| TRANSPOSITION, subst. fém. A. − 1. a) Vx. Changement de lieu. (Dict. xixeet xxes.). − BEAUX-ARTS. Technique de restauration consistant à transférer sur un nouveau support une peinture, une mosaïque (d'apr. Nér. Hist. Art 1985). Synon. rentoilage (dér. s.v. rentoiler). b) Fait qu'une chose soit placée avant ou après la position qu'elle devrait normalement occuper dans une série. Transposition de livres dans un rayon de bibliothèque. − BIOL. ,,Changement dans la localisation chromosomique d'un élément génétique`` (L'Hér. Génét. 1979 et Méd. Biol. Suppl. 1982). − CHIM. ORG. ,,Changement de position d'atome ou de radical dans une molécule provoquant la formation d'un isomère`` (Grand. 1962). Synon. réarrangement (dér. s.v. réarranger). − GÉOM. On donne à la rotation de 180 autour d'une droite le nom de symétrie ou encore de transposition par rapport à cette droite (Hadamard, Géom. ds espace, 1921 [1901], p. 97). − INDUSTR. GRAPH. Interversion, dans un texte composé, de signes, de lignes, de pages, etc. (Dict. xixeet xxes.). − LING., vieilli. Permutation de phonèmes; déplacement d'un mot, d'un groupe de mots par rapport à l'ordre dit direct, logique, naturel. Synon. métathèse.Quant à la construction, je voudrais qu'elle suivît toujours la construction pleine et directe, dans toutes ses phrases et parties de phrase; et qu'on n'y admît d'ellipses que celles qui sont faciles à suppléer, et de transpositions ou d'incises, que celles réellement utiles pour faire sentir la relation d'une proposition avec celle qui précède ou qui suit (Destutt de Tr., Idéol. 2, 1813, p. 413).Fanferluche. Palfernier. Pimpernelle. Sersifis. Le trait commun aux trois premiers de ces mots populaires c'est la transposition de l'r et de l'e, re devenu er (Gourmont, Esthét. lang. fr., 1899, p. 138). − PATHOL. ,,Déplacement de certains organes, et particulièrement des viscères, tel que l'organe considéré se trouve du côté opposé à celui qu'il occupe normalement`` (GDEL). ♦ Transposition artérielle ou des gros vaisseaux. ,,Malformation congénitale caractérisée par une naissance de l'aorte du ventricule droit et une naissance de l'artère pulmonaire du ventricule gauche`` (Méd. Biol. Suppl. 1982). c) P. anal. Déplacement dans le temps. Vous voudrez bien observer qu'en ce qui concerne le changement d'heure des matines, il consiste en une simple transposition de l'horaire et que nous n'y gagnons pas une minute de repos de plus (Huysmans, Oblat, t. 1, 1903, p. 221). − CHRONOL. Modification dans l'ordre de succession. La généalogie de Seth reproduit exactement le même nombre de phases que celle de Caïn lui-même (...). Seulement il y a une transposition remarquable dans l'ordre de ces générations (P. Leroux, Humanité, 1840, p. 585). − RHÉT., vieilli. Fait de placer, dans un récit, un épisode ou un développement ailleurs qu'à la place que justifierait la chronologie des événements. [C'est ici] que se présente la meilleure occasion, sans doute, de revenir sur (...) le jugement du duc d'Enghien. On va connaître tout à l'heure la véritable cause de cette transposition, et d'un aussi long retard (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 376). 2. Inversion de l'ordre des termes d'un rapport. Synon. permutation, renversement.Chacun d'eux donnait le bras à la femme de l'autre. Au dire de la chronique scandaleuse, cette transposition était complète (Balzac, Illus. perdues, 1837, p. 78). − LOG., MATH. Transposition d'ordre ou, p. ell., transposition. Changement de l'ordre d'application des propositions ou des termes d'une série. Synon. inversion, renversement.Pour avoir des exemples de ces renversements de séries partielles, de ces transpositions d'ordre entre des propositions qui ont le même degré de généralité, il suffit de comparer des éléments de géométrie rédigés sur des plans différents (Cournot, Fond. connaiss., 1851, p. 388).Le produit de deux facteurs n'est plus le même selon l'ordre dans lequel on les multiplie. Quelle perversité, n'est-il pas vrai? Certaines transpositions semblent ne devoir introduire rien d'imprévu (Gds cour. pensée math., 1948, p. 448). B. − MUS. Notation ou exécution d'une composition musicale dans une tonalité différente de celle dans laquelle elle est écrite. Au moyen de la transposition, deux bonnes cantatrices, quoique avec des voix différentes, peuvent souvent produire un grand effet dans le même rôle (Stendhal, Rossini, t. 2, 1823, p. 99).Les équivalences mélodiques par modulation et transposition sont extrêmement fréquentes dans l'art grégorien (Potiron, Mus. église, 1945, p. 56). C. − 1. Adapter le contenu d'une œuvre, un thème à un contexte différent, dans une forme différente. C'est donc sous une transposition hégélienne du christianisme que Marx se représente le mouvement moderne d'émancipation (Jaurès, Ét. soc., 1901, p. xliv). 2. Transfert, sous une forme adaptée, des méthodes ou des techniques d'un domaine dans un autre. Mettez (...) à l'acquit de M. Doré d'amusantes fantasmagories de campagne, des jeux de lumière comme au théâtre, une transposition de l'art du décor dans le dessin (Huysmans, Art mod., 1883, p. 215).