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USINE, subst. fém.
A. −
1. Vx. Établissement industriel où l'on travaille surtout le fer, en utilisant comme principaux agents de production et de fabrication des machines mues par diverses sources d'énergie. Nos promenades sur la Seine sont bornées par une usine à papier, et je pense: « Usine à papier, moulin à paroles » (Goncourt, Journal, 1859, p. 617).L'usine Chodorge où l'on ne fabriquait que des clous, l'usine Hausser, une forge qui livrait plus de cent mille faux et serpes par an, l'usine Mirande, une maison qui construisait spécialement des machines agricoles (Zola, Travail,1901, p. 15).
2. Établissement de la grande industrie où s'effectue tout ou partie d'un processus de fabrication en série d'objets ou de produits, ou bien la transformation ou la conservation de matières premières, ou bien la production d'énergie, à l'aide de machines consommant une grande quantité d'énergie de diverses sources. L'emplacement des chaudières et des fours dans ce site écarté, la suite des marteaux-pilons, des tours et (...) tout l'outillage qui constituera la chaîne et par laquelle passera la production en série de l'usine envisagée (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 297):
... on l'envoyait (...) aux usines Wisner. Il y avait une grève à cause de la taylorisation de l'usine. Ce que c'est? Comme toujours, les ouvriers s'opposaient à un progrès (...). Une économie pour tous. Le rendement de l'usine accru d'autant. Aragon, Beaux quart., 1936, p. 258.
Usine pilote. V. pilote II B ex. de De Gaulle.Navire-usine. V. navire rem. 3 g.
3. Bâtiment ou ensemble de bâtiments qui abritent les moyens de production, les différentes installations d'un établissement industriel. Cheminée d'usine. À cinq heures précises, j'entrais à l'usine à gaz de La Villette. On dirait les ruines colossales d'une ville de cyclopes. D'énormes et sombres avenues s'ouvrent entre les lourds gazomètres alignés l'un derrière l'autre (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Horla, 1887, p. 1319).Elle disait (...) en juin 36: «Il faudrait appeler Hitler pour qu'il empêche les occupations d'usines» (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 73).
P. méton. Ensemble des personnes qui travaillent dans une usine; propriétaire d'une usine. Usine qui chôme. Quand on a (...) l'étoffe d'un vrai patron et qu'on peut épouser une usine, on n'a pas le droit d'épouser une fille sans le sou (Aymé, Travelingue, 1941, p. 94).
4. Système d'organisation du travail et du mode de production de la grande industrie tel qu'il est mis en œuvre dans une usine. Travailleur d'usine; travailler en usine. Des ouvriers d'usine passaient, la taille serrée dans leur bourgeron de toile bleue, arborant des casquettes de soie sur leurs têtes faubouriennes (Moselly, Terres lorr., 1907, p. 221).Blanche avait été obligée de donner raison à Dussol lorsqu'il s'était opposé à ces «conseils d'usine» où Jean-Louis voulait réunir les représentants des ouvriers et ceux de la direction (Mauriac, Myst. Frontenac, 1933, p. 166).
SYNT. Usine chimique, électrique, hydroélectrique, laitière, métallurgique, pharmaceutique, sidérurgique; usine d'armes, d'armements, d'automobiles, d'aviation, de construction aéronautique, de fabrication de produits alimentaires, de produits textiles; usine d'assemblage, de fabrication, de montage, de transformation; usine informatisée, automatisée; usine à coke, à gaz, à papier, à sulfate; usine marémotrice, nucléaire; bâtir, créer, édifier, fonder, implanter, installer, monter, moderniser une usine; diriger, exploiter, faire marcher une usine; usine fonctionnelle, gigantesque, insalubre, moderne, rationnelle, spécialisée, standardisée; usine cassée, désaffectée, fermée; personnel d'une usine; aller, travailler à l'usine.
B. −
1. Fam. Établissement qui évoque une usine par ses dimensions, par l'activité importante qui y règne, et par la priorité donnée au rendement. La puanteur des cuissons rencontrait le relent des machines lubrifiées. Ce côté service des grands hôtels-usines nourrissait le côté client sur Parliament Avenue (Hamp, Champagne, 1909, p. 216).
2. Péj. Usine + compl.Activité, système, organisme qui produit en série à une échelle industrielle, des types identiques de personnes, de comportements, de choses.
Usine à + compl. ou verbe à l'inf.Usine à enfants; usine à diplomés, à chômeurs; usine à penser, à enseigner, à marier. Le Collège Saint-Louis de Gonzague faisait à cette heure un grand bruit de machine (...). L'usine à mémoire était en marche (Estaunié, Empreinte, 1896, p. 78).Je ne vous paie pas pour entretenir des quarts-de-révolutionnaire qui n'osent pas dire franchement ce qu'ils sont: la police n'est pas une usine à fournir des alibis (Malraux, Cond. hum., 1933, p. 236).
