Police de caractères:

Surligner les objets textuels
Colorer les objets :
 
 
 
 
 
 

Entrez une forme

options d'affichagecatégorie :
RHÉTORIQUE, subst. fém. et adj.
I. − Subst. fém.
A. − Technique du discours; ensemble de règles, de procédés constituant l'art de bien parler, de l'éloquence. Enseignement de la rhétorique; maître, professeur de rhétorique; préceptes de rhétorique. Il considérait la rhétorique comme une chose grave; quand il faisait du style, l'hyperbole l'emportait au delà de sa pensée, et il employait des expressions magnifiques pour des sujets assez pauvres (Flaub., 1reÉduc. sent., 1845, p. 102):
1. Il semble (...) qu'il y ait rhétorique partout où les mots prennent le pas sur la pensée, se mettent en évidence, appellent l'attention sur leur ordre et leur composition. Ainsi parle-t-on des belles phrases et des « raisonnements sonores » par lesquels un écrivain, un orateur cherche à séduire son public; du « beau vers », ce moule tout fait où le poète s'efforce de couler sa pensée. Paulhan, Fleurs Tarbes, 1941, p. 206.
Figure de rhétorique. V. figure I B 3 spéc. b.Fleur de rhétorique. V. fleur B 5 a.
P. méton.
Livre traitant de cette technique ou de cet art. Ces syllabes naturelles ou physiques ne sont pas exactement les mêmes que celles qui sont reconnues et avouées par les grammaires, les rhétoriques, et les poétiques des différentes langues (Destutt de Tr., Idéol. 2, 1803, p. 323).Je dévorais tous les traités d'éloquence; je savais par cœur la rhétorique d'Aristote et les discours sur l'éloquence de Fénélon (Jouy, Hermite, t. 1, 1811, p. 96).
Vieilli. Classe de l'enseignement secondaire (correspondant à l'actuelle première) où l'on enseignait la rhétorique. Quelques années de seconde et de rhétorique employées à mal apprendre le grec et le latin (Vigny, Journal poète, 1847, p. 1261).Lorsque nous étions en rhétorique, il arriva qu'un jour notre professeur s'attarda assez longuement à un rapprochement, qu'il considérait sans doute avec quelque complaisance. Entre L'enfer du Dante de la Divine Comédie et l'idée que purent s'en faire par la suite les romantiques et particulièrement Hugo (Gracq, Beau tén., 1945, p. 59).
Rhétorique supérieure. Première supérieure. Brillant élève de lettres en rhétorique supérieure à Condorcet (Martin du G., Souv. autobiogr., 1955, p. lxxii).
HIST. LITTÉR. Chambres de rhétorique. [En Flandre et en Artois, au xives.] Sociétés littéraires. Les chambres de rhétorique [des poètes flamands] ont eu beau cultiver et mettre en scène la poésie, aucun talent n'a tiré de cette matière une grande et belle œuvre (Taine, Philos. art, t. 1, 1865, p. 252).
Rem. 1. On relève un empl. de rhétorique s'appliquant à des faits autres que des faits de discours: Un seul mot couvre de sa clameur répétée le placard de publicité ou l'annonce de spectacles: Sensation! Sensationnel! L'anglicisme répond, en écho: Exciting! C'est ce que Valéry appelait la « rhétorique du choc » (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 52). 2. Le concept de rhétorique est actuellement réexaminé sous l'impulsion de la sémiotique discursive et textuelle et reformulé dans le cadre d'une tentative pour constituer une nouvelle rhétorique générale et une théorie littéraire contemporaine: La rhétorique est considérée par certains comme le second chapitre, après la linguistique, de la sémiotique générale. La rhétorique est une étude du discours, et ces procédés de discours sont pour la plupart codés (Rey Sémiot. 1979). 3. Dans le cadre de la sémiotique générale, le concept de rhétorique est appliqué à des langages autres que le langage articulé: rhétorique de la publicité, du message publicitaire, rhétorique de l'image.
B. − En partic.
