| PUNIR, verbe trans. A. − Infliger à quelqu'un un châtiment, une peine en expiation d'une faute. 1. Punir qqn.Synon. châtier; anton. récompenser.Punir un coupable, un criminel, un enfant, un traître. Parmi ceux que l'on punit, dit Platon, il en est qui, par l'énormité de leurs crimes, sont réputés incurables, tels que les sacriléges, les assassins et tous ceux qui se sont noircis par d'atroces forfaits (Dupuis,Orig. cultes, 1796, p. 522).Si Dreyfus est coupable, qu'il soit puni aussi rigoureusement que vous voudrez (Clemenceau,Iniquité, 1899, p. 208): 1. Le goût de punir, on le verra plus loin, est souvent fort trouble: humilier, dompter, frapper un être fragile, le réduire au silence ou à l'immobilité, ces jeux cruels sont savourés par plus de bonnes âmes qu'on ne croit.
Mounier,Traité caract., 1946, p. 99. ♦ Punir qqn comme il le mérite. Infliger une punition proportionnelle à la faute, au méfait. Qui vient-là? Qui se glisse le long de la muraille? (...) Si c'est lui, je le punirai comme il mérite, il ne vivra pas longtemps sous les cieux (Nerval,Faust, 1840, 2epart., p. 148). − Expressions ♦ Être puni par où l'on a péché. Subir une punition telle qu'elle correspond à une faute commise. Ah! monsieur, vous êtes bien puni par où vous avez péché! Est-ce qu'on abandonne son argent comme ça! (Zola,Dr Pascal, 1893, p. 221). ♦ Dieu, le Ciel le/te/vous punira. Son/ton/votre crime ne demeurera pas impuni. (Ds Ac.). Le ciel me punit, aux yeux de Dieu, je suis coupable de meurtre (Stendhal,Rouge et Noir, 1830, p. 113).Dieu te punit! Tu as été contre Dieu! Tu as forcé la limite! Tu as passé la borne intransgressible! (Claudel,Chr. Colomb, 1929, 2epart., p. 1179).[En formule de serment] Dieu me punisse si... Mon père, je le jure! et Dieu me punisse si je manque à mon serment! (Dumas père, Lorenzino, 1842, iv, 3, p. 263). ♦ Fam. C'est le Bon Dieu qui t'a puni. [Se dit à un enfant qui, après avoir commis une faute, subit un châtiment mérité, sans l'intervention de personne (d'apr. Lar. Lang. fr.)] . 2. Punir qqn de/pour qqc. a) Punir de.Punir quelqu'un au moyen de quelque chose. Punir qqn d'un anathème, du bâton, de l'exil, d'une gifle, de la prison; punir de la peine capitale; punir de mort. Le crime de séduction est infâme, et puni du dernier supplice (Marmontel,Essai sur rom., 1799, p. 332).L'article 330 punit de trois mois à deux ans quiconque s'est rendu coupable d'outrage public à la pudeur (Courteline,Article 330, 1900, p. 278).Le maître d'école punit de retenue la classe entière pour un coupable qui ne s'est pas dénoncé (Paulhan,Fleurs Tarbes, 1941, p. 143): 2. Le gouvernement avait commencé par soumettre au corps législatif un projet de loi punissant d'une amende et d'un emprisonnement toute personne convaincue de s'être attribué sans droit un titre nobiliaire quelconque.
Zola,E. Rougon, 1876, p. 280. b) Punir pour.Punir quelqu'un à cause de quelque chose. Punir qqn de sa cruauté, de sa désobéissance, de son impudence, de sa paresse, de sa présomption, de sa trahison. Le chevalier: Que je m'en aille? Oh! mais, comtesse, je ne vous aimerais pas si je vous obéissais, et vous seriez la première à me punir de cette indifférence (Dumas père, Mariage sous Louis XV, 1841, ii, 4, p. 132).Nous serons punis, me dit Jeanne, pour ce que nous n'aurons pas fait, et que nous aurions pu faire (Bloy,Journal, 1894, p. 120): 3. La plupart des fautes pour lesquelles ma mère nous réprimandait, ma sœur et moi, c'était des maladresses ou des étourderies. Poupette se fit durement gronder et punir pour avoir perdu un collet de civette.
