| * Dans l'article "QUALIFIER,, verbe trans." QUALIFIER, verbe trans. A. − Considérer comme et nommer tel. 1. a) Qqn qualifie qqc. (chose, action) de + adj. attribut ou subst. ou groupe syntagm. nom., adj. ou adv.Marquer de telle qualité, caractériser en attribuant une qualité, une appellation, un titre. Synon. appeler, caractériser, dénommer, désigner, intituler, nommer.Qualifier le nom de. La valse à deux temps, je ne sais pourquoi, s'appelle en Grèce la valse allemande. La valse à trois temps est indûment qualifiée de valse française (About, Grèce, 1854, p. 372): 1. Nous disons spontanément que les orbes concentriques de l'arbre ne sont que des « cercles grossiers ». À l'inverse, la circonférence est qualifiée de parfaite quand elle est absolument régulière.
Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 170. Rem. Pour introd. un néol. ou une expr. surprenante, souvent suivi de guillemets ou en it.: Le Conservateur avait une face que je qualifierai, d'un terme botanique, d'hispide, j'entends par là velue (Arnoux, Calendr. Fl., 1946, p. 170). − [Sans de] Un glacier peut donc être qualifié: un appareil naturel qui a pour fonction de débiter l'excès des neiges persistantes (Lapparent, Abr. géol., 1886, p. 46).Peu après, nous les quali-fions [les réveils] sommeil parce que nous ne nous les rappelons plus (Proust, Guermantes 2, 1921, p. 335).Les gens, las d'attendre, étaient allés chez un confrère. Alors il faisait une colère à grand orchestre, qualifiait avilissante et vexatoire cette profession qu'il avait si passionnément souhaitée (Duhamel, Terre promise, 1934, p. 119). SYNT. Ne pas hésiter à, persister à, oser qualifier qqc. de...; ne pas savoir comment qualifier (une conduite morale); qu'on peut, qu'on pourrait qualifier de... ♦ P. euphém. Qu'on ne saurait qualifier (en parlant d'une conduite morale, d'un comportement). Absolument odieux. Synon. inqualifiable, innommable.Ce prince, dont on ne saurait qualifier la déplorable faiblesse, accepta sans résistance une mission qui n'était qu'un prétexte pour l'éloigner (Staël, Consid. Révol. fr., t. 1, 1817, p. 277).Qui donc a pu commettre sur vous un crime que je ne sais de quel nom qualifier! (Lautréam., Chants Maldoror, 1869, p. 129).Elle ne savait comment qualifier une pareille méconnaissance de ses bonnes intentions (Gobineau, Pléiades, 1874, p. 287). − DR. ,,Mettre l'acte ou le fait en équation juridique, afin de déterminer le régime auquel il se trouve soumis`` (Roland-Boyer 1983). ♦ DR. PÉNAL. ,,Rechercher dans la loi pour l'appliquer à l'espèce, l'incrimination susceptible de lui convenir`` (Roland-Boyer 1983). Considérer comme coupable, non ce qui est qualifié délit par la loi, mais ce qui déplaît aux organes de l'accusation (Courier, Pamphlets pol., Procès, 1821, p. 109).Combien trouverait-on de jurés pour qualifier votre action de crime passionnel?... Ce n'est pourtant pas autre chose (Curel, Nouv. idole, 1899, ii, 5, p. 213). b) Qqn qualifie qqn (de) + compl. ou adj. qualificatif.Traiter de. Bien, jeune homme − Le père Miné qualifiait de ce titre tous les gens de moins de soixante ans (Huysmans, Oblat, t. 1, 1903, p. 94).Un savant peut travailler dans de larges domaines, où il applique les créations dues au génie de ses prédécesseurs, sans pour autant être qualifié de plagiaire (Schaeffer, Rech. mus. concr., 1952, p. 136). − En partic. ♦ Vx. Attribuer un titre féodal ou nobiliaire. Les Lettres du Roi, d'Arrêt le qualifient chevalier, prince, duc (Ac.). ♦ Péj. [Avec de] Qqn qualifie qqn (et p. méton. un aspect du comportement) de.Insulter, en portant un jugement dépréciatif. Qualifier qqn de tous les noms: 2. boissonnade: Vous avez qualifié de moule le gendarme? (...). le baron: C'est grave, hein? boissonnade: Comment, si c'est grave! Six jours à trois mois, tout bonnement.
