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RIGUEUR, subst. fém.
A. −
1. Sévérité inflexible, austérité, dureté extrême. Mesures de rigueur; rigueur des sanctions, des lois; user de rigueur; traiter qqn avec rigueur. La rigueur des condamnations se trouva être assez variable suivant la composition des jurys (De Gaulle,Mém. guerre,1959, p. 107):
Ces rapides progrès du duc de Bourgogne n'intimidaient nullement le connétable et les conseillers du roi. Ils continuaient leurs préparatifs de défense, et leur autorité s'exerçait avec d'autant plus de rigueur sur la ville de Paris. Barante,Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 132.
En partic. Austérité matérielle imposée par la pénurie. La baisse des prix pétroliers explique la moitié du ralentissement de l'inflation en 1985. C'est donc elle qui a beaucoup contribué à mettre fin à la rigueur (Le Monde,6 sept. 1986, p. 1, col. 5).
MOR., PHILOS. Application stricte, sévère de principes moraux, religieux. Religion de la rigueur, leur christianisme [des Jansénistes] est aussi fondé sur le refus de la contrainte intérieure (Encyclop. univ.t. 91968,p. 293, col. c).
2. Comportement austère, rigide, aspect dur, sévère. Son large front ridé, ses joues blêmes et creuses, la rigueur implacable de ses petits yeux verts (Balzac,Peau chagr.,1831, p. 28).Cette sorte de rigueur puritaine par quoi les protestants, ces gêneurs, se sont rendus souvent si haïssables, ces scrupules de conscience, cette intransigeante honnêteté, cette ponctualité sans scrupule, c'est ce dont nous avons le plus manqué (Gide,Journal,1940, p. 47).
3. Domaine milit.Arrêts de rigueur. V. arrêt I A 2 b.
4. Vx. Juges de rigueur. V. juge A 1.
5. Loc. verb. Tenir rigueur à qqn. Garder du ressentiment envers quelqu'un, lui en vouloir, ne pas lui pardonner quelque chose. Mlle Ventura et M. Escande jouèrent en tenue de ville la scène fameuse du quatrième acte de Bérénice. Expérience saisissante, à laquelle j'eusse voulu que M. Pierre Hamp assistât, lui qui tient rigueur à Racine de ses empereurs et de ses princesses (Mauriac,Journal 3,1940, p. 250).
B. − Fréq. au plur.
1. Vieilli ou littér. Trait de sévérité, de cruauté, acte d'austérité. Partout les Orléanais étaient défaits; mais leur obstination était extrême, comme aussi les rigueurs exercées contre eux (Barante,Hist. ducs Bourg., , t. 3, 1821-24, p. 260).M. Beaussier le constatait avec l'âpre joie d'une âme droite qui applaudit aux rigueurs de la justice (A. France,Vie fleur,1922, p. 361).
2. Littér. Insensibilité, froideur d'une femme envers les avances d'un homme. Deux ans où votre souvenir n'a cessé d'être présent à mes yeux. Depuis le jour où, désespéré de vos rigueurs, j'ai quitté Paris pour vous fuir (Sardou,Rabagas,1872, i, 10, p. 23).Elle traitait ses soupirants avec moins de rigueur qu'elle ne me l'avait laissé imaginer (Beauvoir,Mém. j. fille,1958, p. 300).
3. Caractère dur, pénible d'une chose difficile à supporter. Les rigueurs du destin, de la guerre, du métier, de la misère, de la prison, de la vie. Il examine attentivement cet enfant gâté qu'une mère craintive voudrait soustraire aux rigueurs de la discipline et aux dangers de la guerre (Sand,Hist. vie, t. 1, 1855, p. 214).
En partic. Rigueur du climat, de l'hiver, des saisons, du temps, des frimas. Quant aux plantes qui semblent vivre aux dépens des arbres, et contribuer à leur destruction, comme les mousses et les lichens, il est probable, quoi qu'en disent quelques cultivateurs, qu'elles leur sont utiles et qu'elles les revêtent en quelque sorte contre les rigueurs du froid (Bern. de St-P.,Harm. nat.,1814, p. 325).
C. − Caractère d'exactitude, de précision, de régularité de quelque chose. Rigueur scientifique, mathématique, logique; rigueur d'une démonstration, d'un raisonnement, d'une expérimentation. Cet idéal ne pourra être atteint, mais ce sera assez de l'avoir conçu et d'avoir ainsi mis la rigueur dans la définition de l'unité de temps. Le malheur est que cette rigueur ne s'y rencontre pas (H. Poincaré, Valeur sc.,1905, p. 40).Si construites puissent paraître ces séquences, un auditeur, à l'écoute, sentira une vague organisation, mais sera loin d'en percevoir la rigueur (Schaeffer,Rech. mus. concr.,1952, p. 34).
Loc. adv. Avec rigueur. Rigoureusement, avec la plus grande netteté. Lorsque la série dodécaphonique est utilisée avec rigueur pour la première fois dans la valse de l'opus 23, Arnold Schoenberg n'opère pas une révolution « radicale » (Samuel,Art mus. contemp.,1962, p. 177).
D−. Loc. adj. De rigueur. Exigé, imposé par les usages, l'étiquette, le règlement. Mademoiselle, dit-il enfin, en tâchant de garder une sévérité froide, il y a des choses que nous ne pouvons tolérer... la bonne conduite est ici de rigueur (Zola,Bonh. dames,1883, p. 721).Les votes ont lieu à main levée, sauf en matière contentieuse ou disciplinaire où le scrutin secret est de rigueur (Encyclop. éduc.,1960, p. 121).
