| RESSORT1, subst. masc. A. − 1. Peu usuel. Propriété qu'ont certains fluides de reprendre leur état initial après avoir subi une déformation élastique (pression, compression, tension, etc.). Synon. élasticité.Les hommes, respirant avec peine un air qui n'avait plus de ressort, levaient les yeux vers le ciel où ils cherchaient en vain la lumière (Chateaubr.,Essai Révol., t. 1, 1797, p. 337).L'avion s'enfonce dans cet air sans ressort, l'avion s'enlise (Saint-Exup.,Courr. Sud, 1928, p. 70). 2. Organe élastique, le plus souvent en acier trempé, ayant la propriété de reprendre sa forme et sa position initiales après avoir subi une déformation, et entrant dans un mécanisme pour absorber du travail ou pour produire un mouvement. Manon s'arrêta, fit mouvoir les ressorts d'une antique serrure, et ouvrit une porte (Balzac,Mmede La Chanterie, 1850, p. 230).Dans l'étui de notre tige est reclus notre mouvement, comme le ressort dans le barillet. C'est par ce mouvement que nous marchons (Claudel,Art poét., 1907, p. 164).V. carrosse ex. 1. ♦ Ressort à boudin*. Ressort à lame; lame de ressort. V. lame I A 2 b. SYNT. Ressort à spirale, hélicoïdal, conique; ressort de flexion, de torsion, de rappel, de choc, de suspension, de traction; ressort d'acier; ressort d'une gâchette; ressorts d'un sommier; jumelles de ressort (automobile); ressort d'horloge, de montre, de pendule, de selle; bander, tendre, plier, ployer, pousser, débander, détendre, lâcher, faire jouer, casser un ressort; un ressort joue (bien, mal), plie, se tend, se détend, se débande. − À ressort. Qui fonctionne à l'aide d'un ressort, qui est muni de ressorts. Lame à ressort; matelas à ressorts. Le pilon [d'une jambe de bois] en était muni de liège, et il avait des articulations à ressort (Flaub.,MmeBovary, t. 2, 1857, p. 27).Arg. Blave* à ressort; crucifix* à ressort. − Expr. Mû comme par un ressort, comme mû par un ressort. D'un bond, brusquement. Ce fut comme mû par un ressort qu'après la dernière semaine de mai il s'échappa (Verlaine,
Œuvres compl., t. 4, L. Leclercq, 1886, p. 152). ♦ Vx. Marcher par ressorts; se mouvoir par ressorts. Marcher de façon saccadée. Promenez-vous dans Goettingue, vous remarquerez de grands jeunes gens blonds un peu pédants (...) marchant par ressorts dans les rues (Stendhal,Haydn, Mozart et Métastase, 1817, p. 108).P. anal. N'agir que par ressort. Pour elle, après cet entretien, elle était dans la position d'un homme de cœur qui, las de la vie, a pris une dose de stramonium; il n'agit plus que par ressort, pour ainsi dire, et ne porte plus d'intérêt à rien (Stendhal,Rouge et Noir, 1830, p. 158). B. − Au fig. 1. a) Au sing. Ce qui fait agir, mouvoir; cause agissante. Synon. moteur.Ressort central, intérieur, caché, secret de qqc.; ressort puissant. Vous ne sauriez croire tout ce qu'on peut faire parmi nous avec le mot honneur: le jour où nous serions obligés de peser sur ce grand ressort de la France, nous remuerions encore le monde (Chateaubr.,Corresp., t. 4, 1823, p. 39). b) Le plus souvent au plur. Mobile plus ou moins apparent qui est la cause profonde ou agissante d'une action, d'un comportement. Ressorts cachés, inexplicables, obscurs, secrets. Probablement, me dis-je, ce monstre à visage d'ange la gouverne par tous les ressorts possibles: la vanité, la jalousie, le plaisir, l'entraînement du monde (Balzac,Gobseck, 1830, p. 411). 2. Énergie, force physique et surtout morale. Synon. force, résistance, élan, dynamisme, cran (fam.), tonus (fam.), vitalité.Ressort de l'esprit, de la volonté. La résistance aux grandes fatigues du malheur ne se mesure pas à la force du corps, mais au ressort de l'âme (Feuillet,Bellah, 1850, p. 330). − Empl. abs. Avoir du ressort; manquer de ressort; perdre de son ressort; être sans ressort. Vivre et penser comme dans un rêve, comme en un court instant de lucidité entre deux sommeils, sans avoir assez de ressort pour se lever, pour ouvrir les yeux, pour voir et marcher (Blondel,Action, 1893, p. 188).Faites attention à son moral, madame. Il perd cinquante pour cent de ses chances. Ha! ce n'est pas la première fois que je le constate! Les hommes n'ont pas le ressort des femmes! (Malègue,Augustin, t. 2, 1933, p. 392). 3. Littér., surtout au plur. Intrigue; moyens de faire réussir une entreprise. Cette malicieuse fille se plut à essayer sur le comte tous les ressorts de sa coquetterie (Balzac,Chouans, 1829, p. 252).Loc. verb., fam. Faire jouer tous ses ressorts, certains ressorts. V. jouer II B 1. Prononc. et Orth.: [ʀ
əsɔ:ʀ]. Barbeau-Rodhe 1930: un ressort [œ
̃
ʀsɔ:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1121-34 resort « secours, remède » (Philippe de Thaon, Bestiaire, 1612 ds T.-L.); 2. 1230 resort « rebondissement, élan » (Chevalier deux épées, 10336, ibid.); 3. 1260 resort de serrëure (E. Boileau, Métiers, 46, éd. G. B. Depping); 1564 « organe capable de produire le mouvement » (Paré,
Œuvres, éd. J. F. Malgaigne, t. 2, pp. 616-617); 1676 ressort à boudin, ressort de chien (Félibien, p. 723); 1694 « mécanisme destiné à affaiblir les secousses qu'éprouve la caisse des voitures » (Ac.); 1842 ressort à chien (Ac. Compl.); 1875 ressort à lames (Lar. 19e); 1876 ressort de rappel (Chabat t. 2); 4. 1690 « propriété de reprendre sa position première » (Fur.); 1694 faire ressort (Ac.); 5. a) 1548 resourd « moyen plus ou moins secret qui sert à faire réussir une intrigue » (La Boétie, De la servitude volontaire ds Littré); b) 1580 plur. ressors « force qui fait agir, se mouvoir quelque chose » (Montaigne, Essais, éd. P. Villey et V. L. Saulnier, p. 75); 1597 sing. (G. Bouchet, Serees, éd. C. Roybet, t. 4, p. 7); c) 1680 « force morale, énergie d'une personne » (Mmede Sévigné, Lettres, éd. M. Monmerqué, t. 6, p. 348); d) 1867 avoir du ressort (Feuillet, Camors, p. 103). Déverbal de ressortir1. Bbg. Quem. DDL t. 25 (s.v. ressort en C). |