| TUNIQUE, subst. fém. A. − 1. Vêtement de forme simple, tombant des épaules aux genoux ou aux pieds, souvent sans manches et serré à la taille par une ceinture, servant de chemise ou de vêtement de dessus et porté par les deux sexes. a) HIST. DU COST. [Dans l'Antiq., au Moy. Âge et de nos jours dans certains pays] Synon. angusticlave, chiton1, péplum.On le voyait [Caton], même dans sa préture, traverser la place sans toge, en simple tunique, nus-pieds, comme un esclave, et siéger ainsi sur son tribunal (Michelet, Hist. romaine, t. 2, 1831, p. 221): Sans ceinture, cette tunique [le khiton ou chiton] flottait et servait de vêtement de nuit; elle permettait aussi de revêtir facilement une cuirasse. Allongée, la tunique masculine était utilisée comme costume de cérémonie par des personnages importants et, dans les fêtes, par des joueurs d'instruments ou des conducteurs de chars...
F. Boucher, Hist. du cost. en Occident, 1969, p. 108. SYNT. Tunique dorienne, grecque, ionienne, perse, romaine; tunique courte, légère, longue, mince, plissée; tunique d'homme, de femme, d'esclave, de prêtre; tunique de laine, de lin, de pourpre, de soie; tunique à bande brodée verticale; tunique à manches; pan, pli d'une tunique; porter, revêtir une tunique. ♦ P. métaph. Tunique de pluie. Et la neige éclatait, tunique grave et blanche (Péguy, Ève, 1913, p. 945). − [P. allus. à Jean XIX, 23] Tunique sans couture (du Christ). Synon. robe* sans couture(s).P. anal. Chose qui ne peut souffrir le partage. Dans un tel débat, quel parti choisir sinon celui de recevoir pieusement l'œuvre de notre ami [Jacques Rivière], mais l'œuvre entier comme cette tunique du Christ: sans couture et qui ne pouvait être partagée? (Mauriac, Écrits intimes, Du côté Proust, 1947, p. 230). − [P. allus. à la légende d'Hercule] Tunique de Nessus. Synon. robe* de Déjanire ou de Nessus.L'homme était libre dans sa volonté et ses pensées, et ce voile de fatalité cosmique qui l'enserrait comme une tunique de Nessus était enfin déchiré (Barbault, De psychanal. à astrol., 1961, p. 32).P. anal. Chose qui étreint ou qui ronge de l'intérieur. [La conscience] n'est, en fin de compte, qu'un effort pour secouer la tunique de Nessus, pour rejeter les responsabilités brûlantes de notre chair (Mounier, Traité caract., 1946, p. 706). b) Vêtement à l'image de la tunique antique.
α) Vêtement féminin. − Robe très courte et sans manches, portée pour la danse et dans certains sports. Tunique de danse, de gymnastique. Elle était dorée comme le blé mûr, fonçant à la nuque (...), couleur de feu sur l'étroit rectangle décolleté par sa tunique de sport (Montherl., Songe, 1922, p. 44). − Robe simple ou flottante inspirée de l'antique. Tunique à la romaine. [Sous le Directoire] la tunique blanche, en tissu léger, à manches courtes et ceinture placée haut, est une mode générale (F. Boucher, Hist. du cost. en Occident, 1969, p. 341).
β) Vêtement porté depuis le Moyen Âge par les ministres du culte, les religieux. Synon. robe.Tunique de prêtre. Leur ancien habit, qui les vêt encore, consiste en une tunique à manches de grosse laine blanche, avec le scapulaire sur lequel est cousue (...) une croix rouge et bleue (Goncourt, MmeGervaisais, 1869, p. 219).
γ) LITURG. CATH. Ornement propre au sous-diacre, plus court et moins ample que la dalmatique, porté lors des messes solennelles jusqu'en 1972. Synon. tunicelle.Dépouillé de la tunique du sous-diacre, j'avais le cierge dans la main droite, la dalmatique et l'étole sur le bras gauche (Billy, Introïbo, 1939, p. 138).
