| ![]() ![]() ![]() ![]() RAMER2, verbe A. − Empl. intrans. 1. [Le suj. désigne une pers., parfois un de ses attributs] Manœuvrer une ou deux rames, agir sur une ou deux rames pour faire mouvoir un bateau. Ramer dans, sur une galère; se mettre, se remettre à ramer; cesser de ramer. Toutes les mains qui ne ramaient pas s'élevèrent vers le capitaine (Hugo,Travaill. mer, 1866, p. 209).Ces deux matelots ramaient d'une façon très lente et régulière (Maupass.,Sur l'eau, 1888, p. 285). − Expr. fig. Ramer contre le(s) courant(s), à contre-courant. Aller contre les façons de faire, de penser du moment, de tout le monde. On avait l'habitude, au Désert, de voir Justin ramer contre les courants et les brises (Duhamel,Désert Bièvres, 1937, p. 199).C'est assez de la patience de quelques hommes obstinés qui rament à contre-courant pour tenir Machiavel en respect (Mauriac,Cah. noir, 1943, p. 363). − Plus rare. [P. méton.; le suj. désigne un bateau] Se déplacer sous l'action des rames. Des canots armés ont entouré le vaisseau: ils ramaient au loin, écartant les curieux, même à coups de fusil (Las Cases,Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 34). 2. P. anal. a) Imiter le mouvement d'une rame qu'on manœuvre. Bras qui rame. Ses mains rament sous le lit à la recherche d'un pot qu'il sait absent (Renard,Poil Carotte, 1894, p. 23).Le long triangle du phare de Colombo ramait dans la nuit (Malraux,Voie roy., 1930, p. 32). b) [Le suj. désigne un oiseau] Voler avec un mouvement d'ailes rappelant celui des rames. Les uns y rament [dans l'air], comme le pigeon pesant; d'autres y volent par longs jets, comme la perdrix (Bern. de St-P.,Harm. nat., 1814, p. 153). c) [Le suj. désigne une pers. ou un animal] Ramer avec, de + compl. de moyen.Se déplacer à l'aide d'un élément fonctionnant comme une rame; faire un mouvement rappelant celui d'une rame à l'aide de quelque chose. C'était un aveugle (...) ramant dans l'espace autour de lui avec un bâton (Hugo,N.-D. Paris, 1832, p. 95).Seul, l'intrépide oiseau [le goëland], ramant énergiquement des deux ailes, résiste à l'ouragan, avance même par rudes secousses (Coppée,Franc-parler I, 1894, p. 270). 3. P. méton., pop., fam. a) [Le suj. désigne une pers.] Travailler, se donner de la peine, se fatiguer: Il a fallu quinze ans pour en arriver là − ou, plus exactement, l'on a « ramé » pendant quatorze ans et neuf mois (...) et, en trois mois, le nouveau Comité (...) trouve une solution à tous les problèmes.
L'Auto, 29 oct. 1933, p. 5 ds Grubb Sports 1937, p. 60. b) Expr. Ça rame. C'est difficile, ce n'est pas évident, cela se déroule mal. Ils se turent encore un moment et Mathieu pensa tristement: « Ça rame » (Sartre,Âge de raison, 1945, p. 120). B. − Empl. trans., gén. littér. 1. [Le compl. désigne un bateau] Le faire mouvoir au moyen des rames. À la forme passive. Polisson admirablement ramé par A (Le Sport,1ersept. 1858ds Petiot 1982). − [Dans un cont. métaph.] Jusqu'au jour de misère Où, condamné, je sors Seul, ramer ma galère (Corbière,Am. jaunes, 1873, p. 145). 2. P. anal. a) [Le compl. d'obj. dir. désigne une chose concr.] Ramer qqc. de + (compl. de moyen).Lui donner un mouvement de rame à l'aide de quelque chose. Et la jeune espérance au court manteau (...) Qui rame des deux mains la noble faux (Péguy,Quatrains, 1914, p. 529). b) [Le compl. d'obj. dir. désigne l'élément environnant] L'agiter comme avec une ou plusieurs rames. Quelques gestes, parfois, qui mollement rament l'ombre lourde (Genevoix,Éparges, 1923, p. 166). − Ramer qqc. avec, de + (compl. de moyen).Les chats-huants s'éveillent, et sans bruit Rament l'air noir avec leurs ailes lourdes (Verlaine,Poèmes saturn., 1866, p. 73).L'aveugle ramait doucement l'air de ses mains ouvertes (Bernanos,Nuit, 1928, p. 36). REM. 1. Ramant, -ante, adj.,rare. Qui rame. Mais d'autres fois, c'est la mort grande et sa légende, Avec son aile (...) ramante (Verhaeren,Villes tentac., 1895, p. 192). 2. Ramé, -ée, adj.Vol ramé. Vol d'oiseau rappelant le mouvement des rames. Dans leur vol ramé, les oiseaux battent l'air avec leurs ailes (Davau-Cohen1972). Prononc. et Orth.: [ʀame], (il) rame [ʀam]. Homon. et homogr. ramer1, 3. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1213 « manœuvrer la rame, l'aviron » (Fet des romains, éd. Flutre et Sneyders de Vogel, 712, 28); 2. 1718 fig. « prendre beaucoup de peine » (Ac.); 3. 1765 « voler en battant des ailes (d'un oiseau) » (Encyclop.). Dér. de l'a. fr. raim, rain, reimes (fin xies., Raschi, Gl., éd. A. Darmesteter et D. S. Blondheim, t. 1, p. 123), « rame de bateau », qui représente le lat. remus « rame ». Bbg. Bruch (J.). Frz. vanneau, ramer. Z. fr. Spr. Lit. 1932, t. 56, pp. 355-359. − Vidos 1939, p. 558, 559. |