| TARDIF, -IVE, adj. A. − Anton. de prompt, rapide. 1. Tardif (à + inf.).Qui est lent à entreprendre ou à faire quelque chose. Tardif à s'émouvoir. Il est vrai, mon cœur est fermé à vous, ô mon Dieu, il est tardif et obstiné, il est lent à vous accueillir (Psichari, Voy. centur., 1914, p. 158).Les plantes, si tardives à se sélectionner et à s'équilibrer (Pesquidoux, Livre raison, 1928, p. 253). 2. Vx ou poét. Qui va lentement. Pas tardif. Partagez le bonheur d'Hélène, qui vers le foyer de son père, d'un pied lent et tardif mais d'autant plus ferme, s'approche toute en joie (Nerval, Sec. Faust, Hélène, 1840, p. 224). − Empl. subst. en cont. métaph. La France a marché vite en juillet 1830 (...). Maintenant beaucoup sont essoufflés (...). On veut attendre les tardifs qui sont restés en arrière (Hugo, Roi s'amuse, 1832, préf., p. 349). B. − Anton. de précoce. 1. Qui présente du retard dans son plein développement. Honorine Porrichet (...) avait mené une enfance maladive. D'une intelligence lente et tardive, on l'avait d'abord crue idiote (A. France, Anneau améth., 1899, p. 55). 2. Qui se développe plus lentement ou plus tard que les autres. Fleur tardive, fruit tardif; couvée tardive, poulet tardif. De tardifs chrysantèmes, couleur de rouille gracieusement entremêlés à des branchettes de cryptomeria (Loti, Trois. jeun. MmePrune, 1905, p. 74).Les ormes, plus tardifs, se couvraient de duvet (Arnoux, Paris, 1939, p. 267). C. − 1. Qui se manifeste ou qui a lieu tard, après le temps normal, vers la fin d'une période, d'une évolution. Dans ces cas, l'état physique m'a toujours paru accompagné d'un état moral parfaitement correspondant. Mais, quand la destruction des facultés génératrices est le produit tardif des maladies, ou de l'âge, elle n'a pas, à beaucoup près, la même influence (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 1, 1808, p. 328).Nos désirs cherchent toujours à anticiper sur l'ordre des événemens, et notre impatience ne saurait attendre cette tardive maturité (Senancour, Obermann, t. 1, 1840, p. 217). ♦ Vendange* tardive. − Domaine artist. ou ling.Latin tardif. Je suis allé regarder la cathédrale au clair de lune. Profond mystère de cette gigantesque masse noire que la lune effleure d'un rayon. Je déchiffre à grand'peine un petit coin du portail, des scènes de la création, d'un gothique tardif, tout cela rongé comme si des flammes avaient léché ces pierres (Green, Journal, 1935, p. 44).Un hôtel gothique, d'un Viollet-le-Duc tardif, plein d'escaliers secrets, de tourelles et d'oubliettes (Morand, Fin siècle, 1957, p. 176). 2. a) Qui se situe à une heure avancée de la matinée, de la journée ou de la nuit. Déjeuner, lever tardif. Le soleil chauffait encore la rue Notre-Dame malgré l'heure tardive (Roy, Bonheur occas., 1945, p. 301). b) Qui agit ou qui se présente à une heure avancée. À l'arrêt de l'auto, maître d'hôtel, garçons et sommeliers, s'empressèrent au-devant de ces clients tardifs, et leur firent cérémonieusement conduite, de bosquet en bosquet (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 221).[P. méton. du subst.] Et, ce soir, mon seul bien est ce roulement des voitures tardives et rares sur le pavé de ma rue, et la certitude que personne ne viendra me chercher (Alain-Fournier, Corresp.[avec J. Rivière], 1908, p. 323). 3. Qui vient trop tard, au moment où il n'y a plus rien à faire. Remords tardif. On m'avait fait même quelques avances de ce côté, mais, vu la différence d'âge, je me suis jugé; j'ai voulu être généreux et juste envers cette rose matinale. J'étais trop vieux pour cette aurore, et il m'eût déplu de l'exposer à des regrets tardifs (Amiel, Journal, 1866, p. 488). Prononc. et Orth.: [taʀdif], fém. [-i:v]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1remoit. xiies. « (d'une personne) lent à agir » tardis a + subst. (Psautier de Cambridge, 144, 8 ds T.-L.: tardis a forsenerie [ad furorem tardus]); 2equart xiiies. tardif a + inf. (Evangile des domées, 113, 25, ibid.: tardif a croire); 2. a) ca 1160 « (id.) qui vient trop tard pour pouvoir agir » (Eneas, éd. J. J. Salverda de Grave, 1644); b) ca 1200 « (d'une chose) qui vient trop tard » (Moralium in Job, éd. W. Foerster, p. 354, 4); 3. ca 1200 « qui se situe à une heure avancée de la nuit », de la journée» hore tardive (Li Dialoge Gregoire lo pape, p. 76 ds T.-L.); 4. ca 1223 « qui se meut, avance lentement » ici, n. propre Tardis li limaçons (Gautier de Coinci, Miracles, éd. V. Fr. Koenig, 2 Mir 27, 505); 1342 (Renart le contrefait, 14374 ds T.-L.: Comme lymechon fu tardive [une beste]); 5. a) 1549 « paresseux, nonchalant [segnis] » (Est.); b) [1552 tardif a comprendre (Est., s.v. tardus)] 1561 « qui comprend lentement » esprit tardif et hebeté (Calvin, Institution chrestienne, Genève, I, 14, p. 10); c) 1694 « qui n'est en sa perfection que tard, qui présente un retard dans son développement » esprits tardifs (Ac.); 6. a) 1538 « (d'un fruit) qui vient tard à maturité » (Est., s.v. serus, serotinus: [poma] tardives, Qui meurissent apres le temps et Saison); 1636 foin tardif (Monet, p. 871 a); b) 1551 « qui se produit tard dans la saison » pluye tardive (Calvin, Bible, impr. J. Crespin, Osée, VI, p. 274 b); c) 1636 « né après ceux de son espèce » agneau tardif (Monet, p. 871 a). Du b. lat. tardivus (Notes tironiennes, éd. W. Schmitz, 57, 94 d'apr. W. Heraeus ds Arch. für lat. Lexicogr. t. 12, 1902, p. 74), dér. de tardus « lent »; le sens « tardif » s'est développé postérieurement dans la lang. parlée, le mot propre étant serus (Ern.-Meillet). Fréq. abs. littér.: 719. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 926, b) 770; xxes.: a) 1 130, b) 1 174. |