| POUR, prép. [Marque l'idée d'échange, d'équivalence, p. ext., celle de simple repérage (infra I); ou bien marque l'idée de destination (infra II), ou entre dans une relation de causalité (infra III)] I.− [Marque l'idée d'échange ou de substitution, celle d'équivalence, d'où p. ext. celle de simple repérage] A.− [Idée d'échange ou de substitution] 1. En échange de. Acheter, se procurer qqc. pour telle somme, pour trois fois rien, pour une bouchée de pain; pas pour tout l'or du monde; en être pour ses frais (v. frais2). J'ai fait l'affaire pour cent florins, dit Stephen à Schmidt (Karr, Sous tilleuls,1832, p. 196).Un magasin Woolworth apparaît, le premier maillon de cette chaîne immense de bazars à « tout pour cinq et dix cents » qui enserre maintenant les États-Unis (Morand, New-York,1930, p. 125): 1. Lipp est à coup sûr un des endroits, le seul peut-être, où l'on puisse avoir pour un demi le résumé fidèle et complet d'une journée politique ou intellectuelle française.
Fargue, Piéton Paris,1939, p. 163. − Risquer, jouer le tout pour le tout. Agir, s'exprimer sans se ménager d'autre issue en cas d'échec. Mais Jacques, d'instinct, avait reculé le buste, comme pour s'écarter. Daniel risqua le tout pour le tout : − « Explique-moi, enfin! Qu'est-ce qui s'est passé, il y a quatre ans? » (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 212).Jouant le tout pour le tout, désespéré, il pria cet être qui se moque de la prière (Queffélec, Recteur,1944, p. 190). − (On n'a) rien pour rien. On n'a rien gratuitement, sans effort. Oui, Eugénie, j'aurais l'âme bien petite, si je n'acceptais pas. Cependant, rien pour rien, confiance pour confiance (Balzac, E. Grandet,1834, p. 161). −
Œil pour œil*, dent pour dent; rendre coup pour coup. Il n'y avait point d'archers pour rendre flèches pour flèches (Barante, Hist. ducs Bourg.,t. 4, 1821-24, p. 74).Il faudrait au moins (...) changer pour un an un Français pour un Anglais (Michelet, Journal,1834, p. 122): 2. De même, reprit l'ami désireux de rendre politesse pour politesse, concession pour concession, j'avouerai que érymante, toute jaune qu'elle est, est une plante fort présentable.
Karr, Sous tilleuls,1832pp. 244-245. 2. En remplacement de, à la place de a) (d'une personne). Je réponds pour lui, tu paieras, tu signeras pour lui. Allez vous reposer : je veillerai pour vous (La Martelière, Robert,1793, v, 3, p. 58).Inscrivez donc le nom de mon père, si c'est possible; il aurait été content d'être là-dessus. Je donnerai pour lui (R. Bazin, Blé,1907, p. 245). − En partic. (dans un courrier, un document officiel, comme mention précédant la signature du subordonné qui remplace la personne citée). Pour le Président Directeur Général. b) (d'une chose). Traduire mot pour mot (= mot à mot); dire un mot pour un autre. Elle prononçait les oit en ait et disait frait pour froid, porteux au lieu de porteurs (Balzac, Lys,1836, p. 104).Je vous demande de me répéter, mot pour mot, votre première phrase (Peisson, Parti Liverpool,1932, p. 12). − Trait pour trait. Il n'y avait pas une de ces aimables petites femmes qui ne ressemblât trait pour trait à la mienne (Nodier, Fée Miettes,1831, p. 169). B.− [Rapport d'équivalence] 1. Comme, en fait de, en guise de, en tant que. Au-dessus de la muraille, vous verrez, pour inscriptions, des têtes de morts entassés dans des cages de fer (Quinet, All. et Ital.,1836, p. 178): 3. ... un important groupement, constitué à l'avance dans la région de Sontay sous les ordres du général Alessandri, avec, pour noyau, la Légion, remplit vaillamment sa mission.
De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 166. − Pour sûr. Ce qui est dit peut être considéré comme sûr; assurément. C'est cela pour sûr qui terrifia le comte et le fit tomber sur son lit sans connaissance (Sue, Atar-Gull,1831, p. 12). − Fam. Pour de vrai. Dans la réalité. Écoutez donc : un père de famille, c'est jamais un vrai père de famille. Un assassin c'est jamais tout à fait un assassin. Ils jouent, vous comprenez. Tandis qu'un mort, c'est un mort pour de vrai (Sartre, Mains sales,1948, 4e tabl., 6, p. 169).Pour de bon (v. bon1). 2. En partic. [Dans des constr. attributives] − Passer pour qqc. (v. passer3). Passer pour + inf. Un homme de mon âge (...) qui a toujours passé (...) pour être doué d'un sentiment très exquis des arts (Nodier, Fée Miettes,1831, p. 130). − Prendre* pour. − Accepter, reconnaître qqn pour. Le courage intrépide qu'il a montré dans les deux derniers assauts, le fait accepter avec joie pour chef suprême de tout le camp (Cottin, Mathilde,t. 2, 1805, p. 265).Avec la maison entière, je fis chorus au sujet de la princesse Flibustofskoï; je la reconnus pour la palatine la plus généreuse et la plus adorable de l'univers (Reybaud, J. Paturot,1842, p. 189). − Être connu pour. Il est question plus loin de la nommée Lebeau, femme du nommé Cardinal, connue pour une prostituée (Nerval, Filles feu,Angélique, 1854, p. 515). − Faire passer qqc. pour; donner qqc. pour; donner qqc. pour fondement à. Nous n'entendons pas donner ceci pour une démonstration (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 166). − Avoir pour nourriture un morceau de pain sec; avoir, posséder une cabane pour toute fortune. Son père victime de sa scélératesse (...) n'a au fond d'un cachot qu'une pierre où reposer sa tête, pour nourriture qu'un pain noir détrempé de ses larmes (La Martelière, Robert,1793, i, 4, p. 6).Leur esprit et leur corps se développent à l'aise; ils ont pour école le grand air, pour maître l'exercice, pour nourrice la liberté (About, Roi mont.,1857, p. 18). − Avoir pour effet, pour conséquence de. Entre temps, l'intervention britannique en Syrie avait eu pour effet d'y déclencher une nouvelle vague d'agitation antifrançaise (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 197). − Avoir qqn pour ami. Oui, nous aurions pour gouverneurs des anges incarnés (Crèvecœur, Voyage,t. 2, 1801, p. 325).J'ai longtemps eu pour ami le grand ours noir des Iles de l'Amirauté, mais maintenant, je lui préfère les grizzlies des Rocheuses (Morand, New-York,1930, p. 244). C.− P. ext. [Marque seulement l'idée de repérage] 1. [Dans une échelle ou p. rapp. à des obj. de même nature] Mais, pour un Rudi, champion national de descente, vedette des saisons de ski, recherché par les riches étrangères, et pour quelques autres privilégiés, combien de déshérités, résignés à la misère d'un temps où le métier de guide semblait finir! (Peyré, Matterhorn,1939, p. 15). − En partic. [Pour marquer l'idée de proportion] Cinq pour mille habitants. Il y a encore vingt pour cent à gagner en deux ans, outre les intérêts à un excellent taux (Balzac, E. Grandet,1834, p. 93).Voilà trois semaines qu'il me rase pour que je lui prenne de l'argent dans l'affaire. Il m'offre tout ce que je veux à dix pour cent, plus une part dans les bénéfices! (Bourdet, Sexe faible,1931, i, p. 256).V. pour-cent rem. s.v. pourcentage. − Jour pour jour. D'amères désillusions me sont peut-être réservées. Mais si, dans un an, jour pour jour, vous n'avez pas gagné les vingt-cinq mille francs nets qui vous sont dus (...) je vous autorise à venir me faire une scène ici (Romains, Knock,1923, ii, 3, p. 11). 2. [Dans une distribution] − Chacun pour soi. Chacun pour soi dans ce désert d'égoïsme qu'on appelle la vie (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 322). − Une fois pour toutes. Depuis le mariage de Camille, elle avait accepté, une fois pour toutes, sa position de concubine (Drieu La Roch., Rêv. bourg.,1937, p. 132). 3. [Dans le temps] Partir pour Pâques. Pour la première fois le préfet, qui jusque-là avait été humble jusqu'à la servilité, voulut prendre un ton ferme (Stendhal, L. Leuwen,t. 3, 1836, p. 95).Dieu, quelle belle robe elle pourrait étrenner pour la Saint-Maurice! (Peyré, Matterhorn,1939p. 52). − [Le compl. situe dans le temps, mais sans préjuger de la suite] Une mouche te pique, et tu me plantes là, sans raison, sans t'excuser après, ni avant. (Après avoir lu). C'est tout pour aujourd'hui. (Il referme son carnet) (Achard, J. de la Lune,1929, ii, 8, p. 22): 4. Je dirai, le moment venu, les effets particuliers qu'une telle beauté produisit sur deux de nos solitaires. Laissons cela pour l'instant.
