheur et fausse imperceptiblement les angles de vues (Griaule, Méth. ethnogr., 1957, p. 67).Prise de vue(s). Fait de considérer quelque chose. Nous avons considéré le bloc informe, les éléments homogènes, les liaisons verticales et horizontales d'une société religieuse: cette prise de vues, ces dissections, ces mesures, nous rendent compte de la structure (Traité sociol., 1968, p. 82).
Vue + adj. + de qqc.Fait de concevoir de telle manière. La claire vue et le dégoût de sa propre inutilité (Vogüé, Morts, 1899, p. 245).Je n'ai jamais cru que la grandeur d'un ensemble, l'ampleur d'une synthèse pussent dispenser de la vue aiguë et infiniment particulière du détail (Romains, Hommes bonne vol., 1932, p. xviii).
b) Souvent au plur. Manière de concevoir quelque chose; idée que l'on a de quelque chose. Synon. point de vue (v. ce mot), jugement.Conformité, continuité, échange de vues; vues concordantes, opposées ; abandonner, exposer, imposer ses (propres) vues; échanger des vues. Après un mois que la duchesse avait demandé pour réfléchir, elle se rendit en soupirant aux vues sages du ministre (Stendhal, Chartreuse, 1839, p. 113).
[Avec des termes exprimant une qualité de la pers.] Vue(s) fausse(s), hardie(s), juste(s), géniale(s), honnête(s), nette(s), solide(s), simpliste(s), superficielle(s), utile(s); vue(s) optimiste(s), pessimiste(s), pacifique(s); vue(s) d'intérêt personnel; ampleur, honnêteté, richesse de vue(s). Un système qu'on ne peut nommer grand en philosophie qu'à titre de monstruosité, malgré les vues curieuses, spirituelles ou profondes dont il est semé (Renouvier, Essais crit. gén., 3eessai, 1864, p. 148).Votre admiration constante m'induit en une vue fausse des choses (Montherl., Malatesta, 1946, iv, 7, p. 524).
En compos., région., pop. Bleuses-vues. Idées fausses, sans fondement, exagérément optimistes. V. bleu I C, rem. ex. de Adam.
[Avec des termes exprimant une perspective, un choix partic.] Vue(s) complète(s), fragmentaire(s), générale(s), sommaire(s), d'ensemble; vue(s) philosophique(s), politique(s), théorique(s). [Malinowski] cherche le moyen d'appliquer les vues psychanalytiques à l'étude de la société mélanésienne de ces petites îles (Hist. sc., 1957, p. 1527).Nous, adultes, n'osons point dire qu'apprendre à construire une tour, à trier des laines colorées ou à dessiner un bonhomme, soit un travail scolaire. Mais c'est là une vue d'adultes (Jeux et sports, 1967, p. 144).
Vue + compl. spécifiant le sujet auquel on pense.Conception, connaissance que l'on a de quelque chose.
Vue de qqc.Avoir, donner, prendre une vue de la situation, des problèmes. La réflexion (...) ne doit pas se borner à remplacer une vue du monde par une autre, elle doit nous montrer comment la vue naïve du monde est comprise et dépassée dans la vue réfléchie (Merleau-Ponty, Phénoménol. perception, 1945, p. 247).
Vue sur qqc.Je trouve qu'il n'a pas eu [Boileau] sur l'art poétique des vues assez neuves et assez déliées (Chênedollé, Journal, 1833, p. 178).As-tu des vues nettes sur l'existence de Drouart, Rouin, etc.? Je les ignore totalement pour le moment (Valéry, Corresp. [avec Gide], 1897, p. 299).
3. Fait de concevoir un but; intention, projet. Vues de la providence; être dans les vues de qqn; servir les vues de qqn; agir dans des vues intéressées. L'explication de ces difficultés t'arrivera un jour, si Dieu le permet; et si ce dessein n'entrait pas dans les vues de son éternelle prudence, tu aurais beau t'efforcer de les débrouiller sans lui (Nodier, Fée Miettes, 1831, p. 174).[Il] visait au monopole allemand de la fabrication des armes. Son fils, Fritz Krupp, réalisa ses vues en rachetant son principal concurrent (Lesourd, Gérard, Hist. écon., 1966, p. 336).
