| TABLETTE, subst. fém. A. − HISTOIRE 1. Planchette, surface plane rectangulaire de petites dimensions, faite ou recouverte d'une matière tendre sur laquelle on écrivait ou dessinait à l'aide d'un style. Tablette à glissière; tablette d'argent, de bois, d'ivoire, de plomb. [L'] église de l'Ascension [à Jérusalem] était circulaire, comme l'indiquent les récits des auteurs et le plan dessiné sur des tablettes de cire, au VIIèmesiècle, par l'évêque Arculfe (Lenoir, Archit. monast., 1852, p. 249).À ses pieds luisait un objet d'ivoire. Il le ramassa: c'était une tablette à écrire, d'où pendait un style d'argent. La cire en était presque toute usée, mais on avait dû repasser plusieurs fois les mots tracés, et la dernière fois on avait gravé dans l'ivoire (Louÿs, Aphrodite, 1896, p. 35). 2. Au plur. Double feuillet souvent en ivoire, orné de sculptures sur la face extérieure, muni d'un fermoir et dans lequel étaient insérées des pages de parchemin, de papier. Le secrétaire en bois de rose regorgeait de merveilles inaccessibles (...) les tablettes de bal à feuillets de nacre, attachées à l'inutile éventail de jeune fille qui ne va jamais au bal (Colette, Mais. Cl.,1922, p. 119). − Loc. fig. Écrire, inscrire, mettre, noter sur ses tablettes. Prendre bonne note de quelque chose pour ne pas l'oublier. « Du nouveau encore un coup, mais qui soit exactement semblable à l'ancien! » Don Fernand: Ô sublime Guipuzcoan! Ô parole vraiment dorée! Je veux l'inscrire sur mes tablettes (Claudel, Soulier, 1929, 3ejournée, 2, p. 782).Je décrochai la mention « bien » et ces demoiselles, satisfaites de pouvoir inscrire ce succès sur leurs tablettes, me firent fête (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 156).Rayer qqc./qqn de ses tablettes. Synon. de rayer qqc./qqn de ses papiers.V. rayer B 3. 3. Vx. Ouvrage, livre dans lequel les matières sont présentées sous forme de résumé. Tablettes chronologiques. (Ds Bach.-Dez. 1882). 4. Plaque de marbre, de pierre sculptée ou portant une inscription commémorative posée sur ou décorant la façade d'un bâtiment, d'un monument. La façade (...) était d'un style Phellion. Au-dessus de la porte, il avait mis une tablette de marbre blanc sur laquelle se lisait en lettres d'or: Aurea mediocritas (Balzac, Pts bourg.,1850, p. 88).Il n'y a qu'à voir au Parthénon (...) les restes de ce qu'on appelle le type du beau. S'il y a jamais eu au monde quelque chose de plus vigoureux et « de plus nature », que je sois pendu! Dans les tablettes de Phidias, les veines des chevaux sont indiquées jusqu'au sabot et saillantes comme des cordes (Flaub., Corresp., 1851, p. 297). B. − 1. Petite planche placée dans les armoires, les bibliothèques ou fixée au mur, destinée à recevoir des livres ou divers objets. Synon. étagère.Bureau à tablette; tablette d'un secrétaire. Des bronzes antiques, d'élégans quinquets à globe, ont été disposés avec un goût infini sur des tablettes en citronnier, à filets de cuivre (Jouy, Hermite, t. 1, 1811, p. 200).J'ai fait ce rêve dans ma bibliothèque, et, quand mon heure sera venue de quitter ce monde, Dieu veuille me prendre sur mon échelle, devant mes tablettes chargées de livres! (A. France, Bonnard, 1881, p. 342). − En partic. [Dans certains transp. en commun] Planchette qui se rabat entre les sièges pour servir de table. Je partis par la gare du Nord dans (...) un wagon spécial de première classe (...) miroirs aux panneaux, tablettes d'acajou relevées au juste moment pour déjeuner ou dîner, etc. (Verlaine,