Duhamel, Désert Bièvres,1937, p. 183. − [Suivi d'inf.] Pour finir, la mère Gourvennec cracha par terre et jura qu'elle marierait Scolastique (Queffélec, Recteur,1944, p. 74). 4. [À propos d'une propriété, p. rapp. à des circonstances ou des obj. où elle est moindre] − Cette robe est bien chaude pour la saison; la porte est bien étroite pour une pareille maison; sa dépense est peu considérable pour son revenu (Ac.1935).Il faisait dehors une nuit de lait étonnamment lumineuse pour la fin de novembre (Nizan, Conspir.,1938, p. 37).C'est qu'elle est trop jolie pour le métier qu'elle fait, elle ne passe pas assez inaperçue (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 92). − Il est grand pour un Japonais (laisse entendre que les Japonais sont petits). En effet, Rocambole remarqua que, pour un cheval de remise, celui qui les traînait avait de bien belles allures (Ponson du Terr., Rocambole,t. 3, 1859, p. 457).Thomas éclata de rire et l'assura que, pour un mourant, il avait la tête bien solide, encore, sur les épaules (Queffélec, Recteur,1944p. 139). 5. En partic. [Dans un repérage circulaire, marquant l'idée d'un choix indifférent] Capitaine pour capitaine, ils aimaient mieux celui qui savait les conduire que ce bavard outrecuidant dont la nullité leur répugnait (About, Roi mont., 1857, p. 264). « (...) Dis, laisse-moi prendre ma chance. » « C'est pas le moment... » dit Brunet. « N'importe comment, dit le typo, si je vais là-bas j'y crèverai. Crever pour crever... » Brunet ne répond pas (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 284). − [Avec une idée d'intensité] − Eh ben! mince alors, nous sommes frais! − En v'là encore, des loufoques! − Ah! pour d'la belle ouvrage v'là de la belle ouvrage! (Courteline, Train 8 h 47,1888, 1repart., 6, p. 70). 6. [Sert au repérage du thème] Pour moi, pour ma part, pour le reste... (infra II C 3). II.− [Marque l'idée de destination] A.− [Dans l'espace, dans le temps ou au fig.] 1. [Dans l'espace] Partir pour les États-Unis; son départ pour les États-Unis. À son réveil il ne restait plus comme preuve et comme souvenir de tous ces événements que ce petit yacht, faisant à l'horizon voile pour Porto-Vecchio (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 558).Elle quitte le boulevard pour une rue déserte (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 328): 5. Une paysanne slovaque (...) avec toutes les fleurs de l'Europe centrale brodées sur sa peau de mouton, prenait son billet pour l'Ouest et l'attachait à son corsage...
Morand, New-York,1930, p. 31. − Pour où? Philippe, âgé de dix-huit ans, va nous quitter. Et pour où? Pour l'armée, pour la guerre (Barrès, Cahiers,t. 11, 1914, p. 96). 2. [Dans le temps] On parlait vaguement d'un grand bal pour le 15 mai (About, Roi mont.,1857, p. 20).Une de ces piles de bûches dont on fait provision pour l'hiver (Ramuz, Derborence,1934, p. 228). − Fam. Pour quand... Mes parents lui ont arrangé notre ancienne chambre, à Georges et à moi, en cabinet de consultation, pour quand il aura de la clientèle (Gide, Faux-monn.,1925, p. 955). − [Avec l'idée d'une durée dont on prévoit qu'elle s'étendra jusqu'à une certaine limite] J'suis inapte! Gaspard en eut de la joie pour trois jours (Benjamin, Gaspard,1915, p. 112).Repasse ce soir, je te raconterai... ou bien, veux-tu m'accompagner? J'en ai pour dix minutes avec lui (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 303): 6. − Avez-vous des enfants? Pouvez-vous les nourrir? − Je peux. − Bien. Votre mari ira en prison pour six mois.
Morand, New-York,1930p. 184. − [Dans le syntagme nom.] Une chambre pour la journée, tout comme rue de Bucarest! (Fargue, Piéton Paris,1939, p. 231). 3. Au fig. a) En vue de. Et quand, pour un dernier adieu, je me retournai vers eux, je vis mon petit ami qui pleurait (Gide, Journal,1903, p. 137).La précaution de conserver pour les archives des doubles de chaque pièce de correspondance n'était pas encore en pratique (Gracq, Syrtes,1951, p. 145).Le 9 mai, lendemain de la victoire, je me rendis à Notre-Dame pour le Te deum solennel (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 252). b) [Dans le syntagme nom.] A la mobilisation, il existait : 1 338 000 000 de cartouches pour fusils ou mitrailleuses (Joffre, Mém.,t. 2, 1931, p. 36). − [Introd. un subst. d'action] Cette princesse seconde leurs efforts pour l'agrandissement de la science qu'ils cultivent (Cuvier, Anat. comp.,t. 3, 1805, p. xiii). − [Introd. un subst. désignant un domaine d'activité] Chiffreville, son associé pour sa fabrique de produits chimiques, me l'a dit (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 26).Notre délégué pour le Tonkin Jean Sainteny, se posant à Hanoï le 22 août, y trouve l'autorité Viet-Minh établie dans la capitale d'accord avec les Japonais (De Gaulle, Mém. guerre,1959p. 228). − [Introd. un subst. désignant l'obj. d'une action] Vous savez, Monsieur Goulden, que je vous ai parlé d'un acheteur pour la petite montre en argent? (Erckm.-Chatr., Conscrit 1813,1864, pp. 13-14). c) [Dans le syntagme adj.] L'affaire fut arrêtée, mais ajournée à l'époque la plus opportune pour la publication (Delécluze, Journal,1827, p. 469).La place est donc libre pour la naissance et le développement d'un art décoratif véritable (Lévi-Strauss, Anthropol. struct.,1958, p. 290). B.− [Introd. un compl. indiquant la pers. ou la chose qui bénéficie (ou est victime) de qqc.] 1. [Le compl. désigne une pers. (ou un animal)] a) [Elle est bénéficiaire (ou victime) d'une action] En faveur de, au bénéfice de. − Plaider, se prononcer, voter pour qqn. Je veux demander aujourd'hui pardon à la femme de ma brutalité, et c'est pourquoi je voterai pour le mari (Goncourt, Journal,1881, p. 137). − Vivre pour qqn. J'aime Vivre pour mes amis, mes livres et moi-même! (Delille, Homme des champs,1800, p. 145). − N'y être pour personne. Être censé être absent. Gabrielle (...) : Oh! non, non! voyez ce qu'il veut; et, à moins que ce ne soit absolument urgent, je n'y suis pour personne (Feydeau, Dame Maxim's,1914, iii, 1, p. 56). − Faire qqc. pour qqn; préparer, confectionner, acheter qqc. pour qqn. Elle se perce le cœur, et les pâtissiers instituent une fête pour cette martyre boutiquière (Nerval, Filles feu,Chans. et lég. du Valois, 1854, p. 633).Pour les dindonneaux, on avait planté une vieille roue sur un pieu (Pourrat, Gaspard,1925, p. 6).Éliane préparait un lit à l'hôpital pour M. Godeau (Jouhandeau, M. Godeau,1926, p. 83): 7. J'ai diverti la moitié de la France pendant dix ans; il est bien juste que le gouvernement fasse quelque chose pour moi.
