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SOMNAMBULE, subst. et adj.
I. − Subst. et adj.
A. − (Personne) qui pendant son sommeil se livre à des actes automatiques comme la marche, la parole et qui n'en garde aucun souvenir à son réveil; (personne) qui est atteint(e) de somnambulisme. Un bruit inattendu tire souvent de leur léthargie des somnambules, sur qui la plus vive lumière n'a fait aucune impression, leurs yeux même étant ouverts (Cabanis,Rapp. phys. et mor., t. 2, 1808, p. 376).Elle est somnambule; sa fille l'enferme la nuit pour qu'elle n'aille pas effrayer les voisins (Martin du G.,Vieille Fr., 1933, p. 1032).
B. − P. anal. (Personne) qui effectue des actes de manière automatique, sans en avoir conscience, généralement sous le coup d'une émotion intense, d'une grande fatigue ou en ayant perdu le sens des réalités. Marcher comme un somnambule. C'étaient deux somnambules. Ils n'avaient pour ainsi dire que changé d'égarement. Ils ne savaient ni où ils étaient, ni ce qu'ils faisaient; ils se hâtaient machinalement, ils ne se souvenaient plus de l'existence de rien (Hugo,Travaill. mer, 1866, p. 444).Hermione, Roxane suivaient la loi de leur sang; elles se précipitaient, somnambules, vers l'objet de leur faim; elles n'imaginaient pas qu'elles pussent offenser personne (Mauriac,Vie Racine, 1928, p. 120).
Loc. adv. En somnambule. À la manière d'un somnambule, sans avoir conscience de ce qu'on fait. Il n'est que trop tentant de confondre avec la psychologie romantique du rêve certaines scènes des drames de Kleist, où les personnages agissent en somnambules et vivent sur un double plan de conscience (Béguin,Âme romant., 1939, p. 319).Elle a marché dans l'ombre, au hasard, en somnambule. Toute raide. Toute droite. Elle n'a touché ni le mur de la chapelle, ni un chien qui la flattait (Giraudoux,Lucrèce, 1944, II, 1, p. 95).
Loc. adj. De somnambule. Dont le comportement, la physionomie semblent appartenir à un somnambule. Air, obstination de somnambule; geste, yeux de somnambule. Elle tressaillit, se dressa, passa ses mains sur sa face, dans ses cheveux, se tâta le corps comme une folle; puis, avec des allures de somnambule, elle descendit (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Hist. fille de ferme, 1881, p. 34).C'est un Gênois, qui a traversé la révolution chinoise avec une tranquillité de somnambule (Malraux,Conquér., 1928, p. 23).
II. − Subst. Personne qui, soumise à un sommeil hypnotique ou magnétique, exécute des actes qui lui sont ordonnés et, en particulier, qui se livre à des pratiques de voyance ou de guérisseur. Vous serez comme les gens guéris par les somnambules, ils croient au bout d'un mois que la nature a tout fait (Balzac,Cous. Bette, 1846, p. 351).La somnambule lucide de ce praticien déclara à Strombeck qu'il possédait dans son secrétaire un papier écrit de sa main et contenant deux alinéas dont elle dit aussi le nombre de lignes (Amadou,Parapsychol., 1954, p. 95).
En appos. Il indiquait, avec l'obscure clarté d'un voyant somnambule, ou bien d'une pythie sous le souffle ardent du dieu, les linéaments de l'œuvre qui allait suivre, y compris le mystérieux largo qui relie l'adagio à la fugue (Rolland,Beethoven, t. 1, 1937, p. 309).
III. − Adj. Qui concerne le somnambulisme, qui est ou semble être le fait d'un somnambule. Pas somnambule. Il prononça pour la troisième fois, d'un air somnambule: − J'aurais dû la faire veiller (Mauriac,Génitrix, 1923, p. 343).
REM.
Somnambuliste, adj.,hapax. Somnambule (supra I B). C'est dans le cabinet et en présence de moi-même que je suis moins distrait ou somnambuliste (Maine de Biran,Journal, 1817, p. 21).
Prononc. et Orth.: [sɔmnɑ ̃byl]. Att. ds Ac. dep. 1718. Étymol. et Hist. 1. 1688 subst. « personne qui se lève tout endormie et qui marche, agit, parle sans s'éveiller » (Nouvelles de la République des Lettres, oct., p. 1104); 1812 adj. « qui se lève tout endormi et qui marche, etc. » (Mozin-Biber); 2. 1818 « personne qui est sous l'influence du sommeil magnétique » (Maine de Biran, Journal, p. 166). Comp. sav. du lat. somnus « sommeil » et de -ambulus (cf. praeambulus « qui marche devant », v. préambule), issu du verbe ambulare « marcher », sur le modèle du lat. class. funambulus (funambule*). Fréq. abs. littér.: 362. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 254, b) 571; xxes.: a) 848, b) 506.
DÉR. 1.
Somnambuler, verbe intrans.Agir, se comporter comme un somnambule, en somnambule. Il gardait pour lui la nuit et son âme. Chaque matin, M. Godeau éteignait le soleil et somnambulait (Jouhandeau,M. Godeau, 1926, p. 116).Part. prés. en empl. adj. Qui paraît automatique, inconscient. Il fut (...) une de ces marionnettes lamentables (...) à qui chaque heurt de la foule arrache une exclamation somnambulante: « Je l'avais bien dit » (A. Daudet,Nabab, 1877, p. 94). [sɔmnɑ ̃byle]. 1reattest. 1877 id.; de somnambule, dés. -er. Cf. aussi 1785 somnambuliser « agir en somnambule » (Corr. litt. secr., 7 avril, n o15 ds Proschwitz Beaumarchais, p. 349).
2.
Somnambulesque, adj.a) Vieilli. Qui concerne les somnambules (supra II). Un faquir assis au bord d'une pagode et qui, tuant la chair, fait arriver l'esprit à toute la puissance inconnue des facultés somnambulesques (Balzac,Cous. Pons, 1847, p. 125).b) Qui semble le fait d'un somnambule, qui en a le comportement, l'aspect. Paris cependant continue à résister par la toute-puissance de la force d'inertie. Une agitation quasi somnambulesque emplit les rues (Céard,Soir. Médan, Saignée, 1880, p. 209).Zola est triste, triste, d'une tristesse qui donne à son rôle de maître de maison quelque chose de somnambulesque (Goncourt,Journal, 1880, p. 70). [sɔmnɑ ̃bylεsk]. 1resattest. a) 1847 (Balzac, loc. cit.), b) 1860, 8 sept. regard somnambulesque (Goncourt, Journal, Paris, Flammarion/Fasquelle, 1935, p. 263); de somnambule, suff. -esque*.
BBG. Quem. DDL t. 37.