| ROC1, subst. masc. A. − 1. Bloc de pierre très dure dressé au-dessus du sol. Les horizons pleins d'ombre et de rocs chevelus, Et d'arbres effrayants que l'homme ne voit plus (Hugo, Légende, t. 1, 1859, p. 29).Ruskin décrit quelque part une petite clairière qu'il vit dans le Jura, près du fort de Joux: des sapins noirs, un roc altier, abrupt, pathétique, un aigle solitaire dans le grand ciel muet (Mille, Barnavaux, 1908, p. 166). − Rare, littér. Pierre qui affleure ou émerge, récif. Ce n'est ni la colère des vents, ni celle des flots (...) qui font sombrer un vaisseau (...). C'est le roc caché sous la mer (Dumas père, C. Howard, 1834, I, 4, p. 221). SYNT. Roc aigu, escarpé, nu, sauvage, stérile, suspendu, vif; aspérités, flanc du roc; du haut, au pied, sur la pointe du roc; creusé dans le roc. 2. P. méton., au sing. Matière minérale caractérisée par sa grande cohérence et son extrême dureté. Vitellius (...) exigea qu'on lui ouvrît les chambres souterraines de la forteresse. Elles étaient taillées dans le roc en hautes voûtes (Flaub., Hérodias, 1877, p. 164).Les hommes qui ont vécu sur cette terre où le roc est à fleur de peau, ou plutôt même la peau est partout percée par le roc, n'ont pu subsister qu'en déplaçant et replaçant les pierres (Brunhes, Géogr. hum., 1942, p. 260). 3. [Dans des compar., pour souligner la fermeté ou la dureté de qqn] Dur, solide comme un roc. Pauvre petite femme! pensa-t-il avec attendrissement. Elle va me croire plus insensible qu'un roc; il eût fallu quelques larmes là-dessus; mais, moi, je ne peux pas pleurer; ce n'est pas ma faute (Flaub., MmeBovary, t. 2, 1857, p. 44).Nous avons vu la Grande-Bretagne, sous l'impulsion d'un Wilson Churchill, tenir ferme comme un roc sous les avalanches de bombes de l'invasion aérienne (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 674). B. − P. anal. ou au fig. 1. Personne forte et résistante; personne qui ne manifeste pas de sensibilité. Vous êtes un roc! me dit-elle; vous n'êtes pas capable de la plus petite concession pour rester près de moi et me donner du courage! (Sand, Mllede La Quintinie, 1863, p. 145).Le docteur a le droit de parler: il n'a pas manqué sa vie; il a su se rendre utile. Il se dresse, calme et puissant, au-dessus de cette petite épave; c'est un roc (Sartre, Nausée, 1938, p. 94). ♦ Cœur de roc. Cœur insensible. Synon. cœur de roche*. − (...).Elle a un cœur de roc, avec son air de tout donner aux autres (...). − Mademoiselle Pauline, un cœur de roc! oh! Madame peut-elle dire ça! (Zola, Joie de vivre, 1884, p. 929). 2. Bâtir sur le roc. Faire une œuvre sur des bases solides. Anton. bâtir sur le sable (v. bâtir2I B 2).Certaines personnes, jugeant impertinemment des choses de l'Église, ont parlé d'un « glissement à gauche »: comme si ce qui est bâti sur le roc pouvait glisser à droite ou à gauche (Maritain, Primauté spirit., 1927, p. 126). 3. Roc de/des + subst.[Souligne ce qu'il y a de solide, d'inébranlable dans le subst.] Il y avait une distance que ces messieurs avaient tort d'oublier, entre l'extrême portée de leurs sondages et le roc des faits (Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 27).En 1788, Kant réédifia effectivement la métaphysique sur le roc de la conscience morale (Lefebvre, Révol. fr., 1963, p. 72). − P. métaph. Il faut créer une opposition sur le roc des idées et non sur la poussière des intérêts et des personnalités (Lamart., Corresp., 1836, p. 235). Prononc. et Orth.: [ʀ
ɔk]. Homon. rock1 et 2, roque. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1470 « rocher » (George Chastellain, Chronique, éd. Kervyn de Lettenhove, t. 1, p. 278); 2. fig. 1626 « se dit d'une personne insensible » (Hardy, Triomphe d'amour, 180 ds IGLF). Forme masc. de roche1*. Fréq. abs. littér.: 1 422. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2 815, b) 2 643; xxes.: a) 1 675, b) 1 220. Bbg. Blochw.-Runk. 1971, p. 482. − Germain (J.). Les Carrières... Cah. Inst. Ling. Louvain. 1981, t. 7, p. 233. |