Leclercq, Prov. dram.,MmeSorbet, 1835, 2, p. 122. ♦ [Avec un verbe en empl. abs.] Cette préoccupation fut à l'origine du soin que je pris au début de l'été d'ouvrir un cahier où j'écrivais pour elle, chaque nuit (J. Bousquet, Trad. du sil.,1936, p. 154). − [Avec une interj.] Hourrah pour... Je me secoue et je crie : hourrah pour Mary-Ann! (About, Roi mont.,1857, p. 219). b) [Elle est bénéficiaire (ou victime) d'un soutien, d'une disposition, d'une attitude, d'une qualité] − Avoir, manifester, montrer, se sentir de la sympathie, de l'antipathie, de la pitié pour qqn; un faible, une inclination, une préférence pour qqn. Je sentais croître mon intérêt pour elle, à mesure que son inquiétude augmentait (Krüdener, Valérie,1803, p. 20): 8. Il nageait dans le bonheur. Il se sentait une telle indulgence pour Armand qu'il pensa même que ça aurait bien arrangé les choses de le faire se coller avec la mère Beurdeley...
Aragon, Beaux quart.,1936, p. 363. − Ma sympathie, mon antipathie, ma pitié pour lui. J'espère en venir à bout par amour pour elle (Janin, Âne mort,1829, p. 106).Point de pitié pour les Républicains (Stendhal, L. Leuwen,t. 3, 1836, p. 40).Fanny, n'aie aucune pitié pour moi. Si tu aimes toujours ce garçon, si tu crois que ton bonheur est là, tant pis pour moi (Pagnol, Fanny,1932, iii, 9, p. 202). − (Être) telle chose pour qqn. L'abbé Boutarel était pour Anne-Marie plutôt un confesseur qu'un directeur de conscience (Pourrat, Gaspard,1925, p. 91).[En parlant d'une chose] Hommes et bêtes allaient et venaient sur la jonchée. C'était l'occasion pour les enfants d'apprendre à rouler le guéret ou à piquer les bœufs (Pesquidoux, Chez nous,1921, p. 145).Le New-York de 1930 est, pour nos jeunes artistes, ce que Rome était pour Corot ou Poussin (Morand, New-York,1930, p. 264). − Être pour qqn. Être en sa faveur. Je croyais fermement que l'immense majorité de la nation française était pour nous (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 448). ♦ [Dans le syntagme adj.] On considère cette mission comme avantageuse pour moi à beaucoup d'égards (Gobineau, Corresp.[avec Tocqueville], 1859, p. 305).Au nom du salut public, je somme le citoyen juré d'être impitoyable pour les conspirateurs et les traîtres (A. France, Dieux ont soif,1912, p. 115).J'étais un enfant féroce pour qui prétendait m'aimer (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 29). ♦ [Dans le syntagme nominal] Jusqu'au soir elles discutèrent sur la perfidie des hommes, tout le mal que fait la guerre, et la nécessité pour les femmes de se défendre, coûte que coûte (Benjamin, Gaspard,1915, p. 150). c) [Elle est bénéficiaire (ou victime) d'une chose] C'est pour toi. Point de repos pour l'assassin! Vengeance! Vengeance! (Guilbert de Pixer., Coelina,1801, iii, 1, p. 42).Adieu, mon amie; mille choses aimables pour toi (Napoléon Ier, Lettres Joséph.,1807, p. 142).Madeleine, c'est pour la truie! (Giono, Gd troupeau,1931, p. 149). − [Dans le syntagme nom.] Il y a bien, en plus, quelque deux ou trois bijoutiers et poissonniers qui n'ont rien apporté de nouveau à ce quartier pour rentiers (Fargue, Piéton Paris,1939, p. 67). − Une cuillerée pour... [S'emploie comme stratagème pour inciter les enfants à manger] Mange, Hugo, mange. Une cuillerée pour le gardien qui est en chômage, une cuillerée pour la vieille qui ramasse les épluchures dans la poubelle, une cuillerée pour la famille du charpentier qui s'est cassé la jambe (Sartre, Mains sales,1948, 3etabl., 3, p. 98). 2. [Le compl. désigne une chose] Les autres se prononcent pour un armistice qui serait demandé à l'Allemagne (Vedel, Dr. constit.,1949, p. 257).Dans son premier mouvement, au moins, loin de plaider pour le mal, il plaide pour la justice qu'il met au-dessus de la divinité (Camus, Homme rév.,1951, p. 76). a) Avoir de l'attrait, de la répugnance pour qqc.; mon attrait, ma répugnance pour. Il montrait une préférence pour les courses entre chien et loup (Bosco, Mas Théot.,1945, p. 138). b) Faire qqc. pour qqc. C'est bon pour les hommes de croire aux idées et de mourir pour elles (Anouilh, Antig.,1946, p. 148). c) Être pour qqc. Être en sa faveur. Et moi aussi, bien sûr, je suis pour l'armée, pour la patrie, pour la religion et contre les Juifs (Mirbeau, Journal femme ch.,1900, p. 121). − Empl. adv., néol. Être pour, voter pour. Eh bien, supprimer ces chaînes médiocres (...), je suis pour à 100 % (Télérama,13 août 1986, p. 4). − Empl. subst. Le pour et le contre. V. contre1. d) [Dans le syntagme nom.] Destiné à. La Rochelle ne possède que trois bâtiments d'un tonnage un peu fort, un pour la morue, un pour la baleine, un pour le cabotage (Michelet, Journal,1835, p. 170).Tu vas avoir quatre cents francs par an pour ta toilette... tu t'arrangeras comme tu voudras (Gyp, Souv. pte fille,1928, p. 348). C.− P. ext. En ce qui concerne (la pers. ou la chose désignée par le compl.) 1. [Le compl. désigne une pers.] a) [En tant que suj. doué de conscience] Monsieur, me dit alors le vieillard, Dina, ma fille, est bien sensible à votre politesse, je vous remercie franchement, mais cela pour nous est impossible (Borel, Champavert,1833, p. 122). − Tant pis pour vous (v. pis1); tant mieux* pour lui. b) En partic. [En tant qu'instance d'évaluation] − [En tête de phrase] Pour moi, c'est un saint! crie Flaubert (Goncourt, Journal,1860, p. 784). − [En incise] L'étoile nébuleuse à forte condensation centrale n'est donc pas, pour Laplace, l'état tout à fait primordial, puisqu'il lui suppose un état antérieur (H. Poincaré, Hyp. cosmogon.,1911, p. 9). − [En fin de phrase] Ça te paraît absurde. Ces choses là n'existent pas pour toi (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 254). − [Dans le syntagme nom.] J'ai remarqué que l'eau prenait un charme effrayant pour tous les esprits un peu artistes illuminés par le hachish (Baudel., Paradis artif.,1860, p. 339).C'est presque une victoire pour moi puisque vos froideurs ne seront plus imputables à de l'indifférence (J. Bousquet, Trad. du sil.,1936, p. 250). − [Dans le syntagme adj.] Lac très formidable pour des voyageurs novices, et que les autres font bien de ne pas trop regarder (Dusaulx, Voy. Barège,t. 1, 1796, p. 224). 2. [Le compl. désigne une chose] À propos de; au sujet de. Je me suis arrangé avec lui pour deux cheminées de marbre qu'il doit m'envoyer à Bordeaux (Maine de Biran, Journal,1816, p. 205).Nous sommes d'accord pour les prix (Pagnol, Fanny,1932, iii, 1, p. 172).Louise était très gourmande et faisait de la concurrence à Henriette pour la cuisine (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 233). − Au titre de. Vous oubliez que le clergé figure pour vingt-cinq millions au budget de l'État (Courier, Pamphlets pol.,Procès, 1821, p. 116). − Pour tout. À tous égards. Le régent anglais fit prêter à tous les habitants de Paris (...) le serment de lui obéir en tout et pour tout, et de nuire de tout leur pouvoir aux complices ou alliés de Charles de Valois (Barante, Hist. ducs Bourg.,t. 4, 1821-24, p. 387). − [Après une interj.] Et zut pour la monnaie! Moi, quand j'ai un béguin, je m'en fais crever (Zola, Nana,1880, p. 1297). 3. [Introd. un compl. de phrase qui sert au repérage du thème] Pour le magnésium, nous n'avons pas vérifié la nature chimique des éléments formés en raison des difficultés expérimentales (Joliot, Curie, Radioact. artif.,1935, p. 15).Pour les locations de villas, on a observé justement que les habitudes actuelles devraient être assouplies pour répondre aux derniers aménagements des vacances scolaires (Jocard, Tour. et action État,1966, p. 273): 9. − Pauvre Nanon! Veux-tu du cassis? − Ah! pour du cassis, je ne dis pas non; madame le fait ben mieux que les apothicaires.