1. Ensemble des moyens d'expression, des procédés stylistiques propres à une personne ou à un groupe de personnes. J'empruntai des ressources à la langue figurée, je puisai dans les profondeurs de ma rhétorique, je jonchai le chemin de la débutante de toutes les épithètes que peut imaginer un homme de style; je l'élevai sur un trône de périodes, orné de trophées d'érudition pittoresque (Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 81).Le petit soldat (...) acquérait les grâces balancées et fleuries du tourlourou parisien. Il en apprenait la rhétorique, les épanouissements galants, les entortillements de style, si flatteurs pour les dames (Zola, Page amour, 1878, p. 956).
En partic. Ensemble des expressions, des figures de style propre à un écrivain ou à une école littéraire. Rhétorique romantique. [V. Hugo] nous avait conquis par ses fortes allures de géant, il nous ravissait par sa rhétorique puissante (Zola, Doc. littér., Musset, 1881, p. 74):
2. L'exigence de la révolte, à vrai dire, est en partie une exigence esthétique. Toutes les pensées révoltées (...) s'illustrent dans une rhétorique ou un univers clos. La rhétorique des remparts chez Lucrèce, les couvents et les châteaux verrouillés de Sade, l'île ou le rocher romantique, les cimes solitaires de Nietzsche, l'océan élémentaire de Lautréamont, les parapets de Rimbaud... Camus, Homme rév., 1951, p. 316.
2. Péj. Ensemble de procédés d'éloquence apprêtés, déclamatoires et pompeux. Faire de la rhétorique. Notre excellent Norpois a beau écrire (en sortant un des accessoires de rhétorique qui lui sont aussi chers que « l'aube de la victoire » et le « Général Hiver »): « Maintenant que l'Allemagne a voulu la guerre, les dés en sont jetés », la vérité c'est que chaque matin on déclare à nouveau la guerre (Proust, Temps retr., 1922, p. 796).Arsène commença de soupçonner que pour son confesseur, l'expression de « Créature infernale » était de pure rhétorique (Aymé, Vouivre, 1943, p. 51).
[En parlant d'un écrivain] Style pompeux et artificiel. Le vrai talent littéraire, c'est d'écrire des livres comme on écrit des lettres, absolument. Tout ce qui n'est pas cela n'est que pathos, pose, rhétorique, enflure (Léautaud, Journal littér., 1, 1906, p. 249).Je ne puis plus croire une seule des paroles que vous avez écrites. Votre œuvre n'est que rhétorique, un monument de mauvaise littérature (Montherl., Pitié femmes, 1936, p. 1188).
Rem. On relève des empl. de rhétorique dans son accept. péj. pour parler de réalités artistiques (mus., archit., sculpt.): Exécrable musique romantique, d'une rhétorique orchestrale à vous faire aimer Bellini (Gide, Journal, 1907, p. 246). Quand l'ornement, au lieu de suivre la forme, devint lui-même forme, l'art gothique ne fut plus qu'une rhétorique (Alain, Beaux-arts, 1920, p. 195). À quoi tient notre indifférence à la sculpture romaine dont la gloire couvrit trois siècles, sinon à ce qu'elle nous apparaît comme rhétorique et non comme création? (Malraux, Voix sil., 1951, p. 614).
II. − Adj. Qui appartient, est relatif à la rhétorique ou concerne son étude.
A. − [Corresp. à supra I A] Exercices rhétoriques; figure rhétorique. Que si je m'avise à présent de m'informer de ces emplois, ou plutôt de ces abus du langage, que l'on groupe sous le nom vague et général de « figures », je ne trouve rien de plus que les vestiges très délaissés de l'analyse fort imparfaite qu'avaient tentés les anciens de ces phénomènes « rhétoriques » (Valéry, Variété III, 1936, p. 45).
B. −
1. [Corresp. à supra I B 1] « (...) nous mangerons le poulet d'honneur et nous boirons le vin eucharistique ». Dans les premiers temps, papa et maman donnaient mille raisons à leur refus, peu soucieux qu'ils étaient d'accepter cette invitation saugrenue (...). Ils comprirent bien vite que l'offre de M. Wasselin était surtout une effusion rhétorique (Duhamel, Notaire Havre, 1933, p. 87).