Fam. Imposé par une nécessité ou une convention plus ou moins factice. Quand on revient au front pour la troisième fois (...) l'enthousiasme n'est pas de rigueur (Alain,Propos,1921, p. 222).J'ai été assez frappé de tes soupçons pour ne voir Mathilde qu'avec les précautions de rigueur (Vailland,Drôle de jeu,1945, p. 49).
Il est de rigueur, c'est de rigueur. Il est recommandé, il est habituel. Oui, je lui ai déjà donné un petit abbé (...) C'est de rigueur (Dumas père, Mariage sous Louis XV,1841, iii, 7, p. 156).Il est de rigueur, pour les gens qui se piquent d'élégance, d'avoir leur loge aux Taureaux, comme à Paris, une loge aux Italiens (Gautier,Tra los montes,1843, p. 76).
En partic.
Subst. (désignant un vêtement, une tenue) + de rigueur.Vêtement, tenue, sans lesquels on ne peut être admis en certains lieux. Chacun peut faire un appel à ses souvenirs, et sourira, certes, en évoquant devant soi toutes ces personnes endimanchées, aussi bien par la physionomie que par la toilette de rigueur (Balzac,Cous. Bette,1846, p. 134).Cette même nuit, j'ai vu quelque chose de sinistre. C'était un jeune homme élégant qui soupait à une table de brasserie, en habit de rigueur, une rose à la boutonnière, tout seul (Renard, Œil clair,1910, p. 21).
Délai de rigueur. Délai, date à respecter impérativement. Quand ses juges rentrèrent, à l'expiration du délai de rigueur, ils furent si émerveillés de son épure, qu'ils ajoutèrent à la mention promise: nous n'avons pas un autre dessinateur de talent égal (Verne,500 millions,1879, p. 103).
E. − Loc. adv.
1. Vx ou littér.
a) À la rigueur. Avec une extrême sévérité, strictement. [Ce code] a toujours paru tellement sévère aux tribunaux, qu'ils n'en ont jamais exécuté les dispositions à la rigueur (Le Moniteur,t. 2, 1789, p. 368).Il va de soi que pas plus que tout autre, il ne faut prendre cette classification à la rigueur (Mounier,Traité caract.,1946, p. 28).
b) En rigueur. Exactement, rigoureusement. Dans leurs arbres encyclopédiques, Bentham et Ampère abandonnent tous deux le principe de la division tripartite de Bacon, et tous deux se proposent d'appliquer en rigueur le principe de la classification dichotomique (Cournot,Fond. connaiss.,1851, p. 504).Il est impossible en rigueur de faire la part du jeu, de délimiter, dans la vie individuelle et dans la vie sociale, un domaine propre du jeu (Jeux et sports,1967, p. 1158).
2.
a) À la rigueur, à l'extrême rigueur
α) En allant à la limite de l'acceptable. Je comprends à la rigueur que vous n'aimiez pas le gouvernement. Mais ça n'empêche pas de gagner son pain, ce serait trop bête (Zola,Ventre Paris,1873, p. 671).Cela pourrait, à l'extrême rigueur, se concevoir si ces gigantesques et interminables entreprises devaient avoir un caractère définitif (L'Hist. et ses méth.,1961, p. 1099).
β) En cas de nécessité absolue, s'il n'y a pas d'autre solution. Elle acceptait à la rigueur de coucher avec Luzzati, et d'être sa femme pendant deux ans, si elle était sûre de ne pas avoir d'enfant de lui, et sûre d'en avoir un de moi (Martin du G.,Confid. afric.,1931, p. 1124).
b) En toute rigueur. Rigoureusement, absolument. Pascal atteint dès lors la théorie classique dans sa précision, il la fixe telle qu'elle sera reprise et maintenue en toute rigueur dans notre prose depuis La Bruyère jusqu'à Fontanes (Sainte-Beuve,Port-Royal, t. 3, 1848, p. 37).
Prononc. et Orth.: [ʀigœ:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Fin xiies.: « sévérité inflexible » rigor d'orgoil (Sermons St Gregoire sur Ezechiel, 99, 22 ds T.-L.); 2. 1283 « manière stricte d'appliquer les lois » selonc rigueur de droit (Philippe de Beaumanoir, Coutumes de Beauvaisis, LXIX, 1939, éd. Am. Salmon, t. 2, p. 478); 1694 juges de rigueur (Ac.); 3. xves. au plur. « dispositions répressives » (Bibl. Éc. Chartes, 4esérie, t. 1, p. 265); 4. fin xves. « dureté pénible à supporter » (Jardin de Santé, I, 362 ds Gdf. Compl.); 1580 la rigueur de l 'hyver (Montaigne, Essais, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, I, 54, 312); 5. 1580 « exactitude, précision » rigueur d'opinions (Id., ibid., II, 11, 422). B. Loc. adv. 1. a) ca 1480 a rigueur « rigoureusement » (Mystere du Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 41987); 1501 a la righeur (Le Livre de conduite du Regisseur, éd. G. Cohen, 290); b) 1724 à la rigueur « en allant jusqu'à la limite de l'acceptable » (Marivaux, Le Spectateur, p. 138); 2. 1671 en toute rigueur (Pomey); 3. 1783 de rigueur (L. Mercier, Tableau de Paris, t. 5, p. 343). Empr. au lat.rigor « raideur, dureté », au fig. « sévérité, inflexibilité ». Fréq. abs. littér.: 2 208. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 3 209, b) 2 683; xxes.: a) 2 233, b) 3 871. Bbg. Boyer (H.). « L. Rigueur pour moderniser la France!... » MOTS. 1988, n o17, pp. 219-229.