Balzac, E. Grandet,1834, p. 167. − Pour ma part. En ce qui me concerne. J'ai, pour ma part, l'impression que la plupart des théoriciens actuels (...) ont trop facilement renoncé à se faire une image intelligible des phénomènes de la physique quantique (L. de Broglie, Bases interprét. mécan. ondul.,1963, p. 1). − Pour le reste*. III.− [Entre dans une relation de causalité] A.− [Marque la causalité finale, le but] 1. [Suivi de subst. ou de pron.] [Il] se vit contraint de tirer son épée pour sa défense personnelle (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 275).La lutte pour la vie, puis pour le mieux-être dans un monde où les biens nécessaires ou convoités sont rares (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr.,1967, p. 12). − Pour cela. À cette fin. La philosophie (...) crut pouvoir avancer une justification directe du mal physique. Elle emprunta pour cela la notion de limitation (Renouvier, Essais crit. gén., 3eessai, 1864, p. 172): 10. ... le pauvre chemisier résolut de faire un peu de réclame. Pour cela, il s'adressa à une agence de publicité qui lui fit d'abord verser un acompte de mille francs.
Larbaud, Barnabooth,1913, p. 13. − Empl. adv., néol. C'est fait pour, étudié pour. Pour cela, à cette fin, à cette destination. C'est la ville qui te lasse, dit Isaïe. Tu n'es pas fait pour (Troyat, La Neige en deuil,1952, p. 86 ds Grev. 1986, § 992 a 4). 2. [Suivi d'un syntagme inf.] a) [Compl. circ.] Synon. de afin de (ce dernier appartenant à la lang. écrite).
α) [Répond à la question pourquoi?] Manger pour vivre et non vivre pour manger. Elle (...) prit un manteau et m'accompagna avec Nanine, pour ne pas revenir seule (Dumas fils, Dame cam.,1848, p. 226).Avant de quitter Gênes, il se fit raser, pour arriver décent à Rome (Gide, Caves,1914, p. 780).Nous luttons pour rejeter l'agresseur et pour le mettre, nous l'espérons bien, dans l'impossibilité de recommencer (Barrès, Cahiers,t. 11, 1918, p. 320). − [Avec une nuance optative] Je voudrais qu'il vînt une belle fille pour m'aimer vraiment et comprendre à fond ce que je mets de désespoir dans cette dernière phrase (J. Bousquet, Trad. du sil.,1936, p. 80). − [Le suj. de l'inf. est l'obj. de la princ.] La malheureuse! Je l'avais élevée pour devenir la femme d'un roi (About, Roi mont.,1857, p. 267).Je ne sais pas ce que vous êtes, mais je vous paie pour vous occuper de mes enfants et non pour les dresser contre leur mère (H. Bazin, Vipère,1948, p. 54). − Ce n'est pas pour dire, (mais)... Ce n'est pas pour le plaisir de parler que je dis que, c'est sincèrement que je dis que... Ah! ce n'est pas pour dire, mais avec ces prêtres qui (...) permettent, les jours de fête, à des voix retroussées d'actrices de danser le chahut aux sons pesants de l'orgue, elle est devenue quelque chose de pas bien propre (Huysmans, En route,t. 2, 1895, p. 228).Ah! c'est pas pour dire! T'étais plus amoureux hier soir! (Feydeau, Dame Maxim's,1914, i, 6, p. 10).
β) [Le compl. final appartient au thème (il est antéposé ou antéposable)] De Skénectady, où nous nous trouvions alors, nous partîmes sur un bateau léger pour remonter la Mohawk (Crèvecœur, Voyage,t. 2, 1801, p. 73).La religion est un feu que l'exemple entretient, et qui s'éteint, s'il n'est communiqué. Pour être pieux, il faut qu'on se fasse petit (Joubert, Pensées,t. 1, 1824, p. 126).La foule y est nombreuse pour accueillir Charles de Gaulle (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 219). − Pour ce faire. À cette fin. La police, agissant à titre judiciaire, a notamment qualité, sous contrôle du Parquet, pour décider le maintien des suspects sans titre de détention à la disposition de la justice. Pour ce faire, elle dispose du système de « la garde à vue » dont la durée peut atteindre 48 heures (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr.,1967, p. 48).
γ) [Dans un comment. métalinguistique] Elle que j'avais vue si économe, pour ne pas dire avare, me donnait plus d'argent que je n'en demandais, me poussait à la dépense (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 34).Ainsi tenions-nous dans la presse un rôle de quémandeurs, pour ne pas dire de mendigots (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 22). − [Introd. un compl. de phrase] Pour être bref : j'apportai un jour à ma maîtresse un joli petit huilier de porcelaine, le sien (le nôtre) s'étant cassé à notre dernier repas (Larbaud, Barnabooth,1913, p. 175).Ils projetaient d'avoir des chambres particulières et ne pensaient même pas à employer la chambre vide. Pour être exact, Élisabeth y avait pensé une heure. Mais le souvenir de la morte, sublimé par la chambre mixte, l'effrayait encore sur les lieux (Cocteau, Enfants,1929, p. 64). b) [Compl. d'obj. indir.] Profiter de... pour. Kimberly profita de ces interruptions flatteuses pour avaler une gorgée de champagne (Mirbeau, Journal femme ch.,1900, p. 204). c) [Compl. déterminatif] Son zèle pour faire élire M. Gonin (Stendhal, L. Leuwen,t. 3, 1836, p. 114).Il se met en quête d'un endroit pour manger (Goncourt, Journal,1880, p. 65).Les fontaines se trouvent presque toujours au milieu d'un vaste terrain pelé, sans un arbre pour donner de l'ombre à ceux qui viennent puiser l'eau (T'Serstevens, Itinér. esp.,1933, p. 24): 11. Les uns reprochaient au commandement français de n'avoir pas encore trouvé une solution décisive pour chasser l'ennemi de notre sol.
