| VAISSELLE, subst. fém. A. − 1. Ensemble des récipients, des plats, des assiettes et des ustensiles divers servant à la présentation et à la consommation des aliments sur la table. a) [Du Moy. Âge au xixes.] Ensemble des pièces en métal précieux, souvent ouvragées, composant le service de table des seigneurs et constituant une richesse monnayable. Vaisselle godronnée; vaisselle d'argent, de vermeil; fondre sa vaisselle; vaisselle au poinçon de Paris. Le prince d'Orange (...) en est réduit à vendre sa vaisselle d'or aux juifs de Strasbourg, pour donner de la poudre à ses partisans! (Sardou, Patrie!1869, I, 1ertabl., 2, p. 11). ♦ Vaisselle montée. Vaisselle d'or ou d'argent dont les pièces sont faites d'éléments joints. La table. Sans être aussi considérable qu'au XVIIIesiècle, la vaisselle de table − plate ou montée − reste fort abondante et d'une variété extrême (Grandjean, Orfèvr. XIXes., 1962, p. 46). ♦ Vaisselle plate. Vaisselle d'or ou d'argent massif dont les pièces sont d'un seul morceau. [La table] prenait tout à fait bon air avec sa vieille vaisselle plate chargée de ciselures et blasonnée d'armoiries, ses flacons en cristal de Bohême mouchetés d'or, ses verres de Venise aux pieds en spirale, ses drageoirs à épices et ses mets d'où montaient des fumées odorantes (Gautier, Fracasse, 1863, p. 439).[Au xixes.; p. oppos. à la vaisselle de porcelaine, de faïence] Vaisselle d'argent. Il se demandait (...) pourquoi des gens qui ne le valaient pas se permettaient de manger dans la vaisselle plate, quand il mangeait, lui, maître Jolibois, tout simplement dans la porcelaine (Sandeau, Sacs, 1851, p. 24).On avait remplacé la vaisselle plate par de la porcelaine de Sèvres, décorée de fines peintures bleues et roses (Zola, E. Rougon, 1876, p. 163). − Pop., vieilli. Vaisselle de poche. ,,Argent en espèces, disponible`` (Cellard-Rey 1980). Mon petit, décidément tu es plus fort que moi... Allons, faisons avancer la vaisselle de poche (E. de Goncourt, Zemganno, 1879, p. 106).Arg. Vaisselle de fouille. Même sens. (Ds Cellard-Rey 1980). b) [P. oppos. à l'argenterie, aux couverts, à la verrerie, à la batterie de cuisine] Ensemble des assiettes, tasses, bols, plats, récipients constituant un ou des services de table. La vaisselle, en faïence brune et blanche, valait bien douze francs (Balzac, Cous. Pons, 1847, p. 312).Au fond, dans l'encoignure où quelque humble vaisselle Aux planches d'un bahut vaguement étincelle, On distingue un grand lit (Hugo, Légende, t. 2, 1859, p. 761). SYNT. Vaisselle blanche, dépareillée, ébréchée, incassable; vaisselle de couleur; vaisselle de carton, de faïence, de grès, de matière plastique, de porcelaine, de verre trempé, en terre cuite; débris, tessons de vaisselle; briser, casser de la vaisselle; empiler, ranger la vaisselle; réassortir la vaisselle d'un service. − Expr. fig., fam. S'envoyer la vaisselle à la tête. Se disputer violemment. (Dict. xxes.). 2. a) Ensemble des récipients, des plats, des assiettes, des couverts, des verres et des ustensiles de cuisine qui sont à laver. Ce jour-là, elle négligea son ménage. Elle laissa même la vaisselle s'empiler sur l'évier et elle cousit longtemps (Roy, Bonheur occas., 1945, p. 272). ♦ Machine à laver la vaisselle. Synon. lave-vaisselle.V. ce mot A ex. de D. Chappat. SYNT. Vaisselle grasse, sale; lavette, torchon de vaisselle; bac à vaisselle; produit pour la vaisselle; laveur, laveuse de vaisselle; écurer, égoutter, essuyer, laver, rincer la vaisselle; laisser la vaisselle s'empiler, traîner. b) P. méton. Action de laver et d'essuyer les plats, les assiettes, etc., qui ont servi au repas. Corvée de vaisselle. Après sept heures, en principe, les petits boulots sont rentrés. Leurs femmes sont dans la vaisselle, le mâle s'entortille dans les ondes radios (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 20). ♦ Faire la vaisselle. Synon. techn. faire la plonge*.J'aidais maman à faire la vaisselle; elle lavait des assiettes, je les essuyais (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p. 105). ♦ Eau de vaisselle. Eau qui sert ou a servi au lavage de la vaisselle. Synon. vieilli eau grasse*.Ses mains plongeaient dans l'eau de vaisselle, tiède et savonneuse (Roy, Bonheur occas., 1945, p. 166).P. anal., pop., fam. Potage trop clair, café sans saveur, liquide douteux. On leur avait fait payer dix francs de l'eau de vaisselle, où nageaient des pâtes (Zola, Bonh. dames, 1883, p. 576). B. − P. anal. Ensemble