| SEMBLABLE, adj. et subst. I. − Adjectif A. − Épith. gén. postposée ou attribut 1. [Détermine un subst. sing. ou plur.] Qui a en commun avec une autre/d'autres entité(s) des caractéristiques essentielles, d'aspect ou de nature, au point de pouvoir être considéré comme appartenant au même type. a) [Avec compl. subst. introd. par à] Cette soirée fut semblable en apparence à mille soirées de leur existence monotone (Balzac,E. Grandet, 1834, p. 118).L'organisme adulte composé de milliards de cellules semblables, quant à leurs chromosomes, à cette cellule germinale (Ruyer,Cybern., 1954, p. 170).Semblable à soi-même. Inchangé. Le véritable amour est éternel, infini, toujours semblable à lui-même; il est égal et pur, sans démonstrations violentes (Balzac,Lys, 1836, p. 167).Quand ils lui parlaient d'amour elle restait semblable à elle-même, patiente, calme, muette tant qu'elle ne voyait rien qu'il leur fallût dire (Hémon,M. Chapdelaine, 1916, p. 192). − [Le compl. subst. désigne une entité de nature très différente: semblable à introduit le 2eélément d'une compar.] Une invisible main semblait enlever à ce paysage le dernier des voiles dont elle l'aurait enveloppé, nuées fines, semblables à ce linceul de gaze diaphane qui couvre les bijoux précieux (Balzac,Chouans, 1829, p. 12).Il arrive que Dieu, semblable au moissonneur, fauche des fleurs mêlées à l'orge mûre (Saint-Exup.,Citad., 1944, p. 531). b) [Avec effacement du compl. introd. par à, l'entité servant de réf. étant exprimée dans le cont.] Le fondateur du criticisme arrivait à une théorie de la matière fort peu différente de celle que nous avons esquissée, ainsi qu'à une façon toute semblable d'entendre la constitution des sciences (Renouvier,Essais crit. gén., 3eessai, 1864, p. 149): 1. ... car Margot se ressouvenant des dangers anciens, oublie la douleur de son cou meurtri dans le choc formidable de frayeur qui l'emplit toute à sa vue. Ah ! le corps étiré de l'oreillard, la chute inerte des sœurs sous le plomb cinglant: c'est un danger semblable qui la menace, et, sans comprendre la mort, elle la sent venir dans ce pas lourd qui s'avance vers elle.
Pergaud,De Goupil, 1910, p. 199. Quelque chose de semblable. Ce prince, jadis détesté, fut reçu par des acclamations telles qu'il n'en aurait pas autrefois reçu de semblables des moines, habitants de cet ancien couvent (Chateaubr.,Mém., t. 3, 1848, p. 106).Le moujik fonça de l'avant, comme une force de la nature, et (...) cinq cent mille communistes, portés par ce torrent de cent millions d'hommes, établirent leur dictature; (...) il ne pouvait être question de rien de semblable avec des Anglais, des Français, des Belges (J.-R. Bloch, Dest. du S., 1931, p. 294).♦ MUS. Mouvement semblable. ,,Celui dans lequel deux ou plusieurs parties harmoniques montent et descendent à la fois`` (Rougnon 1935, p. 40). Synon. usuel mouvement* parallèle.On évitera (...) de doubler une note évoluant chromatiquement au changement d'accord (...). Cependant étant donné la puissance d'expression et d'action harmonique de la basse, et lorsque le mouvement semblable peut être accepté (mais en montant seulement) (...) (Caussade,Techn. harm., 1931, p. 89). − Littér. ou vieilli. [Épith. antéposée] Lentement étouffée, et d'un semblable mal, La splendeur de Paris s'est éteinte avec Elle (Cros,Coffret santal, 1873, p. 70).Même cour carrée, plantée de quelques arbres, dont faisait le tour une haute galerie couverte, élargie à un endroit pour former préau: même disposition des classes tout du long de cette galerie; et sur les murs, entre les fenêtres, semblables moulages de bas-reliefs antiques (Lacretelle,Silbermann, 1922, p. 7). 