δ) HIST. FR. ,,Chasuble de couleur bleu azuré, parsemée de fleurs de lis d'or, que les rois de France recevaient à Reims lors de leur sacre`` (Marcel 1938). 2. [De nos jours] a) HABILL. MILIT. Longue veste d'uniforme ajustée à la taille, à col droit et sans poches, pourvue au xixes. de basques ou d'une base plissée. Tunique d'officier. Toujours est-il que les dîners du caravansérail avaient un grand renom dans les camps du sud (...). Les tuniques bleu de ciel s'y pressaient à côté des vestons de hussards galonnés de soutaches et de brandebourgs (A. Daudet, Contes lundi, 1873, p. 148).Jeunes gens vêtus de tuniques militaires sans les boutons réglementaires (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 155). − P. anal. Veste d'uniforme des élèves internes des lycées et collèges. Au collège Rollin, un élève serait déshonoré (...) s'il sortait au dehors avec la tunique d'uniforme du collège (Goncourt, Journal, 1861, p. 897). b) Courte robe droite ou de forme variable portée sur une jupe, une robe ou un pantalon. Tunique de cachemire, de dentelle, de velours. Carlotta avait une robe claire, avec une tunique feuille-morte, et autour du cou un boa (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 439). B. − Spécialement 1. ANAT. Membrane qui enveloppe certains organes dont elle fait partie intégrante, ou qui constitue la paroi d'un vaisseau. Tunique charnue; tunique musculaire, nerveuse, vasculaire; tunique de l'estomac. [L'intestin] comprend comme tout le tube digestif trois tuniques, l'une externe c'est le péritoine; une moyenne formée par des muscles lisses qui lui permettent de se contracter; l'autre interne ou muqueuse qui présente de nombreux replis (Quillet Méd.1965, p. 127). ♦ Tuniques (de l'œil). Ensemble des trois membranes concentriques qui constituent la paroi du globe oculaire. Cette partie de la seconde tunique, qui est située au devant du cristallin, est presque plane dans l'homme (Cuvier, Anat. comp., t. 2, 1805, p. 396). ♦ Tunique vaginale. ,,Tunique séreuse constituant l'enveloppe la plus interne du testicule`` (Méd. Biol. t. 3 1972). 2. BOT. Enveloppe charnue des bulbes et oignons. L'oignon est formé de plusieurs tuniques superposées (Ac.1878, 1935).[Le bulbe de la scille] est composé de feuillets imbriqués. Les tuniques extérieures, sèches, ont une couleur rouge-brunâtre; celles de l'intérieur sont charnues et d'un blanc rosé; elles forment jusqu'au centre des écailles alternes (Kapeler, Caventou, Manuel pharm. et drog., t. 2, 1821, p. 656). REM. -tunique, élém. de compos. entrant dans la constr. de subst. désignant un vêtement.V. robe-tunique (rem. 1 h s.v. robe) et aussi:a) Blouse-tunique, subst. fém.Longue blouse retombant sur une jupe, un pantalon. Pour la fille: jupe-culotte et blouse-tunique à pied de col, rayée bleu-blanc ou vert-blanc (Le Point, 26 avr. 1976, p. 39, col. 1). b) Pull-tunique, subst. masc.Long pull porté par-dessus une jupe, un pantalon. Ici, somptueux pull-tunique en laine et acrylique, double épaisseur, point nid d'abeilles, coulissé à la taille, manches bouffantes sur poignet élastique (Elle, 27 sept. 1976, p. 60). Prononc. et Orth.: [tynik]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. 1. Ca 1150 « dalmatique, vêtement sacerdotal que l'on revêt pour officier » (Thèbes, éd. G. Raynaud de Lage, 6147); ca 1165 (Benoît de Ste-Maure, Troie, 26935 ds T.-L.); 2. a) ca 1160 tonicle « dans l'Antiquité, vêtement de dessous, chemise assez longue, avec ou sans manches » (Eneas, 6402, ibid.); en partic.
α) 1216 la tunike qu'il [Nostre Sires] avoit vestue (Robert de Clari, La Conquête de Constantinople, éd. Ph. Lauer, LXXXVII, p. 82, ligne 27); 1690 la tunique du Sauveur (Fur.);
β) 1824 la tunique de Nessus (Balzac, Annette, t. 2, p. 96); b) ca 1170 « vêtement ample évoquant la tunique » (Béroul, Tristan, éd. E. Muret-L.-M. Defourques, 2882); en partic. 1797 « robe de femme aux lignes simples et droites » Tuniques à la Cérès, à la Minerve (d'apr. Brunot t. 10, p. 895); 3. a) 1306 « cotte d'armes » bruire tuniques dorées (Guillaume Guiart, Royaux Lignages, éd. Wailly et Delisle, 9833); en a. et m. fr. b) 1845 « vêtement d'uniforme que portent les soldats, les collégiens » (Besch.); 4. a) 1844 « pièce de vêtement féminin qui prend la forme d'une seconde jupe courte, portée sur un fourreau » (Journ. des demoiselles, janv., 36b, ill. [Bruxelles] ds Quem. DDL t. 16); b) 1964 « pièce de vêtement féminin analogue au corsage » (Lar. encyclop.). II. 1. Ca 1314 anat. l'artere a. 2. tuniques (Henri de Mondeville, Chirurgie, éd. A. Bos, § 324); 2. 1552 bot. « enveloppe des bulbes ou d'autres organes végétaux » (Est.). Empr. au lat. class.tunica « vêtement de dessous des Romains à l'usage des deux sexes; enveloppe de toute espèce: gousse, cosse, coque...; tunique de l'œil »; les formes en -cle de l'a. et m. fr. proviennent d'un dimin. tunic[u]la « petite tunique » att. en lat. classique. Fréq. abs. littér.: 833. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 230, b) 1 817; xxes.: a) 1 222, b) 782. DÉR. Tuniqué, -ée, adj.a) Rare, plais. [En parlant d'une pers.] Revêtue d'une tunique. Ce sera rigolo. For-mi-dable. Bardot en diable. Début de notre show à nous: la reine Brigitte (comme la reine Christine). En velours marron. Moulée, tuniquée, bottée. Ourlée de martre-zibeline (Elle, 7 déc. 1967, p. 55, col. 1).b) Bot. [Corresp. à supra B 2] Enveloppé d'une ou plusieurs tuniques. En partic. Bulbe tuniqué. Bulbe formé de gaines minces enveloppantes, concentriques. D'autres Liliacées, comme l'Oignon (...), la Tulipe (...), la Jacinthe (...), ont un bulbe tuniqué: les feuilles gorgées de réserves alimentaires y sont très développées et se recouvrent mutuellement (Bot., 1960, p. 1204 [Encyclop. de la Pléiade]).− [tynike]. − 1resattest. 1306 « revêtu d'une cotte de maille » chevaux houssez & teniclez (Ordonance touchant les duels & les gages de Bataille ds Ordonnances des roys de France, t. I, p. 436), attest. isolée, à nouv. au xviiies. 1719 tuniqué « revêtu d'une tunique » (N. Gueudeville, trad. Les Comédies de Plaute, Leyde, P. Vander Aa, t. 8, p. 166), en partic. 1803 bot. (Boiste); de tunique, suff. -é. BBG. − Quem. DDL t. 16. |