Joffre, Mém.,t. 2, 1931, p. 144. d) [Compl. de l'adj.] Ainsi l'on verra bientôt un simple officier, employé comme négociateur, avoir la finesse de l'homme le plus consommé dans la politique (...) tant ces climats sont heureux pour développer l'esprit humain! (Baudry des Loz., Voy. Louisiane,1802, p. 75).Lucien appela un commis extrêmement adroit pour gratter et fit mettre partout Tarte au lieu de Tourte (Stendhal, L. Leuwen,t. 3, 1836p. 257). 3. Pour que. Synon. de afin que (ce dernier appartenant à la lang. écrite) a) [En réponse à la question pourquoi?] Coupez-le bien proprement, pour que ça ne se voie pas (Renard, Journal,1903, p. 834).− Tu veux vraiment aller là-bas? − Bien sûr. − Et pour quoi faire? − C'est pour que le petit ait un père (Ramuz, Derborence,1934, p. 227): 12. ... elle a prononcé vivement une parole que je ne peux analyser sans me faire du mal : « Je vous dis cela pour que vous ne soyez pas étonné quand vous apprendrez que je suis allée à Toulouse... »
J. Bousquet, Trad. du sil.,1936, p. 103. − [Dans le champ de la nég.] À quoi employez-vous donc vos journées?... je ne vous paie pas pour que vous flâniez du matin au soir (Mirbeau, Journal femme ch.,1900p. 75). − [Dans une phrase exclam.] P. iron. : 13. ... Duplat tué, Blackman tué, les gardes anglaises mutilées, vingt bataillons français, sur les quarante du corps de Reille, décimés, trois mille hommes, dans cette seule masure de Hougomont, sabrés, écharpés, égorgés, fusillés, brûlés; et tout cela pour qu'aujourd'hui un paysan dise à un voyageur : Monsieur, donnez-moi trois francs; si vous aimez, je vous expliquerai la chose de Waterloo! Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 374. b) [Le compl. final appartient au thème] Mais, pour que la densité de la voie lactée devînt homogène, il faudrait répartir la masse du soleil (H. Poincaré, Hyp. cosmogon.,1911, p. 259).Je peux bien te l'avouer : pour que notre bonheur ait été possible, il a fallu que ce mariage manqué leur ait porté à la tête (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 67). Rem. Dans cet empl., le verbe de la princ. est souvent devoir ou falloir. La princ. exprime alors la condition nécessaire à la réalisation de ce qui est dit dans la sub. − [Dans une question] Qu'est-ce que les Grandet font donc à leur grande Nanon pour qu'elle leur soit si attachée? Elle passerait dans le feu pour eux! (Balzac, E. Grandet,1834, p. 33). Rem. Pop. pour ne pas que (p. anal. avec pour ne pas + inf.) : pour ne pas qu'il vienne? « pour qu'il ne vienne pas ». B.− [Marque l'idée de cause] 1. À cause de (mais proche de « à propos de »; supra II C 2) Le roi d'Angleterre avait pourtant été ému d'admiration aussi bien que de colère pour cette prodigieuse défense de la ville de Meaux (Barante, Hist. ducs Bourg.,t. 4, 1821-24, p. 357).Est-ce là votre bonne foi, dit-elle? Cette sincérité pour laquelle on vous vante? (Duras, Ourika,1824, p. 154). 2. [Dans des tournures plus ou moins figées ou bien signifiant l'idée de cause par le subst. introd. par pour] Pour un oui ou pour un non, pour cette raison, pour cause de... La grande question est de savoir si, pour raison de santé, Vincent va devoir renoncer à l'internat (Gide, Faux-monn.,1925, p. 1004).Peu après, Augustin Laurent quittait, pour raisons de santé, le ministère des postes que je confiais à Eugène Thomas revenu de déportation (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 262). − Pour cela. À cause de cela. « Je ne conçois pas, » dit la duchesse de Noirmoutier, « qu'on puisse aimer une femme qui semble un homme. » − « Mais, c'est pour cela qu'on l'aime, » observa la princesse (Péladan, Vice supr.,1884, p. 103). − Et cela pour... Trois mois d'études et deux années d'apprentissage; et cela pour l'amour de l'art (Gide, Caves,1914, p. 825).Yse : (...) N'achève pas de partir! Ne sois pas absent dans le milieu de ma vie! De Ciz : Et tout cela pour une absence de quelques jours! (Claudel, Part. midi,1949, ii, p. 1108). 3. [Dans des phrases nég., interr., hyp.] Qu'avez-vous contre lui pour le traiter ainsi? On brisera vos volets et vos vitres, vous n'en dormirez pas mieux pour cela (Karr, Sous tilleuls,1832, p. 176). − Pour que. « Qui est cette personne? Elle est bien belle », demanda-t-il en voyant la Viennoise. « Mais qu'a-t-elle donc pour que lui aussi la trouve belle? » (Radiguet, Bal,1923, p. 158). − Pour si peu. Si il plaisait à notre Chinois, on en ferait des autres voilà tout, des Câkya-mouni, tout en or! On s'arrêterait pas pour si peu. On arrangeait l'avenir en rose (Céline, Mort à crédit,1936, p. 208). − Pour autant. [En tour nég.] Ce n'est pas une raison pour que... [En tour interr.] Est-ce une raison pour que... Mais celle-ci [l'Assemblée] (...) n'était pas parvenue pour autant à assurer un régime d'assemblée (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr.,1967, p. 31): 14. ... la parole, au point de vue strictement auditif, n'est, de son côté, qu'une suite de sonorités diversement combinées. Et, sans nul doute, la poésie en tire une large part de ses prestiges! Doit-on, pour autant, nier le rôle qu'y jouent le sens et l'évocation?
Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 234. 4. [Suivi d'un inf. passé] Dans le huitième siècle, un pape ignorant avait persécuté un diacre pour avoir soutenu la rondeur de la terre, contre l'opinion du rhéteur Augustin (Condorcet, Esq. tabl. hist.,1794, p. 142).Le président Brisson, honnête homme et savant, pour avoir conseillé au roi de se défier des courtisans, fut pendu (Courier, Pamphlets pol.,Réponses aux anon., 1, 1822, p. 147). 5. [Introd. la justification du dire] Mon dieu, me disais-je, comme il faut que ces actrices soient habiles pour prendre ainsi tout de suite l'air des autres! (Vigny, Serv. et grand. milit.,1835, p. 110). − Pour un peu. Il suffirait/aurait suffi d'une cause minime et ce qui est dit serait/aurait été. Une maîtresse qui, pour un peu, ne saurait pas lire et ignore absolument jusqu'aux titres des livres que je fais (Goncourt, Journal,1860, p. 819). C.− [Marque l'idée de concession] 1. Pour + inf. [Ce qui est décrit dans le syntagme en pour ne suffit pas, quoi qu'on ait pu penser, pour rendre moindre ce que décrit le verbe princ.] − [La prop. princ. est nég. ou interr.; elle comporte également un autre élément d'interprétation concessive (en partic. ne pas moins)] Et ceux qui croient qu'un amour d'écolier, pour être sans espoir et sans but, n'est pas vif et dévoué, ceux-là se trompent (Toepffer, Nouv. genev.,1839, p. 105).Le bien qui est fait en est-il moins un bien, pour être fait d'une manière contraire à leur pensée? (Senancour, Obermann,t. 2, 1840, p. 31).La victoire, pour être complète, n'en est donc pas moins maintenant d'une application difficile (Gobineau, Corresp.[avec Tocqueville], 1850, p. 134): 15. ... cette nouvelle « béatitude de l'âme » (...) pour être moins dispendieuse, moins ruineuse pour l'organisme, elle ne le détourne pas moins de l'effort et de la réalisation.