Beauvoir,Mém. j. fille, 1958, p. 75. c) Empl. pronom. réfl. S'infliger une punition. Pour me punir moi-même de mon étourderie, je voulus m'en imposer toutes les conséquences (Jouy,Hermite, t. 1, 1811, p. 26).Si tu veux, je vais me punir de notre faute en te quittant pour huit jours (Stendhal,Rouge et Noir, 1830, p. 115).Elle s'était couchée pendant une heure sur le carreau glacé de sa chambre, pour se punir d'une faute (Zola,Conquête Plassans, 1874, p. 1065). B. − Punir qqc.Réprimer, sanctionner quelque chose. Punir un délit, l'erreur, une faute, l'hérésie, une infraction, la traîtrise. La fameuse Atlantide (...) ne fut submergée que parce que les dieux voulurent punir les crimes de ces insulaires (Dupuis,Orig. cultes, 1796, p. 596).Une expédition contre l'un de ses fils, dont il punit la révolte en le faisant brûler avec sa femme et ses enfants (Thierry,Récits mérov., t. 1, 1840, p. 320).On avait les moyens d'empêcher les brutales saccades et de punir les abus. Deux ordonnances du 30 juin codifièrent ce qu'il fallait (De Gaulle,Mém. guerre, 1959, p. 247). REM. 1. Puni, -ie, part. passé adj. et subst.(Celui, celle) qui subit ou a subi une punition. Écolier, élève, enfant, soldat puni ; les innocents punis. Déjà, malgré les airs d'enfant puni qu'il prenait dès qu'il était seul avec elle (...) déjà il avait sorti de sa malle des costumes d'été, et pris, à son insu, une mine rajeunie (Martin du G.,Thib., Belle sais., 1923, p. 982).Empl. subst. Le quartier des punis. D'autres jeux consistent à (...) entourer d'un rond dansant et grimaçant les punis, les malchanceux, les plus décriés de l'école (Frapié,Maternelle, 1904, p. 80).Nous nous en tirions comme tous les punis dans tous les camps militaires du monde, en sabotant le travail (Ambrière,Gdes vac., 1946, p. 88). 2. Punissant, -ante, part. prés. en empl. adj.Qui exerce une punition. L'action de la Providence divine se fera donc sentir bienfaisante à l'avenir, comme elle s'était exercée sévère et punissante dans le passé (Théol. cath.t. 4, 11920, p. 1002). Prononc. et Orth.: [pyni:ʀ], (il) punit [-ni]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1260 punir qqn « frapper quelqu'un d'une peine pour avoir commis une faute » (Étienne Boileau, Métiers, 39 ds T.-L.); b) 1269-78 punir qqn de qqc. « lui faire subir un mal à cause de quelque chose » (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 11729); c) 1637 empl. abs. (Corneille, Le Cid, I, 5 ds
Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 3, p. 119); 2. xiiies. punir (une faute) « sanctionner (une faute) par une peine, une punition » (Isopet de Lyon, 2534 ds T.-L.); 3. 1647 punir qqn « mal récompenser quelqu'un de ses bienfaits » (Corneille, Héraclius, III, 2 ds
Œuvres, éd. citée, t. 5, p. 198). Du lat. punire, poenire « punir, châtier », dér. de poena (v. peine); en raison de sa date d'apparition relativement tardive, le mot a aussi pu être empr. au lat. (FEW t. 9, p. 600b). Fréq. abs. littér.: 2 582. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 5 883, b) 3 309; xxes.: a) 2 783, b) 2 508. DÉR. Punisseur, -euse, adj. et subst.a) Adj. Qui inflige une punition. Mon bras ne peut frapper, mais ma voix peut maudire. Ô vous, dieux punisseurs, dieux du profond empire! (Ponsard,Lucrèce, 1843, V, 3, p. 94).b) Subst. Personne qui exerce la fonction de punir. Le même juge, le lendemain, siège comme gardien de l'ordre et punisseur. Il pèse les actes, la sagesse, l'intention, la responsabilité de chacun (Alain,Propos, 1912, p. 136).− [pynisœ:ʀ], fém. [-ø:z]. Att. ds Ac. dep. 1835 (1835 et 1878 au masc.). − 1resattest. ca 1355 subst. (P. Bersuire, f o31 v ods Littré), 1568 adj. (Garnier, Porcie, 32 ds Tragédies, éd. W. Foerster, t. 1, p. 18); de punir, suff. -eur2*. BBG. − Gohin 1903, p. 318 (s.v. punisseur). |