d'ustensiles, de récipients destinés à un autre usage que la table. Vaisselle de toilette en or (Aragon, Cloches de Bâle, 1934, p. 26 ds Rob. 1985). − VITIC. Vaisselle vinaire. Ensemble des cuves, tonneaux, etc., servant à la vendange et à la fabrication du vin. C'est un bon et rude ouvrier spécialisé dans la fabrication des cercles pour vaisselle vinaire. Il fend, il « ripe », il « trempe » tous les cercles qui corsettent les fûts, bandes de bois brunes aux ligatures d'osier d'or. Et ceux de la cuve, du tonneau où le vin est foulé (Pesquidoux, Chez nous, 1923, p. 145). Prononc. et Orth.: [vεsεl]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. a) α) Ca 1140 veissele « ensemble des récipients qui servent à la préparation et à la présentation des aliments » (Geoffroi Gaimar, Hist. des Anglais, éd. A. Bell, 5990); ca 1155 vaissele (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 10487);
β) 1435 (Estat. de S. J. de Jer. [= Statuts de l'Ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem], fo61b, Arch. de la Haute-Garonne ds Gdf., s.v. plate: la vaysselle d'or ou d'argent en placte); 1634 vaisselle plate, vaisselle montée (Inventaire de Charles Benoît, notaire d'apr. Havard t. 4, col. 1499); 1680 vaisselle plate, vaisselle montée (Rich.);
γ) 1835 vaisselle plate « plats et assiettes d'argent, par opposition à vaisselle de porcelaine, de faïence, etc. » (Ac.); b) α) 1842 eau de vaisselle (Hugo, Rhin, p. 17);
β) 1882 « lavage de la vaisselle » (Zola, Pot-Bouille, p. 277: sa vaisselle finie); 1929 faire la vaisselle (Dabit, Hôtel Nord, p. 151); 2. 1773 arg. « argent » (Les Porcherons ds Les Amusemens Rhapsodi-Poétiques de Paris, Stenay, 1773, p. 177: il faut que la vaisselle Sorte soudain de l'escarcelle); 1810 vaisselle de poche (Les Parades des boulevarts, vii [Delaunay] ds Quem. DDL t. 32, s.v. tirelire). B. Fin xves. vesselle « tonneau » (Le Parnasse satyrique du xves., éd. M. Schwob, XVIII, p. 74: Maintenant j'ayme la vesselle Et boy jusqu'à dire: Holla!); 1530 (Arch. de la Gironde, Not., Charrier, 95-5, 29 août ds Gdf.: ung tonneau de vin en une bonne vaycelle neuve); 1766 [1reéd.] (Desgrouais, Gasconismes corrigés, p. 246: il faut apprêter sa vaisselle [= tonneaux, futailles, pour les vendanges]); 1875 vaisselle vinaire (Messager du Midi dans Gaz. des Trib., 16 sept., p. 895, 4ecol. ds Littré Suppl. 1877). D'un lat. pop. *vascella, plur. de vascellum (vaisseau*) pris pour un fém. sing. de sens collectif. Fréq. abs. littér.: 587. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 363, b) 928; xxes.: a) 1 081, b) 1 038. DÉR. 1. Vaisselier, subst. masc.Meuble de cuisine ou de salle à manger formé de deux parties, le corps inférieur servant au rangement du linge de table et de la vaisselle, le corps supérieur comportant des étagères à rebords sur lesquelles sont exposées les assiettes et les pièces décoratives. Synon. crédence, dressoir.Rayons du vaisselier. Je vis les bahuts, les lits bretons, les vieilles assiettes rangées au vaisselier (Loti, Mon frère Yves, 1883, p. 94).Une sage lumière tirait de l'ombre les plats du vaisselier, une écuelle d'étain, les flancs polis ou les panneaux des meubles (Pourrat, Gaspard, 1931, p. 211).En compos. Buffet-vaisselier. Même sens. Comme meubles, un buffet-vaisselier, une table étroite dans la cuisine (Pesquidoux, Livre raison, 1932, p. 237).− [vεsəlje]. Att. ds Ac. 1935. − 1resattest. 1376 (Inventaire ds B. Prost, Inventaires mobiliers des Ducs de Bourgogne, t. 1, no2467: un vaichelier à mettre un bassin [sens incertain: meuble faisant partie du mobilier d'un tavernier]), 1568 (Inventaire de Pierre Bonafous, conseiller au parlement, Toulouse ds Havard 1890; deux petitz vaisseliers d'avet [c.-à-d. de sapin]); de vaisselle, suff. -ier*. 2. Vaissellerie, subst. fém.a) Industrie qui comprend la fabrication de la vaisselle de table et de récipients divers, tels que seaux, écuelles, gamelles, salières, etc. Travailler dans la vaissellerie (Lar. 20e-Lar. encyclop.). b) Ensemble d'objets fabriqués par cette industrie. Magasin de vaissellerie. Mais que de fois [ai-je rêvé] d'une petite maison hors des villes, bien proprette avec ses meubles de bois, ses vaisselleries luisantes, sa treille à l'entrée, des poules! (E. de Guérin, Journal, 1838, p. 160).− [vεsεlʀi]. − 1resattest. a) 1838 « ensemble d'objets... » (id.), b) 1876 « industrie qui comprend la fabrication de ces objets » (Lar. 19e); de vaisselle, suff. -erie*. |