Œuvres compl., t. 5, Quinze jours en Holl., 1893, p. 199). 2. Plateau mince fait de matière solide et résistante qui sert de support, d'appui ou de décoration. Quand il monte à la tribune, il semble accablé. Appuyé des deux mains à la tablette d'acajou, il promène sur l'assemblée des yeux mourants (A. France, Vie littér., 1890, p. 329).Le duc avait fait poser une grande tablette de marbre rose drapée de volants de cretonne; la baignoire était également en marbre rose (Gyp, Province, 1890, p. 105). ♦ Tablette de cheminée. Plaque le plus souvent en pierre ou en marbre, profilée d'une moulure arrondie, qui est placée sur le chambranle d'une cheminée. Sur la tablette [de la cheminée] couverte de velours rouge, il y a au milieu un cartel en écaille (...) et de chaque côté deux flambeaux d'argent d'un modèle étrange (Balzac, Béatrix, 1839-45, p. 14).La pièce était de proportions modestes, avec une grande fenêtre divisée en petits carreaux et une cheminée de brique surmontée d'une tablette de bois peint (Green, Moïra, 1950, p. 26). − ARCHIT. Tablette d'appui. Dalle de pierre qui couvre l'appui d'une croisée, d'un balcon (d'apr. Havard 1890). 3. INFORMAT. Tablette graphique. ,,Périphérique d'entrée permettant la réalisation de graphiques sur l'écran de l'ordinateur ainsi que leur traitement`` (Virg. Micro-informat. 1984). En 1964, M. R. Davis et T. O. Gille ont présenté (...) la première tablette graphique opérationnelle (...). Du point de vue physique, cet outil d'entrée graphique se présente sous la forme d'une petite planche à dessin (...). Le principe de fonctionnement repose sur le repérage de la position d'un stylo spécial (...) à l'aide de ses coordonnées x et y (MorvanInformat.1981). C. − 1. Préparation pharmaceutique médicamenteuse solide, aplatie, rectangulaire ou ronde destinée à fondre dans la bouche. Si la maladie ne cède point, on fera faire usage des tablettes martiales apéritives, dont la malade prendra tous les jours une tablette pendant douze ou quinze jours (Geoffroy, Méd. prat., 1800, p. 394). 2. P. anal. a) Substance alimentaire solide, présentée sous forme de plaques rectangulaires. Tablette de bouillon, de guimauve, de réglisse. Les jeunes filles (...) s'occupaient, les unes à recouvrir les tablettes de chocolat d'une mince feuille de métal clair comme l'argent, les autres à envelopper deux par deux ces mêmes tablettes dans du papier blanc à vignettes (A. France,Pt Pierre,1918,p. 54).Dominique le vit tirer de sa poche une petite tablette dont soigneusement il enleva le papier, un morceau de chewing-gum qu'il mit dans sa bouche (Montherl., Songe, 1922, p. 182). b) Produit solide quelconque présenté sous cette forme. Tablette de combustible. Ce salaud n'a pas voulu brûler. − Brûler? − On a fauché des tablettes de phosphore aux Schleuhs dans le maquis; ça marche très bien d'habitude; mais peut-être que maintenant elles sont trop vieilles (...); j'ai attendu trois heures et le ventre est à peine entamé (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 562). Prononc. et Orth.: [tablεt]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1225 « planche posée pour mettre quelque chose » (Péan Gatineau, Vie de Saint-Martin, éd. W. Söderhjelm, 6312); 2. 1680 « petit ais qui sert à divers artisans et à divers usages » (Rich.); 3. 1701 « pièce de bois ou de pierre de peu d'épaisseur, posée à plat sur le chambranle d'une cheminée ou sur l'appui d'une fenêtre » (Fur.). B. 1. Ca 1280 « planchette de bois enduite de cire sur laquelle on écrivait avec un poinçon » (Clef d'amour, 2841 ds T.-L.); d'où a) 1466 mectre en mes tablettes (P. Michault, Doctrinal du Temps Present, éd. Thomas Walton, p. 41); b) 1694 ostez cela de dessus vos tablettes (Ac.); 1718 rayez cela de vos tablettes (ibid.); c) 1694 vous estes sur mes tablettes (ibid.); 2. 1660 « ouvrage dans lequel la matière est rédigée par ordre et en raccourci » (Molière, Sganarelle, 1, vers 34). C. 1. 1564 « médicament solide d'une forme aplatie » (A. Paré, Des Playes d'harquebuses, XIII, éd. J.-Fr. Malgaigne, t. 2, p. 167); 2. 1690 « préparation alimentaire moulée de forme aplatie » (Fur.). Dér. de table*; suff. -ette (v. -et). Fréq. abs. littér.: 375. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 513, b) 643; xxes.: a) 586, b) 459. Bbg. Dauzat Ling. fr. 1946, p. 32. − Saint-Gérand (J.-Ph.). Ét. d'un micro-syst. lex. La Licorne. 1976, no1, pp. 137-139, 147. |