| REPRÉSENTATIF, -IVE, adj. A. − [Corresp. à représenter21reSection II A] Vieilli. Qui donne, qui constitue une représentation de quelque chose (v. représentation II A). Synon. figuratif (v. ce mot A). 1. [Représentation au naturel] J'ai l'image d'une femme, d'un poisson, de chants, de rochers; ces pensées sont vraies et représentatives de ce qui existe. Je forme un jugement de toutes ces pensées, et j'imagine une femme-poisson qui habite des écueils (Bonald, Législ. primit., t. 1, 1802, p. 239). − Absol. La musique est (...) le moins représentatif et le plus émotif des arts (Laloy, Aristoxène, 1904, p. 47). ♦ BEAUX-ARTS. Il est (...) beaucoup moins facile de duper les yeux avec un tableau illisible, qu'avec un tableau représentatif, car ce dernier, s'il est mort en soi, peut tenir de son modèle une apparence de vie (Cocteau, Poés. crit. I, 1959, p. 101).V. colorant ex. 2.Non représentatif. Synon. de non figuratif.Aux XIIIeet XIVesiècles les ornements non représentatifs dominent, aux XVeet XVIesiècles les ornements représentatifs d'objets réels: feuilles, fleurs, pots à fleurs, statues (Michelet, Journal, 1831, p. 85): 1. ... l'art masculin, centré sur la sculpture, affirme sa volonté représentative, tandis que l'art féminin − limité au tissage et au tressage sur la côte nord-ouest, incluant en plus le dessin chez les indigènes du sud du Brésil et du Paraguay − est un art non représentatif.
Lévi-Strauss, Anthropol. struct., 1958, p. 281. 2. a) [Représentation conventionnelle] Nous avons vu quels sont nos différens langages ou systèmes de signes représentatifs de nos idées (Destutt de Tr., Idéol. 1, 1801, p. 379).La tonalité peut être représentative d'un état d'âme, de situation, être un leit-motiv tonal (Migot, Lex. termes mus., 1935).V. acception1ex. 8. b) En partic.
α) [Représentation graphique] [En harmonie] il faut souvent mettre des accidents devant les chiffres représentatifs des intervalles par lesquels s'effectue la modulation (Dubois, Harm., 1921, p. 46): 2. La variation de la température d'ébullition en fonction de la pression a été spécialement étudiée par Regnault, qui vérifia que la courbe représentative de ce phénomène coïncidait avec celle de la pression de saturation.
Hist. gén. sc., t. 3, vol. 1, 1961, p. 270.
β) [Représentation matérielle, concrète] Le billet est le document représentatif du contrat de passage, sur lequel sont mentionnées diverses indications se rapportant à la date de départ, au numéro de la couchette, aux bagages, etc. (M. Benoist, Pettier, Transp. mar., 1961, p. 40). − FIN. Indemnité représentative de frais; titres représentatifs de créances hypothécaires; traites représentatives de fournitures. Les actions représentatives de leur capital [des firmes] circulent sur tous les grands marchés financiers du monde (Meynaud, Groupes pression en Fr., 1958, p. 325).En 1947 et en 1948, un taux d'escompte plus favorable était appliqué aux effets publics, aux effets commerciaux représentatifs de ventes (Univ. écon. et soc., 1960, p. 30-15). ♦ Absol. Tout ce qui pourrait résulter de cette multiplication exagérée du numéraire serait une dépréciation des matières d'or et d'argent, une valeur représentative moindre (Proudhon, Révol. soc., 1852, p. 208). ♦ Vieilli, empl. subst. masc. [Mettons de l'ordre] dans les finances de ce pays, que nous ne soyons jamais obligés de substituer à l'espèce un représentatif perfide. La Louisiane a déjà éprouvé plus d'une fois le systême ruineux du papier-monnaie, et il serait impossible de gagner encore sa confiance à cet égard (Baudry des Loz., Voy. Louisiane, 1802, p. 201). B. − [Corresp. à représenter21reSection II C] Qui constitue la trace, l'expression matérielle d'une réalité abstraite. Je n'examine pas si réellement les aptitudes et les passions ont un signe représentatif dans l'enveloppe extérieure du cerveau: supposons-le. Qu'est-ce que cela prouve contre la liberté humaine? (Lacord., Conf. N.