| QUATRE, adj. et subst. masc. inv. I. − Adjectif A. − Adj. numéral cardinal. Trois plus un. Ils portent (...) quatre gilets, deux blancs, un bleu, un rouge (Michelet, Journal, 1831, p. 98).Il les prenait [ses longues moustaches] entre le pouce et les quatre doigts joints (...) et les repassait doucement (Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 39).V. haie ex. 3. SYNT. Les quatre as d'un jeu de cartes; voiture tirée par quatre chevaux; les quatre côtés d'un carré; moteur à quatre cylindres; trèfle à quatre feuilles; les quatre galons d'un commandant; les quatre membres; les quatre phases de la lune; appartement de quatre pièces; voiture à quatre places; les quatre roues d'une voiture; les quatre saisons; mesure à quatre temps; moteur à quatre temps; les quatre trimestres d'une année. 1. Loc. Les quatre bandes d'un billard (v. bande1); jeu des quatre coins, jouer aux quatre coins (v. coin2); les quatre fers en l'air (v. fer); faire feu des quatre fers (v. feu1); ne pas valoir les quatre fers d'un chien*; tisane des quatre fleurs (v. fleur); un caporal* et quatre hommes; les quatre humeurs fondamentales/cardinales (v. humeur); la semaine des quatre jeudis (v. jeudi); à quatre mains (v. main 1reSection I H 1 c δ); se saigner aux quatre membres/aux quatre veines (v. membre et veine); ne laisser que les quatre murs (v. mur); (être logé) entre quatre murs (ibid.); (dans/entre) les quatre murs (ibid.); entre quatre planches (v. planche); les quatre parties du monde (v. partie), nos compagnons à quatre pattes*; (se mettre) à quatre pattes (v. patte1); les quatre points cardinaux (v. cardinal1); entre quat'/quatre z'yeux (v.
œil). ♦ Vieilli, au propre et au fig. Tirer à quatre chevaux. Écarteler. Ma situation était pénible; je me disais tiré à quatre chevaux (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 448).Les régicides qu'on tenaillait, qu'on tirait à quatre chevaux (Balzac, Cous. Bette, 1846, p. 283). 2. [Avec ell. du subst. déterminé] Attelage à quatre [chevaux]; défiler (colonne) par quatre [personnes]; être à quatre [personnes] par chambre. Zèphe Maloret a poussé son garçon dans l'écurie. Décrochant un fouet tressé à quatre [brins], il lui cingle les mollets (Aymé, Jument, 1933, p. 107): 1. N'est-ce pas une honte de faire circuler tout ce matériel à vide, alors qu'il y aurait tant de monde à transporter, qu'on laisse ramper à quatre [kilomètres] à l'heure sur les routes...
Romains, Hommes bonne vol., 1938, p. 108. ♦ HIST. Bande des quatre. Groupe de quatre dirigeants chinois, représentant la tendance maoïste radicale, accusés de complot et de trahison, arrêtés en 1976 et jugés en 1980-81. À en croire les journaux de Pékin, la « Bande des quatre » dirigée et soutenue par MmeMao (Chiang Ching) a soumis le pays, depuis six ans, à un (...) amas de forfaits, sabotages et actes de vandalisme (L'Express, 1eraoût 1977, p. 53, col. 1). ♦ Pas de quatre. V. pas2. − Loc. adv., fam. [Détermine le fait de monter ou de descendre un escalier] Quatre à quatre, quatre par quatre (plus rare). Quatre marches par quatre marches, très rapidement. Monter, descendre (un escalier, des marches) quatre à quatre; sauter les marches quatre par quatre. Je grimpais les escaliers quatre à quatre et (...) je m'arrêtais, hors de souffle, à la porte de ce convoité grenier (Lorrain, Contes chandelle, 1897, p. 112).Jos-Mari (...) quatre à quatre, Wolf sur les talons, dégringola les marches vers la forge (Peyré, Matterhorn, 1939, p. 159).V. escalier A 1 ex. de Maupassant. ♦ Au fig., rare. Très rapidement. Au lieu de prendre leur temps et de ruminer chaque morceau, ils avalaient quatre à quatre comme gens affamés (Sand, Maîtres sonneurs, 1853, p. 150).Ils avaient quatre à quatre revêtu des vêtements plus élégants, fait appeler une voiture et étaient venus chez la princesse de Guermantes (Proust, Temps retr., 1922, p. 1013). − En partic. En quatre. En quatre parties (égales). Couper, déchirer, plier en quatre. Ma mère ne manquait jamais de cueillir (...) la figue la plus belle et la plus chaude. Elle me la tendait, ayant fendu en quatre la pulpe rose et granuleuse (Lacretelle, Silbermann, 1922, p. 9). ♦ Loc., au fig., fam. Couper les cheveux en quatre (v. cheveu); fendre* un (les) cheveu(x) en quatre; couper un fil*/les fils en quatre; se couper* en quatre. Se mettre en quatre. Synon. de se couper* en quatre.Se mettre en quatre pour aider qqn, pour faire qqc. Va-t-en aussi, puisque tu n'es pas mon ami. − Moi, pas ton ami! quand je me suis mis en quatre! (Zola, J. Damour, 1884, p. 372).Des gens qui se mettraient certes en quatre pour lui, s'ils ne partaient le lendemain pour Salzbourg ou pour Deauville (Arnoux, Paris, 1939, p. 118). 3. P. ext. a) Un petit nombre. Écrire quatre lignes à qqn; à quatre pas d'ici; avoir quatre sous d'économies. Voilà la foi qui sauve, la foi qui nous fait envisager autrement que comme une folle partie de joie les quatre jours que nous passons sur cette terre (Renan, Réf. intellect., 1871, pp. 338-339).La nature avare m'avait refusé le don précieux de la parole (...) je n'avais su de ma vie improviser quatre mots (A. France, Vie fleur, 1922, p. 435): 2. − Tu ne voudrais quand même pas que je sorte sans me faire la barbe! − Bah! tu n'as que quatre poils et tu nous obliges à perdre une heure.