Loc. verb.
Avoir des vues pour/sur qqn. Former des projets pour lui; en partic., envisager un mariage, une liaison. Il fallait que quelqu'un eût de grandes vues sur vous pour vous avoir imposé toute cette souffrance (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 291).
En vue
Avoir qqc. en vue. Désirer ou penser obtenir, atteindre quelque chose. (...) On va déménager...Tu dis ça tous les jours!J'ai quelque chose en vue, quelque chose qui te plaira, j'en suis sûre (Triolet, Prem. accroc, 1945, p. 117).
Avoir qqn en vue. Penser à quelqu'un pour remplir une fonction, pour l'épouser. Le ministère (...) eût été certainement plus prudent dans cette circonstance, si l'on avait un successeur précisément en vue (Delécluze, Journal, 1827, p. 450).Si tu en as un autre en vue, qui te plaise et qui t'aime assez, dis-le! Le petit Victor, par exemple? (Pagnol, Fanny, 1932, i, 2etabl., 6, p. 101).
Avoir en vue de. Avoir pour but. Des controverses que le concile avait en vue de terminer (Théol. cath.t. 4, 11920, p. 845).
Qqc. est en vue. Quelque chose semble possible, imminent. [De Gaulle] adressa le 18 juin à la nation française un appel à tous les Français pour les appeler à la résistance et à la continuation de la lutte en dépit de l'armistice en vue (Vedel, Dr. constit., 1949, p. 267).
Loc. prép. Dans l'intention, la perspective de..., pour...
Dans la/une/des vues de (vieilli) + inf./subst.L'usufruitier (...) est responsable de la chose qui lui est confiée; il doit en user conformément à l'utilité générale, dans une vue de conservation et de développement de la chose (Proudhon, Propriété, 1840, p. 189).Elle connaissait le prix des sacrifices que je consommais chaque jour dans la seule vue de m'assurer son attachement et sa fidélité (Milosz, Amour. init., 1910, p. 177).La République française « n'entreprendra aucune guerre dans des vues de conquête (...) » (Vedel, Dr. constit., 1949, p. 529).
En vue de + inf./subst.On souffrait jadis le martyre de la vie en vue de biens éternels (Balzac, E. Grandet, 1834, p. 121).On pillait les provisions d'orge que j'avais réservées en vue des famines (Saint-Exup., Citad., 1944, p. 557).Quelques clefs, chipées ça et là, furent (...) travaillées avec plus ou moins de bonheur en vue de crocheter certains placards (H. Bazin, Vipère, 1948, p. 59).Rare. [Avec compl. désignant une pers.] Je jurerais qu'en vue d'elle-même, elle n'a pas d'autre ambition que de voir son Raoul épouser mon Hélène (Sandeau, Mllede La Seiglière, 1848, p. 238).