-D., 1848, p. 106). C. − [Corresp. à représenter21reSection III] 1. Qui constitue un modèle, qui est typique d'une classe, d'une catégorie, qui peut en être considéré comme le représentant (v. ce mot II A). Dommage que Johnson reste à ce point inférieur à Goethe. Sa sagesse est admirablement représentative de celle de son époque, mais ne s'élève jamais au-dessus (Gide, Journal, 1943, p. 187).Je voudrais que ce lecteur encore lointain [de l'an 2000] puisse se former une idée de ce qu'était un écrivain à notre époque. Il est vrai que je ne suis pas du tout « représentatif » (Green, Journal, 1944, p. 184).V. conceptuel B 2 ex. de Delay.Exemple représentatif. Il est des types morbides qui ne sont que le développement d'un type prémorbide. Je me bornerai ici à en donner quelques exemples représentatifs (Delay, Psychol. méd., 1953, p. 145). − Échantillon représentatif. V. échantillon B 1 a γ ex. de Langlois et de Weinand. 2. a) Qui agit, qui parle au nom d'une collectivité, qui en est le représentant (v. ce mot II B 1 a). Quant aux négociations à engager, elles devaient l'être « avec des gouvernements approuvés par des assemblées réellement représentatives de l'ensemble des populations (...) » (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 163).Les Chambres de métiers sont auprès des pouvoirs publics, les organes représentatifs des intérêts généraux de l'artisanat (Robert, Artis., 1966, p. 78). b) Absolument
α) DR., POL. Régime, système, gouvernement représentatif; monarchie, démocratie représentative. Régime, etc. qui est fondé sur le principe de la souveraineté nationale selon lequel le peuple gouverne par l'intermédiaire de représentants élus (v. représentant II B 1 a γ). [M. Necker] posait en maxime qu'il n'y a point de système représentatif sans élection directe du peuple (Staël, Consid. Révol. fr., t. 2, 1817, p. 47).Il y a démocratie représentative, lorsque (...) l'ensemble de la nation ou du peuple participe à la désignation des représentants, c'est-à-dire lorsque l'élection de l'une au moins des assemblées se fait au suffrage universel (Vedel, Dr. constit., 1949, p. 134). ♦ Constitution représentative. Constitution qui définit le principe de la souveraineté nationale. V. représentant II B 1 γ ex. de Cap. 1936.Mandat représentatif. [P. oppos. à mandat impératif] Mandat en vertu duquel les parlementaires, étant les élus de la nation, n'ont pas à suivre les directives des électeurs de leur circonscription et ne peuvent être révoqués par eux (d'apr. Juridique 1987). ♦ Assemblée représentative. Assemblée composée de représentants élus du peuple. Les Assemblées de la Révolution, 1789-1799. En cinquante-trois jours l'Assemblée représentative de la France était passée de la forme moyenâgeuse groupant les principaux sujets du roi en trois classes distinctes à celle d'un Parlement moderne composé des députés du peuple (Lidderdale, Parlement fr., 1954, p. 11). − Théorie représentative. Synon. de théorie de la représentation (v. ce mot III B 1 b γ).Il n'y a que des pédants de collège, des esprits clairs et superficiels qui aient pu se laisser prendre à l'apparente évidence de la théorie représentative (Renan, Avenir sc., 1890, p. 349).
β) [Dans le monde du travail, face aux Pouvoirs publiques] DR. DU TRAVAIL. Syndicat(s) (les plus) représentatif(s). ,,Syndicat répondant à certains critères légaux qui garantissent son importance et son influence, et jouissant de prérogatives exorbitantes du droit commun syndical`` (Jur. 1981, s.v. syndicat). ♦ Organisme, partenaire représentatif. L'idée est de pouvoir se fonder sur des relations, des avis ou des engagements exprimant effectivement les positions de la grande majorité des travailleurs du secteur considéré (...). Cette notion de partenaires représentatifs est d'autant plus importante que des conventions collectives du travail passées par des organismes répondant à ces critères peuvent ensuite être étendues par les pouvoirs publics à l'ensemble de la branche professionnelle correspondante (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p. 57). − [P. méton.] Sauf intérêt pressant, le secret ne devrait pas être la loi des conseils d'administration, il nuit à leur caractère représentatif en faisant échapper l'administrateur au contrôle de ceux qui l'ont désigné (Chenot, Entr. national., 1956, p. 124). D. − [Corresp. à représenter21reSection IV et 2eSection II] 1. PHILOS., PSYCHOL. a)
α) [En parlant d'un objet] Qui suscite l'apparition à l'esprit d'une image mentale. Le problème essentiel revient à décrire (...) comment il se fait, en même temps, une transformation fonctionnelle de l'objet perçu, qui passe de l'état de matière signifiante à l'état de matière représentative (Sartre, Imaginaire, 1940, p. 41).
