| * Dans l'article "ROTURIER, -IÈRE,, subst. et adj." ROTURIER, -IÈRE, subst. et adj. I. − Substantif A. − HIST., subst. masc. plur. Classe sociale composée d'hommes libres qui ne sont ni clercs ni nobles et comprenant les bourgeois et les vilains (d'apr. Lep. 1948). Synon. roture.L'État, les communautés, les seigneurs et les roturiers se partageaient la province dans une proportion que nous n'avons trouvée nulle part indiquée rigoureusement (Guyot,Agric. Lorr., 1889, p. 12). B. − Personne appartenant à cette classe; plus gén., personne qui n'est pas noble. Le roturier, accablé de tailles et de corvées, était harcelé sans relâche tantôt par les percepteurs du roi, tantôt par ceux des seigneurs et du clergé (Proudhon,Propriété, 1840, p. 151).La mort de la petite roturière met en deuil toutes les familles princières de l'Europe (Proust,Fugit., 1922, p. 671). II. − Adjectif A. − [En parlant d'une pers.] Qui appartient à la classe des roturiers; plus gén., qui n'est pas noble. [Supprimer] le franc-fief que payaient leurs détenteurs roturiers [de fiefs] (Lefebvre,Révol. fr., 1963, p. 183). B. − [En parlant d'un ensemble de pers.] Qui appartient à la roture; qui est composé de roturiers. Notre jeune baron est entré dans une riche famille roturière (Sandeau,Mllede La Seiglière, 1848, p. 331). C. − [En parlant d'une chose] 1. a) Propre à la roture, aux roturiers, à une personne qui n'est pas noble. Origine, profession roturière. Quand il travaille de ses mains, un noble doit quitter son nom. − Il [M. de Rubempré] a effectivement quitté le sien, qui était roturier, dit Zizine, mais pour prendre celui de sa mère qui est noble (Balzac,Illus. perdues, 1837, p. 96).Elle était inquiète de ce que sa fille pensait d'elle et du sang roturier qui peut-être circulait dans ses veines (Green,Malfaiteur, 1955, p. 123). b) Souvent péj. Qui a certaines caractéristiques qu'on prête à la roture, aux roturiers. Synon. bas (v. bas1), commun, grossier, populaire, vulgaire.Des façons roturières. Vous allez voir une femme qui n'a pas un mouvement roturier (...) c'est le type du bon ton (Kock,Cocu, 1831, p. 106).Le roman de mœurs (...) risque fort d'être plat (...). Si Balzac a fait de ce genre roturier une chose admirable, toujours curieuse et souvent sublime, c'est parce qu'il y a jeté tout son être (Baudel.,Art romant., Th. Gautier, 1859, p. 473).V. bonnet ex. 9. 2. HIST. [En parlant d'un bien, d'une terre] Qui est soumis à diverses redevances; qui appartient à une personne qui n'est pas noble. Les conseils de paroisse, avec le sieur syndic, estimaient la part [d'impôt] de chaque héritage roturier (Erckm.-Chatr.,Hist. paysan, t. 1, 1870, p. 414).V. fouage ex. de Chateaubriand. REM. Roturièrement, adv.a)
α) À la manière des roturiers. [J']étais (...) simplement, roturièrement Grandaye (...) Je m'appelle maintenant baron Grandaye de... (D'Esparbès,Demi-soldes, 1899, p. 201).
β) Conformément aux lois qui concernent la roture. Posséder une terre roturièrement. Il n'y avait ni fief, ni seigneurie à cette terre, elle devait se partager roturièrement (Ac.1798-1878).b) Vx. D'une manière basse et ignoble. Cet homme-là pense roturièrement (Ac.1798-1878). Prononc. et Orth.: [ʀ
ɔtyʀje], fém. [jε:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Adj. a) 1271-72 La Rochelle roturer masc. « non noble » en parlant d'une personne (Chartes et doc. poitevins, 388, 13, éd. M. S. La Du, t. 2, p. 267); 1495 enfans roturiers (Coutumes de Sens, CXLVII ds Nouv. coutumier gén., éd. Bourdot de Richebourg, t. 3, p. 495a); b) 1312 Angoulême fém. choses censives et rupturieres (AN JJ 48, fol. 32 v ods Gdf. Compl.); 1462, 16 janv. [concerne Nevers] (Ordonnances des rois de Fr. 3erace, t. 15, 1811, p. 37: Ez tailles [...] ny autres choses roturieres). B. Subst. 1306 masc. « paysan » Poitiers (abbaye de Pinus) [affaire portée devant le Parlement de Paris] (Olim, éd. Beugnot, t. 3, 1repart., p. 212: ab illis qui vocantur Roturiers, et ab illis mercatoribus vendentibus bladum apud Pictavium); ca 1447 « celui qui n'est pas noble » (Coutume d'Anjou, 459, Liger d'apr. K. Baldinger ds Z. rom. Philol. t. 67 1951, p. 42); 1507 fém. (Coutume de Touraine, XXIX, VI ds Nouv. coutumier gén., t. 4, p. 618b). Dér. de roture* (v. ce mot A); suff. -ier*. Cf. le lat. médiév. rupturarius « paysan » 1072 Absie, Deux-Sèvres ds Du Cange, s.v. rotulare, v. aussi Baldinger ds R. ling. rom. t. 26 1962, p. 313, note 3. Apparu dans les provinces de l'ouest, le mot se répand vers l'est, gagne Paris vers le mil. du xves. (après y avoir été att. comme terme région. en 1306, supra) et, de là (cf. Sens 1495 supra), à travers la lang. littér., s'étend à tout le domaine d'oïl au xvies., v. K. Baldinger, loc. cit., pp. 309-330, spéc. cartes 1, 2, 8, 9. Fréq. abs. littér.: 165. Bbg. Baldinger (K.). Die Arbeiten des Instituts für Romanische Sprachwissenschaft. Das Institut für deutsche Sprache und Literatur. Berlin, 1954, pp. 171-177. − Dub. Pol. 1962, p. 411. − Gohin 1903, p. 233. − Militz (H.-M.). Bürger im Frz. Berlin, 1979, p. 75, 77, 80, 92, 96, 114, 141, 149, 152. |