Gide, Faux-monn.,1925, p. 1101. − Plus rarement. [La prop. princ. est positive, mais le syntagme introd. par pour comporte l'adv. moins] Elle avait une idée du monde de Camille qui, pour être moins haute que celle qu'elle avait eue du monde sénatorial, le mettait encore bien au-dessus d'elle (Drieu La Roch., Rêv. bourg.,1937, p. 77).Le cheptel est réduit de moitié. Pour être moins apparents, les dommages causés par les spoliations de biens sont beaucoup plus lourds encore (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 234). ♦ [La prop. princ. est positive, mais elle comporte par ailleurs un élément concessif] Cette ferveur nationale, pour être apaisée, subsiste cependant (E. Charlesds Sandf. t. 3 1965, p. 416). 2. Pour + adj. + que (+ subj.).Il (...) lui jura que, pour grand que fût son amour, son amitié l'emportait de beaucoup encore (Gide, Caves,1914, p. 763).Ce succès, pour modeste et incomplet qu'il fût, m'apparaissait comme une première étape vers la victoire (Joffre, Mém.,t. 2, 1931, p. 61).Je me sentais perdu et, pour absurde que cela paraisse, j'eus un bref mouvement de désespoir (Bosco, Mas Théot.,1945, p. 108). − Pour si + adj. + que (+ subj.).Elle tranche sur mes impressions coutumières au contraire parce que, pour si rare qu'elle soit, elle me paraît plus naturelle (J. Bousquet, Trad. du sil.,1936, p. 117).Pour si court qu'il fût et apparemment dénué de toute signification, je date du passage de Monella à la maison tous les changements apportés à nos habitudes après sa disparition (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 126). 3. Pour peu que (+ subj.). Quelque peu que. Pour peu qu'il réfléchisse, il comprendra que... Même s'il réfléchit peu, avec un minimum de réflexion. L'honnête homme, détrompé de toutes les illusions, est l'homme par excellence. Pour peu qu'il ait d'esprit, sa société est très aimable (Chamfort, Max. et pens.,1794, p. 58).Votre ami, pour peu qu'il y veuille réfléchir, lui-même en conviendra (Courier, Pamphlets pol.,Au réd. « Censeur », 1819, p. 14): 16. La petite fille de Brénugat était d'une sagesse exemplaire. Pour peu qu'elle commençât de pleurer, de rire, ou de chanter, Sénac disait : − Les enfants, c'est très joli.
Duhamel, Désert Bièvres,1937, p. 220. D.− [Marque la conséquence] Pour son malheur; ce n'est pas pour lui déplaire. − En partic. 1. [En corrél. avec une idée d'intensité] Trop, assez, pas assez, suffisamment pour... − Pour + inf.Il est trop bête pour être vraiment méchant (= il n'est pas vraiment méchant, étant trop bête). Il a été assez bête pour le répéter (il l'a répété, sa bêtise ayant suffi à le lui faire répéter). Le faiseur de sépultures (...) était trop ivre pour être honteux (Baudel., Paradis artif.,1860, p. 331).D'abord, les discordances externes ne sont jamais assez nombreuses pour éliminer complètement les coïncidences (Lévi-Strauss, Anthropol. struct.,1958, p. 131). − Pour que. Il y a assez de désert pour que, du centre, on ne voie point d'autre horizon (Nerval, Filles feu,Angélique, 1854, p. 572).Il pleut cependant trop fort pour que je puisse me promener dans les bois (Huysmans, En route,t. 2, 1895, p. 242). 2. [En corrél. avec l'idée de condition suffisante] Suffire pour. Le chant d'un oiseau suffit pour animer la contrée, et le plus léger souffle des airs a changé pour nous la nature (Senancour, Rêveries,1799, p. 47).Avez-vous jamais entendu (...) un militaire se plaindre (...) qu'il suffit d'être un scélérat pour être invulnérable? (J. de Maistre, Soirées St-Pétersb.,t. 1, 1821, p. 17). Prononc. et Orth. : [pu:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Cause A. 1. 842 « en considération, au nom de » (Serments de Strasbourg ds Henry Chrestomathie, p. 2, 3 : Pro Deo amur); ca 1050 (St Alexis, éd. Chr. Storey, 223 : Por amor Deu; 461); 2. « à cause de, en raison de, par le fait de » a) 2emoit. xes. d'un fait, d'une chose (St Léger, éd. J. Linskill, 65, 144, 209 : Por ciels signes que vidrent tels, Deu presdrent mult a conlauder); ca 1100 (Roland, éd. J. Bédier, 686, 957, 1377 : Por itels colps nos eimet li emperere; 2507 : Pur ceste honur e pur ceste bontet, Li nums Joiuse l'espee fut dunet); id. suivi de l'inf. prés. (ibid., 1092 : Pur ben ferir l'emperere plus nos aimet), plus souvent suivi, à l'époque mod., de l'inf. passé : 1664 (Molière, Tartuffe, préf. : comme on ne s'avise point de défendre la médecine pour avoir été bannie de Rome [...] on ne doit point aussi vouloir interdire la comédie pour avoir été censurée en de certains temps); b) ca 1050 d'une personne (St Alexis, 397 : Tantes dolurs ad pur tei andurede[s]). B. Loc. 1. a) 881 por o avec valeur de rel. de liaison « c'est pourquoi » (Ste Eulalie ds Henry Chrestomathie, p. 3, 11, 18, 20 : Enz enl fou la getterent com arde tost : Elle colpes non auret, por o no's coist); 937-952 poro (Jonas, éd. G. de Poerck, 24, 201), cf. T.-L., s.v. poruec; b) ca 1100 por ço « id. » (Roland, 1479); c) id. pur que « id. » (ibid., 3759); 2. a) 937-952 por qe, porqet « parce que » (Jonas, 148 : dunc fut Jonas mult letus co dicit. por qe Deus cel edre li donat a sun souev et a sun repausement; 166); ca 1050 pur que (St Alexis, 439); b) 2emoit. xes. por cio que « id. » (St Léger, 53 : Cio controverent baron franc, Por cio que fud de bona fiet, De Chielperig fesissent rei); ca 1100 por ço que (Roland, 2102 : Rumput est li temples, por ço que il cornat [Rollant]), empl. encore en us. au xviies., cf. [1634] Voiture, Lettre à Mellede Rambouillet, LIII ds
