| * Dans l'article "TRANSGRESSER,, verbe trans." TRANSGRESSER, verbe trans. A. − Ne pas respecter une obligation, une loi, un ordre, des règles. Synon. contrevenir à, désobéir à, enfreindre.Transgresser les commandements de Dieu, la loi divine, chrétienne, son/ses devoir(s), les règles de la logique; transgresser la Constitution, le protocole, la foi jurée. − Monseigneur, répondit le laquais avec un respect prosterné (...) si j'ai osé transgresser la consigne, ce n'est pas sans de bonnes raisons. M. le marquis de Bruyères est là qui voudrait parler à M. le duc pour affaire d'honneur (Gautier,Fracasse,1863,p. 227).« (...) M. Gide veut être un pécheur, il désire des lois pour goûter le plaisir de les transgresser, il réclame des actions défendues (qu'il est délicieux de les accomplir!...) (...) » (Gide, Journal, 1910, p. 298). ♦ Part. passé adj. L'expiation qui n'est pas consentie n'élève pas, elle venge seulement la loi de justice transgressée (Péladan, Vice supr., 1884, p. 199). ♦ Empl. abs. Mais ne prête pas l'oreille à ses tentations; avertis ta Plus Faible; profite d'avoir appris d'un exemple terrible la récompense de la désobéissance: ils auraient pu demeurer fermes; cependant ils tombèrent; qu'il t'en souvienne, et crains de transgresser (Chateaubr., Paradis perdu, 1836, p. 75).Puisque chaque moi est, en lui-même, foncièrement criminel envers l'État et le peuple, sachons reconnaître que vivre, c'est transgresser. À moins d'accepter de mourir, il faut accepter de tuer, pour être unique (Camus, Homme rév., 1951, p. 87). − P. ext. Aller contre ce qui est habituel, ce qui semble naturel. Trois poèmes suffisent à faire un poète immortel. Circonstances biographiques, sensations, lectures, écritures d'autrefois, mythes, y sont proprement méconnaissables. Transgressés, dévorés, ne ressemblant plus à ce qu'ils furent (Durry, Nerval, 1956, p. 164). B. − Aller au-delà d'une limite. 1. [Dans l'espace] Traverser, franchir. Je suis Henry; du moins, Reine, je suis son âme Qui par sa volonté, plus forte que l'Enfer, Ayant su transgresser toute porte de fer Hélas! vient pour te dire avec cette voix morte Qu'il est d'autres amours encor que ceux d'ici (Verlaine,
Œuvres compl., t. 1, Jadis, 1884, p. 378).Déjà il m'arrivait de souhaiter transgresser le cercle où j'étais confinée. Une démarche, un geste, un sourire me touchaient: j'aurais voulu courir après l'inconnu qui tournait le coin de la rue (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p. 56). − GÉOL. [Le suj. désigne la mer] Avancer sur la côte au-delà des limites antérieures. Quand, dans une série de couches concordantes (...), les couches supérieures s'avancent plus loin que les couches inférieures, on dit de cette disposition qu'elle est transgressive, parce qu'elle dénote que la mer a transgressé peu à peu ses limites pour faire des dépôts de plus en plus étendus (Boule, Conf. géol., 1907, p. 38). 2. Au fig. Dépasser ce qui paraît naturel, possible, sortir d'un cadre donné. Par une imprudence fatale, ayant tantôt méconnu, tantôt transgressé sa limite, il s'est lancé dans un dédale d'erreurs et d'infortunes (Volney, Ruines, 1791, p. 46).Les néo-platoniciens du IIIesiècle et leur maître Plotin, réagissaient eux aussi contre la dictée des sens, contre le culte du visible et du palpable, aspiraient à les transgresser (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 131). Prononc. et Orth.: [tʀ
ɑ
̃sgʀese], [tʀ
ɑ
̃z-], [-gʀ
ε-], (il) transgresse [-gʀ
εs]. Passy 1914, Martinet-Walter 1973 [tʀ
ɑ
̃z-] (Martinet-Walter 13/17). Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1385, 30 mai transgresser le deffence (Reg. de la loi, Arch. de Tournai ds Gdf. Compl.), rare av. le xvies., v. Trénel, p. 214; 2. 1520 intrans. « franchir pour parvenir au delà » (G. Michel, tr. Suétone, IV, 139 rods Hug.: transgressant jusques en Euphrate); 1572 éd. trans. (G. Du Bellay, Mém. l. V, 138 rods Gdf.: transgresser les bornes [...] de son royaume). Dér., à l'aide de la dés. -er, du lat. transgressus, part. passé de transgredi « traverser, franchir », fig. « dépasser, excéder la mesure », cf. lat. chrét. transgressae legis invidia (ives., St Hilaire), transgressa prohibitione (ive-ves., St Augustin ds Blaise Lat. chrét.). De transgredi et ses altér. vulg. transgredire (viies., Latham), transgredere (Gl. Reichenau; 802 transgredere praeceptum ds Du Cange; v. aussi Trénel, p. 214, note 2), les empr. m. fr. transgredir « transgresser (une loi) » (ca 1350 [part. prés. subst.] Gilles li Muisis, Poésies, I, 26 ds T.-L.) et transgreder « id. » (1488 ds Gdf.). Cf. dès ca 1175 le subst. transgression*. Fréq. abs. littér.: 85. DÉR. Transgressif, -ive, adj.a) Géol. Qui correspond à, résulte d'une transgression. Dans les mêmes falaises, on peut observer des cordons de silex entrecroisés, discordants et transgressifs, soulignant dans la perfection les mouvements qui ont affecté la craie en voie de dépôt (Cayeux, Causes anc. et act. géol., 1941, p. 64).V. supra ex. de Boule.b) Océanogr. Il s'agit d'un poisson [la morue] vivant en eau froide (...) qui s'écarte des eaux dites transgressives, c'est-à-dire des masses chaudes remontant des régions tropicales vers les côtes septentrionales de l'Europe (Boyer, Pêches mar., 1967, p. 63).− [tʀ
ɑ
̃sgʀesif], [tʀ
ɑ
̃z-], [-gʀ
ε-], fém. [-i:v]. − 1resattest. a) 1842 « qui passe par dessus ou au delà » (Ac. Compl.), 1866, 2 janv. géol. à propos de couches de terrain se déposant sur les précédentes stratification transgressive (ds C.r. de l'Ac. des sc., t. 62, p. 46), b) id. « qui transgresse une loi » (Ac. Compl.); de transgresser sur le modèle de progressif* (FEW t. 13, 2, p. 204a, note 1). |