Duhamel, Suzanne, 1941, p. 147. − Loc. fam. Quatre pelés et un (deux, trois) tondu(s) (v. pelé). Un de ces quatre matins (v. matin). [P. ell. de matins] À un de ces quatre (pop.). Je dois la revoir un de ces quatre (Fr. Dorin, Les Lits à une place, 1980, p. 89). − Loc. adj., fam. De quatre sous, à quatre sous (plus rare). [En parlant d'une chose] Peu coûteux, de peu de valeur. Robe de quatre sous. Madame n'a dans la bouche que ce mot: « très cher » (...) même de pauvres objets de quatre sous, « c'est très cher » (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p. 24): 3. ... il vous indiquait des remèdes de quatre sous; quelquefois une simple tisane. Vous pensez bien que les gens qui payent huit francs pour une consultation n'aiment pas trop qu'on leur indique un remède de quatre sous.
Romains, Knock, 1923, II, 1, p. 7. ♦ Au fig. [En parlant d'une pers. ou d'une chose] De peu de valeur. Une soi-disant princesse (...) une princesse de quatre sous, qui t'a plumé, houspillé, trompé, berné (Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 412).Des ouvriers qui ont fait leurs humanités dans les romans à quatre sous (Goncourt, Journal, 1860, p. 718).Voulez-vous me laisser tranquille avec vos blasphèmes, méchant baron de quatre sous? (Halévy, Carnets, t. 2, 1870, p. 118). b) Dans des loc. fig. Plusieurs. Ne pas avoir quatre bras*; par les quatre chemins (v. chemin); ne pas y aller par quatre chemins (ibid.); aux quatre coins de (v. coin1); aux, des quatre coins de l'horizon*; faire les quatre cents coups (v. coup C 2 b synt.); être tiré à quatre épingles (v. épingle); les quatre horizons (v. horizon); aux quatre vents (v. vent); dire les quatre vérités (v. vérité); faire ses quatre volontés (v. volonté). − [Avec ell. du subst. déterminé] Faire le diable à quatre (v. diable1). ♦ Loc. adv. fam. Comme quatre. Beaucoup, énormément. Boire, manger, faire du bruit comme quatre; avoir de l'esprit comme quatre. S'il hésite une heure, (...) le réfractaire, tout est dit − eût-il du talent comme quatre, les vertus d'un héros, la santé d'un athlète (Vallès, Réfract., 1865, p. 31). ♦ Loc. ,,Il faut le tenir à quatre`` (Ac.), ,, se dit en parlant d'un Fou, d'un furieux qui ne peut être retenu que par les efforts réunis de plusieurs personnes`` (Ac.). Au fig., fam. Se (re)tenir à quatre. Faire un gros effort sur soi-même. Ne m'approchez pas, monsieur le carabinier, vous puez l'écurie! − Gringalet! si je ne me retenais à quatre, je te souffletterais de ma botte! (Borel, Champavert, 1833, p. 210).Je m'appliquais, je me tenais à quatre, et j'étudiais (Pailleron, Monde où l'on s'ennuie, 1869, ii, 7, p. 120).Il se tenait à quatre pour ne pas l'assommer comme une bête (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 175). B. − Adj. numéral ordinal. Qui occupe le rang marqué par le nombre quatre. V. quatrième. 1. [Déterm. postposé d'un élém. appartenant à un ensemble numéroté] Numéro, page quatre; Henri IV. Chapitre quatre de Bello gallico (Toepffer, Nouv. genev., 1839, p. 77).La cellule quatre-bis de la prison royale de Gênes (Corbière, Amours jaunes, 1873, p. 144). 2. [Déterm. antéposé d'un subst. désignant un espace de temps] Il est déjà quatre heures du matin, heure indue, et (...) les fusillés, c'est toujours à quatre heures que ça se passe (Audiberti, Quoat, 1946, 2etabl., p. 49).V. froid I A 1 b ex. de Anouilh. ♦ Quatre heures, subst. masc., fam., le plus souvent dans la lang. des enfants. Synon. de goûter2.Domenico me parlait beaucoup de New-York quand nous prenions les quatre heures à la cambuse (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 27).Elle déjeune à l'école et emporte son (...) « quatre heures » (M. Laforêt, Contes et légendes de ma vie privée, Paris, Stock, 1981, p. 141). − [Avec ell. du subst. déterminé] De quatre [heures] à cinq [heures]. Il est exactement huit heures quatre [minutes] à l'horloge des docks (Pagnol, Fanny, 1932, i, 1ertabl., 1, p. 11). II. − Subst. masc. inv. A. − [Sans art.] Le nombre quatre. Quatre en chiffres arabes (4), en chiffres romains (IV ou IIII); nombre divisible par quatre. Quatre et quatre huit et cinq treize (Courteline, Boubouroche, 1893, i, 1, p. 11).V. cube A ex. de Alain. − Loc. Deux* et deux font quatre; à la six-quatre-deux*. B. − P. méton. 