Œuvres, éd. Paris, J. Clousier, t. 1, 1734, p. 130 : Je ne sçai pour quel intérêt ils tâchent d'ôter à Car, ce qui lui appartient pour le donner à Pour ce que; ni pourquoi ils veulent dire avec trois mots, ce qu'ils peuvent dire avec trois lettres; Trév. 1704-71 note que cet empl. ,,vieillit, et ne se dit plus que dans le Comique``. II. But. Direction. Intention A. 1. « dans l'intérêt de, pour le bien de, en faveur de » 842 (Serments de Strasbourg, p. 2, 3 : et pro christian poblo et nostro commun salvament); 881 (Ste Eulalie, p. 3, 26 : Tuit oram que por nos degnet preier Qued auuisset de nos Christus mercit); 2emoit. xes. (St Léger, 240 : Il nos aiud [Lethgiers] ob ciel Senior Por cui sustinc tels passïons!); empl. subst. av. 1654 le pour et le contre (Guez de Balzac, liv. I, lett. 3 ds Littré [le texte n'a pu être retrouvé dans l'éd. de 1665 indiquée dans les sources de Littré, ni dans celles de 1633 ou de 1642]); 1656 id. (Pascal, Provinciales, VI, Paris, 1966, p. 93); 2. « (d'une chose) fait à l'intention de, destiné à » ca 1050 (St Alexis, 587 : D'or e de gemmes fut li sarqueus parez Pur cel saint cors qu'il i deivent poser); ca 1100 (Roland, 154 : Enz en voz bainz, que Deus pur vos i fist, La vuldrat il chrestiens devenir); 3. « à l'égard de, à l'endroit de (quelqu'un) » ca 1100 (ibid., 842 : .C. milie Francs pur lui [Carle] unt grant tendrur); 4. 1385 « favorable à, du parti de (quelqu'un) » estre pour le Roy (Pièces inédites relatives au règne de Charles VI, éd. L. Douët d'Arcq. t. 1, p. 68). B. 1. But dans l'espace a) ca 1050 guarder an luing por [aucun] « regarder au loin pour voir l'arrivée d'une personne attendue » (St Alexis, 473 : Sire Alexis, tanz jurz t'ai desirrét [...] Et tantes feiz pur tei an luinz guardét); après certains verbes de mouvement, por suivi d'un n. de pers., évoque l'idée que la pers. en cause est recherchée, mandée (Moignet, p. 319); ca 1100 aler pur (Roland, 2859 : Kar mei meïsme estoet avant aler Pur mun nevold que vuldreie truver); ca 1165 corre por (Benoît de Ste-Maure, Troie, 15462 ds T.-L.); ca 1170 enveier pur (Rois, I, XI, 7, éd. E. R. Curtius, p. 81); b) 1791 « dans la direction de » partir pour (Ch. P. Duclos,
Œuvres, éd. Paris, Colnet et Fain. 1806, t. 7, p. 105); 2. durée, terme dans le temps a) 1419, mai « pendant la durée de » pour l'absence des aultres exécuteurs [testamentaires] (Inventaire des biens meubles de N. de Baye ds N. de Baye, Journal, éd. A. Tuetey, t. 2, 1888, p. XLIX); déb. xves. pour suivi d'une indication chronol. chiffrée pour ung an... (Quinze joies de mariage, éd. J. Rychner, VII, 15, p. 57); b) terme dans le temps 1606 introd. l'indication de l'époque pour laquelle une action a été prévue pour aujourd'huy (Nicot). C. Finalité 1. a) ca 1050 por suivi de l'inf.; le régime de cet inf. est régulièrement placé entre la prép. et l'inf. (St Alexis, 254 : De la viande ki del herberc li vint, [...] N'en fait musgode pur sun cors engraisser); ca 1100 (Roland, 26), cf. 1647, Vaug., p. 63 : Cette preposition ne doit rien avoir entre elle et l'infinitif qui les sépare, si ce n'est quelque particule d'une ou deux syllabes [...]; [...] d'y mettre plusieurs syllabes [...], il n'y a rien de si rude; b) ca 1100 por suivi d'un subst. abstr. ou d'un pron. (Roland, 3397, 3620 : ,,Munjoie!`` escriet [Carles] pur la reconuisance); 2. loc. a) ca 1100 por ço que suivi du subj. « afin que » (Roland, 1004 : Sunent mil grailles por ço que plus bel seit); b) 1244, juin pour que suivi du subj. (Trésor des chartes du comté de Rethel, éd. G. Saige et H. Lacaille, t. 1, p. 154). D. Intention 1. 1456 estre pour suivi de l'inf. « être sur le point de » (Antoine de La Sale, Jehan de Saintré, éd. J. Misrahi et Ch. A. Knudson, p. 105, 12); 2. 1549 estre pour id. « être disposé à, avoir l'intention de » (Du Bellay, Olive, 2epréf. ds Hug.). III. Échange. Équivalence. Comparaison. Relation A. Échange, compensation 1. introd. un subst. exprimant une valeur « au prix de, moyennant » a) sans indication de valeur précise 881 en prop. nég. (Ste Eulalie, p. 3, 7 : Elle no'nt eskoltet les mals conselliers Qu'elle Deo raneiet chi maent sus en ciel, Ne por or ned argent ne paramenz); ca 1050 (St Alexis, 163 : Pur amistét ne d'ami ne d'amie, Ne pur honurs ki l'en fussent tramise[s], N'en volt turner, tant cum il ad a vivre); ca 1100 (Roland, 888 : Pur tut l'or Deu ne volt estre cuard); id. en prop. affirm. (ibid., 3756 : Les .XII. pers ad traït por aveir); b) introd. un subst. exprimant une valeur précise 1174-76 (Guernes de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 2092 : un cheval unt pur uit deniers lué); 2. ca 1100 introd. un subst. désignant un dommage, un préjudice demandant dédommagement, compensation (Roland, 2809 : Li reis Marsilie enqui sera venget : Pur sun poign destre l'en liverai le chef); 3. 1176-81 introd. un subst. désignant un service pouvant entraîner une rémunération (Chrétien de Troyes, Chevalier à la Charrette, éd. M. Roques, 109 : sachiez bien Que je n'ai en cest monde rien Que je por votre demorance Ne vos doigne sanz porloignance). B. Remplacement, substitution 1. d'une personne a) ca 1100 agissant à la place d'une autre « en prenant la place de » (Roland, 295, 296 : ,,Si li reis voelt, prez sui por vus le face!`` Guenes respunt : ,,Pur mei n'iras tu mie!``); b) ca 1200 notion de préférence (Guiot de Provins, Bible, 1071 ds
Œuvres, éd. J. Orr, p. 43 : Je donroie bien, per Saint Peire, Doze freires por un ami!); 2. d'une chose a) déb. xiies. notion de choix, de préférence (Benedeit, St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 28 : Pur oc guerpit cist reials eirs Les fals honurs pur iceals veirs); b) fin xiies. notion de tromperie loge por cortine (Béroul, Tristan, éd. E. Muret4, 2180); ca 1200 vecies por lanterne (Guiot de Provins, op. cit., 2628, p. 91). C. Équivalence, comparaison 1. a) ca 1050 introd. un attribut qu'il met en rapport avec l'obj. de verbes signifiant « tenir, estimer, considérer » (St Alexis, 266 : Tuz l'escarnissent [Alexis], sil tenent pur bricun); ca 1100 tenir [aucun] pur seignur; por fol (Roland, 364, 2294); b) ca 1150 pur veir « en vérité » (Wace, St Nicolas, éd. E. Ronsjö, 561); c) ca 1165 por morz [attribut du suj.]; por morte [attribut du compl.] (Benoît de Ste-Maure, op. cit., 20076, 26191); 2. empl. avec un terme redoublé, exprime a) 1188 une réciprocité (Aimon de Varennes, Florimont, éd. A. Hilka, 3068 : A armes en chanp par mesure Li wel requerre ma droiture, Se li dites que je li mant Gent contre gent, a tant por quant; 3072 : Del tot soit a s'aliction Gent por gent ou mon cors a son); b) 1280-83 une équivalence [dr. anc. équivalence entre le délit et la peine] mort pour mort, membre pour membre (Livre Roisin, éd. R. Monier, § 154); c) 1552 une correspondance exacte mot pour mot (Est.); 1689, 3 juill. jour pour jour (Sévigné, Lettres, éd. É. Gérard-Gailly, t. 3, p. 474); d) av. 1592 possibilité d'un choix entre deux choses équivalentes ou présentées comme telles (M. de Castelnau, Mém., V, XI ds Mém. relatifs à l'Hist. de France, t. 33, Paris, 1823, p. 346 : et que, grandeur pour grandeur, si le prince d'Espagne...); 1694 (La Fontaine, Fables, XII, 1 : scélérat