[Corresp. à supra I B 1 en partic.] J'ai repris (...) Les Orientales de Hugo. (...) Quelle prodigieuse invention rhétorique! Tout y est: la force, la grâce, le sourire et les plus pathétiques sanglots. Quelle ressource! Quel soulèvement poétique! Quelle science du vers, et dont il se joue! (Gide,Journal,1929,p. 955).
2. [Corresp. à supra I B 2] Les phrases rhétoriques et apprêtées de Jean-Jacques Rousseau (Balzac, Peau chagr., 1831, p. 122).
REM.
Rhétoriser, verbe intrans.,hapax. La langue s'acheva et se fixa sans Montaigne. Balzac rhétorisa sans lui (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 2, 1842, p. 448).
Prononc. et Orth.: [ʀetɔ ʀik]. Ac. 1694-1740: rhetorique; dep. 1762: rhé-. Étymol. et Hist. A. Subst. 1. a) ca 1150 « celui des arts libéraux qui enseigne l'art de l'éloquence » ici, allégorie représentée sur une œuvre d'art (Thèbes, éd. G. Raynaud de Lage, 4992); ca 1160 (Eneas, 2208 ds T.-L.: De deviner ne sai son maistre [de la Sibylle de Cumes] [...] De retorique et de musique, De dïalectique et gramaire); b) 1ertiers xves. [ms.] premiere rettorique « art d'écrire en prose » (Règles de la seconde rhét. ds Rec. d'arts de seconde rhét., éd. E. Langlois, p. 11); id. seconde rettoricque « art d'écrire en vers; poétique » (ibid.); ca 1405 couleurs de rethoricque « ornements du style » (Jacques Legrand, Des rimes, ibid., p. 1); fin xves. fleur de rethoricque (Jean Molinet, Faicts et dictz, éd. N. Dupire, LXIII, 30, t. 2, p. 856); 2. 1269-78 désigne le ,,De inventione rhetorica`` de Cicéron (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 16167); 3. a) fin xives. « habileté, élégance dans l'art de s'exprimer » (Froissart, Chron., éd. G. Raynaud et S. Luce, II, § 106, t. 9, p. 171, 27: Il [Jehan Lion] parloit de si biau retorique et par si grant art); 1593 la rhetorique de [qqn] « son habileté à s'exprimer » (Satyre Ménippée, IX, Harangue recteur Rose, éd. Ch. Read, p. 136: Je suis meu d'une indicible ardeur de mettre avant ma retohorique); 1689, 4 sept. épuiser sa rhétorique (Sévigné, Lettres, éd. G. Gailly, t. 3, p. 524); b) 1748 péj. « affectation de style pompeux et vide de sens » (Montesquieu, Esprit des lois, XXVIII, 1 ds Œuvres, éd. R. Caillois, t. 2, p. 793: les lois des Wisigoths [...] sont puériles, gauches [...] pleines de rhétorique, et vides de sens); 4. 1591 Bayonne « classe où l'on enseigne la rhétorique » (ds J. M. Drevon, Hist. d'un collège, 1889, p. 351 d'apr. P. Zumthor ds Z. rom. Philol. t. 72 1956, p. 348). B. Adj. 1509 « de rhétorique » (Lemaire, Illustr., I, 32 ds Hug.: les rhetoriques couleurs). A empr. au lat. rhetorica (ars) « rhétorique », gr. ρ ̔ η τ ο ρ ι κ η ́; rhetorici, masc. plur. « les ouvrages de rhétorique de Cicéron », rhetorica, neutre plur. « les préceptes de rhétorique ». À rapprocher de couleurs de rethoricque [A 1 b], colours rethorienes (1212, Angier, trad. Dial. S. Grégoire, 183 ds Meyer, n o23, p. 342b). B empr. à l'adj. lat. rhetoricus « de rhétorique ». Fréq. abs. littér.: 659. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 642, b) 690; xxes.: a) 1 180, b) 1 174. Bbg. Arrivé (M.). Poétique et rhétorique. In: Les Sciences du lang. en France au XXes.: art. recueillis par B. Pottier. Paris, 1980, pp. 59-92. − Barthes (R.). L'Anc. rhétorique. Communications. 1970, n o16, pp. 172-229. − Gohin 1903, p. 233. − Kehrli (P.). Rhétorique et poésie... Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1976, t. 14, n o2, pp. 21-50. − Kerbrat-Orecchioni (C.). L'Énonciation de la subjectivité dans le lang. Paris, 1980, pp. 210-216. − Reboul (O.). La Rhétorique. Paris, 1984, pp. 5-8. − Rhétorique gén. par J. Dubois, F. Edeline... Paris, 1970, pp. 8-27.