2. [Détermine un subst. au plur.] Qui ont en commun des caractéristiques essentielles, d'aspect ou de nature, au point de pouvoir être considérés comme appartenant au même type. a) [Sans compl. introd. par entre] Les deux frères (...) regardaient fixement devant eux, en des attitudes semblables, pleines d'expressions différentes (Maupass.,Pierre et Jean, 1888, p. 305).Ils marchèrent, leurs deux ombres semblables devant eux: même taille, même effet du col de chandail (Malraux,Cond. hum., 1933, p. 287). ♦ MATHÉMATIQUES GÉOM. [En parlant de figures] ,,Ayant leurs angles homologues égaux et leurs côtés homologues proportionnels`` (Sc. 1962). Synon. homothétique.Deux divisions sont semblables [quand] (...) trois couples de points homologues divisent les droites qui les portent en segments proportionnels (Hadamard,Géom. ds espace, 1921 [1901], p. 364).Deux trièdres semblables sont nécessairement égaux, ce qui n'est pas le cas de deux triangles semblables. C'est que l'existence de figures semblables est particulière à la géométrie euclidienne (Gds cour. pensée math., 1948, p. 49).ALG. [En parlant de quantités, de termes] Qui comportent les mêmes lettres affectées des mêmes exposants. De même qu'en algèbre on supprime les quantités semblables, vous bifferez les raisons qui se balancent (France,Vie littér., 1888, p. 14). − [Avec compl. prép. évoquant le domaine ou l'élément de ressemblance] La France, l'Allemagne, l'Angleterre (...), si différentes de destinées, si semblables de misère (Quinet,All. et Ital., 1836, p. 64).Ces deux existences déracinées, différentes par l'âge, semblables par le deuil (Hugo,Misér., t. 1, 1862, p. 525).Deux objets semblables en toutes leurs propriétés font le même usage (Jolley,Trait. inform., 1968, p. 22). b) [Avec pron. plur. introd. par entre et renvoyant au subst. déterminé] Les avenues étaient tout à fait désertes, et si semblables entre elles qu'ils s'y perdirent (Aragon,Beaux quart., 1936, p. 311).La nature et la méthode des sciences de chaque groupe de deux sont infiniment plus semblables entre elles deux qu'elles ne le sont avec les deux sciences du groupe précédent ou avec celles du groupe suivant (Marin,Ét. ethn., 1954, p. 44). B. − Épith. antéposée. De cette nature, de ce genre. Synon. tel. 1. Vieilli. [Avec art. indéf.] Toutes mes gloires m'avaient conduit là, au milieu de cette population souffrante et déshéritée. Était-ce la peine de monter si haut pour aboutir à une semblable décadence? (Reybaud,J. Paturot, 1842, p. 431): 2. Je suppose que des êtres soient sensibles à l'influence de ce fluide [fluide supposé et qui pénètre entre les molécules de notre matière] et insensibles à celle de notre matière (...). Ou bien encore, si ces êtres rejetaient notre logique et n'admettaient pas, par exemple, le principe de contradiction. Mais vraiment je crois qu'il est sans intérêt d'examiner de semblables hypothèses.
H. Poincaré,Valeur sc., 1905, p. 246. 2. [Sans art.] Lui, du moins, Antricon-Balastor, chargeait à fond, et, contre semblable polichinelle, on avait un assaut à soutenir, après tout (Cladel,Ompdrailles, 1879, p. 279).Je n'ai jamais vu en semblable effervescence cette population de bandits qui, d'ordinaire, se fichent de tout, même de la politique (Colette,Cl. école, 1900, p. 272). II. − Substantif A. − masc. sing. à valeur de neutre. Ce qui est semblable. Ce devrait être assez d'un peu de logique et du pouvoir d'ouvrir les yeux, pour discerner le semblable du différent (Renouvier,Essais crit. gén., 3eessai, 1864, p. 94).La critique du témoignage s'appuie sur une instinctive métaphysique du semblable et du dissemblable, de l'un et du multiple (M. Bloch,Apol. pour hist., 1944, p. 55). B. − sing. ou plur., gén. masc. 1. Personne ou chose semblable à une autre. La guérison par les semblables, c'est de l'homéopathie, en somme (Lorrain,Phocas, 1901, p. 87): 3. C'est un des charmes de la Compagnie qu'elle ne soit pas une pure collection de gens de lettres (...). Les semblables ne sont pas améliorés par les semblables; mais plutôt empirés. Les hommes de même métier s'endurcissent chacun dans sa manière de faire et de différer de ses pairs...