[Schrodinger a démontré dès 1926] que le formalisme de la mécanique quantique pouvait être considéré comme une simple transposition algébrique de celui auquel aboutissait la mécanique ondulatoire (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 142). − INFORMAT. ,,Modification plus ou moins importante d'un logiciel pour réaliser sa portabilité et le rendre exploitable sur une machine différente de celle pour laquelle il avait été écrit à l'origine`` (Morvan Informat. 1981). 3. a) Expression du réel par des moyens symboliques relevant de l'analogie, de l'image, des différents langages artistiques. Transposition picturale du réel. Hors de l'art, c'est-à-dire dans les œuvres qui n'ont plus pour but la transposition de la vie en écritures, en formes, en sonorités (Gourmont, Esthét. lang. fr., 1899, p. 301).Le thème bergsonien de la durée (...) devait trouver, grâce à Proust, sa transposition romanesque (Mauriac, Journal 1, 1934, p. 39). b) Passage d'un code à un autre. La linguistique n'examine les systèmes graphiques de communication que s'ils dépendent complètement ou partiellement du système linguistique, s'ils sont à différents degrés, une transposition graphique de ce que le langage manifeste par des signes vocaux (Alarcos-Llorachds Langage, 1968, p. 519). 4. Échange, transfert. D'aventurier, je me suis fait artiste (...) transposition, radicale en apparence, de mes facultés actives (Bloy, Femme pauvre, 1897, p. 205).On ne se fait pas en quelques jours à cette transposition, sinon de regarder des bruits, du moins d'écouter avec les yeux (Proust, Guermantes 2, 1921, p. 332). 5. LING. Passage d'une classe à une autre. a) Transposition (fonctionnelle). Changement de catégorie syntaxique. Synon. translation.Transposition fonctionnelle (BallyLing.1950, p. 116): Lorsque, en 1934, je me suis décidé à publier (...) mon article intitulé: « Comment construire une syntaxe » (...) je me suis trouvé avoir à choisir entre le nom de translation, que j'avais toujours donné personnellement au phénomène, et celui de transposition, que j'avais ensuite trouvé chez Bally, chez M. Juret et chez M. Guillaume. Si, tout bien pesé, je me suis tenu au terme précédemment adopté (...) c'est d'abord parce que le terme de translation est plus bref d'une syllabe et partant maniable, et c'est surtout parce qu'il est la clé de tout un système terminologique commode...
Tesnière, Élém. de synt. struct., 1965, p. 383. b) Transposition sémantique. Changement de sens. La transposition fonctionnelle (qui relève exclusivement de la grammaire) doit être soigneusement distinguée de la transposition sémantique, qui intéresse aussi le lexique, par le fait que les signes changent de signification (généralement par emploi figuré) en même temps que de catégorie; c'est le cas p. ex. lorsque sang devient adjectif dans sanglant (comparez « vaisseau sanguin », transposition fonctionnelle), et glace dans (un froid) glacial (comparez « la période glaciaire ») (BallyLing.1950, p. 116). 6. RHÉT., vieilli. Application à une catégorie sémantique différente. Synon. hypallage.Je note en passant [dans Fromentin] ce « ciel balayé, brouillé, soucieux, » cette transposition et comme ce reflet de l'âme au ciel et aux objets environnants (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 7, 1864, p. 110). 7. TISS. Reproduction totale ou partielle, mais toujours exacte et point par point, des effets d'une mise en carte. (Dict. xixeet xxes.). Prononc. et Orth.: [tʀ
ɑ
̃spozisjɔ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Ca 1270 [ms. xves.] « traduction, adaptation » (L'Art d'Amours, éd. B. Roy, p. 281, ligne 5347), attest. isolée. A. 1. 1488 « action de porter d'un lieu dans un autre » transposition de lieu (La Mer des Histoires, I, 34b, édit. 1491 ds Rom. Forsch. t. 32, p. 175); 1590 « action d'intervertir l'ordre de plusieurs choses » quelque transposition de chronologie (Montaigne, Essais, III, 9, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, t. 2, p. 964); 2. a) 1671 « renversement de l'ordre habituel des mots, inversion » (Bouhours, Les Entretiens d'Ariste et Eugène, 2eentretien, éd. F. Brunot, p. 38); b) 1933 ling. (Mar. Lex.). 3. 1690 impr. (Fur.); 4. 1830 méd. « déplacement de certains organes » (Encyclop. méthod. Méd. t. 13: la transposition du foie à gauche entraîne nécessairement celle du cœur à droite); 5. 1876 tissage (Lar. 19e); 6. 1933 transpositions ... moléculaires (Lar. 20e); cf. 1934 par transposition moléculaire (Boullanger, Malt., brass., p. 414); 7. 1964 électr. (Lar. encyclop.). B. 1. 1680 « action de transformer quelque chose pour l'appliquer à un domaine différent » (Mllede Scudéry, Les Conversations, Dialogue ds Littré); 2. 1694 mus. Transposition d'un ton à un autre (Ac.); 3. 1966 psychol. (Battro). Dér. de transposer*; suff. -(i)tion* sur le modèle de poser*/position*. Fréq. abs. littér.: 231. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 84, b) 111; xxes.: a) 226, b) 714. |