Usine de + compl.Usine de culture, de plaisirs. Alexis Michel est né, comme tous les fils de rois, à la Maternité, boulevard de Port-Royal, la grande usine d'accouchements de Paris (Arnoux, Paris, 1939, p. 245).
Prononc.: [yzin]. Att. ds Ac. dep. 1798. Étymol. et Hist. 1. xiiies., Nord, occhevine « bâtiment destiné à l'exercice d'une activité artisanale, construit près d'un cours d'eau, dans lequel on utilise la force hydraulique pour mouvoir des rouages [atelier de foulon, de brasseur, de fondeur, tanneur; moulin; pressoir...] » (Coutume des Bourgeois de Cambrai ds Tailliar, Rec. d'actes des XII-XIIIes. en langue rom.-wallonne) att. surtout avec la forme pic. œ(u)chine, euchine (v. Gdf., s.v. œuchine et FEW t. 7, p. 334b); 1274 wisine (Charte des Comtes de Lille ds Du Cange s.v. usina; v. aussi Gdf. s.v. usine); figure dans la lexicogr. dep. Trév.1771 (qui cite un édit de 1749), au xviiies. également dans des doc. officiels (v. Brunot t. 6, 1, pp. 382-383), ds Encyclop. t. 7, s.v. forge [mais pas en vedette] et au déb. du xixes., désignant prob. une réalité intermédiaire entre 1 et 2 a, liée à l'évol. des techn. et des conceptions du travail, dans la première étape du développement industr., celui des grandes manufactures; 2. « établissement industriel conçu pour la fabrication en série de produits ou la génération de sources d'énergie, dans lequel les ouvriers utilisent des machines mues par différentes sources d'énergie » a) α) 1832 (Say, Écon. pol., p. 108: des portions du capital qui durent plusieurs années comme les bâtiments des usines, les machines et certains outils); β) 1839 usine à sucre (Balzac, Corresp., p. 677); γ) 1842 usine à gaz (Reybaud, J. Paturot, p. 29); δ) 1851 usines métallurgiques (Cournot, Fond. connaiss., p. 508); ε) 1879 usine modèle (Verne, 500 millions, p. 66); b) empl. métaph. α) 1852 (Hugo, Corresp., p. 98: cette librairie serait l'usine intellectuelle du monde entier); β) 1870 (Goncourt, Journal, p. 619: se bousculant à l'entrée ou à la sortie de la gigantesque usine à manger de nos soldats). Mot dial. du Nord et de l'Est (cf. lat. médiév. usina att. en 922, Franche-Comté pour désigner un moulin, v. Nierm., une autre attest. en 1149, Champagne ds Du Cange), issu (selon une évol. phonét. propre aux parlers de ces régions, v. Thomas (A.) Essais, pp. 395-396) du lat. officina « atelier, fabrique » (v. aussi officine). Jusqu'au xviiies. le mot est, d'une part, localisé géographiquement, et d'autre part, empl. comme terme générique pour désigner un bâtiment dans lequel on pratiquait une activité utilisant des machines, des rouages mus par la force hydraulique. Au xviiies. l'usage du mot se répand, il apparaît dans des doc. officiels, mais comme un mot nouv. dont le sens a besoin d'être précisé, cf. Brunot, loc. cit. qui cite la déf. de l'Encyclop. méthod. (fin xviiies.), celle du Dictionnaire-Vocabulaire de Magnien et Deu (1809), et qui fait réf. à un mém. de Condorcet fournissant ,,toute une doctrine sur l'usine, établissement marchant à l'eau``. À partir des années 1830-40, le mot devient d'usage cour. pour désigner l'ensemble de l'établissement industr., des machines qui y sont implantées (quelle que soit la source d'énergie) et de l'activité que l'on y pratique dans le cont. de l'industrialisation en plein essor (transformation du monde du travail à la fois au plan des nouv. techn. et à celui des nouv. conceptions d'organ. du travail). La prédominance de usine s'explique: d'une part, par son statut de mot « nouveau » non marqué, comme manufacture* ou fabrique* par l'appartenance au concept du travail des xves., xvies., xviies. (de plus ces deux mots signifient originellement « fabrication, production (de biens) » et non « endroit où s'exerce une activité »); d'autre part, et p. oppos. à atelier*, boutique*, ouvroir*, officine* (qui désignent des lieux de taille réduite, où pouvaient se trouver réunies l'activité de production artis. et la vente) son sens originel de « endroit où l'on effectue un travail à l'aide de machines » l'a rendu partic. apte à désigner la réalité nouv. de l'étape industr. Pour des éléments sur l'hist. des mots cités ci-dessus, v. Goug. Mots t. 1, pp. 228-231; Brunot t. 6 et t. 9; K. Baldinger ds Mél. Brunner (O.), pp. 318-335; Gemmingen Arbeit. Fréq. abs. littér.: 1 357. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 289, b) 904; xxes.: a) 1 767, b) 3 977. Bbg. Cohin (G.). Arch. St. n. Spr. 1899, t. 103, no3, p. 242. − Quem. DDL t. 25.