1. Le chiffre quatre. Un quatre arabe (4), un quatre romain (IV ou IIII). Quarante-quatre s'écrit par deux quatre (Ac.). 2. JEUX. Carte, domino, face d'un dé portant quatre marques. Le quatre de trèfle. Le double quatre (DG). Qui veut des cartes? demanda Koukou (...). Le cuisinier tira un quatre (Benoit, Atlant., 1919, p. 200). 3. SPORTS (aviron). Outrigger à quatre rameurs. Quatre de couple; quatre de pointe. Un quatre avec/sans barreur. Le quatre barré et le huit barré féminin (Jeux et sports, 1967, p. 1533). C. − P. ext. [À valeur ordinale; désigne un élém. d'un ensemble numéroté] Miser sur le quatre; habiter au quatre de la rue. Je ne dispose plus d'une seule chambre, et, quoique nous soyons le quatre janvier, vous serez dans l'obligation de coucher dehors (Romains, Knock, 1923, iii, 8, p. 19).Il prit une clef et ils montèrent visiter le numéro 4 (...). − Comment! Tu as loué le quatre! se récria-t-elle. Je l'avais promis (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p. 201). ♦ La nuit* du 4 Août. Prononc. et Orth.: [katʀ
̭]. Dans un usage pop. et fam. dep. le xviies. dans le groupe final cons. + r ou l + [ə], amuïssement de [ə] et de la liquide précédente sous l'effet de la mollesse articulatoire. ,,Au xixesiècle, la prononc. quat(re), not(re), vot(re), aut(re), guêt(res) etc. (surtout devant un mot à initiale consonantique, par ex. quat'sous, maît'd'hôtel, mais aussi en fin de phrase: ils sont quat') a même cessé d'être blâmée`` (Straka ds Trav. Ling. Litt. Strasbourg t. 19 n o1 1981, p. 191). Att. ds Ac. dep. 1694; 1835 et 1878: ,,Entre quatre yeux, on prononce ordinairement par euphonie: Entre quatre-z-yeux``; 1935 remplace « euphonie » par « plaisanterie ». V. aussi quat'zarts. Selon Littré: ,,Il n'y a aucune raison de repousser cette lettre euphonique qui se trouve dans bien d'autres cas: va-s-y, donne-s-en``. Étymol. et Hist. 1. Fin xes. adj. numéral cardinal (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 31); ca 1200 subst. (Mort Garin, 235 ds T.-L.); ca 1316 quatre et quatre (Geffroy de Paris, Chron. métrique, éd. Ar. Diverrès, 79); 1690 (Fur.: On dit proverbialement, Quatre à quatre et le reste en gros); 1636 se mettre en quatre (Corneille, Illusion comique, III, 3, 689); 1640 (Oudin Curiositez, s.v. chemin: il n'en faut point aller par quatre chemins .i. il faut faire resolument); 1674 aux quatre coins du monde (Mmede Sévigné, Lettre au comte de Guitaut, éd. M. Monmerqué, t. 3, p. 405, n o380, avril ou mai); 1539 subst. (Est.: Le nombre de quatre); 1671 (Pomey: Le quatre; au jeu des cartes, ou des dez); 2. 1254 adj. numéral ordinal (ds Ordonnances des rois de France, t. 1, p. 75b); 1694 « 4mejour du mois » (Maintenon, Lett. à Mmede Veillhant, mai ds Littré). D'un lat. quattor « quatre » (cf. CIL VI, 13302 ds Vään., p. 48, ALL 7, 65 ds FEW t. 2, p. 1440b, et aussi quator CIL 10, 5939 ds OLD), issu p. dissim. du class. quattuor « id. ». Fréq. abs. littér.: 24 445. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 37 340, b) 41 994; xxes.: a) 36 485, b) 27 653. Bbg. Bursch (H.). Die Vierzahl im Romanischen. In: [Mél. Meier (H.)]. Bonn, 1980, pp. 100-106. − George (K.E.M.). Quatre, quattro, cuatro... St neophilol. 1969, t. 41, pp. 31-38. − Mackel (E.). Der Bildiche Gebrauch von quatre. Arch. St. n. Spr. 1909, t. 123, pp. 145-150. − Quem. DDL t. 30. |