Valéry,Regards sur monde act., 1931, p. 294. ♦ [Avec adj. poss.] Il faut que M. Marcel et ses semblables entendent que ces vertus personnelles, que ces intentions généreuses n'entrent précisément pas en ligne de compte (Nizan,Chiens garde, 1932, p. 131). ♦ Plus rare. [Avec de + subst. désignant la/les pers. ou chose(s), élément(s) de réf.] Il suffit qu'il sache et comprenne bien une seule chose pour qu'il se sente en cela le frère et le semblable de tous ceux qui savent et comprennent (Alain,Propos, 1921, p. 201).Il y a des œuvres qui sont les semblables d'autres œuvres; il en est qui n'en sont que les inverses (Valéry,Variété II, 1929, p. 197). 2. [Gén. précédé d'un adj. poss.] Être humain par rapport aux autres êtres humains. À l'heure où ses semblables courent l'héritière ou revendent des autos, le marquis s'était exilé (Montherl.,Bestiaires, 1926, p. 387): 4. Ayant éprouvé que certaines pratiques envers ses semblables avaient l'effet de modifier à son gré leurs affections et de diriger leur conduite, il employa ces pratiques avec les êtres puissans de l'Univers; il se dit: « Quand mon semblable, plus fort que moi, veut me faire du mal, je m'abaisse devant lui, et ma prière a l'art de le calmer (...) »
Volney,Ruines, 1791, p. 218. − Rare, au fém. Être humain de sexe féminin. Je vague depuis le matin En proie à des loisirs coupables, Épiant quelque grand destin Dans l'œil de mes douces semblables (Laforgue,Poés., 1887, p. 229). Prononc. et Orth.: [sɑ
̃blabl]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1165 sanlables « qui se ressemblent » (Guillaume d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 1919); b) 1267 [date du ms.] adj. « qui ressemble à » (Wace, Vie de Ste Marguerite, éd. E. A. Francis, 368, ms. A); c) ca 1265 « sert à introduire le deuxième terme d'une comparaison » (Brunet Latin, Trésor, éd. F. J. Carmody, p. 370); d) 1671 être semblable à soi-même (Pomey); 2. a) 1484 math. nombre semblable (N. Chuquet, Le Triparty en la science des nombres, table des matières ds Quem. DDL t. 1); b) 1639 géom. (Mersenne, Les Nouv. pensées de Galilée, éd. Costabel et Lerner, p. 69); 3. a) 1587 « s'emploie avec une valeur démonstrative pour renvoyer à une chose, une personne dont on vient ou dont on va parler » (F. de La Noue, Discours politiques et militaires, 347 ds Littré); b) 1669 épith. à valeur dém. et toujours antéposé « de cette nature » (Molière, Tartuffe, II, 4); 4. a) 1370-72 subst. « personne ou chose qui ressemble à une autre » (Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, 425); b) 1406-09 empl. avec un adj. poss. « désigne un être animé considéré par rapport à ceux de son espèce » (Bouciquaut, Livre des fais, éd. D. Lalande, p. 43); 1538 il n'a pas son semblable (Est.). Dér. de sembler*; suff. -able*. Fréq. abs. littér.: 7 928. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 17 735, b) 9 105; xxes.: a) 6 976, b) 9 508. Bbg. Quem. DDL t. 1. |