Courteline, Gend. sans pitié, 1899, 2, p. 155. − Empl. pronom. réfl. ♦ Vx. [Sans de] S'arroger, prendre une qualité, un titre, une fonction. Se qualifier Écuyer, Docteur, Bourgeois de Paris (Ac.). Jomini (...) se qualifia colonel, et c'était ainsi qu'on le désignait habituellement (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 13, 1869, p. 74). ♦ Mod. [Avec de] Mais non, ni lard ni cochon, mon type, (...) se qualifiant de journalier et usurpant ce titre qui implique force et courage (Verlaine,
Œuvres compl., t. 4, Mes hôp., 1891, p. 344): 3. Dans la gondole, Bouvard et Pécuchet firent la conversation avec trois paysans, deux bonnes femmes, un séminariste, et n'hésitèrent pas à se qualifier d'ingénieurs.
Flaub., Bouvard, t. 1, 1880, p. 90. c) Qqc. qualifie qqc.Caractériser. Puisque l'intention qualifie l'acte, que va faire la volonté en présence des jugements de la raison? (Gilson, Espr. philos. médiév., 1932, p. 147): 4. ... toutes les fleurs sont exactement représentées par des alliances d'alcoolats et d'esprits, dérobant au modèle sa personnalité même et y ajoutant ce rien, ce ton en plus, ce fumet capiteux, cette touche rare qui qualifie une œuvre d'art.
Huysmans, À rebours, 1884, p. 150. 2. GRAMM., LING. Exprimer la qualité. Synon. caractériser, déterminer.L'adverbe de manière qualifie les actions. Il aimait de brutaliser l'ordre des mots, d'éloigner le qualificatif du nom qu'il qualifie, le complément du verbe (Valéry, Variété II, 1929, p. 221). B. − Qqc. qualifie qqn (à, pour qqc.; pour + inf.).Donner la qualification à. 1. DR. DU TRAV., ÉCON., SOCIOL. Rendre apte à assumer, à remplir un emploi déterminé. Souvent à la forme passive. Être qualifié (pour). Être capable (de), avoir qualité pour. L'état universitaire qualifie peu pour discourir des choses de la passion, et je me sens emprunté pour vous dire ce qu'est Antinéa (Benoit, Atlant., 1919, p. 170). − Empl. pronom. Se rendre capable, acquérir de la compétence. Se qualifier dans son métier. (Dict. xixeet xxes.). − P. ext., dans la lang. usuelle. Donner la capacité, la compétence. Synon. autoriser, habiliter.Cela ne vous qualifie nullement pour...; être particulièrement, pleinement, tout, seul qualifié pour...; personne n'est mieux/plus qualifié que vous pour... Ce système reviendrait, essentiellement, à placer l'Empire et, demain, la France elle-même sous l'autorité personnelle d'un homme que rien ne qualifie pour l'exercer (De Gaulle, Mém. guerre, 1956, p. 460): 5. ... [ce genre d'esprit] était du moins (...) de l'esprit adroit à utiliser (comme un traducteur) différentes formes de syntaxe. Or, rien de tel ne semblait qualifier Mmede Citri à mépriser des qualités tellement semblables aux siennes.
Proust, Sodome, 1922, p. 688. 2. SPORTS. [Le suj. désigne un concurrent, un cheval, un athlète, une équipe] Être qualifié (pour) (souvent au passif). Obtenir la qualification, le droit de disputer une épreuve ultérieure, une compétition sportive de niveau supérieur (d'apr. Petiot 1982). Anton. éliminé.Les Championnats sont des courses annuelles ayant pour but de déterminer quel est le plus fort parmi les coureurs qualifiés pour y prendre part (Baudry de Saunier, Cycl., 1892, p. 431).Le Red Star et Toulouse, leaders de championnat, se trouvent tous deux qualifiés en Coupe (L'Œuvre, 28 févr. 1941).Trente-deux clubs, on le sait, restent en course pour le titre, répartis en huit poules de quatre: donc trois tours à jouer, à l'issue desquels les deux premiers de chaque poule se trouveront qualifiés pour le tableau final (Le Figaro, 19-20 janv. 1952, p. 8, col. 5). − Empl. pronom. réfl. Se qualifier pour un championnat, pour les Jeux Olympiques. Cochet se qualifia pour la finale, en battant le Parisien par 2-6, 6-3, 6-1, 2-6 et 6-2 (Le Miroir des sports, 1923, n o24, p. 158). Prononc. et Orth.: [kalifje], (il) qualifie [-fi]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 4equart xves. califfier « caractériser par l'attribution d'une qualité » (H. Baude, Poésies, éd. J. Quicherat, p. 83); 1585 qualifier de « attribuer un titre, une qualité à » (N. du Fail, Contes d'Eutrapel, t. 2, p. 262); 1845-46 gramm. (Besch.); 1566 part. passé adj. « qui a toutes les conditions requises par la loi pour constituer le délit, le crime » (H. Est., Tr. prep. a l'apol. p. Herod., XXIII ds Gdf. Compl.: Ils ne se laissent pas de commettre aussi des larrecins qualifiez); 2. 