β) [En parlant d'un fait intellectuel; p. oppos. à affectif] Qui présente un objet à l'entendement. Synon. cognitif.V. affectif ex. 1, 3 et 4.[L'objet de l'action est spécifié] V. conscience ex. 12.
γ) [En parlant d'une faculté intellectuelle] Dont la fonction est de présenter un objet à l'entendement. Dans la phénoménologie de l'esprit, la mort n'apparaît qu'au niveau de la lutte des individus, au moment où la conscience représentative et théorique fait place à la conscience pratique et éthique (J. Vuillemin, Essai signif. mort, 1949, p. 286).Faute de pouvoir s'élever à la pensée représentative, l'animal ne peut non plus se livrer ni à des jeux avec l'imaginaire, ni à des jeux avec l'ordre (Jeux et sports, 1967, p. 67). − Mémoire représentative. [P. oppos. à mémoire mécanique ou mémoire sensitive] Si les signes sont absolument vides d'idées, ou séparés de tout effet représentatif (...), le rappel n'est qu'une répétition simple de mouvements; j'en nommerai la faculté mémoire mécanique. (...) [lorsque le rappel du signe est] accompagné ou suivi immédiatement de l'apparition claire d'une idée bien circonscrite, je l'attribuerai à la mémoire représentative (Maine de Biran, Influence habit., 1803, p. 129). b) En partic.
α) (Théorie des) idées représentatives. ,,Doctrine généralement admise par les cartésiens, d'après laquelle l'esprit ne connaît pas directement les objets réels, mais seulement des idées qui en sont les signes`` (Lal. 1968). Si l'on en croit, Descartes, Malebranche, Leibnitz, Locke, Hume, Condillac, etc., bref tous les philosophes modernes, ont admis des idées représentatives, sortes d'êtres interposés entre l'esprit et les objets (Taine, Philos. XIXes., 1857, p. 32).V. espèce ex. 1: 3. Malebranche n'avait pris tant de soin d'établir la théorie des idées, des êtres représentatifs distingués des perceptions, que pour les projeter en Dieu, qui seul peut faire, à l'égard des esprits, la fonction de cet être représentatif universel des corps. De là le fameux dogme malebranchiste: Que nous voyons toutes choses en Dieu.
Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 5, 1859, p. 243.
β) [Chez Renouvier] Qui appartient au représentatif. On peut donc supposer, (...) que l'être est défini par une aptitude représentative, dont les représentés ne seraient que des produits fugitifs, et non la contre-partie corrélativement nécessaire: doctrine de l'idéalisme pur (Renouvier, Essais crit. gén., 3eessai, 1864, p. 11). − Empl. subst. masc. sing. [P. oppos. à représenté (v. ce mot rem. 2 b s.v. représenter2)] Ce qui, dans la représentation, a la fonction de représenter; l'un des deux pôles de la représentation (d'apr. Lal. 1968). [Le caractère commun des] fonctions de l'entendement et de la raison (...) est de subordonner le représentatif au représenté dans la représentation (Renouvier, Essais crit. gén., 3eessai, 1864, p. xviii).Dans le système agissant tel qu'il nous apparaît maintenant, un terme se met tout d'abord en lumière: c'est l'agent, le sujet, le représentatif, le moi (Hamelin, Élém. princ. représ., 1907, p. 357). 2. SOCIOL. Qui concerne les représentations collectives: 4. Là où tout le monde était obligé de fabriquer de la même manière, toute variation individuelle était impossible. Le même phénomène se produit dans la vie représentative des sociétés. La religion (...) absorbe primitivement toutes les fonctions représentatives avec les fonctions pratiques. Les premières ne se dissocient des secondes que quand la philosophie apparaît. Or, elle n'est possible que quand la religion a perdu un peu de son empire.