Prononc. et Orth.: [vy]. Ac. 1694, 1718: veuë; 1740: vûe (l'accent marque la réduction du hiatus); dep. 1762: vue. Étymol. et Hist. I. A. 1. Ca 1100 « sens par lequel on perçoit la lumière » (Roland, éd. J. Bédier, 2012); spéc. 1812 seconde vue « faculté de voir des choses qui se passent au loin » (Mozin-Biber); 2. a) déb. xiies. veuthes (Benoît de Ste-Maure, St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 213); b) 1155 « portée et acuité du sens de la vision » (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 9227); 1552 tout d'une vue « d'un seul et même regard » (R. Est., Dictionarium Latino gallicum d'apr. FEW t. 14, p. 425a); 1671 hors la vue (Pomey); 3. a) 2emoit. xiiies. « organes permettant de voir » (1reContinuation de Perceval, éd. W. Roach, 7787: le front ot haut et la veüe Enfossee et la face oissue); b) α) 1615 donner dans la veuë de « éblouir par un vif éclat » (V. d'Audiguier, Histoire Trage-Comique, p. 325); β) 1916 arg. en foutre plein la vue (Barbusse, Feu, p. 338); γ) 1919 cycl. mettre dans la vue (Vélo-Sport, 16 juill. ds Quem. DDL t. 10); 4. 1225-50 « fait de regarder, d'avoir sous les yeux » (Lancelot du Lac, éd. E. Kennedy, p. 290, 16); 1283 dr. jour de veue (Philippe de Beaumanoir, Coutume de Beauvaisis, éd. Am. Salmon, § 276); a) 1585 a la veuë des hommes « en public » (N. Du Fail, Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, t. 1, p. 229); 1615 a la veuë de tout le monde (A. de Montchrestien, Traicté Œconomie Politique, p. 348); b) 1636 à la premiere vue « au premier coup d'œil » (Monet); 5. 1485 « manière dont le regard saisit un objet regardé » (Mistere Vieil Testament, 43607, éd. J. de Rothschild, t. 5, p. 315); 1538 de vue « par la vue » (Est.); 1676 payable à vue (Mmede Sévigné, Corresp., éd. R. Duchêne, t. 2, p. 340); 1679 garder à vue (J.-F. de Retz, Mémoires, t. 4, p. 464); 1690 chasser à vue (Fur.). B. 1. 1remoit. xiies. « ce qu'on perçoit » (Lapidaires anglo-norm., éd. Studer-Evans, IIIc, V, 9, p. 141); 1370 mettre en la veue de « mettre sous les yeux de » (texte ds Du Cange, s.v. visus, p. 358a); 2. a) 1461 « spectacle qu'une chose offre à l'œil » (Jean de Bueil, Jouvencel, éd. L. Lecestre, t. 1, p. 189); α) 1552 en vue « être à la portée du regard » (R. Est., loc. cit.); 1637 en veüe de + nom de lieu (N. de Peiresc, Lettres, t. 4, p. 86); β) 1585 a veue de pays « sans entrer dans les détails » (N. Du Fail, op. cit., t. 2, p. 216); b) 1681 relig. « la vue de Dieu, état des bienheureux qui voient Dieu » (Bossuet, Histoire univ., II, 6, p. 286); 3. a) 1634 « tableau, dessin qui représente un site » (N. de Peiresc, op. cit., t. 3, p. 113); b) 1678 veue d'oiseau « vue perspective du lieu exécutée par un dessinateur placé soit dans la plaine, soit sur un lieu fort élevé » (Lubin ds F. de Dainville, Le Langage des géographes [1500-1800], p. 48); 4. 1763 vén. (Le Verrier de La Conterie, L'École de la chasse aux chiens courants d'apr. FEW t. 14, p. 425a). C. 1. a) 1438 « ouverture dans un bâtiment » (Comptes Manoir de Rouen, 188 ds IGLF); b) 1707 « ouverture d'une maison par laquelle on voit les lieux voisins » (Lesage, Diable boiteux, 9 ds Littré); 2. 1451 « fente de la visière d'un casque » (A. d'Agnel, Comptes du Roi René, t. 1, p. 361 ds IGLF). II. A. 1580 « image, représentation mentale » (Montaigne, Essais, I, 4, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 22); id. à nostre veüe (Id., ibid., I, 35, p. 223). B. 1665 en vue de + subst. « de manière à rendre possible une chose » (J.-F. de Retz, Conjuration comte de Fiesque, p. 551); 1672 en vue de + inf. « afin de » (Mmede Sévigné, op. cit., t. 1, p. 422); C. 1676 « action d'envisager » (Id., ibid., p. 471); 1679 avoir des vues pour qqc. (J.-F. de Retz, Mémoires, t. 4, p. 426). Part. passé fém. subst. de voir*. Fréq. abs. littér.: 17 209. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 24 592, b) 25 204; xxes.: a) 22 313, b) 25 274. Bbg. Lucius (H.). La Litt. visionnaire en France du début du 16eau début du 19es. Paris, 1970, pp. 53-54. − Meier (H.). Die Benennung der fünf Sinnesvermögen. Rom. Forsch. 1979, t. 91, p. 53. − Quem. DDL t. 6, 9, 10, 21.