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SCRIBE, subst. masc.
A. − HISTOIRE
1. Celui qui pratique l'écriture, qui est habile dans l'art d'écrire.
a) [Dans l'Antiquité, partic. en Égypte et en Mésopotamie]
α) Celui qui occupait les fonctions de rédacteur ou de copiste des textes liturgiques, funéraires ou juridiques, de juriste, de secrétaire royal, parfois d'écrivain public. Sennachérib, Sargon ou Assurbanipal ordonne à ses scribes d'écrire sur la brique: « Mes chars de guerre écrasent les hommes et les bêtes et les corps de mes ennemis (...) » (Faure,Hist. art, 1909, p. 61).La classe des scribes formait la base de l'administration de l'État et c'est chez elle que se recrutait l'élite intellectuelle du pays [l'Égypte] (M.-A. Hussein, Les Orig. du livre du papyrus au codex, trad. par R. Savoie, 1971, p. 13).
β) Représentation de ce personnage. Le scribe accroupi (...) est effrayant de vérité, d'application directe à la fonction qu'il accomplit (Faure,Hist. art, 1909, p. 50).
b) [Dans les monastères, les chancelleries] Synon. de copiste.Scribe monastique. Plusieurs scribes, transcrivant un texte, ne feront pas exactement les mêmes fautes aux mêmes endroits (Langlois, Seignobos,Introd. ét. hist., 1898, p. 73).L'originalité [de la méthode de Sickel] (...) consiste avant tout dans une comparaison aussi minutieuse que possible des écritures et du style des documents émanés d'une même chancellerie, en vue d'en déterminer les scribes et les rédacteurs (L'Hist. et ses méth., 1961, p. 659).
2. HIST. JUIVE. [À l'époque du Second Temple] Celui qui était versé dans les Écritures, qui était capable de les interpréter, de les enseigner; docteur de la Loi; en partic., Sage de la Grande Synagogue depuis l'époque d'Ezra jusqu'à celle de Siméon le Juste (environ 500 à 300 avant J.-C.). Ezra est l'ancêtre des scribes (Soferim) qui, d'abord de concert avec les grands-prêtres de Jérusalem, plus tard avec une certaine indépendance à l'égard du sacerdoce, régissent la vie spirituelle d'Israël et préparent les fondations de l'édifice talmudique (Weill,Judaïsme, 1931, p. 20).
[Dans le N.T., associé au pharisien dans une même accusation de formalisme et d'hypocrisie] Qui est-ce qui se scandalisoit, à cause des malades qu'il [le Christ] guérissoit le jour du Sabbat? Les scribes et les pharisiens. Qui l'interrogeoit insidieusement et lui tendoit des pièges pour le perdre? Les scribes et les pharisiens (Lamennais,Paroles croyant, 1834, p. 202).
Rem. Aux deux premiers s. de l'ère chrét., le terme hébreu sofer « scribe » ne désigne plus le docteur de la Loi appelé à cette époque, dans les sources rabbiniques hakham « sage », mais une personne moins éminente, copiste, rédacteur de documents légaux, notaire, enseignant d'école primaire. Auj., le sofer, le scribe, est celui qui a qualité pour écrire les rouleaux de la Tora (Sefer-Tora) destiné à l'usage synagogal (v. E. Gugenheim, Les Portes de la Loi, 1982, p. 342).
B. − [À l'époque mod.] Vieilli
1. Celui qui a pour profession d'écrire à la main, greffier, secrétaire, écrivain public. Un homme public (...) ne peut, ne doit pas écrire l'orthographe. Ses idées doivent courir plus vite que sa main (...) il faut qu'il mette des mots dans des lettres, et des phrases dans des mots; c'est ensuite aux scribes à débrouiller tout cela. « Or, l'Empereur laissait beaucoup à faire aux scribes (...) » (Las Cases,Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 148).Scribe et calligraphe, il écrivait des lettres pour les servantes et faisait des écriteaux pour les marchands ambulants (France,P. Nozière, 1899, p. 86).
Avec une connotation péj. Employé aux écritures. Synon. gratte-papier.Scribe militaire, officiel; scribe d'état-major; scribe distrait, ignorant; scribe de banlieue. Il renvoya le papier au War-Office. Là, suivant une vieille et sage règle, un scribe perdit le dossier et le bon officier n'entendit plus jamais parler de cette bagatelle (Maurois,Sil. Bramble, 1918, p. 184).Elle les fit entrer dans une pièce où un scribe à lunettes suait au-dessus d'un faux col dur et de paperasses à tamponner de cachets officiels (Queneau,Loin Rueil, 1944, p. 186).
2. Auteur, écrivain sans talent. Synon. scribouilleur (dér. s.v. scribouiller).[Sarcey], lorsqu'il n'occupera plus le rez-de-chaussée du Temps, peut s'attendre à être traité de bas scribe et de pauvre plumitif dramatique! (Goncourt,Journal, 1892, p. 340).J'avoue que le copieux improvisateur dont vous me semblez surfaire singulièrement les élucubrations effarantes [Balzac], m'a toujours paru un scribe insuffisamment méticuleux (Proust,Sodome, 1922, p. 1050).
Prononc. et Orth.: [skʀib]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1269-78 antiq. juive (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 11578); b) 1872 antiq. « celui qui écrit les textes officiels, les actes publics, qui copie les écrits » (Littré); 2. a) 1461 « celui qui fait profession d'écrire à la main, de faire des copies » (Ord., XV, 22 ds Gdf. Compl.); b) 1694 péj. « employé de bureau, commis aux écritures » (Ac.); 3. 1823 « mauvais écrivain » (Boiste). Empr. au lat.scriba « copiste, scribe, secrétaire »; en lat. chrét. « docteur de la loi, chez les Juifs », dér. de scribere « écrire » (v. écrire). Fréq. abs. littér.: 133.