Durkheim, Divis. trav., 1893, p. 269. E. − [Corresp. à représenter23eSection B] Qui a de l'allure, qui présente bien. V. brougham ex. REM. 1. -représentatif, -ive, élém. de compos.,dr., pol. [Corresp. à supra C 2 b α] a) 2. Semi-représentatif, -ive, adj.Le régime représentatif a évolué dans un sens de soumission des élus au contrôle de leurs électeurs qui a fait dire à certains auteurs (M. Laferrière, par exemple), que l'on avait affaire à un régime « semi-représentatif » (Vedel, Dr. constit., 1949, p. 140). b) Ultra-représentatif, -ive, adj.Le régime « ultra-représentatif ». Entre les trois régimes plus ou moins bien esquissés que la France a envisagés ou connus depuis octobre 1945 (...), un facteur commun, complexe d'ailleurs, existe: c'est le caractère absolu donné à la fiction selon laquelle l'Assemblée exprime totalement la souveraineté nationale (Vedel, Dr. constit., 1949, p. 583). Représentativement, adv.,rare. a) [Corresp. à supra A 1] De manière à donner une représentation, à rendre perceptible l'aspect de quelque chose. Vu de trop près, (...) [un tableau] tombe sous l'éclairage dominant dans la galerie, et les couleurs « n'agissent plus alors représentativement, elles ne nous donnent plus l'image de certains objets, elles agissent comme badigeon sur une toile » (Merleau-Ponty, Phénoménol. perception, 1945, p. 361).b) [Corresp. à supra C 2] Sur la personne d'un seul représentant. Un jour vient où, sur un fait donné, toute l'ancienne impunité se paye. Tel est le rôle historique de l'affaire Dreyfus. Sur ce bouc émissaire du judaïsme, tous les crimes anciens se trouvent représentativement accumulés. L'expiation est en chemin (Clemenceau, Vers réparation, 1899, p. 296).c) [Corresp. à supra D 1 b β; chez Renouvier] En tant qu'élément représenté; en tant qu'objet dans la représentation. La sensibilité est aussi expérience, expérience de soi et de non-soi en corrélation mutuelle. Les espèces et qualités sous lesquelles cette expérience a lieu sont irréductibles les unes aux autres représentativement (Renouvier, Essais crit. gén., 3eessai, 1864, p. VII). Prononc. et Orth.: [ʀ
əpʀezɑ
̃tatif], fém. [-i:v]. Ac. 1718: representatif; dep. 1740: -pré-. Étymol. et Hist. [Ca 1330 d'apr. l'adv. representativement (Guillaume de Diguleville, Pélerinage vie hum., éd. J. J. Stürzinger, 3231)] xves. [ms.] « qui représente » (Evr. de Conty, Probl. d'Arist., B.N. 210, f o264d ds Gdf. Compl.); spéc. 1718 pol. (Ac.: Representatif. Qui represente, et ne se dit gueres qu'en cette phrase. Les Ambassadeurs ont le caractère representatif); 1764 corps représentatif (Mém. touchant le Gouvernement d'Angleterre, p. 94 ds Brunot t. 6, p. 450, note 14); 1789 gouvernement représentatif (Arch. Parl. 1reSér., t. VIII, p. 594, col. 2, ibid., t. 9, p. 732, note 1); 1791 système représentatif (D'André, Ass. Nat., 30 août, Arch. Parl., 1reSér., t. XXX, p. 68, col. 2, ibid., note 7). Formé sur le supin repraesentatum de repraesentare, v. représenter, suff. -(a)tif*. Cf. le lat. médiév. representativus terme de philos. ca 1270 ds Latham, et le fr. représentif 1779 (Journal de Paris, p. 494 ds Gohin, p. 277). Fréq. abs. littér.: 662. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 798, b) 770; xxes.: a) 438, b) 604. Bbg. Vardar Soc. pol. 1973 [1970], pp. 300-301. |