1483 part. passé adj. « ayant la qualité nécessaire » (ds Rec. gén. des anc. lois fr., éd. Isambert, t. 11, p. 55: personnages lettrez de grandes expérience, et bien qualifiez); a) 1619 « qui a les qualités requises pour » (ds Nouv. Cout. gén., éd. Bourdot de Richebourg, t. 2, p. 98: Nul ne pourra exercer l'estat d'advocat en nostre dite cour, qu'il n'ait preallablement esté trouvé capable et à ce qualifié par examen); 1956 ouvrier qualifié (P. Chombart de Lauwe, Vie quotid. familles ouvrières, p. 19); 1840 turfisme qualifié (d'apr. Petiot); 1840 qualifier (d'apr. Dauzat 1964); 1869 part. passé adj. qualifié (Littré); 1902 part. passé subst. (L'Auto-Vélo, 20 janv. ds Petiot); 1903 se qualifier (L'Auto, 12 oct., ibid.); b) 1625 part. passé adj. (J. Stoer, Dict. fr.-lat.: Homme bien qualifié, Vir illustris). Empr. au lat. médiév.qualificare « qualifier, apporter des modifications » ca 1270 ds Latham, comp. du lat. class. qualis, quel* et de -ficare, de facere, faire*, v. -ifier; 2 sous l'infl. de l'angl. to qualify « investir de qualités nécessaires à » att. dep. 1581 ds NED, lui-même empr. dès 1549 (ibid.) au fr. Fréq. abs. littér.: 463. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 387, b) 801; xxes.: a) 727, b) 769. DÉR. 1. Qualifiable, adj.a) [Corresp. à supra A 1 a]
α) Rare. Qui peut être qualifié. Anton. inqualifiable.La Semoy, noire sur son lit de cailloux bavards, ses truites qualifiables vraiment de surnaturelles (Verlaine,
Œuvres posth., t. 2, Souv. et prom., 1896, p. 135).
β) [Péj., gén. dans un cont. nég., p. exagér.; par litote] Ne ... pas/guère qualifiable. Qu'on ne saurait qualifier (qui est si répréhensible qu'il n'y a pas de vocable assez fort pour le nommer, pour l'apprécier). Synon. inqualifiable, innommable.Sa conduite n'est pas qualifiable (Ac.1878-1935).
γ) Dr. On ne peut faire des lois pénales que pour les délits qualifiables (Ac.1878-1935).b) Sports. [Corresp. à supra B 2; en parlant d'un concurrent] Qui peut se qualifier (être qualifié) pour disputer une épreuve sportive (d'apr. Petiot 1982). Étant qualifiables d'office, nos vedettes ne poussèrent pas (L'Auto, 23 juin 1941).− [kalifjabl̥]. Att. ds Ac. dep. 1878. −1reattest. 1858 adj. (Legoar.: Qualifiable, adj. des 2 g. Qui peut se qualifier); de qualifier, suff. -able*. L'angl. qualifiable « qui peut être qualifié, modifié » est att. dep. 1611 ds NED. 2. Qualificateur, subst. masc.a)
α) Hist. de l'Église. [Au temps de l'Inquisition, au xvies., notamment en Espagne] Théologien d'un tribunal local qui a pour mission de qualifier les hérésies des « propositions ». Chaque tribunal [de l'Inquisition espagnole] comprend des juges (...) des « qualificateurs » chargés de donner une qualification théologique (erroné, sentant l'hérésie, hérétique, etc.) aux (...) crimes contre la foi qui leur sont déférés... (Encyclop. univ.t. 81970, p. 1040).
β) Dr. canon. anc., hist. de l'Église. ,,Théologien chargé par la congrégation pour la Doctrine de la foi (autrefois le Saint-Office) d'examiner les opinions nouvelles en rapport avec la foi ou les mœurs et de présenter un rapport à cette congrégation`` (Lar. Lang. fr.). Qualificateur du Saint-Office (Ac.).b) Ling. Dans sa tentative de classification des catégories verbales, Jakobson (1957) appelle qualificateurs les désignateurs qui indiquent la qualité du terme de l'énoncé, c'est-à-dire le genre des agents ou patients (les protagonistes du procès de l'énoncé) exprimé dans les formes verbales: animé, inanimé, masculin, féminin, etc.V. quantificateur (Mounin 1974).−[kalifikatœ:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1718. − 1reattest. 1665 (Retz, Lettre ds
Œuvres, éd. R. Chantelauze, t. 7, p. 113); dér. sav. de qualifier, suff. -(a)teur*. |