pour scélérat, Il vaut mieux être un loup qu'un homme). D. Relation. Placé en tête de la phrase, met en évidence a) 1160-74 le suj. (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, 427 : E pur l'estrif, que il remaine); 1640 pour moi (Corneille, Horace, II, 3 : Pour moi, je l'ose dire); b) 1676, 1erjuin, l'attribut (Sévigné, op. cit., t. 2, p. 110 : J'ai à vous dire que vous faites tort à ces eaux de les croire noires : pour noires, non; pour chaudes, oui); c) 1666 le compl. (Molière, Misanthrope, III, 1 : Pour de l'esprit, j'en ai). E. Rapport, proportion ca 1208 expression de la proportion entre deux nombres (Geoffroi de Villehardouin, Constantinople, éd. E. Faral, § 164 : e fu mult grant merveille que por un qu'il estoient en l'ost estoient il .CC. en la ville). IV. Conséquence. Por introd. un inf. A. 1. en parlant d'une pers.; la princ. est nég. a) ca 1100 tel [...] por « capable de » (Roland, 2256, 2889 : Unques nuls hom tel chevaler ne vit Por granz batailles juster e defenir); b) ca 1140 si [...] pur « id. » (Voyage de Charlemagne, éd. G. Favati, 29); 2. ca 1100 « assez pour; de manière à; au point de » (Roland, 26 : Prozdom i out pur sun seignur aider; 514 : Jo vos ai fait alques de legerie, Quant por ferir vus demustrai grant ire; 3617 : Trenchet la teste pur la cervele espandre); fin xves. estre gens pour « capable de » (Commynes, Mém., V, XIII, éd. J. Calmette, t. 2, p. 170); 3. ca 1225 « (en parlant d'une chose) capable de, de nature à » (Péan Gatineau, St Martin, 2177 ds T.-L.). B. Ca 1210 exprime la conséquence prévisible d'un procès « ayant toutes chances de » (Robert de Clari, Constantinople, éd. Ph. Lauer, XXXIII, 15, p. 32 : Miex nous vient il [...] que nous conquestons viande et avoir par raisnaule acoison, que nous i aillons pour morir de fain). V. Concession, opposition A. 1. dans une phrase nég., ca 1100 pur [aucune rien] « malgré, en dépit de » (Roland, 810; 2990 : Joiuse, Ki pur soleill sa clartet nen escunset; 3417 : Cumunement l'en prametent lor feiz Ne li faldrunt pur mort ne pur destreit); 2. id. la princ. étant nég., pur introd. un inf. « même s'il s'agit de, au risque de » (ibid., 1048 : Ja pur murir ne vus en faldrat uns; 1909); 3. a) id. loc. pur poi [...] ne introd. une concess. au mode ind.; exprime un procès qui a failli se réaliser « il s'en faut de peu que... » (ibid., 304 : Dunc ad tel doel pur poi d'ire ne fent); b) id. por poi que [...] ne (ibid., 3608 : Carles cancelet, por poi qu'il n'est caüt); 4. a) ca 1165 la princ. étant nég., por suivi d'un subst. et de que introd. une rel. au mode subj. « quelque... que » (Benoît de Ste-Maure, op. cit., 489); 1176 (Chretien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 1490 : Mes por esmai que il en aient N'ont nul talant que il se randent); b) 1394 por + subst. précédé d'un adj. + que « id. » (Hardouin de Fontaine-Guérin, Trésor de Vénerie, 1766 ds T.-L. : Pour estrange estat qu'il prëist); 5. 1593 la princ. étant nég., pour introd. un inf. « bien que, quoique » (Satyre Ménippée, Harangue de M. d'Aubray pour le Tiers-Etat, éd. Ch. Read, p. 276 : Les Roys pour estre Roys ne laissent pas d'estre hommes). B. 1. 1444 pour suivi d'un adj. + que introd. une concess. au mode subj. « quelque... que; si... que » (Antoine de La Sale, La Salade, éd. F. Desonay, prol., p. 10, 122 et 11, 141); 2. 1599 pour si suivi d'un adj. + que « id. » (Du Vair, Médit., Ps. 36 ds Hug.). VI. Condition restr. 1135 por ce que suivi du subj. « pourvu que, dans la mesure où » (Wace, Ste Marguerite, éd. E. A. Francis, 165 [ms. A]); ca 1165 por que « id. » (Benoît de Ste-Maure, op. cit., 25415). Du lat. pro « pour » (de même que le logoudorien pro, l'esp. et le port. por, l'a. prov. por, ca 1143 avec une indication de prix « au delà de, plus de » ds Brunel, no41, 17, 18, t. 1, p. 48; cf. FEW t. 9, p. 402b, note 8; le lat. pro ayant été supplanté par per dans les autres lang. rom. y compris le prov.), devenu por à basse époque (E. Diehl, Inscriptiones lat. christ. veteres, Berlin, 1961, t. 1, no2490 A : si d[eu]s por nobis), peut-être par infl. de per (par1*), REW3, § 6762. Du sens « en avant (dans l'espace) » est issu celui de « en faveur de » [II A]; de celui-ci est dér. à basse époque le sens final (iiies. ds Blaise Lat. chrét.) [II C]. De là, en a. fr., les notions de but dans l'espace et de durée dans le temps [II B 1, 2], d'intention, d'imminence [II D] et de conséquence [IV A, B]. Les sens « en échange de, pour le prix de, en retour de » [III B]; « en qualité de, en tant que, comme » (pro occiso relictus, Cicéron) [III C]; « en proportion de, dans la mesure de, selon » [III E; la notion de relation. III D, étant issue de celle de proportion], sont directement issus du lat. class. Le sens causal [I A, B] est dér. de pro « à la mesure de, selon » (poenae pro delicto, Tacite; pro tua clementia, Tite-Live); il est tout à fait clair à basse époque (Peregrinatio Aetheriae, 5, 10 et 25, 12, v. Blaise Lat. chrét. et Löfstedt, p. 156) : en raison de l'empl. causal de par1* et de por, ces deux prép. ont parfois été confondues au Moy. Âge, notamment dans certaines formules d'invocation, peut-être en raison de la double interprétation possible du dans les mss (v. Moignet, p. 319; Ménard Synt., § 335, rem.). Du sens causal de por est dér. le sens concess. [V A], résultat de l'opposition entre le verbe à la forme nég. et l'élém. introd. par por qui représente une cause inopérante, c.-à-d. une oppos., une concession. L'empl. concess. V B [pour + adj. + que] est dér. de V A 4 [por + subst. précédé d'un adj. + que]. La condition restr. [VI] « dans la mesure où, pourvu que » est issue du sens « pour le prix de » [III A]; FEW t. 9, p. 401b. Fréq. abs. littér. : 450 662. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 685 063, b) 610 655; xxes. : a) 603 828, b) 641 715. Bbg. Anscombre (J.-Cl.). Pour autant, pourtant,... Cah. Ling. fr. Genève. 1983, no5, pp. 37-64. − Bement (N. S.). The Early history of Fr. pour que. Rom. Philol. 1955/56, t. 9, pp. 429-435. − Cadiot (P.). Pour et de. In : Sprachen in Kontakt, von J. Caudmont. Tübingen, 1982, pp. 113-128; Saturation gramm. et saturation discursive : rem. sur qq. emplois de pour. DRLAV. 1979, no21, pp. 128-134. − Darcueil (J.). Ét. de l'expr. de la concession en fr. 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